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L’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, fortement lié au principe de clarté de la loi

TITRE 1 : LA NOTION CLASSIQUE DE L’ACCÈS AU DROIT

B. L’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, fortement lié au principe de clarté de la loi

La loi pour être comprise doit être clairement énoncée. Ce principe, affirmé par le Conseil Constitutionnel, découle de l’article 34 de la Constitution fixant le domaine de la loi. Comme rappelé par le Conseil constitutionnel dans plusieurs de ses décisions309, « une

disposition législative incompréhensible et inexplicable est entachée d’incompétence négative »310. Ainsi, la clarté de la loi est le corollaire de l’intelligibilité et de l’accessibilité du droit.

307 P. DE MONTALIVET, « La "juridicisation" de la légistique. À propos de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi », [in] La confection de la loi, R. DRAGO (dir.), PUF, 2005, p. 114.

308 Le considérant est le suivant : « Considérant que les dispositions contestées, rédigées en allemand, n’ont pas

donné lieu à une publication de la traduction officielle prévue par les lois du 1er juin 1924 susvisées ; qu’aux termes du premier alinéa de l’article 2 de la Constitution : "La langue de la République est le français"» ; que si la méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789, ne peut, en elle-même, être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité sur le fondement de l’article 61-1 de la Constitution, l’atteinte à l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité de la loi qui résulte de l’absence de version officielle en langue française d’une disposition législative peut être invoquée à l’appui d’une question prioritaire de constitutionnalité ; que, toutefois, compte tenu de la déclaration d’inconstitutionnalité prononcée au considérant 11, il n’y a pas lieu pour le Conseil constitutionnel d’examiner le grief tiré de la violation de ces exigences constitutionnelles» :

C.C., 30 novembre 2012, n° 2012-285 QPC, M. Christian S.

309 Le Conseil d’État fait référence à certaines décisions notoires, et notamment à la décision n° 81-132 DC du 16 janvier 1982, relative à la loi de nationalisation : Conseil d’État, Sécurité juridique et complexité du droit, rapport public 2006, La Documentation française, 2006, p. 287.

310 Conseil d’État, Sécurité juridique et complexité du droit, rapport public 2006, La Documentation française, 2006, p. 287.

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A. FLÜCKIGER, qualifie la clarté de la loi d’« idéal chaque fois revendiqué mais

jamais atteint »311. Il est vrai que le langage juridique utilisé est parfois complexe et obscur. De même, la multiplicité des normes et leur obsolescence rendent difficile l’appréhension de la loi par ses destinataires. En conséquence, parler de clarté de la loi semble effectivement tendre vers un idéal, mais il sera préféré la notion de « règle de conduite » imposée au législateur. Certes, la perfection n’est jamais atteinte, mais le Conseil constitutionnel semble vouloir rappeler (et parfois imposer) au législateur, rédacteur des normes et dépositaire du pouvoir de légiférer de par son élection par le peuple, qu’il doit s’astreindre à certaines règles précises dans la rédaction des normes, afin d’en permettre a maxima la clarté.

Les décisions qui mettent côte à côte l’objectif d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi (et plus particulièrement sa composante relative à l’intelligibilité de la loi) et le principe de clarté font ressortir les liens ténus qui existent entre eux, permettant notamment de garantir la sécurité juridique des sujets de droit. Ce lien transparaît dans la définition même de la clarté, qui renvoie au « Caractère de ce qui est facilement intelligible »312, et donc à la notion d’intelligibilité même. Selon P. DE MONTALIVET, si les deux notions sont différentes, « le

Conseil, à la suite des requérants, invoque fréquemment les deux normes simultanément, si bien qu’on peut se demander si les deux normes n’en forment pas parfois qu’une »313.

