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Modélisation numérique du changement de structure du milieu de propagation

expériences de laboratoire

3.3 Analyse de la variation de la cohérence et/ou de la phase de signaux synthétiques et expérimentaux

3.3.3 Modélisation numérique du changement de structure du milieu de propagation

Afin de compléter cette analyse de sensibilité, considérons à nouveau le modèle numérique proposé dans la section 2.4. Nous rappelons que celui-ci était dédié à étudier la sensibilité des retards de temps de parcours vis-à-vis de la déformation du système. Le milieu était pour cela déformé à l’aide de Code Aster, en déplaçant « mécaniquement » une des inclusions de l’échan-tillon. Nous souhaitons ici évaluer la sensibilité de la perte de cohérence accumulée par le champ d’ondes diffus, à un changement de la structure du milieu de propagation.

Comparaison de deux approches conceptuelles : perturbation « géométrique » et perturbation « mécanique » du milieu de propagation

Nous commençons par rappeler les principaux éléments caractéristiques de l’approche déve-loppée dans la section 2.4. Nous utilisions un ensemble de 75 récepteurs régulièrement distribués sur l’ensemble de la face de l’échantillon opposée à la source, celle-ci étant de fréquence centrale

f0= 400 kHz. La durée totale des signaux produits par Specfem2D est de 3.0 · 10−4s. Cet ensemble plus dense de capteurs permettait d’étudier la variabilité des retards de temps de parcours le long de la face latérale du milieu. Les formes d’onde étaient comparées de manière itérative au moyen de la méthode discrète, pour laquelle les signaux sont discrétisés en fenêtres d’une durée de 6.5 µs avec un recouvrement de 80%. La condition de chargement appliquée au moyen de Code Aster conduisait à déplacer l’une des inclusions circulaires de l’échantillon. Cette approche permettait notamment de produire un champ de déformation dont la structure était relativement hétérogène à l’échelle de l’échantillon (voir Fig. 3.20 (b)).

En employant les mêmes paramètres dans la modélisation de la propagation des ondes et dans la méthode de CWI, nous complétons cette analyse numérique en étudiant ici le cas où nous im-primons une perturbation « géométrique » au même milieu de propagation. Le milieu de « réfé-rence » demeure identique à celui considéré précédemment et une perturbation lui est toujours appliquée localement, en imposant le déplacement de la même inclusion circulaire. En revanche, différemment de ce qui a été proposé précédemment, nous imposons ce déplacement de manière à potentiellement susciter une forte variation de la structure de la grille de maillage (Fig. 3.20 (a)). Le milieu « perturbé » est ainsi obtenu en discrétisant une seconde fois le maillage, après avoir modifié la géométrie de celui-ci et après avoir déplacé le groupe de nœuds (ou « entité physique ») définissant le bord de l’inclusion circulaire. Dans la section 3.3.3, nous tenterons de décrire l’im-pact de ce type de perturbation sur la structure du milieu de propagation, ou plus précisément, sur la structure de la grille de maillage utilisée pour simuler la propagation du champ d’onde.

FIGURE3.20 – Principe des expériences où un déplacement de 75 µm est appliqué à la limite de l’une des in-clusions circulaires. Nous utilisons pour cela deux stratégies distinctes. (a) Le milieu « perturbé » est obtenu en décalant géométriquement la position du diffuseur circulaire de 75 µm avant que le maillage ne soit à nouveau discrétisé. (b) Le milieu « perturbé » est obtenu en déformant l’ensemble de la grille de maillage au moyen du code de déformation.

Nous bénéficions donc de la flexibilité du formalisme numérique proposé, afin de proposer une approche permettant de distinguer, pour une perturbation donnée du milieu de propagation, deux évolutions distinctes de la structure de celui-ci.

— La forme du système dans son état de « référence » est identique dans les deux situations modélisées.

— Nous appliquons la même condition de chargement dans les deux approches.

— Les moyens employés pour passer de l’un à l’autre de ces états de chargement diffèrent d’un modèle à l’autre : d’une part, nous déformons le maillage de manière élastique, d’autre part, nous recomposons intégralement la structure de la grille de maillage.

Ainsi, on peut s’attendre à ce que les processus mobilisés, leur impact sur la structure du maillage et in fine, sur les mesures de CWI, diffèrent significativement d’une approche à l’autre.

Évolution de la perte de cohérence DC

Il est particulièrement intéressant d’étudier l’effet d’une telle perturbation sur la perte de co-hérence mesurée entre les signaux, et de comparer son impact sur les retards de temps de parcours à celui observé lorsque nous suscitions la déformation plus ou moins homogène du milieu de pro-pagation.

