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La notion d’intégration chez les théoriciens des organisations : une complémentarité de la

Du contexte à la question de recherche : une généalogie de la crise des politiques

3. Des évolutions symptomatiques de l’apparition d’une crise dans les organisations

3.2. Qu’est-ce que la gestion intégrée ?

3.2.4 La notion d’intégration chez les théoriciens des organisations : une complémentarité de la

différenciation pour obtenir une organisation performante dans un environnement donné

Pour mettre en perspective ces définitions de l’intégration dans le domaine environnemental, nous allons revenir sur la notion d’intégration telle qu’elle a été introduite par les économistes afin de pouvoir ainsi mettre en exergue les points communs et les différences par rapport à celles données dans le domaine de l’environnement avant de proposer dans le paragraphe suivant une définition qui sera celle retenue lors de cette thèse.

La notion d’intégration est apparue en économie des organisations chez les théoriciens de la contingence qui ont établi la différence entre intégration et différenciation. Il nous semble ici intéressant de nous arrêter quelques instants sur cette école et d’évoquer l’importance du changement dans l‘étude des organisations que la théorie de la contingence a effectué par rapport aux théories « classiques ». En effet, à partir de l’observation de plusieurs entreprises, des chercheurs (notamment Woodward et Chandler) vont abandonner l’idée de la généralisations

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d’un type unique d’organisation. Certains comme Burns et Stalker (Burns et Stalker 1961) ou Lawrence et Lorsch (Lawrence et Lorsch 1967) vont alors élargir le champ de leurs études en intégrant la prise en compte de l’environnement de l’entreprise dans l’étude de celles-ci29. En

général, les théoriciens de la contingence commencent par identifier les entreprises efficaces de celles qui le sont moins afin de pouvoir par la suite analyser ce qui dans leur environnement vient créer ces différences de performance. Ainsi Joan Woodward (Woodward 1958) met en avant le fait que la technologie30 a une influence sur la structure des organisations et sur leur

performance. Chandler, quant à lui, démontre que, pour faire face efficacement aux différents types d’environnement, l’entreprise change de stratégie et que ces modifications d’orientation déterminent sa structure. Pour leur part, Burns et Stalker identifient des types extrêmes d’environnement (stable et changeant) qui vont influer sur la structuration de l’entreprise dont les deux types extrêmes idéaux sont constitués par les structures mécanique et organique. Puis Lawrence et Lorsch poursuivent l’analyse des liens entre l’organisation et son environnement. Ils décrivent notamment une industrie de textile qui est insérée, comme toute organisation, dans un environnement avec des fournisseurs, des clients, des concurrents où des règles juridiques sont à observer. L’entreprise est formée de petites unités (conception, finance, production, …) qui n’ont de liens chacune qu’avec une petite partie de l’environnement global de l’entreprise. Pour que l’organisation dans son ensemble fonctionne bien dans son environnement, il faut que chacune des unités puisse s’adapter à la partie de l’environnement global qui la concerne : c’est ce que Lawrence et Lorsch appellent le principe de différenciation qu’ils définissent comme : « les

différences d’attitudes et de comportement et non uniquement le simple fait du fractionnement et de la spécialisation » (p. 27) (Lawrence et Lorsch 1989). Il résulte de cela que l’entreprise sera

différenciée. Toutefois cette différenciation risque d’entraîner un éclatement de l’organisation. Aussi des mécanismes intégrateurs sont nécessaires afin de maintenir l’unité de l’organisation. En effet, les informations détenues par une des unités peuvent être primordiales pour une autre unité ; la cohésion de l’entreprise est nécessaire. Les auteurs définissent donc l’intégration comme :

« la qualité de la collaboration qui existe entre des départements qui doivent unir leurs efforts pour satisfaire aux demandes de l’environnement. » (p.29).

29 Toutefois, il faut cependant noter que cette rupture avec les théories « classiques » n’est pas si importante qu’il n’y parait car les théoriciens de la contingence demeurent malgré tout assez normatifs dans leurs considérations tout en proposant plusieurs types de structurations.

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Dans trois secteurs : les matériaux plastiques, les conserves alimentaires et les emballages standards, Lawrence et Lorsch comparent une entreprise très efficace à une autre moins efficace et relient ces résultats aux différences de milieu externe. Ils concluent en disant : « Dans un

domaine plus divers et plus dynamique, tel que l’industrie du plastique, les organisations efficaces doivent être très fortement différenciées et hautement intégrées. Dans un environnement plus stable et moins divers, tel que l’industrie des emballages, les organisations efficaces doivent être moins différenciées mais elles doivent cependant atteindre un haut niveau d’intégration. » (p.109). Les deux principes de différenciation de la structure

et parallèlement d’intégration sont à la base de la mise en place d’une organisation performante. Mintzberg reprend ces principes de différenciation et d’intégration dans ses travaux sur les organisations (Mintzberg 1984).

La définition de l’intégration de Lawrence et Lorsch nous semble se démarquer de celle adoptée dans le domaine de l’environnement dans la mesure où elle nous parait plus restrictive, et désigner davantage une forme de structuration de l’organisation qu’avoir une valeur conceptuelle comme c’est le cas dans le domaine de l’environnement. Toutefois, il nous semble que l’on peut en retenir deux leçons intéressantes pour les domaines qui nous concernent :

1. la différenciation est indispensable (cf Billé et le millefeuille politico-administratif) mais l’intégration en est la contrepartie

2. il y a une influence du contexte sur les arrangements retenus par les acteurs. On peut faire un parallèle

Type d’environnement Type de structuration d’entreprise

Analogie dans les politiques locales du développement

durable

stable Système mécanique Système Politico - Administratif Local (SPAL)

mouvant Système organique Gestion intégrée (GI)

Figure 2 : influence du contexte sur l'intégration dans les entreprises et dans les politiques locales du développement durable

Le tableau ci-dessus résume l’analogie qu’on peut effectuer en ce qui concerne l’influence de l’environnement sur le type de système de gestion retenu entre les entreprises et les politiques techniques locales du développement durable qui nous concernent.

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