• Aucun résultat trouvé

Le pluralisme politique dans les Constitutions de la Pologne et de la Roumanie

Section II : Le pluralisme politique en Europe de l’Est et dans le monde arabe

A- Le pluralisme politique dans les Constitutions de la Pologne et de la Roumanie

Dans les Constitutions des pays d’Europe centrale et orientale, « le multipartisme est partout la règle, le plus souvent favorisé par le mode de scrutin (mixte ou proportionnel) et l’on a pu constater une certaine alternance droite/gauche dans plusieurs pays »439. En Roumanie, « le pluralisme est dans la société roumaine une condition et une garantie de la

437 Les Constitutions de la Pologne de 1997, de la Roumanie de 1991, de l’Egypte de 2014 et de la Tunisie de 2014.

438 DANELCIUC-COLODROVSCHI Natasa, La justice constitutionnelle dans les pays de la CEI : évolutions et perspectives, Clermont-Ferrand : Fondation Varenne, coll., « collection des thèses », 2012, p. 425.

439 GELARD Patrice, « Vingt-cinq ans depuis la chute du Mur », RFDC, n°100, 2014, p. 950.

132 démocrate constitutionnelle »440. Selon Jean-Pierre Massias, « la Constitution polonaise prévoit la règle du pluralisme des partis politiques et elle assure aux citoyens polonais la possibilité de s’associer d’une façon volontaire et égale »441.

En Pologne, selon la Constitution de 1997, « la République de Pologne garantit la liberté de fonder des partis politiques et la liberté de leurs activités. Les partis politiques regroupent, dans le respect des principes de la libre participation et d’égalité, des citoyens polonais en vue d’exercer, par des méthodes démocratiques, une influence sur la politique nationale. Le financement des partis politiques est public »442. En Roumanie, la Constitution de 1991 énonce que « la Roumanie est un État de droit, démocratique et social, dans lequel la dignité de l’être humain, les droits et les libertés des citoyens, le libre développement de la personnalité humaine, la justice et le pluralisme politique représentent les valeurs suprêmes et sont garantis »443. Cette disposition constitutionnelle qui garantit le pluralisme politique est exclue de la révision constitutionnelle. Selon Nicolae Popa, « les dispositions constitutionnelles concernant le caractère national indépendant, unitaire et indivisible de l’Etat roumain, la forme républicaine du gouvernement, l’intégrité territoriale et l’indépendance de la justice, le pluralisme politique et la langue officielle ne peuvent pas faire l’objet d’une révision »444. En effet, la Constitution roumaine de 1991 dispose que « les dispositions de la présente Constitution portant sur le caractère national, indépendant, unitaire et indivisible de l’État roumain, la forme républicaine du gouvernement, l’intégrité du territoire, l’indépendance de la justice, le pluralisme politique et la langue officielle ne peuvent pas faire l’objet de la révision »445.

Au-delà des textes constitutionnels, en réalité, en Roumanie et en Pologne, depuis l’adoption de leurs Constitutions respectives plusieurs élections, illustrant le pluralisme politique, ont été organisées446. Dans le cadre de ces élections, différents partis politiques, qui incarnent différents courants politiques, ont accédé au pouvoir par urne. Selon Jean GICQUEL et Jean-Éric GICQUEL, dans ces pays, « les élections se déroulent régulièrement,

440 Article 8 de la Constitution roumaine de 1991.

441 MASSIAS Jean-Pierre, Droit constitutionnel des Etats d’Europe de l’Est, PUF, 2ème édition entièrement revue, 2008, p.147.

442 Article 11 de la Constitution polonaise de 1997.

443 Article 1 de la Constitution roumaine de 1991.

444 POPA Nicolae, « La révision de la Constitution roumaine », Revue de justice constitutionnelle est-européenne, n°2, 2004, p. 132.

445 C’était l’article 148 de la Constitution roumaine de 1991 et depuis la révision constitutionnelle de 2003, c’est l’article 152 qui a repris mot pour mot l’ancien article 148.

