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Après cette observation des titres courants, il nous faut passer à l’étude des titres d’article eux-mêmes. Pour ce faire, nous avons sélectionné, au sein de l’ensemble des titres de notre corpus, un sous-corpus de titres. Celui-ci, tout d’abord, contient uniquement les titres des pages intérieures, puisque les Unes ont fait l’objet d’une étude à part. Il se restreint ensuite aux titres, excluant ainsi les surtitres (situés immédiatement au-dessus du titre de l’article) et les sous-titres (situés immédiatement en dessous). Nous nous limitons

385 Nous reprenons ici les mots de Françoise Sullet-Nylander, qui conçoit le thème comme « point de départ du message que le locuteur choisit comme base à son énoncé » (1998 : 65), s’appuyant elle-même sur Halliday (1994 : 32-34) et Brown et Yule (1983 : 126-127).

aux titres eux-mêmes car nous considérons, à l’instar de Françoise Sullet-Nylander (1998 : 9) – s’appuyant elle-même sur Guéry (1991 : 47)

que d’une part c’est la partie la plus importante de la titraille, et que d’autre part il est obligatoire pour tout article de presse de porter un titre, tandis que la présence ou non de surtitres et/ou de sous-titres varie selon les pratiques rédactionnelles des journaux, voire selon les rubriques.

De son côté, Jacques Mouriquand (2005 : 105) indique que la « règle absolue » de l’écriture journalistique est que le titre est l’élément de la titraille qui doit apporter l’information centrale, le surtitre ou le sous-titre servant à le compléter.De fait, dans notre corpus la présence de surtitres et de sous-titres n’est pas du tout systématique386.

Ce critère de sélection s’explique également par la configuration de la titraille à l’intérieur de notre corpus : nous avons relevé précédemment (3.2.1), pour les quotidiens

Últimas Noticias et El Universal, la présence de surtitres (généralement précédés d’un pré-

titre qui, dans notre corpus, fait office de titre courant) surmontant de par leur position sommitale l’ensemble de la page, mais pour lesquels il est parfois difficile de déterminer s’ils se rapportent à l’ensemble des articles ou à l’article dominant de l’hyperstructure. S’en tenir à l’étude des titres permet ainsi d’éviter de se confronter à ce problème de hiérarchie entre les différents niveaux du péritexte – dans certains cas impossible à résoudre.

D’autre part, nous avons choisi d’étudier le titre principal ou titre dominant de la page. En effet, comme on l’a indiqué plus tôt, la structure de page des journaux de notre corpus s’apparente au modèle de l’hyperstructure telle que la décrivent Adam et Lugrin (2006 : 129), au sein de laquelle on peut repérer un « article dominant ». Celui-ci, généralement, est situé en haut de page ou sous la photo et occupe bien souvent une surface plus importante que les autres articles. Mais c’est surtout son titre qui permet de le distinguer de ces derniers, par une typographie plus grande et en caractères gras387. Ce

386 Pour El Nacional et El Universal, elle est même assez rare. Pour Últimas Noticias, elle est un peu plus fréquente, notamment dans le cas de regroupements de petits articles portant sur un thème similaire. Ces derniers sont alors bien souvent surmontés d’un court surtitre (tel que « Chile », « Bolivia », « petróleo », etc.), généralement nécessaire à la compréhension du reste du titre.

387 Dans le cas des hyperstructures occupant une double page et dont l’article dominant se poursuit sur la page de droite, on conserve uniquement, pour notre sous-corpus, le titre de celui-ci, même si son titre se situe sur la page de gauche, les autres articles de la page de droite étant considéré comme articles « secondaires ».

critère visuel n’est pas dénué d’importance, car comme le souligne Jacques Mouriquand (2005 : 102), l’un des principaux impératifs du titre est de « produire un signal graphique clairement repérable ». L’une des fonctions du titre est en effet de hiérarchiser les informations, et « il le fait d’abord par ce qui est sa caractéristique première : sa grosseur typographique » (ibid. : 103). L’auteur observe ainsi que « l’usage le plus commun est que les titres les plus gros soient en tête de page ». Ces pratiques de mise en page sous-tendent « un contrat implicite avec le lecteur qui doit pouvoir se reposer sur cette adéquation entre signal visuel fort et importance de l’information » (ibid.). L’article dominant est donc désigné, par la typographie de son titre, comme celui contenant les informations principales, et le titre, lui-même, comme titre central de la page.

