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Les obstacles techniques au commerce

Dans le document L'origine des marchandises (Page 128-145)

Les mesures de protection

II. Les obstacles techniques au commerce

164. L’Accord sur les obstacles techniques au commerce (O.T.C.), dont le texte figure à l’Annexe 1A de l’Accord instituant l’O.M.C., présente sans doute un fort caractère protectionniste. L’Accord sur les O.T.C. reconnaît le droit des pays d’adopter des normes nationales qu’ils jugent appropriées. Il pourrait s’agir d’un cadre normatif concernant la protection de la santé et de la vie des personnes et des animaux, la préservation des végétaux, la protection de l’environnement ou bien la protection des intérêts des consommateurs (par exemple, les ingrédients utilisés dans la fabrication des produits doivent être mentionnés sur l’étiquette). L’accord en question encourage les pays à appliquer les normes internationales. Or l’existence d’un si grand nombre de normes techniques nationales et internationales apporte des difficultés supplémentaires aux échanges commerciaux internationaux.

165. L’Accord sur les O.T.C. dispose que les procédures d’évaluation de la conformité des produits avec les normes nationales

352 Cf. infra, n° 317.

353 Cf. infra, n° 234.

doivent être justes et équitables. Il décourage le recours à des méthodes qui donneraient un avantage inéquitable aux produits indigènes. En revanche, il encourage les pays à reconnaître mutuellement les procédures d’essai : c’est ainsi qu’un produit peut être soumis à des essais dans le pays où il est fabriqué en vue d’évaluer sa conformité avec les normes du pays importateur.

166. L’application des normes techniques apporte à la fois des avantages et des inconvénients pour les usagers du commerce international. Parmi les avantages figure l’harmonisation des normes techniques sur le plan international. Ce processus permet de diminuer les coûts de production et de commercialisation des marchandises. Quant aux inconvénients liés à l’application des normes techniques, il est à noter que celles-ci sont très souvent employées par les Etats à des fins protectionnistes. Par exemple, l’ancienne Loi moldave concernant la protection des consommateurs355 n° 1453-XII du 25 mai 1993, indiquait que toutes les marchandises nationales et étrangères devaient être accompagnées, au moment de leur vente, par des étiquettes dans la langue officielle de l’Etat (article 14, §4). Par la suite, avant d’être vendues sur les réseaux commerciaux nationaux, les marchandises étrangères devaient être étiquetées soit au stade de leur fabrication dans leur pays de production, soit sur le territoire moldave.

167. La norme mentionnée ci-dessus a complètement bouleversé les importations en Moldavie pour une période de quelques mois. Cela a permis aux producteurs nationaux de renforcer leur position sur le marché moldave. Par exemple, à cette époque-là, les producteurs moldaves de bière ont presque doublé leur chiffre d’affaires. En effet, les importations de bière, surtout d’origine russe et ukrainienne, ont chuté considérablement. Cette mesure technique prise par le gouvernement moldave a eu au moins deux conséquences. D’un côté il s’agit de la protection de la santé des consommateurs (but informatif), tandis que de

355 Voir la Loi moldave concernant la protection des consommateurs, n°1453-XII du 25 mai 1993, Monitorul Oficial n° 10/281 du 30 oct. 1993. Cette loi a été abrogée dès l’entrée en vigueur, le 13 juil. 2003, de la nouvelle Loi sur la protection des consommateurs, n° 105-XV du 13 mars 2003, Monitorul Oficial n° 126-131/507 du 27 juin 2003.

l’autre côté cette mesure a fait protéger le producteur autochtone tout en créant une barrière supplémentaire pour l’importation des produits étrangers similaires. Sans aller plus loin dans le développement de cet exemple, on peut mentionner qu’il est souvent difficile de constater une liaison directe entre les O.T.C. et la notion d’origine des marchandises. En revanche, on peut toujours soupçonner la présence d’un lien indirect entre ces deux éléments : dans l’exemple présenté ci-dessus l’application de la norme d’étiquetage a eu comme conséquence la chute de l’importation de bière d’origine russe et ukrainienne.

168. Parmi les autres mécanismes à caractère protectionniste la pratique internationale connaît des mesures de circonstances telles que l’embargo et le boycott. Celles-ci présentent un vif intérêt pour cette recherche, car a priori ces mesures emploient la notion d’origine des marchandises.

