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Origine du comportement de déformation cellulaire:

III. Résultats et Discussion:

III.3 Origine du comportement de déformation cellulaire:

Nous avons montré un peu plus tôt dans ce travail que des cellules cancéreuses, qu'elles soient d'origine épithéliale ou mésenchymateuse se déforment sur des micro-piliers. Par contre, nous avons aussi mis à jour que ces déformations ne sont pas vraies pour toutes les cellules. En effet, des cellules non cancéreuses et différenciées restent au dessus des piliers et présentent des noyaux de formes

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rondes. Nous avons aussi passé en revue les paramètres connus des substrats (chimie, rigidité, topographie,...) qui ont des effets directs sur les comportements cellulaires. Nous voudrions à présent tenter de comprendre quelles combinaisons de ces paramètres permettent la déformation d'une cellule et de son noyau entre les piliers? Ces travaux ont fait l'objet d'une publication en 2013 dans Biomaterials qui est résumée et discutée ci-dessous.

La première approche a été de modifier les rigidités et chimies de surface des micro-piliers. La chimie est connue pour avoir un rôle important dans différents mécanismes cellulaires dont l'étalement et la migration (Anselme K., et al., 2010; Zheng X, et al., 2013). Nous avons montré précédemment sur les surfaces étirables PEG-RGD que les cellules ne peuvent pas adhérer sur les PEG alors qu'une fois les RGD découverts les cellules s'étalent et prolifèrent normalement (Bacharouche J., et

al., 2013). D'autres équipes avant nous ont décrit l'importance de la chimie pour

l'adhésion cellulaire notamment par greffage de RGD (Schuler M., et al.,2006; Hersel U., et al., 2003). C'est pourquoi nous avions décidé d'évaluer l'importance de la chimie dans les mécanismes de déformations cellulaires sur micro-piliers. Nous avons donc fabriqué des supports en PDMS présentant exactement la même topographie (vérifiée par MEB) mais avec une chimie différente. Cet élastomère étant très hydrophobe et non adhérent pour les cellules à l'état brut, une adsorption de fibronectine a été réalisée pour permettre aux cellules d'y adhérer. Les comportements cellulaires ont ainsi été comparés sur ces différents supports.

Les résultats obtenus ont permis de montrer que la chimie de surface n'est pas un facteur déterminant pour la déformation cellulaire. En effet, les cellules SaOs-2 cultivées sur les différentes chimies présentaient toujours la même déformation nucléaire. Ces résultats sont confirmés par Pan et al. qui ont observé le même genre de déformation sur des supports de PLGA (Poly(lactic-co-glycolic acid)) (Pan Z., et

al., 2012).

Les cellules se déforment donc dans des proportions identiques sur du PLLA et du PDMS. Pourtant ces surfaces présentent aussi des rigidités très différentes. En effet, des mesures AFM réalisées dans le cadre d'une collaboration avec Dimitar Stamov et Clemens Franz à Karlsruhe (Allemagne) ont montré que les modules de Young variaient de 2 à 11MPa pour le PDMS à presque 500MPa pour le PLLA.

La rigidité du substrat est pourtant un facteur clé régissant de nombreux comportements cellulaires. Levental I., et al., détaillent les effets de matériaux mous

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sur les fonctions cellulaires (Levental I. et al.,2007). Notamment, la rigidité du substrat est décrite comme un facteur clé dans la différenciation cellulaire (Georges P.C., et al., 2006; Engler A.J., et al., 2004). Yeung T. et al., ont montré que la rigidité des supports sur lesquels sont cultivées les cellules détermine en partie la morphologie cellulaire (Yeung T., et al., 2005). L'élasticité de l'environnement cellulaire peut même changer profondément le comportement cellulaire en modifiant la réplication et la transcription de cellules épithéliales (Kocgozlu L., et al., 2010). C'est donc avec surprise que nous avons constaté que de grandes variations de rigidité (2 à 480MPa) ne modifiaient pas le comportement cellulaire sur nos micro-piliers. Cependant comme le soulignent Discher D., et al., les cellules perçoivent leur environnement cellulaire comme rigide à partir de 30 à 100kPa (Discher D., et al., 2005). Ceci signifie que même si nous avons testé des rigidités très différentes, elles restent toutes rigides compte tenu de la sensibilité cellulaire. Cependant, la confection de piliers de la même topographie que ceux testés ici avec des rigidités inférieures à 30kPa n'est pour l'instant pas réalisable au sein de notre laboratoire. La chimie et la rigidité des substrats n'apparaissant donc pas comme des facteurs déterminants dans la déformation cellulaire sur micro-piliers, la seconde approche a été d'identifier dans quelle mesure la topographie influençait la déformation des noyaux cellulaires. Ce paramètre a déjà été largement utilisé pour contrôler les fonctions cellulaires (Anselme K., et al., 2010, Anselme K., 2011). Schulze S. et al., décrivent comment la topographie sous forme de micro-tubes peut par exemple contrôler la différenciation de neurones (Schulze S., et al., 2010). La microtopographie peut aussi être représentée par des puits qui ont la particularité de modifier la morphologie cellulaire (Poellmann M.J., et al., 2010). Les supports sous forme de micro-piliers sont des outils déjà utilisés notamment pour montrer qu'ils modifient les architectures ainsi que les fonctions cellulaires (Matschegewski C. et

