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6.1 Urbanisme et mobilité dans la planification montréalaise

6.1.2 Niveau du redéploiement du CUSM : conception limitée

Le statut de secteur d’emplois institutionnels a été attribué au site Glen en 2004, mais il a toutefois été reconnu à la ville de Montréal un manque de leadership dans la planification de la zone : très peu d’éléments programmatifs ont découlés du plan d’urbanisme — à l’exception d’un engagement à l’accompagnement du projet ainsi qu’une modification du règlement ad hoc. Cette dernière a permis l’accueil des activités de l’hôpital, grâce à un coefficient d’utilisation du sol plus important que dans les zones résidentielles environnantes — 3,5 au lieu de 2. Ainsi, dans le cadre de son projet de redéploiement, le CUSM n’a en fait été que peu contraint par la réglementation supérieure : l’OCPM relevait d’ailleurs en 2005 déjà le fait que « le CUSM et la Ville auraient avantage à compléter de façon concertée le processus de planification conduisant à une meilleure intégration du projet hospitalier dans son environnement » (OCPM 2005, p.19).

Des possibilités d’action restreintes

Dans le cadre de la préparation du projet, une large série d’étude d’impact a été commanditée par l’hôpital et présentée lors les deux procédures de consultation publique en 2005 et 2013.

Ce sont avant tout les enjeux liés à l’accès au site (CUSM, 2008 ; CIMA+, 2011) ainsi que l’impact du projet sur le contexte socio-économique (Daniel Arbourd & co., 2005) qui ont été traités7. À ce stade de la planification et comme a pu le relever dans ses conclusions l’OCPM (2005), l’enjeu central pour le porteur du projet est sa bonne intégration dans le secteur dans lequel il est parachuté : beaucoup de documents l’ont mis en lumière, cette intégration doit entre autres passer par un désenclavement du site, dont les barrières physiques empêchent son accès facilité (Dessau-Soprin, 2007 ; CIMA+, 2011). Ce point est important

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Notions-clés Objectifs Mesures proposées

Accès - Offrir des accès rapides et sécuritaires vers l’hôpital et ayant peu d’impacts sur le réseau routier municipal

- Élargissement du boulevards Décarie et aménagement de deux accès routiers au site - Réaménagement des intersections

Maisonneuve/Décarie, St-Jacques/Décarie, Upper Lachine/Girouard

- Aménagement d’une route pour urgence au nord du site Glen, d’une intersection sur la rue St-Jacques avec un nouvel accès au site

- Construction de deux nouvelles bretelles autoroutières

-Reconstruction du viaduc du CP

Prolongement du tunnel piétonnier vers la station Vendôme

- Aménagement d’un passage sous-voie à l’axe Claremont

- Prolongement de la piste cyclable du côté Nord des voies de chemin de fer

Déplacements - Assurer la desserte adéquate du site Glen - Assurer un maximum de fluidité et faciliter

la circulation des déplacements vers et au dé-part du CUSM

- Améliorer les liens de transports avec les secteurs d’emplois

Inégalité

d’accès - Offrir un accès qui tienne compte des besoins de tous les citoyens

Il est donc ici avant tout question de déplacements et de fluidité, que la planification projectuelle tente de renforcer. Concentrer la focale sur la gestion des flux, avant tout routiers, s’explique par les moyens limités de l’hôpital, ainsi que des recommandations leur ayant été formulées par l’office de consultation (OCPM, 2005). Au vu des objectifs que s’est fixés le CUSM, ceux-ci restent éloignés de la question de la mobilité. Toutefois, le dernier objectif indiqué — relatif aux inégalités d’accès — revêt une dimension intégratrice plus forte, sans pour autant détailler toute son ambition qui pourra être éclaircie lors de l’étude des mesures proposées.

Déséquilibre dans les recommandations

Parmi les multiples études menées dans la phase du projet, un point doit être souligné : la place très importante prise par la question des transports individuels au détriment des autres. Ce déséquilibre s’explique toutefois par la situation très enclavée du site, dont la question de l’accès a focalisé l’attention du public, des riverains participant à la procédure de consultation de l’OCPM (2005) : la crainte générale de voir une forte augmentation des nuisances dans le quartier si le trafic n’était pas géré de façon appropriée a poussé l’hôpital à formaliser un nombre important de mesures touchant à l’accès routier au site8, au détriment des modes doux, comme le montre la synthèse des actions proposées par le plan — voir annexe 11 pour le détail.