§ 2. Les mesures de protection à caractère

circonstanciel

169. L’application des mesures de protection à caractère circonstanciel est un sujet délicat. Ces mesures sont souvent associées au terme de « sanctions économiques »356 ou à celui de « contre mesures »357.

356 Voir DEWOST Jean Louis, La Communauté, les dix, et les « sanctions » économiques : de la crise iranienne à la crise des malouines, A.F.D.I., 1982, pp. 215-232 ; KOSKENNIEMI Martti, Le comité des sanctions (créé par la résolution 661 (1990) du Conseil de sécurité), A.F.D.I., 1991, pp. 119-137 ; WILLAERT Philippe, Les sanctions économiques contre la Rhodésie (1965-1979), R.B.D.I., 1985, pp. 218-245.

357 Voir ALLAND Denis, Justice privée et ordre juridique international. Etude théorique des contre-mesures en droit international public, Paris, Ed. A. Pedone, 1994 ; BOISSON de CHAZOURNES Laurence, Les contre mesures dans les relations internationales économiques, Paris, Ed. A. Pedone, 1992 ; LEBEN Charles, Les contre-mesures interétatiques et les réactions à l’illicite dans la société internationale, A.F.D.I., 1982, pp. 9-77 ; SICILIANOS Linos Alexandre, Les réactions décentralisées à l’illicite. Des contre-mesures à la légitime défense, Paris, Ed. L.G.D.J., 1990, Bibliothèque de Droit International, T. 102 ; STERN Brigitte, Et si on utilisait le concept de préjudice juridique ? Retour sur une notion délaissée à l’occasion de la fin des travaux de la C.D.I. sur la responsabilité des Etats, A.F.D.I., 2001, pp. 3-34. A consulter également les articles 49-54 de l’annexe à la Résolution La responsabilité de l’Etat pour le fait internationalement illicite, adoptée par l’Assemblée générale de l’O.N.U. (sur le rapport

Les deux termes témoignent, en effet, des tentatives entreprises au niveau international afin de trouver la formule qui correspondrait au mieux aux exigences contemporaines du droit international en général et du commerce international en particulier. On propose de les retenir, car chacun d’entre eux présente des avantages non négligeables.

170. Par « sanctions économiques » on peut entendre toute mesure à caractère commercial, financier ou monétaire, prise par un ou plusieurs Etats en vue de protéger ses intérêts d’ordre politique, économique ou social. D’une manière générale toutes les sanctions ont comme objectif de renforcer la valeur du droit, sanctionner ses violations, et par conséquent prévenir les infractions futures. Les sanctions économiques peuvent être appliquées « non seulement aux exportations et aux importations, mais également aux relations financières et aux services »358. Par ailleurs, le terme en question est accueilli avec des réserves par la doctrine juridique, car il est considéré comme peu satisfaisant même pour designer « les mesures adoptées par le Conseil de Sécurité (de l’O.N.U.) qui sont juridiquement des moyens de pression, l’équivalent de mesures d’astreinte, mais qui n’ont pas authentiquement pour but de sanctionner, c’est-à-dire d’infliger un traitement punitif ».359 Il est à noter que l’application des sanctions économiques peut se faire par voie unilatérale ou multilatérale.

171. La voie unilatérale est liée à la prise de sanctions économiques au niveau national. Par exemple :l’embargo décidé par l’Inde en novembre 1944 et mis en œuvre en juillet 1946 à l’égard de l’Union Sud Africaine comme réponse au traitement de la minorité indienne360 ; le gel des avoirs iraniens dans les banques américaines y compris les succursales à

de la Sixième Commission A/56/589), 85ème séance plénière, le 12 déc. 2001, texte publié dans l’A.F.D.I., 2001, pp. 35-44.

358 DEWOST J.L., op. cit., p. 216.

359 BASTID-BURDEAU Geneviève, Les embargos multilatéraux et unilatéraux et leur incidence sur l’arbitrage commercial international, Revue de l’Arbitrage, n° 3, 2003, p. 756

360 Cela a été un échec total pour l’Inde car l’Union Sud Africaine se procurait des produits indiens soit directement au Pakistan, soit par l’intermédiaire d’autres Etats. Voir DUBOUIS L., L’embargo dans la pratique contemporaine, A.F.D.I., 1967, pp. 105 et s.

l’étranger de ces banques pendant la crise iranienne 361 ; l’embargo prononcé par le gouvernement des Etats-Unis contre les livraisons à destination de l’U.R.S.S. par les filiales allemande, anglaise, française et italienne des entreprises américaines concernant le gazoduc eurosibérien en construction362. Sur le plan pratique, l’application de telles mesures s’avère souvent non efficace. Cela peut s’expliquer par le fait que l’Etat auquel on applique les sanctions en question reste loin d’être isolé sur le plan international, ce qui lui permet de maintenir des relations commerciales avec les autres pays du monde.