Dans la décision n° 2001-451 DC314, les requérants ont soutenu que certaines dispositions de la loi portant amélioration de la couverture des non-salariés agricoles contre les accidents du travail et les maladies professionnelles contrevenaient aux articles 21 et 34 de la Constitution et étaient entachées d’un défaut de clarté et d’intelligibilité en raison, notamment, de multiples renvois au pouvoir réglementaire. Le Conseil constitutionnel a estimé que la loi déférée ne contrevenait ni à l’objectif d’intelligibilité de la loi315 ni à celui de clarté. D. RIBES, commentant cette décision, a indiqué qu’en « méconnaissance de son sens et de sa portée,

l’objectif à valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi ne saurait être

311 A. FLÜCKIGER, « Le principe de clarté de la loi ou l’ambiguïté d’un idéal », Les cahiers du Conseil

constitutionnel, n° 21, janvier 2006, p. 78.

312 J. REY-DEBOVE, A. REY (dir.), Le Petit Robert de la langue française, Le Robert, édition 2016, p. 446.

313 P. DE MONTALIVET, « La "juridicisation" de la légistique. À propos de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi », [in] La confection de la loi, R. DRAGO (dir.), PUF, 2005, p. 127.

314 C.C., 27 novembre 2001, n° 2001-451 DC, Loi portant amélioration de la couverture des non salariés agricoles

contre les accidents du travail et les maladies professionnelles.

315 Cette décision fait partie des hypothèses relatives à « la répartition des compétences opérées par les articles

34 et 37 de la Constitution, qui peut ne pas permettre à la loi "d’appréhender complètement le nouveau dispositif" qu’elle met en place » et où « le Conseil constitutionnel refuse une méconnaissance de l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité » : A. JENNEQUIN, « L’intelligibilité de la norme dans les jurisprudences du Conseil constitutionnel et du Conseil d’État », RFDA, n° 5, sept.-oct. 2009, p. 913.

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utilisé pour étendre, au-delà de ce que prévoit déjà la Constitution, le domaine obligatoire de la loi. Particulièrement dans une matière dont la technicité appelle une réglementation détaillée […] »316.

Cette conception se retrouve dans la décision n° 2001-455 DC317, qui « consacre

solennellement la valeur de principe constitutionnel à la clarté, pour la première fois, dans la jurisprudence du Conseil »318. Les requérants y soutenaient que la loi de modernisation sociale contenait des dispositions contrevenant aux exigences de clarté et d’intelligibilité de la loi (certaines dispositions étant selon les requérants, floues, non définies, etc.), ce que le Conseil constitutionnel avait pu rejeter319. Concernant l’exigence de clarté, le Conseil, en se fondant sur les travaux préparatoires du législateur, a précisé qu’en étant « suffisamment précis »320, le terme « restructuration » ne portait pas atteinte à l’article 34 de la Constitution. Le Conseil constitutionnel donne ainsi des exemples de ce qui peut définir la clarté d’une norme, ses dispositions devant notamment être « suffisamment précises ». Il est aussi fort instructif de constater que le Conseil constitutionnel pallie l’imprécision du législateur en se référant à ses travaux préparatoires pour compléter le sens de certaines dispositions de lois déférées devant lui. Ce point pose question, dans la mesure où la multiplicité des supports rend difficile la compréhension d’une norme, l’information juridique pertinente à trouver pour le citoyen étant diluée dans le nombre de textes existants.

D. RIBES a considéré que « Si elle traduit un impératif de sécurité juridique,

l’intelligibilité de la loi ne demeure qu’un objectif de valeur constitutionnelle et non une exigence constitutionnelle à l’instar de la clarté de la loi. La perception de ces différences essentielles devrait réduire le nombre d’invocations, largement inutiles, de l’objectif d’intelligibilité et mettre fin à la confusion qui a paru jusqu’à saisir le Conseil constitutionnel lui-même »321. Commentant ensuite la décision n° 2001-455 DC précédemment citée, D. RIBES ajoute que : « Au regard du succès stérile de l’objectif d’intelligibilité chez les

316 V. BERTILE, E. OLIVA, L. PHILIP, D. RIBES, « Jurisprudence du Conseil constitutionnel, 1er octobre-31 décembre 2001 », Revue française de Droit constitutionnel, n° 49, 2002, pp. 151-198.

