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L’indéfinition du champ d’application quant à la perte du droit

Partie 2. Un mécanisme de protection des droits

B) L’indéfinition du champ d’application quant à la perte du droit

112. UNE MISE EN RELATION LEGITIME. La Cour européenne des droits de l’homme n’a pas été plus prolixe que nous ne le constations juste avant en ce qui concerne la relation du

289 Alors que ceux-ci sont couramment employés pour délimiter le droit de dérogation, ils peuvent de ce fait ressurgir de façon combinée dans le questionnement relatif à l’application de l’interdiction d’atteinte à la substance du droit en matière dérogatoire (voir, par exemple, B.DUARTE,Les restrictions aux droits de l'homme garantis par le Pacte international…, op. cit., p. 202 ; R.ERGEC, Les droits de l’homme à l’épreuve des

circonstances exceptionnelles…, op. cit., p. 42 ; R.PELLOUX, « Les limitations prévues pour protéger l’intérêt commun offrent-elles une échappatoire… », op. cit., p. 52).

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¶” –ncipe à la perte d’un droit. Pourtant, cette thématique présente théoriquement un grand intérêt pour la notion d’interdiction d’atteinte à la substance du droit, qui vise justement à empêcher la perte du droit par atteinte à sa partie la plus essentielle. Ainsi, il faut se demander comment l’interdiction d’atteinte à la substance du droit intervient dans le cadre de cette thématique. En dépit des faibles références doctrinales sur le sujet, il s’agit de dépeindre les questionnements qui peuvent émerger quant à la matérialisation de ses contours.

Doivent donc être observés successivement les rapports du principe aux deux manifestations principales de perte du droit : d’une part, à la situation de limitation externe ou confiscation d’un droit – l’abus de droit (1) ; et d’autre part, à la situation de limitation interne d’un droit – la renonciation à un droit (2).

1) Le rapport du principe à l’abus de droit

113. L’ARTICLE 17 DE LA CEDH. Dans le cadre de la Convention, il faut signaler qu’une disposition – à double sens – prévoit la possibilité tant de déchoir un individu de l’usage de son droit, que de sanctionner la mise en œuvre inconventionnelle par un Etat de l’exercice d’un droit290, en sanction de l’utilisation de l’instrument conventionnel dans le but de détruire un droit qu’il garantit. Il s’agit de l’article 17291. Or, si la question des rapports de l’interdiction d’atteinte à la substance du droit avec la notion d’abus de droit (ou plutôt son interdiction), doit en premier lieu être envisagée sous le premier angle cité, nous verrons que le second aspect peut également recouvrir un intérêt tout particulier quant à l’étude de notre notion.

290 Sur la clause de l’abus de droit en général, voir : – pour la doctrine propre à la CEDH, M. LEVINET, « Le pluralisme confronté à la clause d’interdiction de l’abus de droit », in M. LEVINET (dir.), Pluralisme et juges

européens des droits de l’homme, Bruylant, 2010, coll. « Droit et justice », pp. 125-150 ; -v SUDRE, Droit

européen et international des droits de l'homme, op. cit., pp. 204-206 ; S. VAN DROOGHENBROECK, La

proportionnalité dans le droit de la Convention européenne des droits de l’homme…, op. cit., notamment

pp. 384-385 ; S.VAN DROOGHENBROECK, « L’article 17 de la Convention européenne des droits de l’homme est-il indispensable ? », RTDH, 2001, n° 46 spécial, pp. 541-566 ; J.VELU etR.ERGEC, La Convention européenne

des droits de l’homme, op. cit., pp. 168-175 (notamment p. 168 sur le double volet de l’article 17) ; – pour la

doctrine constitutionnaliste, L. ECK, L’abus en droit constitutionnel, Paris, L’Harmattan, coll. « Logiques juridiques (Paris) », 2010 ; spécifiquement concernant la Convention, pp. 267-294.

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L’article 17 de la CEDH, interdisant l’abus de droit, prévoit qu’« Aucune des dispositions de la présente

Convention ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu, un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits ou libertés reconnus dans la présente Convention ou à des limitations plus amples de ces droits et libertés que celles prévues à ladite Convention ».

En guise de parallèle, voir notamment – l’article 30 de la DUDH, selon lequel « Aucune disposition de la

présente Déclaration ne peut être interprétée comme impliquant pour un Etat, un groupement ou un individu un droit quelconque de se livrer à une activité ou d'accomplir un acte visant à la destruction des droits et libertés qui y sont énoncés » ; – l’article 29 a) de la CIADH, prévoyant qu’ « Aucune disposition de la présente Convention ne peut être interprétée comme : a. Autorisant un Etat partie, un groupement ou un individu à supprimer la jouissance et l'exercice des droits et libertés reconnus dans la présente Convention ou à les restreindre plus qu'il n'est prévu dans ladite Convention ».