172. Dans le cas où la voie unilatérale s’avère inefficace, les Etats peuvent recourir à la voie multilatérale pour résoudre la situation de conflit. Ils font appel alors aux organisations internationales telles que l’O.N.U. pour poser le problème à l’échelle planétaire. Tel est le cas, par exemple, des sanctions économiques prises contre la Rhodésie du Sud 363 ou de

361 La crise iranienne éclate le 4 novembre 1979 avec l’occupation des locaux de l’Ambassade des Etats-Unis à Téhéran et la prise du personnel diplomatique en otage. Voir DEWOST J.L., op. cit., pp. 217-219 ; GIANVITI François, Le blocage des avoirs officiels iraniens par les Etats-Unis (executive order du 14 novembre 1979), R.C.D.I.P., 1980, pp. 279-303.

362 Cette mesure a été prise le 29 décembre 1981 par le gouvernement des Etats-Unis suite aux événements survenus en Pologne au mois de décembre 1981, étant invoquée la responsabilité directe de l’U.R.S.S. par rapport à la répression qui a eu lieu. Voir AUDIT Bernard, Extra-territorialité et commerce international. L’affaire de gazoduc sibérien, R.C.D.I.P., 1983, pp. 399-434 ; ERGEÇ Rusen, Les pressions économiques sous l’angle du conflit du gazoduc euro sibérien, R.B.D.I., n° 1, 1984-1985, pp. 166-170.

363 L’affaire de la Rhodésie du Sud (Zimbabwe) est un cas exemplaire en ce que les mesures de pression économique adoptées à cette occasion représentent un système élaboré de sanctions sans précédent dans l’histoire des Nations Unis et la première application du chapitre VII de la Charte des Nations Unis pour l’adoption de sanctions économiques obligatoires. Il convient de rappeler qu’en 1964 et 1965 la Grande-Bretagne négocie avec des représentants rhodésiens l’évolution institutionnelle du territoire. Après la rupture des négociations entre le gouvernement britannique et la minorité blanche de la Rhodésie, M. I. Smith déclare unilatéralement l’indépendance de la Rhodésie du Sud le 11 novembre 1965. Le même jour, le Premier Ministre britannique affirme que cette déclaration unilatérale d’indépendance est illégale. Voir WILLAERT Ph., op. cit., pp. 216 et s. En conséquence, le conflit est sorti du cadre interne de la Grande Bretagne. En ce sens la Résolution n° 232 du Conseil de Sécurité de l’O.N.U., adoptée le 16 décembre 1966, prévoit l’embargo partiel contre la Rhodésie du Sud (il s’agit ici de la prohibition à l’importation et à l’exportation des produits tels que l’amiante, le minerai de fer, le chrome, la fonte, le sucre, le tabac, le cuivre, la viande et les produits cornés (cuirs et peaux)). Puis, avec la Résolution n° 253 du Conseil de Sécurité adoptée le 29 mai 1968, l’embargo s’est élargi sur tous les produits et marchandises (embargo total), à l’exclusion des fournitures à objet strictement médical, du matériel d’enseignement et du matériel destiné à être utilisé dans les écoles ou autres établissements d’enseignement, des publications, des matériaux d’information et dans des circonstances humanitaires spéciales, des denrées alimentaires.

celles imposées contre l’Iraq en tant qu’Etat agresseur après l’invasion du Koweït le 2 août 1990364.

173. On ajoute également que lorsque les conditions de recours aux dispositions du chapitre VII de la Charte de l’O.N.U. se trouvent réunies, c’est-à-dire qu’il existe une menace contre la paix365, une rupture de la paix366 ou un acte d’agression367, le Conseil de Sécurité de l’O.N.U. a la possibilité de prendre des décisions instituant des sanctions économiques. Lorsqu’une telle décision est prise, celle-ci s’impose à tous les Etats membres de l’O.N.U. (article 2, § 7 de la Charte) et même aux Etats non membres (article 2, § 6). En ce sens, l’article XXI du G.A.T.T. de 1947 qui se prononce sur les exceptions concernant la sécurité, montre qu’« aucune disposition ne sera interprétée comme empêchant une partie contractante de prendre des mesures en application de ses engagements au titre de la Charte des Nations Unies, en vue du maintien de la paix et de la sécurité internationale ».