317 C.C., 12 janvier 2002, 2001-455 DC, Loi de modernisation sociale.

318 J.-F. KERLÉO,La rénovation parlementaire à travers l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, mémoire de Master 2, sous la direction de T. DEBARD,Université Jean Moulin – Lyon 3, 2005-2006,p.28.

319 Cons. 30.

320 Cons. 17.

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requérants, on ne peut finalement que saluer le refus du Conseil constitutionnel de consacrer, avec rang constitutionnel, un principe général de sécurité juridique »322.

La décision n° 2003-475 DC323 place pour la première fois l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité (et non plus uniquement le principe d’intelligibilité) aux côtés de l’exigence de clarté, ces deux éléments imposants au législateur,

« afin de prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou

contre le risque d’arbitraire, d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques »324. Le Conseil constitutionnel censure donc l’article 7 de la loi déférée, estimant notamment que certaines notions étaient « ambigües »325. La formule adoptée dans le considérant 20 (« adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non

équivoques ») sera notamment reprise par la suite dans les décisions du Conseil constitutionnel

pour préciser les exigences incombant au législateur rédacteur de la norme en matière de clarté, d’accessibilité et d’intelligibilité des lois.

L’intelligibilité et la clarté de la loi apparaissent par la suite fréquemment associées dans les décisions du Conseil constitutionnel. Dans sa décision n° 2004-494 DC326, le Conseil estime que si les dispositions critiquées rendent « plus complexe l’articulation entre les différents

accords collectifs, elles définissent de façon précise les rapports entre les différents niveaux de négociations », et qu’ainsi le législateur n’aurait pas méconnu les exigences d’intelligibilité et

de clarté de la loi327. La complexité en tant que telle de certaines dispositions ne méconnaîtrait donc pas forcément les principes précités. D’aucuns ont pu considérer que l’objectif poursuivi par le juge constitutionnel avait vocation à laisser une marge de latitude au législateur s’agissant du dialogue social et expliquait ainsi cette décision328.

322 D. RIBES, « Non-rétroactivité de la loi et sécurité juridique », Recueil Dalloz, 2002, p. 1953.

323 C.C., 24 juillet 2003, n° 2003-475 DC, Loi portant réforme de l’élection des sénateurs.

324 Cons. 20.

325 Cons. 24.

326 C.C., 29 avril 2004, n° 2004-494 DC, Loi relative à la formation professionnelle tout au long de la vie et au

dialogue social.

327 Cons. 14.

328 Au sujet de cette décision, P-Y. GAHDOUN a pu indiquer que « si le principe de faveur était constitutionnalisé,

ainsi que l’exigeaient une fois de plus les requérants, il empêcherait de facto toute initiative du Parlement en ce sens. Entendu de la sorte, ce principe est facteur de rigidité et non de flexibilité puisqu’il oblige à une dérogation dans un sens particulier (celui du salarié). On peut alors comprendre – et discuter – la position du Conseil constitutionnel, certainement soucieux de ne pas enfermer le législateur dans un système d’organisation normative qui limiterait trop largement ses aspirations futures. La flexibilité affichée par la loi relative aux dialogue social trouve donc un écho dans une souplesse évidente voulue par le juge constitutionnel » : P.-Y. GAHDOUN, « Chronique de jurisprudence constitutionnelle premier semestre 2004 », Revue administrative, n° 342, 2004, pp. 590-594.

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Dans son autre décision 2004-503 DC329, le Conseil constitutionnel estime que le législateur a décrit « en termes suffisamment clairs, précis et intelligibles » les dispositions législatives visées par les requérants330 et rejette leurs griefs331. Dans la décision n° 2011-631 DC332, où les requérants invoquaient notamment la méconnaissance de l’étendue de la compétence et l’exigence constitutionnelle de clarté et d’intelligibilité de la loi333, le Conseil constitutionnel a pu considérer que « les dispositions contestées ne sont ni obscures ni

ambigües […] que, par suite, le grief manque en fait »334. La décision du Conseil permet de comprendre une nouvelle fois la notion de clarté, de précision et d’intelligibilité de certaines dispositions déférées devant elle, en l’opposant aux conceptions d’« obscurité » et d’«ambigüité ».

