4.2 Cas des CL toro¨ıdales
4.2.4 Mod`eles twist´es
Afin de pouvoir ´etudier les mod`eles twist´es, discutons plus dans le d´etail la topologie des amas non triviaux sur le tore. Cela nous servira ´egalement au chapitre 6, lorsque nous ´etudierons le mod`ele de Potts avec des CL toro¨ıdales. Consid´erons d’abord le cas non d´eg´en´er´e, correspon- dant `a un nombre de boucles non triviales n 6= 0. Chacune des fronti`eres s´eparant deux amas non triviaux est une boucle non triviale et auto´evitante. En orientant cette boucle de fa¸con arbitraire, on peut la caract´eriser par une paire d’entiers (i1, i2), o`u i1 et i2 indiquent respec-
tivement combien de fois elle traverse les directions principales horizontale et verticale du tore dans le sens positif. Nous utilisons deux r´esultats essentiels [29] :
84 CHAPITRE 4. MOD `ELES RSOS
1. |i1| et |i2| sont copremiers, et donc en particulier ont des parit´es diff´erentes.
2. les orientations relatives des boucles peuvent ˆetre choisies de mani`ere `a ce que toutes les boucles aient le mˆeme (i1, i2). Cela s’explique par le fait que des boucles distinctes d’une
configuration donn´ee ne peuvent se couper, et donc ont la mˆeme topologie. De plus, par un choix global d’orientation, on peut supposer que i1 ≥ 0. Dans la suite, on supposera
´egalement que i2 ≥ 0, car on peut changer le signe de i2 en consid´erant une image par
un miroir de la configuration de d´epart, cette transformation laissant son poids inchang´e dans les deux mod`eles.
Par extension, on d´efinit la classe d’homotopie des amas non triviaux par la paire (i1, i2)
caract´erisant les boucles. Par exemple, les amas percolant seulement horizontalement corres- pondent `a (1, 0), et ceux percolant seulement verticalement `a (0, 1). Il y a des amas d’homotopie plus complexe, qui ont `a la fois i1 et i2 non nuls. Notons d’ailleurs que si l’un des indices est
sup´erieur `a deux, alors l’autre est forc´ement non nul. Dans le cas d´eg´en´er´e, toutes les boucles sont triviales, et donc la classe d’homotopie de l’amas non trivial est (0, 0).
Nous allons maintenant twister le mod`ele RSOS. Cela se fait en changeant les valeurs des hauteurs par travers´ee d’une ligne de coupure horizontale et d´eformable localement (sa classe d’homotopie est donc (1, 0)). Le mod`ele ´etant invariant sous h → p − h, on d´efinit le twist de cette fa¸con (on se limite ici au cas o`u le twist est une sym´etrie du mod`ele, mais ce n’est pas obligatoire [85]), et uniquement pour p pair, car les hauteurs directes et duales doivent avoir des parit´es fix´ees et oppos´ees afin de satisfaire la contrainte RSOS. Ce twist est appel´e Z2 car en
traversant deux fois la ligne de coupure, on revient `a la valeur initiale de la hauteur : on exploite la sym´etrie sous Z2 du diagramme de Dynkin Ap−1. Ces nouvelles CL transverses changent les
poids des diagrammes de Pasquier. Les boucles triviales ont toujours un poids de √Q, car on peut d´eformer la ligne de coupure de mani`ere `a les ´eviter. Seul le poids wc des cycles est modifi´e.
Consid´erons d’abord le cas non d´eg´en´er´e n 6= 0. Si un amas non trivial a i2 impair, alors
sa hauteur est fix´ee par h = p − h, et vaut donc p2. Mais comme n ≥ 2, il y a au moins `a la fois
un amas direct et un amas dual percolant, et comme ils ne peuvent pas avoir la mˆeme valeur de hauteur `a cause de la contrainte RSOS. Par cons´equent, les diagrammes non d´eg´en´er´es avec i2 impair ont un poids nul avec les CL Z2 twist´ees. Supposons maintenant que i2 est pair. Le
poids du cycle est donn´e par [21] : wZ2
c = Tr [(Gp−1)nJp−1] , (4.30)
o`u la matrice Jp−1, de dimension p − 1, est d´efinie par :
Jp−1= 0 · · · · · · 0 1 .. . 1 0 .. . . .. ... 0 1 ... 1 0 · · · · · · 0 . (4.31)
Jp−1 impl´emente le saut de h → p − h dˆu `a la ligne de coupure. Les matrices Gp−1 et Jp−1 commutent, comme on peut le v´erifier directement, donc la position de Jp−1dans l’Eq. (4.30) n’a pas d’importance. Cela est reli´e au fait que la ligne de coupure peut ˆetre d´eform´ee localement. Pour ´evaluer wZ2
c , on utilise les valeurs propres de Gp−1 et Jp−1. Jp−1 commutant avec Gp−1,
4.2. CAS DES CL TORO¨IDALES 85
|vk > pour k impair, resp. pair, sont sym´etriques, resp. antisym´etriques, sous la transformation
h → p − h, les valeurs propres de Jp−1 valent (−1)k+1. wZc2 a donc pour expression :
wZ2 c = p−1 X k=1 (−1)k+1 2 cos kπ p n pour n 6= 0 . (4.32)
Dans le cas d´eg´en´er´e, wZ2
c = 1, car la valeur des hauteurs situ´ees sur l’amas non trivial est fix´ee
` a p2.