364 A l’occasion de la crise puis de la guerre du Golfe, le Conseil de Sécurité devait décider progressivement de la mise en oeuvre de toute la panoplie des sanctions imposables au titre du Chapitre VII de la Charte à la suite de l’invasion du Koweït par les forces armées de l’Irak. Agissant tout d’abord sur le fondement des articles 39 et 40 de la Charte après avoir constaté une situation de rupture de la paix (Résolution n° 660 du 2 août 1990), le Conseil de Sécurité imposait des sanctions économiques généralisées à l’encontre de l’Irak en tant qu’Etat agresseur (embargo et boycott complets : Résolution n° 661 du 6 août 1990 ; blocus naval pour faire respecter cette rupture totale des relations économiques : Résolution n° 665 du 25 août 1990 ; blocus aérien : Résolution n° 670 du 25 sept. 1990). Voir sur ce sujet CARREAU D., Droit International, Paris, Ed. A. Pedone, 8ème éd., 2004, pp. 73 et s.

365 Selon le Préambule de la Charte des Nations Unis, les Etats membres ont convenu « à préserver les génération futures du fléau de la guerre qui deux fois en l’espace d’une vie humaine a infligé à l’humanité d’indicibles souffrances. On peut en déduire que les menaces qui n’avaient pas un aspect militaire ne constituaient pas a priori des menaces contre la paix ».

366 Le concept de « rupture de la paix » est assez vague. Il peut être appliqué dans les cas de l’éclatement des conflits. Ce concept peut couvrir aussi bien l’acte de la « rupture » tout comme les conséquences qui en résultent.

367 Par « agression » il faut entendre « l’emploie de la force armée par un Etat contre la souveraineté, l’intégrité territoriale ou l’indépendance politique d’un autre Etat, ou de toute autre manière incompatible avec la Charte des Nations Unies, ainsi qu’il ressort de la présente définition ». Voir l’article 1er de la Résolution de l’Assemblée générale des Nations Unis, n° 3314 (XXIXème session) du 14 déc. 1974. Voir également RAMBAUD Patrick, La définition de l’agression par l’Organisation des Nations Unis, R.G.D.I.P., 1976, pp. 835-881.

174. Concernant l’autre terme mentionné plus haut, celui de « contre mesures368 »369, on pourrait parler d’une nouveauté terminologique370. En revanche, on ne peut pas insister sur une nouveauté conceptuelle. En effet, le concept de contre mesures concerne les pratiques étatiques longtemps existantes. On peut ajouter également qu’« aucune des mesures en réaction exercées par un Etat n’est susceptible plus qu’une autre d’être qualifiée de contre mesure »371.

175. Le terme en question présente un double aspect. Stricto sensu, il

correspond à celui de « sanctions économiques », tandis que

lato sensu la sphère du terme « contre mesures » est beaucoup plus large. Elle s’étend non seulement sur les « sanctions économiques », mais concerne également les « mesures de représailles »372

368 Dans le cadre de cette recherche on ne prendra en compte que l’aspect pacifique des « contre mesures » et non pas celui qui concerne l’application de la force armée.

369 Cette expression présente un nombre significatif d’avantages qui peuvent être tous regroupés sous la rubrique « neutralité ». En effet, « dire d’une action d’un Etat qu’elle constitue une contre mesure, c’est marquer simplement, comme l’a noté le Professeur REUTER lors d’une séance de la Commission du droit international, sa simple postériorité par rapport à une action préalable… On dispose ainsi d’un terme commode, pouvant designer aussi bien les représailles que les rétorsions sans que l’on soit amené à se prononcer, a priori, sur la qualification juridique de ces mesures. Par ailleurs, les mots

représailles (non militaires) et rétorsion sont très souvent utilisés dans le cadre du mécanisme de la réciprocité, tel qu’il s’exprime dans les traités bilatéraux ou multilatéraux ». Voir LEBEN Ch., op. cit., p. 16.

