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2. Les principes de la procédure applicables dans le cadre du recours au

2.1. Le principe général de la détermination de la procédure applicable

2.1.3. La possibilité de recourir à la négociation, la médiation, l’arbitrage ains

Le deuxième alinéa de l’article 1 NCPC indique que les modes de PRD « sont

principalement la négociation entre les parties au différend de même que la

médiation ou l’arbitrage dans lesquels les parties font appel à l’assistance d’un

tiers »

486

. Il existe toutefois un vaste éventail de modes de PRD qui ne sont pas

mentionnés expressément dans le NCPC

487

. Afin de laisser aux parties la plus

grande liberté dans le choix des procédures de PRD, le législateur précise qu’elles

« peuvent aussi recourir à tout autre mode qui leur convient et qu’elles considèrent

adéquat […] » [nos italiques]

488

.

La conseillère juridique à la Commission des droits de la personne et des

droits de la jeunesse, Évelyne Pedneault, s’est dite particulièrement inquiète des

conséquences possibles de l’exercice d’une telle liberté, soulignant qu’elle pourrait

entraîner de la discrimination et d’autres formes d’injustices, en particulier lorsque

483 Observatoire du droit à la justice, Mémoire PL, supra note 295 à la p 8.

484 Réseau pour une approche transformative, Mémoire PL, supra note 121 à la p 6. 485 Ibid.

486 Art 1, al 2 NCPC.

487 Assemblée nationale, Journal, 8 octobre 2013, supra note 1 à la p 10 (Rita de Santis). Mentionnons à titre d’exemple le

partenariat préventif, la facilitation, le coaching, l’évaluation neutre, la justice réparatrice et le droit collaboratif. Les modes de PRD peuvent d’ailleurs être situés sur un continuum selon le degré de participation qu’ils offrent. À ce sujet, voir notamment Roberge, Justice, supra note 105 aux pp 57-60.

488 Art 1, al 2 NCPC. Il est à noter que cette formulation est particulièrement imprécise : Guillemard, Mémoire PL, supra note

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le rapport de force entre les parties est inégal

489

. Dans certains cas, le

consentement d’une partie à l’exercice d’un mode de PRD peut effectivement être

« teinté par une situation d‘inégalité »

490

. À cet égard, la Commission des droits de

la personne et des droits de la jeunesse indique ce qui suit :

[à] défaut de mécanismes d‘encadrement et d‘accompagnement qui permettent une

détection appropriée de ces situations d‘inégalité, la souplesse, mise en valeur par le

projet de réforme étudié, pourrait tendre à favoriser le déséquilibre des parties, et ce,

alors même que les valeurs intrinsèques des modes alternatifs de prévention

et de règlement des différends et des litiges – notamment les coûts et l‘accessibilité

de ceux-ci – constituent un facteur d‘attraction pour les personnes en situation

de vulnérabilité

491

.

Tel que le fait remarquer le Protecteur du citoyen, « [l]a recherche de l’équilibre

entre les parties revêt ici toute son importance lorsqu’il s’agit d’assurer l’accès réel,

et en toute égalité, à la justice »

492

. Il précise que

[d]ans la mesure où l’État incite le citoyen à recourir à ces modes privés, il lui revient

de prévoir des mécanismes d’encadrement qui permettent au citoyen, plus

particulièrement dans le cas des personnes vulnérables, de recourir à ces modes en

489 Assemblée nationale, Journal, 19 janvier 2012, supra note 86 à la p 5 (Évelyne Pedneault). Ainsi, dans son mémoire, la

Commission des droits de la personne et des droits de la jeunesse se demande « si le seul critère du libre choix est suffisant pour protéger les droits fondamentaux, notamment ceux de personnes en situation de vulnérabilité » : Commission des droits de la personne, Mémoire PL, supra note 122 à la p 10. Voir aussi Assemblée nationale, Journal, 11 septembre 2013,

supra note 28 à la p 52 (Renée Dupuis). Il est à noter que plusieurs facteurs socio-économiques tels que la condition

sociale, l’âge, l’origine ethnique ou nationale, le handicap et le sexe peuvent compromettre l’égalité et l’équilibre des parties. À ce sujet, voir Commission des droits de la personne, Mémoire PL, supra note 122 à la p 10. L’article 10 de la Charte

québécoise, supra note 24, vise par ailleurs à éliminer toute forme de discrimination pouvant découler notamment des

facteurs socio-économiques. Cet article se lit comme suit : « [t]oute personne a droit à la reconnaissance et à l'exercice, en pleine égalité, des droits et libertés de la personne, sans distinction, exclusion ou préférence fondée sur la race, la couleur, le sexe, la grossesse, l'orientation sexuelle, l'état civil, l'âge sauf dans la mesure prévue par la loi, la religion, les convictions politiques, la langue, l'origine ethnique ou nationale, la condition sociale, le handicap ou l'utilisation d'un moyen pour pallier ce handicap. Il y a discrimination lorsqu'une telle distinction, exclusion ou préférence a pour effet de détruire ou de compromettre ce droit ». Voir aussi Charte canadienne, supra note 171, art 15(1) : « [l]a loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques ».

490 Commission des droits de la personne, Mémoire PL, supra note 122 à la p 10.

491 Ibid aux pp 10-11. Abondant dans ce sens, le Protecteur du citoyen estime que « [s]ur le plan des coûts, de la célérité et

de la simplicité du processus, le choix de recourir à la médiation peut s’avérer attrayant pour un grand nombre de personnes, plus particulièrement celles en situation de vulnérabilité en raison de leur condition socio-économique » [nos italiques] : Protecteur du citoyen, Mémoire PL, supra note 28 à la p 9. Dans le même ordre d’idées, l’auteur Jacques Faget, directeur de recherche au Centre national de la recherche scientifique (CNRS) et spécialiste de la médiation, s’exprime en ces mots : « les dangers de la médiation ne sont pas des fantasmes de juristes grincheux. […] La désertion des formes rituelles publiques de la régulation des conflits, au profit d’une multitude de scènes privées, est dénoncée comme étant liberticide. La privation des conflits […] serait notamment préjudiciable aux intérêts des plus défavorisés. Ce risque est particulièrement dénoncé par les mouvements de défense des droits des femmes qui s’opposent au recours à la médiation en matière de violence familiale. Elle serait une façon de nier la gravité de ce problème social et de renforcer les inégalités de statut entre homme et femme. […] Le combat social contre l’oppression domestique et plus généralement contre les injustices doit se livrer sur la scène publique que représente la justice » [notes omises] : Jacques Faget, Médiations : les

ateliers silencieux de la démocratie, Toulouse, Èrès, 2010 aux pp 103-04. Au sujet des autres critiques adressées à l’endroit

des modes de PRD, voir notamment Lafond, Accès, supra note 12 aux pp 195-00 ; Richard Abel, « Conservative Conflict and the Reproduction of Capitalism: The Role of Informal Justice » (1981) 9 Int’l J Soc L 245 ; Maurice Rosenberg, « Second Class Justice » (1981) 1 Windsor YB Access Just 294.

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toute connaissance de cause et avec des garanties procédurales minimales [italiques

dans l’original]

493

.

Afin notamment de favoriser la recherche d’un équilibre entre les parties et

d’assurer le respect de l’égalité lorsqu’elles choisissent de recourir à un mode de

PRD, le législateur a introduit au tout début du NCPC les principes fondamentaux

de la procédure applicables aux modes de PRD. Nous analysons ces principes

dans la prochaine sous-section.

2.2. Les principes fondamentaux