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11gh LA SANCTION DE LABUS DE DROIT A LEGARD DUN INDIVIDU, UNE CONTRADICTION POTENTIELLE AVEC LE PRINCIPE. En premier lieu, il est possible de se pencher sur l’aspect restrictif ou liberticide de la clause de l’article 17 à l’égard des droits garantis par la Convention. L’abus de droit renvoie ici à l’utilisation par un individu d’un droit protégé par la Convention afin de nuire voire de détruire les autres droits protégés. Un tel comportement, s’il est dûment constaté par la Cour européenne, engendre immédiatement la déchéance du droit inadéquatement utilisé. Quelles conséquences cela emporte-t-il pour la protection de la substance du droit ? Il semblerait qu’un tel effet soit a priori contraire à la notion de protection de la substance du droit, en général. La déchéance correspond, ni plus ni moins, au retrait du « droit de se prévaloir »292 d’un droit dans un but nocif à l’ensemble du système juridique en cause ; le détenteur en est donc temporairement et conjoncturellement dépossédé de son exercice293. Au regard de la portée de la clause d’interdiction de l’abus de droit, il paraît donc logique d’envisager que son déploiement a une conséquence sur la substance qui, en raison de la négation circonstancielle de l’usage du droit, n’est alors plus protégée294. Comment peuvent donc être conciliées – dans le respect de leur finalité et leur mise en œuvre efficace – les deux notions ? L’application du principe s’arrête-t-elle au commencement de l’abus de droit ? Il peut en être ainsi en considérant, d’une part, que l’interdiction d’atteinte à la substance du droit n’a pas vocation à garantir cette substance contre l’action destructrice du titulaire du droit lui-même (mais contre l’action ou inaction étatique), et d’autre part, qu’elle n’opère que dans un cadre particulier – celui du respect par leurs détenteurs de tous les droits garantis, en application du principe même – mais ne joue pas contre les « ennemis » du système conventionnel. Compte tenu de ses implications, le recours à l’interdiction de l’abus

292 F.SUDRE, Droit européen et international des droits de l'homme, op. cit., p. 204.

293 Ainsi, « l’exercice abusif d’un droit fondamental n’entre pas dans le champ de la protection conféré par

celui-ci » (S. PLATON, La coexistence des droits fondamentaux constitutionnels et européens dans l'ordre

juridique français, op. cit., p. 611).

À mettre en perspective avec la définition générale des termes : – « abus de droit », visant la « faute qui consiste

à exercer son droit sans intérêt pour soi-même et dans le seul dessein de nuire à autrui, ou, suivant un autre critère, à l’exercer en méconnaissance de ses devoirs sociaux (…) » (G.CORNU (dir.), Vocabulaire juridique, op.

cit., p. 7 ; voir, également, J.ANDRIANTSIMBAZOVINA,H. GAUDIN, J.-P.MARGUENAUD,S. RIALS,F.SUDRE

(dir.), Dictionnaire des droits de l’homme, op. cit,, pp. 1-3 ; et, dans la jurisprudence, Cour EDH, Lawless c/

Irlande (n° 3) précitée (note n° 285), § 7). – « déchéance », qui renvoie à la « perte d’un droit, d’une fonction, d’une qualité ou d’un bénéfice, encourue à titre de sanction, pour cause d’indignité, d’incapacité, de fraude, d’incurie etc. » (G.CORNU (dir.), Vocabulaire juridique, op. cit., p. 301).

294 Selon SébastienVAN DROOGHENBROECK, l’article 17 de la CEDH, « en soustrayant pour sa part de plano

l’activité liberticide à toute protection conventionnelle, en ce compris à celle desdites clauses de restrictions, (…) pourrait donc permettre de surmonter ce principe d’intangibilité » (S. VAN DROOGHENBROECK, « L’article 17 de la Convention européenne des droits de l’homme est-il indispensable ? », op. cit., pp. 549-550). OlivierDE

FROUVILLE évoque quant à lui « une véritable suppression du droit » (O.DE FROUVILLE, L’intangibilité des