J.-F. LACHAUME a considéré que « La référence à l’exigence de la clarté de la loi

rencontrée dans certaines décisions (Cons. const. 7 déc. 2000, no 2000-435 DC, Loi d’orientation pour l’outre-mer, JO 14 déc., p. 19830 ; AJDA 2001. 102, note Schoettl) a disparu des décisions du Conseil à compter des années 2006 (GDCC, 16e éd., p. 369) et l’exigence de clarté s’est, en quelque sorte, fondue dans celles d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi utilisées depuis »335. P. RRAPI a quant à elle observé un « abandon du principe de

clarté au profit de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi »336.

Il est vrai que l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi semble avoir absorbé le principe de clarté, pour autant la conception de « clarté » de la loi n’a pas totalement disparu. Dans la décision n° 2016-739 DC337, les requérants soutenaient que les dispositions de la loi attaquée méconnaissaient « le principe de "clarté de la loi" et

329 C.C., 12 août 2004, n° 2004-503 DC, Loi relative aux libertés et responsabilités locales.

330 Cons. 36.

331 Au sujet de cette décision, V. OGIER-BERNAUD et C. SEVERINO précisent que « Même s’il n’a

explicitement fait aucun parallèle entre les deux types d’expérimentations instaurés par la réforme de 2003, il a fait montre de moins de rigueur dans le contrôle des dispositions prises en application de l’article 37-1 que pour celles définissant les conditions de mise en œuvre de l’article 72, alinéa 4, estimant que la portée limitée de ce premier type d’expérimentation nécessitait un encadrement plus souple […] » notamment au regard de l’objectif

expérimental qui était fixé par la loi : V. OGIER-BERNAUD, C. SEVERINO, « Droit constitutionnel jurisprudentiel : panorama 2004 », Recueil Dalloz, n° 17, 2005, pp. 1125-1131.

332 C.C., 9 juin 2011, n° 2011-631 DC, Loi relative à l’immigration, à l’intégration et à la nationalité.

333 Cons. 11.

334 Cons. 14.

335 J.-F. LACHAUME, « Violation de la règle de droit », Répertoire de contentieux administratif, Dalloz, juin 2013, actualisation janvier 2015, §255.

336 P. RRAPI, L’accessibilité et l’intelligibilité de la loi en droit constitutionnel, thèse, sous la direction d’A. ROUX, Université d’Aix-Marseille, Dalloz, 2014, p. 52.

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l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi dans la mesure où ne sont définis ni la notion de "relation numérique" ni les destinataires des données rendues accessibles »338. Le Conseil constitutionnel énonce sa jurisprudence habituelle de rappel des droits s’agissant de l’objectif de valeur constitutionnelle d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi et indique que cet objectif, « qui découle des articles 4, 5, 6 et 16 de la Déclaration de 1789,

impose au législateur d’adopter des dispositions suffisamment précises et des formules non équivoques. Il doit en effet prémunir les sujets de droit contre une interprétation contraire à la Constitution ou contre le risque d’arbitraire, sans reporter sur des autorités administratives ou juridictionnelles le soin de fixer des règles dont la détermination n’a été confiée par la Constitution qu’à la loi »339. Puis le Conseil précise qu’il ne considère pas que les dispositions invoquées étaient non conformes à la Constitution dans la mesure où « la notion de "relation

numérique" est claire. […]. D’autre part, les dispositions contestées sont suffisamment précises dès lors que toute personne aura accès aux données figurant dans les annuaires et tables nationales des professions mentionnées au paragraphe I »340. La précision et la clarté sont à nouveau invoquées côte à côte par le Conseil constitutionnel, qui rejette les arguments des requérants.

Les exigences incombant au législateur en tant que rédacteur de la loi - s’agissant de la compréhension de cette dernière par le citoyen - se matérialiseraient ainsi en grande partie par le respect des principes de clarté, d’accessibilité et d’intelligibilité de la loi, permettant la sécurité juridique des sujets de droit. L’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi a par ailleurs été mobilisé dans le cadre de contentieux, donnant une implication plus pratique à cet objectif.