En comparant la forme d’onde de « référence » à celle enregistrée après que le milieu ait été perturbé, la figure 3.21 montre qu’une perte de cohérence est à nouveau accumulée progressive-ment dans le signal, au fur et à mesure que le champ d’ondes propagé échantillonne le milieu. Dans la partie (a), nous nous focalisons sur l’analyse des signaux enregistrés en un unique capteur faisant face à la source. D’autre part, nous analysons en (b) la variation temporelle d’une moyenne spatiale : le résultat affiché à un temps t donné est obtenu en moyennant les résultats provenant de l’analyse des enregistrements des 75 capteurs du réseau. De manière similaire à ce qui a été observé pour le chargement uni-axial de l’échantillon de Duraluminium, nous montrons que ces mesures spatialisées évoluent quasi linéairement avec le temps. En revanche, une représentation plus locale de cette fonction du temps (en (a)) conduit à observer des fluctuations plus impor-tantes, avec des sensibilités locales qui n’apparaissent pas dans la sous-figure (b). Ces mesures montrent que la partie tardive des formes d’ondes est particulièrement marquée par la perturba-tion appliquée au système.

De la même manière que pour les retards de temps de parcours (section 2.4), nous montrons que la perte de cohérence mesurée entre les signaux nous renseigne sur l’évolution locale du mi-lieu. La figure 3.22 cartographie la perte de cohérence en faisant varier à la fois la position du capteur au sein du réseau (axe des ordonnées) et le temps dans le signal (axe des abscisses). L’am-plitude de la perte de cohérence est représentée par la palette de couleurs. Les mesures montrent notamment que l’amplitude de la perte de cohérence est forte à proximité de la zone où nous modifions la géométrie du maillage.

FIGURE3.21 – La perte de cohérence DC est mesurée en fonction du temps dans le signal en comparant la forme d’onde de référence à celle enregistrée lorsque l’inclusion circulaire est déplacée de 75 µm. Les mesures sont obtenues en analysant les formes d’ondes enregistrées au capteur faisant face à la source (à gauche) ou bien en moyennant les mesures obtenues à partir des enregistrements des 75 capteurs du réseau (à droite).

FIGURE3.22 – Représentation spatiale et temporelle de la perte de cohérence DC mesurée par corrélation croisée de fenêtres de discrétisation d’une durée de 6.5µs, en comparant la forme d’onde de référence à celle enregistrée lorsqu’un déplacement de 75 µm est appliqué au bord d’une inclusion circulaire. La perte de cohérence DC, dont l’amplitude est représentée par la palette de couleurs, varie en fonction du temps dans le signal (axe des abscisses) et en fonction de la position du capteur sur le réseau (axe des ordonnées).

Évolution des retards de temps de parcours dt

Dans les mêmes conditions que dans le paragraphe précédent, la figure 3.23 cartographie les retards de temps de parcours d t à la fois temporellement (axe des abscisses) et spatialement (axe des ordonnées). L’amplitude du retard, c’est-à-dire ici le nombre de pas de temps Ts, est quantifiée par la palette de couleurs.

Ces mesures diffèrent significativement de celles analysées dans la section 2.4, lorsque nous induisions la déformation du milieu de propagation en déplaçant la même hétérogénéité de ma-nière mécanique. Nous rappelons que les mesures relatives à cette expérience sont présentées dans la figure 2.26 et que le principe de cette approche est illustré dans la figure 3.20 (b). Nous notons ainsi une diminution globale de l’amplitude des délais d t, ainsi qu’une modification de la répartition spatiale de la grandeur. Nous mettons en évidence une baisse de 40% de l’amplitude des retards de temps de parcours, c’est-à-dire une diminution par rapport au cas de la perturba-tion mécanique. Cette différence d’amplitude est observée en moyennant les délais calculés en chaque fenêtre de discrétisation. À l’inverse des mesures de perte de cohérence, qui permettent de localiser la zone où nous appliquons la perturbation (voir Fig. 2.26), nous n’observons pas de structure cohérente dans les variations spatiales des retards de temps de parcours mesurés dans le cas de la perturbation géométrique.

Observation et comparaison des variabilités spatiales des deux grandeurs physiques

Les variations spatiales et temporelles présentées dans les paragraphes précédents montrent qu’il est pertinent de spatialiser les mesures de manière similaire à ce qui a été proposé précé-demment, par exemple dans la section 3.3.2 ou 2.4. À nouveau, nous choisissons de moyenner la perte de cohérence mesurée en chaque fenêtre de discrétisation, et normalisons la fonction de la position obtenue (Fig. 3.24). Nous distinguons un impact significatif de la perturbation appliquée sur la perte de cohérence.

