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Prédiction des propriétés musculaires

Après la naissance, la composition des muscles évolue jusqu’à l’âge adulte et explique en partie l’évolution des caractéristiques sensorielles des viandes. Les propriétés musculaires habituellement associées à la qualité sensorielle de la viande sont les proportions des différents types métaboliques de fi bres, la surface moyenne des

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fi bres, les activités des enzymes oxydatives et glycolytiques, les teneurs en collagène total et insoluble ainsi que les teneurs en lipides intramusculaires (voir chapitre onze, « Qualités sensorielles de la viande bovine. Impacts des facteurs d’élevage ? »). La synthèse des connaissances acquises par méta-analyse d’une base de données expé-rimentales (Schreurs et al., 2008) a permis d’identifi er et de hiérarchiser les facteurs intrinsèques (âge, muscle, race, sexe) qui modifi ent ces propriétés. L’intégration de ces connaissances dans un modèle semi-mécaniste permet la prédiction de ces diffé-rentes caractéristiques musculaires, en fonction du degré de maturité de l’animal et pour différentes catégories de muscles.

Les propriétés musculaires évoluent de la naissance jusqu’à maturité, stade auquel la composition du muscle atteint un état d’équilibre. La quasi-totalité des propriétés explorées – surface des fi bres, types de fi bres, activités isocitrate déshydrogénase (ICDH) et lactate déshydrogénase (LDH), teneur en collagène total, teneurs en lipides totaux, phospholipides et triglycérides – par métaanalyse évolue avec l’âge physiologique (ratio poids vif sur poids vif adulte) chez les jeunes bovins (Schreurs et al., 2008). Chez les vaches, en revanche, seuls la surface des fi bres, le pourcen-tage de fi bres de type I et les teneurs en collagène total et insoluble évoluent en fonction de l’âge physiologique. La surface des fi bres augmente dans le Longis-simus thoracis (LT) des jeunes bovins, mais atteint rapidement un plateau autour de 3 500 µm². Elle est stable dans le Triceps brachii (TB) jusqu’à 30 % du poids adulte, mais augmente ensuite rapidement. La surface des fi bres dans le Semiten-dinosus (ST) augmente quasi linéairement avec l’âge physiologique. La proportion de fi bres IIA diminue pour les trois muscles ST, LT et TB chez le jeune bovin avant d’atteindre une moyenne entre 15 et 25 %. La proportion de fi bres IIX augmente jusqu’à atteindre un plateau autour de 50 % à 60 %. La proportion de fi bres I est stable dans le ST (autour de 10 %) et dans le TB (autour de 30 %), alors qu’elle augmente pour le LT jusqu’à 40 %. Toujours chez le jeune bovin, l’activité de l’en-zyme ICDH diminue de la naissance à la puberté (50 % du poids adulte environ) avant d’augmenter dans les trois muscles, tandis que l’activité de l’enzyme LDH évolue de façon inverse. Chez la vache adulte, il n’y a plus d’évolution, et le TB est le plus oxydatif des trois muscles, tandis que le ST est le plus glycolytique (Jurie et al., 2006 ; Schreurs et al., 2008).

Les modèles développés (Hoch et al., 2002), réajustés et complétés par Schreurs et al. (2010) pour les différentes propriétés musculaires (fi bres, lipides, collagène, activité des enzymes ICDH et LDH) à partir de ces résultats, reposent sur plusieurs hypothèses qualitatives. L’âge physiologique de l’animal rend compte de son déve-loppement au cours de sa vie productive. Il permet de comparer plusieurs races et sexes à même degré de maturité. Malgré les différences observées entre les races et les sexes, les évolutions générales d’une propriété musculaire étaient similaires pour tous les types d’animaux. Ceci indique que la même équation peut être utilisée avec différentes valeurs de paramètres pour décrire les évolutions de différentes races et sexes. Les races laitières et rustiques peuvent être regroupées et faire l’objet d’un paramétrage commun qui sera différent de celui des races à viande. De la même façon, les vaches et les bœufs peuvent être paramétrés ensemble, séparément des mâles. Le modèle actuel prédit la surface moyenne des fi bres, le pourcentage des fi bres de type I, IIA et IIX (fi gure 6.4), ainsi que les activités des enzymes ICDH et LDH (fi gure 6.5).

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Ontogenèse du muscle et prédiction des propriétés musculaires

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Figure 6.4. Développement prédit de la surface (A) et de la proportion (C) des fibres

lentes oxydatives, de la surface (B) et de la proportion (D) des fibres rapides glycolytiques dans le muscle Longissimus thoracis chez les jeunes bovins ( ) et les vaches et bœufs (  ).

La comparaison des valeurs prédites par ces modèles avec les observations issues des expérimentations a montré qu’il existe une variabilité importante des données observées, et que l’erreur faite par le modèle est presque uniquement une erreur de dispersion. Les équations de prédiction des propriétés musculaires qui ont été produites fournissent des estimations justes, qui reproduisent les phénomènes biolo-giques introduits dans les hypothèses (notamment hypertrophie des fi bres, dévelop-pement conduit par l’âge physiologique, etc.). Les travaux futurs concerneront le développement des équations de prédiction des teneurs en lipides intramusculaires et des teneurs en collagène. Ce modèle sera également complété par des équations d’allométrie et couplé avec le modèle carcasse (voir chapitre deux, « Viande ovine en France. Quels systèmes de production pour quels produits ? ») pour parvenir à un modèle complet du muscle et tenir compte de l’impact de la trajectoire de croissance sur le développement des propriétés musculaires.

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Ainsi, chez les ruminants et les bovins en particulier, la vie fœtale est une étape cruciale pour l’acquisition des caractéristiques musculaires (fi bres, tissu conjonctif et matrice extracellulaire). Toutefois, ces caractéristiques évoluent constamment au cours de la vie postnatale, et montrent une plasticité en réponse à différents facteurs d’élevage, avec des conséquences pour les qualités sensorielles des viandes comme cela sera abordé dans le chapitre treize, « Qualités sensorielles de la viande bovine. Impacts des facteurs d’élevage ? ».

Figure 6.5. Développement prédit de l’activité (A) isocitrate déshydrogénase (ICDH) et

(B) lactate déshydrogénase (LDH) dans le muscle Longissimus thoracis dans les races à viande (triangles) et dans les races laitières et mixtes (carrés). Les symboles noirs représentent les prédictions pour les jeunes bovins et les formes blanches pour les vaches et les bœufs.

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Chapitre 7