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Cependant, en dépit de que ce que SébastienVAN DROOGHENBROECK appelle « l’utilité » de l’article 17, l’impact de ce dernier sur la protection de la substance du droit, en général, semble en pratique largement limité. Ainsi, non seulement le recours direct à cet article est considéré comme relativement faible, qui plus est, les droits les plus touchés par la clause de l’article 17295 sont ceux susceptibles de « limitations explicites » prévues par le paragraphe 2 des articles 8 à 11, terrains subsidiaires et particuliers de mise en œuvre du principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit (en dehors de l’article 3 du Protocole 1)296. Mais ainsi que le rappellent JacquesVELU etRusenERGEC, « une lecture attentive de l’article 17 révèle, néanmoins, une « ambiguïté foncière » »297. Aussi cette disposition représente-t-elle également une limite aux limitations étatiques, qui semble rejoindre et compléter adéquatement l’interdiction d’atteinte à la substance298.

115. LA SANCTION DE LABUS DE DROIT A LEGARD DUN ETAT, UN VECTEUR DU PRINCIPE. L’angle opposé de la clause de l’article 17 s’avère particulièrement instructif pour notre réflexion, en ce que loin d’être ici en contradiction avec le principe, la notion d’interdiction de l’abus de droit intervient comme une limite aux limitations prévues par la Convention et donc un allié dans la protection de ladite substance. Il s’agit là de la configuration selon laquelle un Etat partie agirait de façon à détruire, ou à limiter, au-delà de ce que les dispositions de l’instrument ne prévoient, les droits garantis par celle-ci. Aussi, il apparaît manifestement une corrélation en termes de finalité de l’interdiction de l’abus de droit avec le principe sujet de ce travail doctoral. Notons, par ailleurs, que l’article 17 a pu être envisagé comme une « règle d’interprétation » des limitations aux droits conventionnels en général299. Cette clause serait ainsi révélatrice d’une logique inhérente au Traité, et donc souhaitée par ses auteurs, reconnaissant une limite ultime à la mise en œuvre de l’exercice des droits garantis par les Etats parties. Dès lors, la clause prévue par l’article 17 viendrait soutenir textuellement et symboliquement le constat d’un principe prétorien d’interdiction d’atteinte à la substance du

295 Quant au champ d’application global du principe, voir notamment J. VELU etR.ERGEC, La Convention

européenne des droits de l’homme, op. cit., pp. 174-175.

296 Voir, quant à la limite à une intangibilité des droits, S. VAN DROOGHENBROECK, « L’article 17 de la Convention européenne des droits de l’homme est-il indispensable ? », op. cit., pp. 549-550.

297 J.VELU etR.ERGEC, La Convention européenne des droits de l’homme, op. cit., p. 173.

298 Voir, en droit comparé, K.J.PARTSCH, « The contribution of universal international instruments on human rights », in A. DE MESTRAL etal.(dir.), La limitation des droits de l’homme en droit constitutionnel comparé, op.

cit., p. 68.

299 J.VELU etR.ERGEC, La Convention européenne des droits de l’homme, op. cit., pp. 169-170 ; 173 ; en lien avec supra, notes n° 284-285, quant à l’article 15 CEDH.

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d6V=t300. OlivierDE FROUVILLE affirme ainsi que « ces mêmes articles qui semblent pouvoir fonder des ingérences illimitées – une véritable suppression des droits – se révèlent en même temps des garanties de l’intangibilité »301 ; et l’auteur de conclure qu’« ainsi loin d’être un vecteur d’atteinte au principe d’intangibilité, les clauses anti liberticides remplissent au contraire une fonction de garantie de ce principe »302.

116. BILAN DE LANALYSE. Aussi, nous reconnaitrons avec la clause de l’article 17 de la Convention, plutôt qu’une contradiction, un équilibre assurant le respect des deux intérêts majeurs représentés dans le système conventionnel. Dans la continuité de cette logique complémentaire, admettons tant l’existence d’une assise formelle et informelle – tirée de l’esprit même de l’instrument – au principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit, que celle d’une frontière à ce principe, résidant dans l’usage « de bonne foi » d’un droit garanti. Cette limite à l’application du principe est donc possible sous certaines conditions exceptionnelles. Reste à déterminer si la renonciation volontaire à son droit peut en faire partie.