al., 2010). Dans notre cas, pour mieux comprendre les effets de la topographie, nous

avons fait varier la taille des piliers ainsi que les espacements entre ces derniers. Nous avons donc fabriqué des substrats avec des piliers mesurant de 2 à 15µm de côté avec des espacements compris entre 2 et 20µm. Les résultats de déformation sont à diviser en 4 catégories. La première catégorie concerne les piliers de 7µm avec des espacements de 2 à 4µm. Dans ces gammes de taille, les cellules SaOs-2 déforment facilement leurs corps cellulaires entre les structures, alors que seulement une partie de leurs noyaux se déforme. La seconde catégorie est représentée par

A B

des piliers de 7µm espacés par 5 à 10µm. Dans ces conditions, les cellules SaOs-2 déforment complètement leurs corps cellulaires et leurs noyaux entre les piliers. La catégorie suivante concerne les piliers mesurant 7 à 15µm espacés par 11 à 20µm. Pour ce type de substrat, les cellules investissent toujours les espaces entre les piliers mais leurs noyaux n'apparaissent plus totalement déformés. En effet, les espaces sont suffisants pour placer les noyaux entre les microstructures sans les déformer de façon majeure. Enfin la dernière catégorie est constituée de piliers de 2 à 4µm et espacés de 10 à 12µm. Dans ce cas, les cellules se déforment entre les piliers en présentant des noyaux très affectés. En effet, certains noyaux apparaissent comme enroulés autour des piliers mesurant 2µm de diamètre. Les observations de déformations cellulaires sur des piliers très fins ne sont pas nouvelles. Berthing T., et

al., et Mumm F., et al., ont montré que des cellules cultivées sur des nanofils sont

capables de se déformer sans encourir de modifications comportementales majeures (Berthing T., et al., 2012 et Mumm F., et al., 2012). Il apparait qu'un autre paramètre important pour la déformation des cellules est la hauteur de piliers, qui n'a pas été modifiée dans notre étude (Pan Z., et al., 2012). La topographie est donc un paramètre très important régissant le comportement de déformation.

Toutefois, en cultivant différents ostéosarcomes sur les piliers de différentes tailles avec différents espacements nous avons observé que toutes les cellules n'avaient pas les mêmes capacités de déformation. En effet, les cellules SaOs-2 déforment leurs noyaux entre des piliers avec 2µm d'espacement, alors que les cellules MG-63 et OHS-4 n'insèrent leurs noyaux qu'à partir de 4µm d'espacement. Nous avons aussi quantifié les déformations relatives de ces lignées sur des supports microstructurés avec des piliers carrés de 7µm espacés de 7µm. En considérant que les noyaux cellulaires ont des diamètres supérieurs à l'espacement entre deux piliers, nous proposons que toute partie du noyau comprise entre les piliers est déformée alors que les portions de noyau au dessus ne le sont pas. En appliquant ce principe nous avons pu quantifier les déformations et confirmer que les cellules SaOs-2 se déforment plus que les cellules MG-63 qui se déforment elles-mêmes plus que les cellules OHS-4. Ceci signifie qu'en plus d'une topographie spécifique, la déformation cellulaire n'est possible qu'avec des caractéristiques cellulaires particulières. Afin de mieux comprendre ces différences de propriétés mécaniques, les rigidités des cellules SaOs-2, MG-63 et OHS-4 ont été mesurées par AFM.

C D

Furhmann A., et al., par mesure AFM de la rigidité de cellules cancéreuses et non cancéreuses ont montré que la cancérisation rendait les cellules plus souples (Furhmann A., et al., 2011). En parallèle, Beil M., et al., ont constaté un lien entre l'augmentation de l'élasticité cellulaire et la capacité à transmigrer de cellules cancéreuses (Beil M., et al., 2003). Par ailleurs, nous avions suggéré un lien entre la capacité des cellules à se déformer entre les piliers et l'avancement du cancer. Les cellules les plus souples devraient donc être les plus déformables. Etonnamment, nos résultats ont prouvé que les cellules les plus rigides sont les plus à même à se déformer sur les micro-piliers. Ces résultats pourraient paraître contradictoires. Toutefois, une équipe a révélé que la capacité d'invasion des cellules cancéreuses augmente avec la quantité de lamine A (Willis N.D., et al., 2008). Comme, ce type de filament intermédiaire est reconnu comme fortement impliqué dans les propriétés mécaniques cellulaires (Lee J.S.H., et al., 2007), l'augmentation de la rigidité cellulaire serait corrélée au potentiel d'invasion cancéreux. En définitive, il est donc difficile de raisonner uniquement en termes de rigidité ou d'élasticité car les propriétés mécaniques des cellules proviennent de plusieurs constituants cellulaires comme les différents composants du cytosquelette et le noyau.

