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Le plan départemental d’élimination des déchets

L’intégration, les outils

2. Des outils variés et en mutation

2.2. Le plan départemental d’élimination des déchets

ménagers et assimilés, un outil orienté prescription

avec un chef de file désigné

2.2.1 Création et objectifs du plan

Le plan départemental d’élimination des déchets ménagers ou assimilés a été créé par la loi du 13 juillet 1992. Le plan a deux objectifs : coordonner les acteurs et permettre la déclinaison locale des orientations politiques nationales en matière de déchets ménagers. Dans un premier temps, c’était le préfet qui était chargé de l’élaboration, de l’application et de la révision du plan. Depuis la loi Barnier (1995), le président du conseil général pouvait demander à remplacer le préfet dans

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ce rôle en prenant la compétence « plan ». Dans le projet de loi relatif aux libertés et responsabilités locales adopté le 30 juillet 2004 et devenue loi le 13 août 2004, « le projet de plan est [désormais] élaboré à l’initiative et sous la responsabilité du président du conseil général ».

Le plan a un premier intérêt dans le sens où il favorise la réalisation d’un diagnostic. Il est aussi source de débat entre les différents acteurs et à l’intérieur même des différentes structures lors de son élaboration et de sa révision. Il permet dans un premier temps une exploration des possibles. Il rend aussi possible un certain « cadrage » des relations. En effet, seule une organisation collective à une échelle territoriale suffisante permet aux collectivités de gérer leur flux de déchets et de se garantir un moyen de traitement ultime (incinération ou enfouissement). Les structures issues des regroupements des années 1980 sont souvent trop petites au regard de la dimension des unités de traitement actuelles et se retrouvent soumises aux aléas du marché. De plus, il ne faut pas que cette organisation intercommunale laisse de côté une petite partie du territoire comprenant une trop faible population pour laquelle le traitement, voire la collecte des déchets ne pourra alors s’effectuer dans des conditions techniques et économiques acceptables. Le plan permet de limiter la parcellisation, même si certains lui reprochent de créer des monopoles, par exemple en ce qui concerne l’incinération ou la mise en décharge qui constituent des monopoles de fait.

2.2.2 Une implication inégale des différents acteurs

D’après une étude réalisée par Amorce pour le compte de l’Assemblée des Départements de France en 2002, des difficultés ont été rencontrées par un Département sur deux lors de la mise en œuvre de sa politique déchets ; ces difficultés étaient principalement liées à l’intercommunalité. En effet, d’une part, la réalisation du Plan nécessite presque toujours la mise en place d’intercommunalités nouvelles et, d’autre part, le grand nombre de nouvelles intercommunalités créées suite à la loi de 1999 entraîne de nombreux transferts de compétences et des modifications de périmètres dans le domaine des déchets. Ceci a provoqué à retarder ou à remettre en cause des projets structurants. De plus, les zones géographiques ne progressent pas toutes au même rythme, ce qui rend plus difficile la mise en place d’une politique coordonnée et homogène.

C’est là que, d’après nous, l’Etat possède un rôle important à jouer dans la gestion des déchets, même au niveau local, tant sur le plan réglementaire (par la mise en place de dispositifs tels que les plans par exemple), que par l’action d’accompagnement technique des collectivités que

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fournissent ses services déconcentrés. Les plans, même s’ils ont permis une certaine concertation et introduit une relative cohérence, sont critiqués pour le manque d’implication des communes et des usagers dans leur élaboration. En effet, un acteur est devenu prépondérant : le Département.

2.2.3 La place des Départements

La loi a instauré l’échelon départemental comme niveau pertinent pour la planification de la gestion des déchets afin de permettre de concilier à la fois l’objectif général de modernisation de la gestion et la convergence des initiatives locales.

(a) Des possibilités législatives peu utilisées, mais une forte implication dans l’élaboration et le suivi du plan départemental

Après une période de réticence des Départements à prendre de manière volontaire la compétence de planification juste après 1992 (Dubois 2001), les Départements sont aujourd’hui très nombreux à participer activement à l’élaboration du plan. Leur rôle est déterminant pour la coordination et l’animation de la mise en œuvre du plan. Cependant, ils hésitent plus à prendre la compétence « traitement », ce qui est possible pour eux depuis la loi Chevènement en 1999 . Cette hésitation est due à la difficulté pour les Départements de trouver la juste place sans empiéter sur le rôle de l’Etat, ni sur les prérogatives des communes. Les Départements estiment en général que la planification fait partie du rôle de l’Etat, tandis que le traitement est celui des communes. Toutefois, 80 % des Départements déclarent que la question des déchets les concerne. C’est pourquoi, souvent, les déchets forment une part essentielle de leur politique d’environnement (Amorce 2002), notamment au niveau de leur implication financière (IFEN 2005b).

Les Conseils Généraux exercent souvent une politique ambitieuse en ce qui concerne les déchets mais pas toujours très aisée à cerner. Ils sont en effet plus préoccupés par les conséquences de la gestion des déchets, à savoir les pollutions et les nuisances (résorption des dépôts sauvages, réhabilitation des décharges et enlèvement des épaves, devenir des déchets non ménagers) que par les aspects organisationnels de la gestion des déchets.