2) Le rapport du principe avec la renonciation à un droit

117. LE CONFLIT POTENTIEL ENTRE LE PRINCIPE DINTERDICTION DATTEINTE A LA SUBSTANCE DU DROIT ET LA RENONCIATION A UN DROIT GARANTI. La seconde circonstance de perte d’un droit ici examinée n’est autre que la situation de renonciation303. Celle-ci s’avère tout aussi intéressante pour notre étude en ce qu’il s’agit ici non plus d’une perte « involontaire » de l’exercice du droit en cause, mais bien volontaire. Aussi, la question de la capacité choisie de renoncement à un droit se devait d’être confrontée à l’interdiction d’atteinte à la substance du droit304. Plus précisément, il faut se demander si un individu – titulaire au regard de la Convention – a le droit de refuser consciemment et volontairement

300 Ce lien apparaît notamment originellement dans l’Affaire linguistique belge c/ Belgique précitée (note n° 3), § 5, avec le double principe d’interdiction « d'atteinte à la substance de ce droit, ni (…) à d'autres droits

consacrés par la Convention ». Signalons, néanmoins, que la seconde partie de l’énoncé n’a pas eu la postérité

du principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit, duquel il a, d’ailleurs, été rapidement détaché. Il en est autant de la relation avec la clause de l’interdiction de l’abus de droit, qui n’a, par la suite, pas connue d’expression aussi directe (voir, cela dit, l’opinion dissidente du juge VAN DIJK sous Cour EDH, Gde ch., 30 juillet 1998, Sheffield et Horsham c/ Royaume-Uni, req. n° 22985/93 ; 23390/94, Recueil 1998-V, § 8 ; note M. LEVINET, RTDH, 1999, n° 39, pp. 637-672).

301 O.DE FROUVILLE, L’intangibilité des droits de l’Homme en droit international…, op. cit., p. 231.

302 Ibid., pp. 236-237 ; voir également S. VAN DROOGHENBROECK, La proportionnalité dans le droit de la

Convention européenne des droits de l’homme…, op. cit., p. 384.

303 Pour une définition générale, voir G.CORNU (dir.), Vocabulaire juridique, op. cit., pp. 894-895.

304 Notons, à titre de réflexion, que la Constitution turque (de 1982, et déjà celle de 1961) consacre d’une part l’absence de renonciation aux droits et libertés « individuels, inviolables, inaliénables » qu’elle garantit (article 12), et d’autre part, l’interdiction de porter atteinte à leur essence (article 13).

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“ ‘xercer un droit garanti. Ici, nul danger collectif – quant à l’ordre public national, ou bien quant à l’ordre public européen et système conventionnel. L’interrogation suscitée par le droit à la renonciation s’inscrit davantage dans l’intrusion au cœur d’une décision de caractère privé, justifiée par la protection de l’individu « contre lui-même ». Le principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit s’étend-il jusqu’à une telle ingérence dans l’autonomie personnelle ?

118. UN CONFLIT CONDITIONNE PAR LE CARACTERE VOLONTAIRE DU CHOIX DE RENONCIATION A UN DROIT GARANTI. Peu d’arrêts du juge de Strasbourg et d’auteurs de la doctrine témoignent d’une analyse du principe sous cet angle d’approche305. Nous savons, par ailleurs, à quel point la Cour européenne a pu s’avérer élusive en matière – connexe – de dignité humaine306 par exemple. Aussi, les propos s’annoncent une fois de plus largement théoriques. Rappelons d’abord, comme le fait Jean-Louis BERGEL, que pour PaulROUBIER « la faculté de renonciation est inhérente au droit subjectif »307. Aussi, suivant cette analyse, il serait inhérent aux droits garantis par la Convention de prévoir la possibilité d’y renoncer. Cette conception classique vient a priori buter contre l’interdiction d’atteinte à la substance du droit. Il semblerait toutefois admissible de considérer – tout comme dans le cas de l’abus de droit – qu’un tel principe s’efface à des conditions spécifiques et précises, s’articulant autour de la pleine et entière expression de volonté de l’individu choisissant de renoncer à son droit308. Si Philippe FRUMER a constaté l’absence de tout rapprochement systématique des deux notions visées dans la jurisprudence de la Cour européenne309, il paraitrait, néanmoins, que selon un rapport proportionnellement inversé à la reconnaissance de l’interdiction d’atteinte à la substance du droit310, un tel rapprochement soit davantage susceptible de

305 Voir, notamment, Ph. FRUMER, La renonciation aux droits et libertés. La CEDH à l’épreuve de la volonté

individuelle, Bruxelles, Bruylant, Editions de l'Université de Bruxelles, coll. « Collection de droit international ;

47 », 2001, pp. 442-443 ; B.MAURER, Le principe de respect de la dignité humaine et la Convention européenne

des droits de l’homme, op. cit., pp. 468-469.