De nombreuses études ont démontré que l'actine, les filaments intermédiaires et les microtubules déterminent les propriétés viscoélastiques des cellules (Trickey W.R., et

al., 2003; Janmey P.A., et al., 1991). Il a même été prouvé que l'organisation du

cytosquelette et en particulier de l'actine est essentielle dans la définition de la forme cellulaire (Théry M., et al., 2006). L'organisation tridimensionnelle de l'actine est aussi primordiale. En effet, quand les fibres d'actine sont disposées de façon parallèle, elles permettent de maintenir en partie le phénotype cellulaire (Khatau S.B., et al., 2010). Alors qu'une organisation perpendiculaire des fibres d'actine est un signal provoquant une contraction avec la myosine et modifiant donc la forme de la cellule (Reymann A.C., et al., 2012). C'est parce que le cytosquelette cellulaire dirige tous ces paramètres cellulaires que nous avons décidé d'étudier son implication dans la déformation des cellules cancéreuses sur micro-piliers.

L'observation du cytosquelette des cellules SaOs-2, MG-63 et OHS-4 a été effectuée sur des cellules déformées et non déformées. L'actine, les filaments intermédiaires de vimentine et les microtubules ont été visualisés.

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Tout d'abord, l'actine n'est pas présente dans les mêmes proportions dans les différents types cellulaires. En effet, les cellules SaOs-2 ont un réseau d'actine périphérique dense formant des fibres de stress sur les supports plats. Ce réseau d'actine existe chez OHS-4 mais se révèle moins dense et n'est enfin pas observable chez MG-63. Pour les cellules SaOs-2 et OHS-4 déformées, l'actine s'organise tout autour des cellules avec des densifications plus importantes autour des piliers.

Les filaments intermédiaires de vimentine sont très denses dans les trois lignées ostéosarcomateuses. Cette partie du cytosquelette est organisée, essentiellement autour des noyaux cellulaires, formant une gaine fibreuse avec un maillage serré. Enfin les microtubules sont détectables chez les trois lignées d'ostéosarcomes avec une densité plus importante pour MG-63. Ils forment également un réseau autour des noyaux, tout comme la vimentine.

Les cellules SaOs-2 qui se déforment le plus, présentent un réseau périphérique très dense d'actine. Seule, cette observation peut amener à conclure que l'actine est primordiale dans la déformation cellulaire. Cependant, les cellules MG-63 contiennent très peu d'actine comparées à OHS-4 et SaOs-2 alors qu'elles présentent le second taux le plus important de déformation. Ces résultats signifient donc que les microtubules et/ou les filaments intermédiaires ont aussi une implication non négligeable dans ces mécanismes de déformation entre les micro-piliers. L'organisation des composants du cytosquelette nous donne toutefois quelques informations supplémentaires. L'actine, organisée tout autour des cellules avec des condensations autour des piliers semble appliquer des tensions parallèles à la surface afin de maintenir les cellules déformées entre les piliers. Les filaments intermédiaires et les microtubules, distribués tout autour des noyaux pourraient avoir un rôle dans le guidage du noyau et le maintien de son intégrité durant l'adhésion et la déformation. Les microtubules ont déjà été décrits comme participant au guidage des noyaux dans les cellules épithéliales (Umeshima H., et al., 2007). Par ailleurs, le rôle dans le maintien de l'intégrité cellulaire des filaments de vimentine n'est pas nouveau. En effet, l'étude de leur organisation et de leurs propriétés mécaniques avait déjà conduit à cette conclusion (Janmey P.A., et al.,1991). Dupin et al. avaient aussi observé leur rôle dans le positionnement du noyau lors de la migration cellulaire (Dupin I., et al.,2010).

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Supplementary information:

Fig. S1 : Elasticity measurements of poly-L-lactic acid (PLLA) and different formulations of polydimethylsiloxane (PDMS). The numbers in (A-C) indicate the cross-linker to base component ratio. Increasing cross-linker concentrations lead to stiffening (higher Young’s modulus) of PDMS. In comparison to PDMS, PLLA is more than two orders of magnitude stiffer (D). Histograms of elasticity distributions in (A-D) were fit with a Gaussian function.

t uv Fig S2: A: comparison of SaOs-2, MG-63 and OHS-4 cells deformability on PLLA substrates presenting 7 x 7 µm square pillars with a height of 5 µm and spaced 2, 4 or 6 µm apart. Cells were cultured 72 h on pillared substrates, stained by phalloidin-TRITC (red) and DAPI (blue) and pictures were taken with an epifluorescence microscope. SaOs-2 cells deformed already their nucleus on pillars spaced only 2 µm apart (arrow) while MG-63 and OHS-4 nuclei started to deform when pillars were spaced at least 4 µm apart (arrows). On pillars spaced 6 µm apart, SaOs-2 cells deformed their nuclei completely while this was not the case for the two other cells lines, MG-63 cells displaying an intermediate deformation between SaOs-2 and OHS-4 cells.

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III.4 Comparaison des comportements de cellules mésenchymateuses et