Toutes les mesures prévues par le plan s’attachent à améliorer l’accès au site, c’est-à-dire à diminuer le niveau de contraintes permettant de le rejoindre. L’objectif traitant de la réduction des inégalités n’est que très mal traduit en mesure concrète, si ce n’est implicitement, en postulant que toute mesure améliorant l’accès au site le fait équitablement pour chacun. Il y a à nouveau une rupture entre la volonté exprimée de traiter l’enjeu des inégalités et les actions proposées, qui ne se donnent une fois de plus pas les moyens de réaliser cet objectif.

8 Toutes les mesures sont localisées dans la carte de synthèse du plan d’accessibilité à l’annexe 4

S’il n’est guère surprenant que le plan d’accessibilité se concentre sur l’accès au site, le déséquilibre entre les propositions mérite toutefois d’être souligné : l’accès routier/

autoroutier concentre la majeure partie des mesures — 8 des 12 interventions formulées par le plan — comparativement à la gestion piétonne, cycliste et la question des transports publics « qui sont tributaires des solutions automobiles » (OCPM, 2005, p.19). De manière générale, les questions relatives à la mobilité collective ne sont pas traitées par le plan d’accessibilité et les diverses études d’impacts sur la circulation. Ces documents renvoient systématiquement au travail effectué sur le PGD — qui sera développé ensuite.

C’est en fait la localisation du site Glen ainsi que son excellente desserte en transports collectifs qui justifient, aux yeux du porteur du projet, une préoccupation moindre vis-à-vis de ces questions, l’offre était jugée « suffisante en matière de réseaux, d’infrastructures et de services » (CIMA+, 2011, p.49) et permet d’espérer « un report modal important en faveur des transports collectifs, de l’ordre de 12 % concernant les employé.e.s » (p.13).

Ceci, sans réelles mesures d’accompagnement, à l’exception du prolongement du tunnel reliant l’hôpital à la station Vendôme — la construction d’un second tunnel, à l’Est, ne fait d’ailleurs plus partie aujourd’hui des plans du CUSM (Cameron, 2016). C’est en fait l’impact de la première phase de (non-)planification du redéploiement du CUSM et le choix de localiser l’hôpital sur le site Glen qui permet d’avoir de telles attentes de report modal, tout en justifiant une certaine inaction en vue de le renforcer. Le constat de l’excellent accès en transports en commun découle, comme nous l’avions vu, de cette « forme de TOD » qui a été suivie au travers de la relocalisation de l’hôpital.

En concentrant ses propositions d’action sur la gestion des flux et l’accès au site, l’hôpital, dans les documents qu’il a fournis pour accompagner l’implantation du projet — comme le plan d’accessibilité —, semble se baser sur une conception purement sectorisée de la mobilité, pour ne pas dire inexistante, caractérisée par un rétrécissement de la focale d’action. Ce sont avant tout ses moyens d’action limités qui expliquent une telle position et qui orientent son action vers une amélioration de l’hospitalité territoriale — c’est-à-dire une amélioration du potentiel de vitesse du système de transport (Kaufmann, 2014). Bien que cette optimisation participe à l’amélioration globale du champ des possibles et ainsi à la mobilité de chacun, il risque également de renforcer l’injonction qui en est faite. En effet, comme cela avait été relevé dans le cadrage théorique, celle-ci se manifeste lorsque le capital mobile individuel ne permet plus de faire face à l’hospitalité territoriale. De plus, en concentrant son action sur les modes individuels, elle ne permet pas l’amélioration de la mobilité de tous, tout en participant au renforcement de l’utilisation d’un mode dont on cherche à progressivement se séparer — bloquant dans cette situation les individus qui en dépendent. Cette série de propositions doit donc absolument être complétée par des mesures d’accompagnement tenant compte du capital mobile de chacun, comme c’est le cas pour le plan de gestion des déplacements.

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6.1.3 Niveau du redéploiement du CUSM : le plan