306 Voir supra, n° 50.

307 J.-L.BERGEL, Théorie générale du droit, op. cit., p. 39.

308 Béatrice MAURER note, par exemple, quant à l’atteinte à la dignité fondamentale, que « dès lors qu’il y a

consentement, la liberté est respectée » ; ce qui justifie une interprétation très étroite de l’atteinte fondamentale à

la dignité consentie pour ne pas opérer d’ingérence « grave » dans la sphère individuelle. Or, au titre des critères « objectifs » d’appréciation, l’auteur cite la protection de la substance du droit (B.MAURER, Le principe de

respect de la dignité humaine et la Convention européenne des droits de l’homme, op. cit., pp. 468-469).

309 Ph. FRUMER, La renonciation aux droits et libertés. La CEDH à l’épreuve de la volonté individuelle, op. cit., p. 443.

310 Ayant visé principalement les droits susceptibles de limitations implicites ; ce qui laisse dire à Béatrice MAURER que le principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit joue dans le cadre des droits processuels (B.MAURER, Le principe de respect de la dignité humaine et la Convention européenne des droits de l’homme,

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;V D;56D56 C5a d6 V=Ea _ `aa=ŽC 5s de restrictions311. Cela dit, l’auteur rejetait sur le plan conceptuel une « stricte équivalence entre l’intangibilité », au sens de notre sujet d’étude, et « l’inaliénabilité, telle qu’elle est mentionnée dans les textes internationaux », considérée comme réductrice312.

119. BILAN DE LANALYSE. Si l’on peut être convaincus par la conception raisonnée – ressortant des analyses ci-dessus – de l’application de l’interdiction d’atteinte à la substance du droit au cas de renonciation, tentant la conciliation d’un principe d’intangibilité fondamental au système conventionnel et de l’autonomie de choix, autrement dit la liberté de l’individu quant aux droits qui lui sont reconnus, les modalités de cette application restent floues et débattues, notamment eu égard aux catégories de droits susceptibles d’être intéressés.

311 Voir, Ph. FRUMER, La renonciation aux droits et libertés. La CEDH à l’épreuve de la volonté individuelle,

op. cit., p. 443. Bien qu’on puisse considérer que l’interdiction d’atteinte à la substance du droit trouve une

limite sur ces terrains de l’intime, dans la mesure où l’individu détermine lui-même son droit, jusqu’à la menace à l’ordre public (voir B. MAURER, Le principe de respect de la dignité humaine et la Convention européenne des

droits de l’homme, op. cit., p. 469).

312 Ph. FRUMER, La renonciation aux droits et libertés. La CEDH à l’épreuve de la volonté individuelle, op. cit., p. 443.

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1/0hSCHEMA SYNTHETIQUE DES DIFFERENTES HYPOTHESES DE LIMITATION313. Tout comme dans le précédent Chapitre, il semble utile d’illustrer les précédentes analyses par une série de graphiques :

121. BILAN GÉNÉRAL DES ANALYSES. Arrivés au terme de l’analyse du champ d’application incertain du principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit, un constat émerge. Il apparait que la Cour européenne des droits de l’homme, à défaut de se prononcer sur les différentes catégories de limitations préalablement étudiées, continue de bénéficier d’un périmètre potentiellement large d’engagement du principe. Manifestement, le juge européen n’a, jusqu’à présent, pas ressenti le besoin de l’étendre, se contentant d’une application limitée. Cela dit, un tel vague (et permissibilité subséquente) est également observable en matière de critères de contrôle du respect de l’interdiction d’atteinte à la substance du droit, qui peuvent ainsi être qualifiés de tacites tant ils sont sous-entendus, voire doivent être devinés.

313 Voir, en guise d’inspiration à cette représentation graphique, S. VAN DROOGHENBROECK, La

proportionnalité…, op. cit., pp. 392-393.

Remarquons que si les graphiques 2 (quant à la différence de protection en circonstances exceptionnelles) et 2bis (quant à la différence de substance en circonstances exceptionnelles) ont été distinctement mobilisés à l’occasion de nos précédentes analyses s’agissant des mesures dérogatoires, il n’en est pas de même pour les autres hypothèses exceptionnelles de limitation. Il est ressorti, d’une part, que l’abus de droit individuel engendrait la non-applicabilité du principe d’interdiction d’atteinte à la substance du droit, d’autre part, que la renonciation avait probablement pour effet une application limitée du principe (ce qui semble exclure le graphique 1, à la faveur des graphiques 2 ou 2bis), et éventuellement différenciée, selon les catégories de droits visées. Enfin,

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