446 En Pologne, on pense notamment aux élections présidentielles et législatives du 25 septembre 2005,

133 rendant ainsi possible l’alternance politique (Pologne, Lituanie, Hongrie, Bulgarie, Roumanie, Albanie) »447.

En Pologne, « les scrutins successifs ont fourni aux divers observateurs l’occasion de souligner la fluctuation dans les préférences électorales de la société polonaise ainsi que l’absence d’une réelle adéquation entre le statut social des électeurs et les programmes politiques qu’ils cautionnaient »448. Les élections ont été organisées en Pologne avant l’adoption et l’entrée en vigueur de la Constitution de 1997. Ainsi, le 9 décembre 1990, à la suite des premières élections au suffrage universel, Lech Walesa accède à la présidence de la Pologne en devançant Stanislas Tyminski et succède au général Wojociech Jaruzelski qui a été élu par la Diète449. Aux élections législatives du 27 octobre 1991, le parti Union démocratique obtient 62 sièges, le parti Alliance de la gauche démocratique 60 sièges, le parti Action électorale catholique 49 sièges, le parti des paysans polonais récolte 48 sièges et le parti Solidarité du président Walesa n’obtient que 27 sièges, etc. Les élections législatives du 19 septembre 1993 verront le parti Alliance de la gauche démocratique remportée 171 sièges, le parti des paysans polonais obtiendra 132 sièges et le parti Union démocratique obtient 74 sièges, etc. Lors des élections présidentielles du 3 novembre 1995, le président Lech Walesa sera battu par le candidat de l’Alliance de la gauche démocratique Aleksander Kwasniewski.

Également, à la suite de l’adoption de la Constitution polonaise de 1997, plusieurs élections ont été organisées. Les élections législatives de 1997 qui ont été gagnées par la droite ont abouti à une première cohabitation de son histoire politique, car les députés de la droite polonaise ont « dû composer avec un président de gauche (Aleksander Kwasniewski) élu en novembre 1995 et réélu en octobre 2000 »450. Grâce au recul avec le début de la révolution qu’elles offrent, nous allons nous intéresser également aux différentes élections qui se sont déroulées depuis l’adhésion de la Pologne à l’Union européenne en 2004. Ces élections législatives et présidentielles confirment l’adoption du pluralisme politique en Pologne, mais également elles ont permis une alternance présidentielle, car c’est pour la première fois que la Droite accède à la Magistrature suprême et gagne les élections législatives et présidentielles en même temps. Lors des élections législatives de 2005, au

447 GICQUEL Jean et GICQUEL Jean-Éric, Droit constitutionnel et institutions politiques, LGDJ, 28ème édition, 2014, p. 386.

448 MARODY Mira, « La question de la démocratie en Pologne », Pouvoirs, 3/2006 (n° 118), p. 67.

449 Le Nouvel Observateur (France), 13 au 19 décembre 1990, p. 39. Voir également Le Monde (France), 11 décembre 1990, p. 1.

450 GAZIER Anne, « Une démocratie parlementaire à l'européenne ? », Pouvoirs 2003/3 (n° 106), p. 78.

134 Diète, le Parti droit et Justice a gagné 155 sièges, le parti Plateforme citoyenne a remporté 133 sièges, le parti auto-défense de la République a également gagné 55 sièges et également ces mêmes partis ont respectivement gagné, au Sénat, 49, 35 et 3451. Les élections présidentielles de la même année seront remportées par le candidat de la droite, Lesch Kaczynski du parti Droit et Justice452. Pour les élections législatives de 7 octobre 2011, « sept partis sont en lice : Plateforme civique du Premier ministre Donald Tusk (po), Droit et Justice (pis) de l’ancien Premier ministre Jarosław Kaczynski, l’Alliance de la gauche démocratique (lid), le Parti populaire (psl), la Pologne d’abord (pjn), le Mouvement Palikot (rpp) et le Parti du travail (ppp) »453. Pour les élections législatives de 2011, au Diète, les partis Plateforme civique obtient 207 sièges, Droit et Justice récolte 157 sièges, Mouvement Palitok obtient 40 sièges, parti paysan polonais obtient 28 sièges, Alliance démocratique de gauche obtient 27 et minorité allemande n’obtient que 1 siège454.