FIGURE3.23 – Carte des retards de temps de parcours mesurés par corrélation croisée de fenêtres de dis-crétisation, en comparant la forme d’onde de référence à celle enregistrée lorsqu’un déplacement de 75 µm est appliqué au bord de l’inclusion circulaire. Les délais, dont l’amplitude est représentée par la palette de couleurs (nombre de pas de temps Ts = 0.1 · 10−9), sont représentés en fonction du temps dans le signal (axe des abscisses) et en fonction de la position du capteur le long du réseau (axe des ordonnées).

La figure 3.24 confirme les observations effectuées dans la section précédente (chargement uni-axial de l’échantillon de Duraluminium, voir Fig. 3.18 p.ex.).

— Nous notons en premier lieu qu’une perte de cohérence est observée entre les signaux si-multanément à des retards dans le temps de parcours des ondes.

— Ces grandeurs physiques sont empreintes de l’évolution locale du milieu de propagation de manière à ce que l’étude de leur variabilité spatiale, au moyen d’un réseau dense de cap-teurs, nous renseigne sur l’évolution du milieu à cette même échelle.

— L’analyse de leur variabilité spatiale, le long du réseau de capteurs, montre que chacune d’entre elles est sensible à des processus distincts.

— L’application d’une perturbation dite géométrique conduit à observer un signal de perte de cohérence significatif, dont la variabilité spatiale nous permet de localiser la zone où nous modifions la géométrie du maillage. Dans ce cas, nous mesurons des retards de temps de parcours plus faibles que lorsque nous appliquons la même perturbation mais de manière

mécanique.

— De plus, nous rappelons que la perturbation mécanique de ce même milieu favorise l’appa-rition de délais dans la partie tardive des formes d’onde enregistrées, et que l’analyse de leur variabilité spatiale nous a permis d’étudier la structure du champ de déformation produit.

Quels sont les processus à l’origine de l’observation d’un retards de temps de parcours dt ou d’une perte de cohérence DC entre les signaux?

Ayant constaté que les deux types de perturbations appliquées conduisaient à observer des comportements distincts dans les mesures de CWI, nous cherchons à identifier les mécanismes qui sont potentiellement mobilisés de manière préférentielle dans l’une ou l’autre des situations

FIGURE3.24 – Variation, en fonction de la position du récepteur, de la moyenne temporelle de la perte de cohérence DC mesurée le long du signal.

traitées, c’est-à-dire lorsque nous appliquons une perturbation géométrique ou mécanique au mi-lieu. Nous voulons donc identifier les changements apparaissant dans la grille de maillage dans chacun des cas cités.

Nous comparons pour cela les grilles de maillage produites à proximité de l’inclusion circulaire déplacée. Un zoom à proximité de cette hétérogénéité (dont le bord est souligné par un trait épais) est présenté dans la figure 3.25 pour les deux cas traités : la perturbation qualifiée de géométrique (figure de droite) et la perturbation mécanique (figure de gauche). Dans chacune des images, nous superposons le maillage initial (en nuances de rouge) à celui obtenu après que l’inclusion ait été déplacée (en nuances de bleu).

La figure 3.25 permet en premier lieu de visualiser précisément la manière donc est maillé l’interface entre les trous et le milieu environnant. La figure montre en particulier que nous pré-servons la continuité du maillage : ceci permet de modéliser la propagation des ondes à travers l’ensemble du milieu, y compris les trous.

La figure 3.25 permet ensuite de visualiser l’impact des deux types de perturbations décrites sur le maillage. Nous proposons, au travers de l’analyse précédente, que la perturbation

géomé-trique favorise une variation de la cohérence des signaux, et conduit à l’accumulation de retards

de temps de parcours dans la partie tardive des signaux de manière moins importante que la per-turbation mécanique. Les maillages présentés à droite suggèrent en effet que ce type de pertur-bation favorise la modification de la structure du milieu de propagation. Le nombre total d’élé-ments du maillage diffère : le maillage initial comprend 235 482 éléd’élé-ments et celui correspondant au milieu dans son état perturbé comprend 235 572 éléments. La figure de droite suggère que le maillage est modifié de manière désordonnée à proximité de la zone où la perturbation est ap-pliquée. Nous notons que l’agencement des éléments du maillage varie fortement. La génération d’une seconde grille de maillage et la réorganisation désordonnée des nœuds conduit donc à un

FIGURE3.25 – Zoom dans la grille du maillage à proximité de l’inclusion circulaire déplacée, dont le bord est marqué par un trait épais. Le maillage de initial (en nuances de rouge) est superposé à celui obtenu après que l’inclusion ait été déplacée (en nuances de bleu). Gauche : cas du déplacement « mécanique » de l’inclusion. Droite : cas du déplacement « géométrique » de l’inclusion.

changement local de la structure du milieu de propagation. Un tel processus peut reproduire de manière conceptuelle la perturbation causée par un endommagement irréversible du milieu lié, par exemple, à sa micro-fissuration.