Enfin, nous avons sélectionné, pour cette étude, les titres d’articles dominants se trouvant sur les pages coiffées d’un titre courant388. Ce choix est motivé par le fait que chacun des numéros de notre corpus étant consacré presque exclusivement à la crise qui secoue le Venezuela, nous avons rencontré certaines difficultés au moment de faire un tri entre les articles relatifs aux événements et ceux qui n’en traitaient pas. En effet, si certains articles sont consacrés à des thèmes d’actualité sans rapport avec la crise (par exemple, l’actualité colombienne ou celle du Proche Orient, certains sujets économiques ou encore des nouvelles « people »), d’autres ne traitent pas directement des événements mais de leurs conséquences dans des domaines bien particuliers (culturel, économique, vie quotidienne), d’autres, encore, abordent des sujets ayant une relation plus ou moins lointaine avec les événements et se contentent de les mentionner, en particulier certains articles de commentaire analysant les tenants et les aboutissants de la crise. Une première tentative de sélection par rubrique s’est avérée infructueuse, d’une part parce que la classification en rubriques n’était pas identique pour les trois journaux, d’autre part parce que certaines d’entre elles, a priori moins enclines à aborder les événements (telles que celles consacrées à l’international, au divertissement ou aux loisirs), leur dédiaient

D’autre part, on a trouvé un seul cas, dans tout le corpus, d’hyperstructure comportant trois articles de taille similaire et dont les titres avaient une typographie identique. Dans la mesure où il était impossible d’y distinguer un article dominant, les trois titres ont été conservés pour le sous-corpus (« Bush: caída de Chávez se debió a decisiones equivocadas » ; « OEA debe decidir si renunció o lo sacaron » ; « Colombia apoya gobierno de Pedro Carmona », Últimas Noticias, 13 avril 2002).

388 Nous avons également conservé, pour ce sous-corpus, deux titres d’articles dominants situés sur des pages portant un pré-titre différent du titre courant utilisé dans le reste du journal (« Cofavic pide tolerancia », pré- titre : « LLAMADO », Últimas Noticias, 14 avril 2002 ; et « Servicios recuperan parcialmente normalidad », pré-titre : « RECONSTRUCCION »), El Universal, 15 avril 2002.

néanmoins plusieurs articles. La présence de titres courants nous a donc semblé être un critère pertinent, dans la mesure où ce sont les journaux eux-mêmes qui signalent ces pages (et donc les articles qui s’y trouvent) comme ayant un rapport avec les événements, quel qu’en soit le contenu réel.

Ces critères de sélection nous ont conduite à laisser de côté l’ensemble des titres d’articles de la rubrique « Opinión », d’une part parce qu’il est difficile d’y repérer un article dominant, d’autre part parce que les pages de cette rubrique, dans les trois journaux étudiés, ne portent pas de titre courant389. Par ailleurs, pour l’édition du treize avril de

Últimas Noticias, nous avons sélectionné l’ensemble des titres dominants de la rubrique

« El País », étant donné que ce numéro ne contient pas de titre courant. Nous avons retenu cette rubrique car c’est dans celle-ci que la plupart des thèmes d’actualité nationale sont traités, et c’est dans cette dernière qu’apparaissent les titres courants pour les deux autres éditions de notre corpus. Enfin, l’édition du quatorze avril de ce quotidien a également été incluse dans notre sous-corpus bien que les deux autres journaux n’aient pas paru ce jour ; néanmoins l’étude des titres de ce numéro sera menée de manière moins approfondie puisqu’elle ne pourra pas l’être dans une perspective comparative.

En résumé, ce sous-corpus est constitué des titres (et non de surtitres ou de sous- titres) des articles dominants de chaque page surmontée d’un titre courant (excepté, sur ce point, pour le cas particulier du numéro du 13 avril de Últimas Noticias). Il comporte donc un total de deux-cent neuf titres390. Cela nous permet de limiter cette étude à un nombre réduit de titres (le corpus complet compte plus de mille titres d’articles), plus propice à une démarche qualitative, en nous concentrant sur ceux qui, par la mise en page, sont signalés comme porteurs des informations les plus importantes sur les événements.

Afin de procéder à l’exploration de ce sous-corpus, nous avons suivi la méthode proposée par Françoise Sullet-Nylander pour son analyse des « aspects syntaxico-discursifs

389 Pour le quotidien Últimas Noticias, la page « La opinión del director » (ou « Opinión del director », le 13 avril), présente dans les éditions des 12, 13 et 15 avril, a toutefois été conservée, car elle constitue une sorte de sous-rubrique à l’intérieur de la rubrique « El País », et porte un titre courant le 12 avril. Néanmoins, il existe également, dans la structure routinière, une rubrique « La Opinión », que l’on ne trouve, dans le corpus, que dans l’édition du 15 avril : cette dernière a donc été supprimée du sous-corpus de titres, tandis que la page « La opinión del director » est conservée pour cette même date.

390 Parmi lesquels on inclut le seul titre de la troisième édition de El Universal qui soit différent de la deuxième édition (voir 2.3.1) et corresponde à ces critères.

des titres » (1998 : 31-72). Les configurations syntaxiques des énoncés titrés sont envisagées ici, à la suite de cette auteure (s’inspirant elle-même de François et Durandin 1977 et de Halliday 1994), « comme autant de moyens d’exprimer un sens » (Sullet Nylander 1998 : 32).