En Roumanie, plusieurs élections démocratiques se sont déroulées depuis la révolution de 1989. Elles se sont déroulées avant l’adoption de la Constitution de 1991, car « les premières élections législatives et présidentielles ont lieu en mai 1990 »455. Elles ont été gagnées par Ion Iliescu pour la présidentielle et son parti le Front du Salut national pour les élections législatives. Depuis la révision constitutionnelle de 2003, nous allons observer que le pluralisme politique a persisté en Roumanie. En 2004, l’élection présidentielle ne réunissait pas moins de onze candidats au premier tour. Au second tour, « la surprise est venue de la victoire du maire de Bucarest, capitaine de vaisseau, baptisé Popeye par ses électeurs, sur le favori le Premier ministre Adrian Nastase. L’alternance joue à nouveau en Roumanie »456. En Roumanie, pour les élections législatives de 2004, plusieurs partis politiques ont sollicité les suffrages des électeurs. Le Parti social-démocrate obtient 35,95 % à l’Assemblée et 36,45 % au Sénat, Alliance Justice et Vérité obtient 31, 44 % à l’Assemblée et 31,72 % au Sénat, le

451 GELARD Patrice, « L'actualité constitutionnelle en Russie, dans les États de la CEI et de l'Europe centrale et orientale et dans les pays toujours ou anciennement communistes (juillet-octobre 2005) », Revue française de droit constitutionnel, 1/2006 (n° 65), p. 215.

452 GELARD Patrice, « L'actualité constitutionnelle en Russie, dans les États de la CEI et de l'Europe centrale et orientale et dans les pays toujours ou anciennement communistes (juillet-octobre 2005) », Revue française de droit constitutionnel, 1/2006 (n° 65), p. 215.

453 ASTIE Pierre, BREILLAT Dominique, LAGEAOT Céline, « Repères étrangers. (1er octobre – 31 décembre 2011) », Pouvoirs, 2/2012 (n° 141), p. 165.

454 ASTIE Pierre, BREILLAT Dominique, LAGEOT Céline, « Repères étrangers. (1er octobre – 31 décembre 2011) », Pouvoirs, 2/2012 (n° 141), p. 166.

455 PIERRE-CAPS Stéphane, Droits constitutionnels étrangers, PUF, 2010, p. 185.

456 GELARD Patrice, « L'actualité constitutionnelle en Russie, dans les États de la CEI et de l'Europe centrale et orientale et dans les États toujours ou anciennement communistes (avril-décembre 2004) », Revue française de droit constitutionnel, 2/2005 (n° 62), p. 438.

135 parti Grande Roumanie obtient 12,90 % à l’Assemblée et 13,10 % au Sénat et enfin le parti Union démocrate de Magyars obtient 6,1 % à l’Assemblée et 6,2 % au Sénat457. Pour les élections législatives de 2012, « l’Union sociale libérale du Premier ministre Victor Ponta l’emporte largement avec 58,60 % des suffrages à la Chambre et 273 des 412 sièges. La participation n’a été que de 41,80 % »458.

En Europe de l’Est, le pluralisme politique instauré par les différentes Constitutions fonctionne convenablement. Différents partis politiques, de droite ou de gauche, sont arrivés au pouvoir par les urnes et dans le respect de la Constitution. Il ressort de ce rapide panorama des différentes élections que dans ces pays le pluralisme politique n’est pas uniquement une disposition constitutionnelle sans effet, mais une réalité politique. Comme le souligne Édith Lhomel, il s’agissait, dans ces nouvelles démocraties, de « donner tout son sens à la notion de pluralisme »459. Le scrutin proportionnel choisi pour les élections législatives par les deux Etats qui font l’objet de notre étude a joué un rôle important dans la consolidation du pluralisme politique. C’est une victoire notable pour la démocratie dans des États qui sortent des régimes dans lesquels une élection n’était jamais organisée. Les différentes élections organisées ont permis l’alternance politique pacifique dans le respect des Constitutions postcommunistes.

B- Le pluralisme politique dans les Constitutions égyptienne et tunisienne de

Outline

Documents relatifs