En revanche, lorsque le milieu est déformé de manière mécanique (cas illustré à gauche), nous mobilisons de tels processus de manière moins importante. Dans ce cas, la structure est défor-mée élastiquement au moyen de Code Aster : le maillage est modifié uniformément, sans que le nombre total d’éléments soit affecté. Notons toutefois que la perturbation mécanique induit un réarrangement de certains éléments du maillage.

Ainsi, les processus décrits ne sont pas exclusifs à l’une ou l’autre des deux situations étu-diées : dans les deux cas, nous mesurons des retards de temps de parcours et une perte de cohé-rence entre les signaux. En revanche, chacune des perturbations modélisées permet de mobiliser

préférentiellement la déformation cohérente et uniforme de la grille de maillage, ou bien un

chan-gement dans la structure de la grille de maillage.

3.3.4 Conclusions

En appliquant une méthode discrète de CWI aux signaux enregistrés au cours de la déforma-tion du milieu, nous avons observé qu’une perte de cohérence est progressivement accumulée dans la partie tardive des signaux, en plus d’un retard dans le temps de parcours des ondes. L’ana-lyse des enregistrements délivrés par un réseau dense de capteurs suggère que la mesure de cha-cune de ces grandeurs résulte de mécanismes distincts. À partir de deux approches distinctes et complémentaires, nous cherchons donc à identifier, pour une perturbation donnée du milieu de propagation, quels sont les changements causant l’observation de chacune de ces grandeurs phy-siques.

— Nous comparons les mesures d’expériences de laboratoire et de simulations, dans le cas de la déformation élastique d’un échantillon fortement diffusif de Duraluminium.

— Nous confrontons les mesures issues de deux modèles numériques qui permettent, pour une même perturbation du milieu de propagation, de solliciter des mécanismes distincts au sein de la grille de maillage utilisée dans les codes de modélisation.

À l’aide des deux approches, nous constatons que la perturbation du milieu de propagation peut favoriser localement la mesure d’une perte de cohérence ou bien d’un retard dans le temps de parcours entre les signaux, en fonction des mécanismes sollicités par la perturbation.

Nos mesures suggèrent que les parties tardives des signaux comparés sont sujettes à une perte de cohérence lorsque le champ d’ondes diffus échantillonne une zone dans laquelle survient un

changement de structure. Les retards de temps de parcours sont sensibles à la déformation élas-tique du milieu de propagation. Lorsque la perturbation est localisée (p. ex., lorsque nous dé-plaçons une des hétérogénéités composant le milieu) ou bien lorsqu’elle est plus homogène à l’échelle de l’échantillon (p. ex., lorsque nous imprimons le déplacement de sa face supérieure), nous observons en particulier une relation entre la variation spatiale des retards de temps de par-cours et celle de la déformation du milieu.

Finalement, ces deux approches ainsi que les résultats de la section 2.4, montrent que l’ana-lyse de la variabilité spatiale de ces mesures de CWI nous informe sur la perturbation appliquée au système. Pour l’une comme pour l’autre de ces grandeurs physiques, nous constatons que l’étude des enregistrements d’un réseau dense de capteurs permet de nous renseigner sur l’évolution lo-cale du système, pour un état de chargement donné de celui-ci. Lorsque le champ de déformation appliqué est fortement hétérogène à l’échelle de l’échantillon, cette analyse permet de localiser des changements en lien avec chacune de ces grandeurs : un signal fort peut être associé à la dé-formation locale du milieu de propagation ou bien au changement survenant dans la structure du milieu.

Les conclusions apportées par notre étude contribuent à une meilleure compréhension des processus impliqués dans les mesures de retards de temps de parcours ou de perte de cohérence, qui sont deux types de grandeurs physiques communément analysées au moyen des méthodes de CWI. Elles démontrent que l’analyse de ces deux grandeurs physiques délivre des informations complémentaires sur l’évolution du système.

3.4 Modélisation prospective de la déformation thermo-élastique d’un

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