Comme pour le mod`ele non twist´e, on peut consid´erer des secteurs de parit´e donn´ee pour les amas directs et duaux. Le poids des boucles triviales est alors inchang´e, tandis que les poids des cycles non d´eg´en´er´es sont donn´es par :
weven,Z2
c = wcodd,Z2 =
wZ2
c
2 (4.33)
pour des raisons analogues au cas du mod`ele non twist´e. Dans le cas d´eg´en´er´e, n = 0, en d´enombrant les valeurs possibles des hauteurs, on trouve pour un amas non trivial direct :
weven,Z2 c = p 2 mod 2, w odd,Z2 c = 1 − p 2 mod 2 . (4.34)
Pour un amas dual, il faut ´echanger les exposants even et odd. En comparant les Eq. (4.21) et (4.34), on d´emontre la relation suivante entre les mod`eles twist´e et non twist´e :
ZRSOSeven (x) − ZRSOSodd (x) = (−1)p2+1
Zeven,Z2 RSOS (x) − Z odd,Z2 RSOS (x) pour p pair . (4.35)
On peut ´egalement twister le mod`ele de Potts. Consid´erons d’abord les cas o`u Q est entier (et nombre de Beraha) afin de pouvoir utiliser la repr´esentation en spins. Pour p = 4, i.e. pour le mod`ele d’Ising, on d´efinit ZZ2
Ising en introduisant une ligne de coupure horizontale au del`a de
laquelle l’´etat des spins est chang´e, ce qui est un twist de type Z2. Pour p = 6, i.e. pour Q = 3,
on a deux fa¸cons ind´ependantes de twister le mod`ele, car il y a trois ´etats de spin possibles. ZZ2
Q=3 correspond `a ´echanger les ´etats 1 et 2 de spin par travers´ee de la ligne de coupure, tandis
que l’´etat 3 est invariant. ZZ3
Q=3 correspond `a permuter cycliquement les trois ´etats de spin : il
s’agit d’un twist Z3 car apr`es trois travers´ees de la ligne de coupure on revient `a l’´etat de d´epart.
Pour g´en´eraliser les d´efinitions de ZZ2
Q=3et ZQ=3Z3 aux valeurs de Q non enti`eres, on raisonne dans
la repr´esentation en amas. Dans ZZ2
Q=3, les amas directs non triviaux avec i2 impair et les cycles
d´eg´en´er´es avec un amas direct percolant ont un poids 1, tandis que les autres amas directs ont un poids Q (on rappelle que dans la repr´esentation en amas du mod`ele de Potts, seuls les amas directsont des poids non triviaux). On d´efinit ZQ0=1
Potts de cette fa¸con pour n’importe quelle valeur
de Q. De mˆeme, ZQ0=0
Potts , extension de ZQ=3Z3 , correspond `a donner un poids nul aux amas directs
non triviaux avec i2 copremier avec 3 et aux cycles d´eg´en´er´es avec un amas direct percolant, et
un poids Q aux autres amas directs. ZQ0=1
Potts v´erifie la relation de dualit´e suivante :
ZQ0=1
Potts(x) = xBZ Q0=1
Potts(x−1) , (4.36)
car le poids d’un cycle d´eg´en´er´e est toujours 1, que l’amas soit direct ou dual, ce qui explique pourquoi l’Eq. (4.36) est maintenant vraie, tandis qu’elle ´etait fausse pour le mod`ele non twist´e
86 CHAPITRE 4. MOD `ELES RSOS
`
a cause des diagrammes de Pasquier d´eg´en´er´es. Pour ZQ0=0
Potts , on a une relation de dualit´e de la
forme : ZPotts(x) − xBZPotts(x−1) = −(Q − 1) ZQ0=0 Potts (x) − xBZ Q0=0 Potts(x−1) pour p pair . (4.37) En effet, les deux membres de l’´egalit´e sont non nuls uniquement `a cause des diagrammes de Pasquier d´eg´en´er´es, et donc en comparant les poids des cycles dans les mod`eles twist´e et non twist´e on obtient l’Eq. (4.37). En combinant cette ´equation avec l’Eq. (4.27), on obtient une relation entre ce mod`ele twist´e et le mod`ele RSOS :
ZRSOSeven (x) − xBZRSOSodd (x) = −ZQ0=0
Potts(x) − xBZ Q0=0
Potts (x−1)
pour p pair . (4.38) Notons que toutes ces relations sont correctes uniquement grˆace au poids Q0 choisi pour les
cycles d´eg´en´er´es contenant un amas direct. Par cons´equent, un autre mod`ele avec la mˆeme valeur de Q0 mais d’autres poids pour les autres amas v´erifierait ces ´equations. Pour Q = 3, on
a une relation suppl´ementaire entre les deux mod`eles, qui peut se d´emontrer en consid´erant les poids de tous les types possibles de diagrammes de Pasquier et l’expression explicite des valeurs propres de G5 :
ZRSOSeven (x) + Zeven,Z2
RSOS (x) = ZQ=3(x) + ZQ=3Z2 (x) . (4.39)