370 Pour la première fois, le terme de « contre mesures », qui a des racines américaines d’ailleurs, a été employé en droit international lors d’un différend opposant les Etats-Unis et la France à propos de l’interprétation d’un accord concernant le transport aérien international. Voir l’affaire concernant l’Accord relatif aux services aériens du 27 mars 1946 entre les Etats-Unis et la France, Sentence arbitrale du 9 déc. 1978, Recueil des sentences arbitrales (O.N.U.), vol. XVIII, pp. 454-493. Ce terme a été repris par la Commission du droit international de l’O.N.U. dans le cadre de ses travaux sur la responsabilité internationale de l’Etat pour s’écouler, peu après, dans la doctrine du droit international.

371 BOISSON de CHAZOURNES L., op. cit., p. 21.

372 Du point de vue de cette recherche ce n’est que l’aspect pacifique de ces mesures qui peut présenter intérêt. L’Institut du droit international définit les représailles comme « des mesures de contrainte dérogatoires aux règles ordinaires de droit des gens, prises par un Etat à la suite d’actes illicites commis à son préjudice par un autre Etat et ayant pour but d’imposer à celui-ci, au moyen d’un dommage, le respect du droit ». Voir L’Annuaire de l’Institut du droit international, 1934, p. 708. On pourrait apporter comme exemple le blocage des avoirs officiels iraniens par les Etats-Unis suite à la prise en otage à Téhéran du personnel diplomatique américain, le 4 novembre 1979.

et celles de « rétorsion »373.

176. Après un bref éclairage terminologique, on constate que l’application des pressions économiques sous forme de sanctions économiques ou contre-mesures dispose d’un spectre large de moyens adoptés à l’occasion des crises internationales. En outre, il faut mentionner que ces mesures, prises à partir de considérations politiques, apportent en effet des conséquences économiques. Tel est le cas de l’embargo et du boycott, mesures qui a priori entretiennent des liens avec la notion d’origine des marchandises.

177. Il est à noter toutefois que l’embargo et le boycott appartiennent à une grande famille de mesures de pression dont font partie d’autres mesures telles que par exemple : le blocage des avoirs financiers d’un Etat à l’étranger, la dénonciation des traités à portée économique, la suppression des crédits bancaires, le refus d’accorder l’assistance économique et l’aide mutuelle, le refus de renouveler les contrats, la suspension des échanges scientifiques et culturels, le refus d’accorder des crédits ou des prêts nouveaux, etc.

I. L’embargo

178. La notion d’embargo a considérablement évolué depuis son apparition. Aux XVIIIème-XIXème siècles, elle désigne la saisie de navires étrangers pour faire pression sur l’Etat dont ces navires portaient pavillon. Cette notion a connu un développement considérable à la fin du XIXème et le début du XXème siècle. Elle a commencé à être appliquée non seulement pour la saisie des navires commerciaux étrangers, mais également aux autres moyens de transport comme aux véhicules et plus tard aux avions. Peu après, le centre de gravité de ce mécanisme s’est déplacé vers le régime d’importation et d’exportation des marchandises. A cette époque là,

373 Selon le Professeur Ch. LEBEN, si les « contre actions entreprises ne sont pas en elles-mêmes contraires au droit international (ne sont pas illicites), mais sont en principe de la compétence discrétionnaire des Etats, comme le fait de maintenir ou de suspendre des relations commerciales (ou diplomatiques), on parle plutôt de mesures de rétorsion ». Voir LEBEN Ch., op. cit., p. 14.

l’embargo était devenu une forme de justice privée374. Par cet instrument, « une puissance prétend se rendre justice à elle-même sur le fondement de ses seules appréciations de la justice et en considération de ses seuls intérêts »375.

A. Les particularités concernant l’application du terme d’« embargo »

179. Le terme d’« embargo »376 peut être employé lato ou stricto sensu. Lato sensu, l’embargo désigne une mesure de restriction des échanges qu’un Etat peut prendre à l’égard d’un autre Etat ou d’un groupe d’Etats afin de répondre aux actions ou inactions des Etats qui ont provoqué la situation de conflit. Selon M. L. DUBOUIS, l’embargo peut être défini comme « l’interdiction pouvant frapper aussi bien les exportations à destination de certains Etats que les importations en provenance de ces Etats »377. Le même auteur ajoute que « cette acception n’est pas contraire à l’étymologie. On ne manque jamais de rappeler que l’expression embargo a une origine espagnole, le verbe embargar,

374 Afin d’éviter toutes formes de justice privée, l’article 16, §1 de la Charte fondamentale de la Société des Nations disposait que « si un Membre de la Société des Nations avait recours à la guerre allant à l’encontre de ses engagements sociétaires », les

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