Il apparaît au regard de ces développements que l’accès au droit est intrinsèquement lié à l’État de droit, en tant que matérialisation des principes d’égalité et de sécurité juridique. Produit d’un éclatement notionnel épars, l’accès au droit influe et renforce d’autres notions fondamentales de l’État de droit, comme l’accès à la justice, la prévisibilité du droit ou encore l’objectif de valeur constitutionnelle d’intelligibilité et d’accessibilité de la loi. Cette complexité dans ses fondements se couple de difficultés diverses. L’accès au droit demeure en effet complexe à mettre en œuvre, à appréhender, et plus que jamais, terriblement subjectif dans sa réalité. Cet accès au droit s’avère perfectible en tant qu’idéal à atteindre. En ce sens, des

338 Cons. 11.

339 Cons. 12.

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efforts continus et persistants pour l’améliorer sont mis en œuvre par l’État, des organismes publics divers, mais également par des organismes privés ou la société civile, qui s’empare de cette question, au regard de son importance dans tout État de droit.

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CHAPITRE 2 : L’ACCÈS AU DROIT, UNE CONCEPTION PERFECTIBLE INHÉRENTE À L’ÉTAT DE DROIT

Certaines inégalités et insécurités juridiques légitiment le besoin d’accès au droit par les individus, qui devient plus que jamais nécessaire à l’exercice de leurs droits.

L’étude des inégalités entre les individus doit être réalisée afin de démontrer que ces dernières peuvent interférer dans l’accès au droit. En effet, cet accès peut être amoindri par l’existence d’inégalités qui ne sont pas seulement juridiques, mais également de nature économique, culturelle, sociale, etc. De plus, des insécurités juridiques peuvent accroître le besoin d’accès au droit. Le droit est impacté par l’inflation du droit, qui amène un accroissement continu des règles de droit, qui ne consolide pas le droit mais le fragilise, puisque cet accroissement se couple d’une obsolescence de ces mêmes règles. Le droit devient plus obscur, moins accessible, moins compréhensible. La quantité des règles de droit et leur faible durée de vie rendent ainsi difficile la matérialisation de l’adage « nul n’est censé ignorer la loi » (Section 1).

Au regard de ces difficultés, des méthodologies, comme la légistique, la simplification du droit, ou encore la codification sont mises en œuvre afin de permettre un meilleur accès aux règles de droit. Proposées par la doctrine, certaines de ces méthodologies ont fait l’objet d’une reconnaissance juridique, qui a consolidé leur force juridique et a amené la modification de certains comportements, notamment dans le domaine de la rédaction de la loi. Le rédacteur de la loi a une responsabilité envers les récipiendaires du texte de loi, puisque de la qualité de cette même loi dépendra pour partie sa connaissance et sa compréhension. Hélas, certains facteurs comme la pression de l’opinion publique semblent impacter la qualité de la loi.

Par ailleurs, l’existence de l’obligation de publication de la loi rend visible les règles de droit nouvellement applicables et favorise la connaissance du droit, bien qu’il ne s’agisse que d’une mise à disposition de textes de loi sans explication particulière. En outre, des politiques publiques en faveur de l’accès au droit démontrent de l’intérêt persistant pour ces questions qui questionnent la conception même de démocratie dans tout État de droit. Il est possible de s’interroger sur l’efficacité de ces différentes méthodologies et évolutions législatives ou politiques en faveur de l’accès au droit pour permettre de le renforcer (Section 2).

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Section 1 : De l’existence d’inégalités et d’insécurités juridiques justifiant l’accès au droit

La question de l’accès au droit ne peut être abordée d’un point de vue uniquement juridique, et doit faire l’objet d’une brève analyse sociologique, mais également philosophique de la question, afin d’observer les inégalités susceptibles de légitimer l’accès au droit (Paragraphe 1). Des insécurités juridiques, comme la complexité du droit et l’inflation législative, peuvent par ailleurs accroître le besoin d’accès au droit (Paragraphe 2).

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