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Les droits de douane et le processus d’intégration des Etats

Dans le document L'origine des marchandises (Page 102-106)

L’origine, élément indispensable à l’application des mesures tarifaires

III. Les droits de douane et le processus d’intégration des Etats

126. Lors du lancement du processus d’intégration entre deux ou plusieurs pays, le problème de l’application des droits de douane se pose inévitablement. La création d’une zone de libre échange279, qui constitue le

276 Cf. supra, n° 14.

277 Le cadre du G.A.T.T./O.M.C. permet aux pays développés de profiter de l’ouverture des marchés des pays en développement aux grands capitaux qui se réduit souvent à une politique d’expansion économique réalisée par les opérateurs économiques des pays développés sur les marchés des pays en développement ; de l’ouverture des marchés des pays en développement en vue d’un accès plus facile aux ressources naturelles et humaines de ces pays ; d’un climat d’investissement stable pour les grands capitaux ; etc.

278 La question des « pics tarifaires » (droits des douane supérieurs à 15%) est loin d’être résolue. Par exemple, les Etats-Unis comptent plus de 150 pics consolidés entre 26 et 58,6 % pour les textiles, le verre ou les colorants artificiels. Voir CARREAU D., JUILLARD P., Droit international économique, op. cit., p. 166.

279 Parmi les objectifs de la zone de libre échange figure le fait de réduire considérablement, voire de supprimer les droits de douane entre les pays qui forment cette zone. Cependant, la création d’une zone de libre échange ne prévoit pas l’unification des territoires douaniers des pays membres. Ainsi, chaque pays reste le maître de sa propre politique tarifaire et non tarifaire, ce qui n’est pas le cas dans le cadre d’une union douanière. Concernant cette dernière, elle doit s’accommoder davantage aux changements majeurs qui ont eu lieu ces dernières décennies dans le commerce international. C’est ainsi que l’union douanière doit, d’une part, continuer à faciliter les échanges commerciaux internationaux, et, d’autre part, sauvegarder les intérêts généraux des Etats qui la forment. Voir BERR C.J., L’avenir de l’union douanière, R.A.E., n° 4, 2005, pp. 575-585.

premier pas du processus intégrationniste, passe d’abord par la signature entre les Etats d’un accord de commerce libre. En règle générale un tel accord prévoit une liste de marchandises qui peuvent être exclues de son champ d’application. Pour toutes les autres positions tarifaires les droits de douane ne s’appliquent pas où s’appliquent à taux zéro à condition que les marchandises soient originaires d’un pays membre de la zone de libre échange et que la règle de transport direct280 soit respectée. En d’autres termes, le pays qui fait partie de la zone de libre échange applique au moins deux taux des droits de douane pour la même position tarifaire : un taux pour les pays qui font partie de cette zone et un autre taux pour les pays qui n’en font pas partie. Il convient d’observer également qu’en dehors des droits de douane, le processus intégrationniste soulève le problème de l’interdiction des taxes d’effet équivalent281 entre les Etats membres qui forment la zone de libre échange. Ce problème se pose également à tous les autres niveaux d’intégration282.

127. Sur le plan communautaire283, par exemple, l’interdiction des taxes d’effet équivalent284 à des droits de douane est expressément prévue par l’article 23 (ex-article 9) et l’article 25 (ex-article 12) du Traité instituant la C.E.E.285 Cependant les articles en question ne s’efforcent pas

280 Cf. infra, n° 285 et s.

281 Voir, par exemple, l’article 3 de l’Accord de création de zone de libre échange entre les Etats membres de la C.E.I. du 15 avr. 1994.

282 Après la création de la zone de libre échange le processus d’intégration des Etats passe en règle générale par trois phases : il s’agit de l’union douanière, du marché commun et de l’union économique et monétaire. Cf. infra, n° 228 et ss.

283 Il va de soi que l’interdiction des droits de douane au niveau intracommunautaire ne s’applique pas dans le cadre des échanges commerciaux extracommunautaires.

284 Voir sur ce sujet GRAVE J.-M., L’interdiction des taxes d’effet équivalent à un droit de douane : un élément fondateur de l’union douanière au service du marché intérieur et de la politique commerciale commune, R.A.E., n° 4, 2005, pp. 621 et ss. ; FROWEIN J., La notion de taxe d’effet équivalent à des droits de douane, C.D.E., 1967, pp. 301 et ss. ; VAN RAEPENBUSCH S., Les taxes d’effet équivalent à des droits de douane, R.M.C., 1983, pp. 493 et ss.

285 Voir le commentaire de l’article 23 (ex-article 9) et de l’article 25 (ex-article 12) du Traité instituant la C.E.E. Traité instituant la C.E.E. Commentaire article par

de définir les taxes d’effet équivalent qui peuvent être considérées comme une « forme déguisée »286 des droits de douane. Ce n’est qu’au terme d’un travail long et persévérant de la part de la Commission287 et surtout de la C.J.C.E.288 qu’une définition de plus en plus élaborée a pu être dégagée. Ainsi, le texte de l’Arrêt de la C.J.C.E. du 1er juillet 1969, Commission c/Italie, prévoit « qu’une charge pécuniaire – fut-elle minime – unilatéralement imposée, quelque soit son appellation et sa technique et frappant les marchandises nationales ou étrangères en raison du fait qu’elles franchissent la frontière, lorsqu’elle n’est pas un droit de douane proprement dit, constitue une taxe d’effet équivalent, alors même qu’elle ne serait pas perçue au profit de l’Etat, qu’elle n’exercerait aucun effet discriminatoire ou protecteur et que le produit imposé ne se trouverait pas en concurrence avec une production nationale »289.