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Toujours, d’après l’étude (Amorce 2002), ce sont plutôt les Départements ruraux qui s’investissent activement dans des politiques de gestion des déchets. En effet, le caractère rural est souvent étroitement relié avec l’absence d’intercommunalités fortes ou de grandes agglomérations, ce qui peut inciter le Département à coordonner les initiatives et les efforts car il se situe alors à la bonne échelle politique et géographique. En outre, les Départements estiment qu’il est dans leur rôle de soutenir financièrement et parfois techniquement les communes. En revanche, si l’intercommunalité est bien présente ou s’il existe un syndicat départemental, le conseil général n’a alors pas lieu de se saisir d’une question qui est traitée par une autre collectivité. Toutefois, il existe aussi des Départements fortement impliqués, bien qu’ils soient urbains et qu’ils comprennent de grosses agglomérations. Ceci signifie que la politique « déchets » menés par les Départements est certes fruit de la situation locale mais est aussi fortement dépendante d’une volonté politique du Département de s’y investir.

Au niveau financier, les Départements financent la mise en œuvre du plan. Ils adaptent donc leurs financements à la situation, aux besoins locaux et aux objectifs fixés. Les Conseils Généraux s’investissent surtout dans le soutien des collectivités, notamment des petites possédant de faibles moyens financiers.

(b) Une transition d’un rôle de financeur passif vers un rôle plus actif, plus incitatif

Les Départements consacrent 91 % de leurs dépenses liées aux déchets à l’investissement dont la quasi totalité sous forme de subventions aux communes et Etablissements Publics de Coopération Intercommunale (EPCI), tandis que 9 % des dépenses concernent le fonctionnement (dépenses directes, communication et participation à un syndicat mixte). L’apport financier des Départements aux projets est loin d’être négligeable puisqu’il représente entre 20 et 30 % de l’investissement, ce qui en fait un facteur déterminant (Amorce 2002)

Toutefois, ce rôle de financeur est complété de plus en plus par des initiatives des Départements dans des actions d’accompagnement de la politique des déchets, notamment en ce qui concerne l’information des communes et EPCI sur les objectifs du Plan et l’information des usagers, utile pour la réussite des programmes de collecte sélective notamment.

Le Département semble un échelon approprié en ce qui concerne le suivi du plan car il peut rendre possible une appropriation plus grande par les élus locaux de la réflexion sur la gestion des déchets.

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(c) Le cas des syndicats mixtes départementaux : une solution sur la base de partenariat se développe

Un syndicat mixte regroupant le Département et les EPCI chargés de la compétence déchets a été créé dans un département sur cinq afin, dans un premier temps, de réaliser des études, puis de passer à une fonction de réalisation. Ce type d’implication est apprécié par les Départements car elle leur permet d’appliquer le Plan tout en respectant la compétence des EPCI, sans posséder une fonction de réalisation directe des opérations et des investissements.

(d) La coordination des financements via une contractualisation

D’après l’enquête réalisée par Amorce, cette création de syndicat mixte départemental permet en outre de fixer un cadre cohérent pour les participations financières des Départements (réorganisation de l’intercommunalité suite à la loi de 1999). Quatre Départements sur cinq environ souhaitent mettre en place une politique de soutien financier aux communes et aux EPCI. C’est ainsi que, pour coordonner leur politique avec celle de l’ADEME, les Départements sont amenés à passer une convention avec celle-ci (c’est en tout cas ce qui s’est passé quasiment partout) sans pour autant que chacun des deux contractants ne renie les priorités qui lui sont propres.

2.2.4 Commentaires

Dans cette synthèse rapide, on peut se rendre compte que la question de l’échelon pertinent en ce qui concerne la gestion des déchets est une question qui est pour l’instant résolue car la loi a tranché en faveur de l’échelon départemental. Ainsi le Département se retrouve en position de chef de file pour ce qui concerne la planification tandis que les collectivités locales et leurs groupements intercommunaux demeurent l’échelon de gestion. On voit donc que la solution retenue pour atteindre une gestion globale des déchets est de séparer l’échelon de planification de celui de gestion ; la réflexion et la prévision s’effectuant à une échelle plus globale tandis que la gestion reste près du terrain. C’est le même constat que ce qu’il nous semble pertinent de faire dans le cas de l’eau. On peut toutefois déjà remarquer qu’un certain nombre d’acteurs ont un rôle à jouer dans la gestion des déchets. La question qui se pose est alors de savoir vers quel type de gouvernance le secteur des déchets va évoluer afin qu’elle soit capable de gérer la complexité du secteur tout en préservant la proximité avec l’usager-citoyen ? Un des intérêts du plan est qu’il permet notamment de cadrer quelque peu les relations entre acteurs. On peut aussi d’ores et déjà

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constater que c’est la combinaison de plusieurs acteurs selon des structurations variées avec divers outils qui permet d’introduire de l’intégration. Enfin, un dernier point qu’il nous semble important de relever ici concerne l’importance de la contractualisation, pilier et outil classique des relations entre acteurs dans le domaine des déchets également.

2.3. Un outil pour la prescription des savoirs : le