128. La définition présentée ci-dessus, dont chaque mot compte, indique sur trois éléments indispensables qui permettent d’établir qu’une taxe d’effet équivalent a été appliquée. Il s’agit notamment du fait que cette taxe gène les échanges intracommunautaires290 ; qu’elle est perçue lors du

article, sous la direction de CONSTANTINESCO V., JACQUE J.-P., KOVAR R., SIMON D., op. cit.

286 Voir NATAREL E., Construction communautaire et mutations du droit national : le Code des douanes français en question, Aix-en-Provence, Ed. Presses universitaires d’Aix-Marseille, 2004, p. 26.

287 Par exemple, du 15 oct. 1963 (Directive (C.E.E.) n° 63/600 de la Commission du 15 oct. 1963, J.O.C.E. n° L 156 du 29 oct. 1963) au 12 mars 1968 (Directive (C.E.E.) n° 68/157 de la Commission du 12 mars 1968, J.O.C.E. n° L 74 du 26 mars 1968) la Commission a arrêté neuf directives concernant les taxes d’effet équivalent.

288 Dans son premier arrêt sur la taxe d’effet équivalent la C.J.C.E. estime que cette taxe « peut être considérée quelque soit son appellation ou sa technique comme un droit unilatéralement imposé, soit au moment de l’importation, soit ultérieurement, et qui, frappant spécifiquement un produit importé d’un pays membre à l’exclusion du produit national similaire, a pour résultat en alternant son prix d’avoir ainsi sur la libre circulation des produits la même incidence qu’un droit de douane ». Voir C.J.C.E., 14 déc. 1962, Aff. jtes n° 2/62 et n° 3/62, Commission c/Luxembourg et Belgique, Rec. 1962, p. 813.

289 C.J.C.E., 1er juil. 1969, Aff., n° 24/68, Commission c/Italie, Rec. 1969, p. 193.

290 C.J.C.E., 1er juil. 1969, Aff. jtes n° 2/69 et n° 3/69, Sociaal Fonds voor de Diamantarbeiders c/S.A. Ch. Brachfeld et Chougol Diamond Co, Rec. 1969, p. 211.

passage d’une frontière intérieure de la C.E.291 ; et que finalement, celle-ci représente une charge pécuniaire unilatéralement imposée292, son montant s’avérant sans importance293. Peu importe alors que la taxe d’effet équivalent prenne la nature juridique d’une taxe fiscale, d’une taxe parafiscale, de la redevance, etc. Peu importe également que la perception de la taxe d’effet équivalent à un droit de douane soit assurée par les services douaniers, fiscaux, ou par d’autres organismes294.

§2. La notion de tarif douanier

129. Afin d’intégrer une marchandise dans le circuit économique sur un territoire douanier elle doit faire l’objet de la taxation. Pour faciliter cette opération il faut disposer d’un « catalogue qui contient l’énumération des marchandises susceptibles de faire l’objet d’échanges et les droits de douane295 qui se réfèrent à chacune de ces marchandises » 296. Le catalogue, c’est le tarif douanier. Il se propose comme objectif de créer un lien entre

291 C.J.C.E., 16 juil. 1992, Aff. n° C-163/90, Administration des douanes et droits indirects c/Léopold Legros et autres, Rec. 1992, p. I-04625 ; C.J.C.E., 9 août 1994, Aff. jtes n° C-363/93 et n° C-407-411/93, Lancry S.A. c/Direction générale des douanes et droits indirects, Rec. 1994, p. I-03957 ; C.J.C.E., 14 sept. 1995, Aff. jtes n° C-485/93 et n° C-486/93, Maria Simitzi c/Dimos Kos, Rec. 1995, p. I-02655 ; C.J.C.E., 15 avr. 1997, Aff. n° C-272/95, Bundesanstalt c/Milch Kontor, Rec. 1997, p. I-01905 ; C.J.C.E., 21 sept. 2000, Aff. jtes n° C-441/98 et n° C-442/98, Michaïlidis c/Idryma Koinonikon Asfaliseon, Rec. 2000, p. I-07145.

292 C.J.C.E., 1er juil. 1969, Sociaal Fonds voor de Diamantarbeiders c/S.A. Ch. Brachfeld et Chougol Diamond Co, préc. ; C.J.C.E., 26 fév. 1975, Aff. n° 63/74, Cadsky c/Instituto nazionale per il Commercio Estero, Rec. 1975, p. 281 ; C.J.C.E., 15 avr. 1997,

Bundesanstalt c/Milch Kontor, préc.

293 C.J.C.E., 7 mai 1987, Aff. n° 193/85, Frutta SRL c/Amministrazione delle finanze dello Stato, Rec. 1987, p. 2085.

294 Voir sur ce point DUBOUIS L., BLUMANN C., Droit matériel de l’Union européenne, op. cit., pp. 231 et ss.

295 Cf. supra, n° 106 et s.

les marchandises qui franchissent la frontière douanière297 et les charges douanières qu’elles doivent supporter à cette occasion.

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