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Modélisation du mécanisme de décharge régulant le potentiel de surface de

V. ETUDE DES MECANISMES PHYSICO-CHIMIQUES DE VIEILLISSEMENT ELECTRIQUE DES

V.4.1 Modélisation du mécanisme de décharge régulant le potentiel de surface de

compris entre 100 pA.cm-2 et 1,7 µA.cm-2. Il a été démontré que la conductivité apparente et l’émission électronique secondaire de cette céramique revêtue et recuite, bien que non négligeable sont trop faibles pour réguler le potentiel de surface au cours de la charge. La méthode REPA développée a permis de mettre en évidence le mécanisme physique prédominant qui régule la charge lorsque la dose ionisante injectée est faible. En effet, des décharges partielles successives de l’isolant ont été mesurées sous irradiation continue. Toutefois, lorsque la dose ionisante injectée dans le matériau croît, la cinétique de charge augmente lentement jusqu’à un temps d’irradiation critique (correspondant à une dose critique) où la cinétique de charge augmente abruptement. Le vieillissement électrique au-delà de cette dose ionisante critique reçue par le dépôt a été démontré. En effet, la conductivité apparente diminue et tend vers celle du substrat en nitrure de bore. L’altération de ces propriétés électriques a été corrélée à la dégradation chimique de rec-BN/Al2O3. En effet, la formation d’un film mince de contaminants (carbonates) ainsi que le vieillissement chimique du dépôt recuit d’alumine dans la zone irradiée ont été déterminé en comparaison avec une zone non irradiée du même échantillon.

Ces mécanismes physico-chimiques qui ont été identifiés au cours de l’étude des céramiques revêtues et recuites doivent alors être considérés conjointement. Leur évolution parallèle en fonction de la dose ionisante conditionne l’altération du potentiel de charge qui a été identifié dans CEDRE. Un modèle du mécanisme de décharges partielles qui régule Vséq (à faible dose) est alors proposé dans la première section. La seconde section a pour objectif de modéliser l’évolution du comportement électrique de rec-BN/Al2O3 à faible dose puis à forte dose électronique.

V.4.1 Modélisation du mécanisme de décharge régulant le potentiel de surface de rec–BN/Al2O3

Il a été démontré dans le chapitre III que la topographie des substrats affecte macroscopiquement les mécanismes de conduction et d’émission. En effet, une forte rugosité est susceptible d’augmenter le libre parcours des charges en surface et de diminuer ou d’augmenter le rendement d’émission (en fonction de l’allure de la topographie).

Les caractérisations réalisées au MEB ont mis en évidence des crevasses de plusieurs micromètres de largeur à la surface de rec-BN/Al2O3, responsables de la forte rugosité des substrats (III.2.1.1). De plus, le dépôt présente également des micro-fissures qui sont susceptibles d’être à l’origine de l’arrachement de certaines zones du dépôt. Il a alors été démontré que le dépôt de 300 nm n’est pas homogène et ne recouvre pas le substrat. Ce cas de céramique revêtue ne peut donc pas être considéré comme un cas parfait. Les multiples interfaces BN/Al2O3 en extrême surface (Figure 91 – a) dans les pores et les fissures doivent être considérées pour expliquer l’évolution temporelle de la distribution moyenne de la charge d’espace piégée dans cette céramique revêtue et recuite.

Figure 91 – (a) Représentations schématiques 2D du dépôt d’α-Al2O3 à la surface du substrat rugueux de BN et (b) de la distribution moyenne de charge aux interfaces du substrat et du dépôt recuits

L’hétérogénéité de la surface entraîne alors des différences locales (au niveau des interfaces) du rendement d’émission secondaire et de la conductivité apparente de surface. En effet, la conductivité apparente de l’Al2O3 (à 10 keV) est 10 à 100 fois supérieure à celle du BN. Concernant, le rendement d’émission du dépôt, il est au moins 2 fois supérieur à celui du substrat4. De ce fait, lorsque les électrons incidents pénètrent la couche d’alumine (Ei > 6 keV), le substrat de nitrure de bore est globalement chargé négativement tandis que l’alumine est chargée positivement (Figure 91 – b). La différence de potentiel en extrême

4 En se basant sur les valeurs déterminées sous irradiation pulsée qui ont été reportées dans la littérature (I.4.3.2)

dmax (Ei) Electrons incidents (Ei, Ji)

a

Electrons incidents (Ei, Ji) dmax (Ei) Dépôt d’α-Al2O3 (e 300 nm)

b

Substrat de BN b

surface entraîne la création d’un champ électrique élevé aux interfaces. La Figure 92- a représente les lignes de champs inhérentes à la distribution de la charge de surface sur une interface Al2O3/BN/Al2O3 au sein d’une micro-fissure. Ce modèle montre que la configuration d’une interface dépôt/substrat dans le cas de rec-BN/Al2O3 est susceptible de créer un champ électrique orienté préférentiellement vers le BN. Cette configuration électrostatique créée alors une zone de confinement pour les électrons secondaires émis dans le vide. Ces électrons de faibles énergies sont alors davantage susceptibles d’être collectés par le dépôt d’alumine.

Figure 92 – Représentation schématique (a) de la configuration du champ électrique à l’interface Al2O3/BN/Al2O3, (b) de la multiplication des électrons de faible énergie en surface de l’alumine et (c) du

déclenchement et de la propagation du plasma au sein d’une micro-fissure

Les électrons incidents ont été majoritairement implantés dans le substrat lorsque l’échantillon rec-BN/Al2O3 a été irradié avec une énergie incidente supérieure à 10 keV. Son potentiel de surface à l’équilibre qui a été mesuré aux temps courts avec la sonde de Kelvin (et avec la méthode REPA) était de l’ordre d’une centaine de volts. Il peut être supposé que le BN est chargé à (au moins) -100 V car le Vs est moyenné entre les charges d’espace au sein du substrat et du dépôt. Une différence de potentiel d’au moins 100 V est alors supposée entre le BN et l’alumine. Dans le cas représenté dans la Figure 92- b, les électrons qui sont émis du substrat avec une énergie d’une centaine d’eV irradient alors majoritairement le dépôt d’alumine (avec un angle d’incidence inférieur à la normale). Leur énergie cinétique est suffisamment faible (Ec1 < E < Ec2) pour engendrer une multiplication des électrons secondaires suite à leur impact sur l’extrême surface du dépôt. De plus, la topographie du matériau favorise l’irradiation de la surface en angle rasant et la multiplication des électrons

Electrons incidents (Ei, Ji) Substrat de BN dmax (Ei) Electrons incidents (Ei, Ji) Désorption Electrons incidents (Ei, Ji) a b c

secondaires.

En résumé, l’apparition d’une différence de potentiel entre le dépôt et le substrat conduit à la création d’un champ électrique suffisant pour amorcer un processus de multiplication électronique au sein des cavités et l’amorçage d’un plasma local. L’irradiation du dépôt par les électrons incidents de 10 keV et surtout par les électrons de faible énergie (inférieure à quelques centaines d’eV), engendre en effet la désorption des atomes d’oxygène inhérents à l’alumine [RAKHOVSKAYA et al. 1992]. Ces espèces neutres sont majoritairement confinées à proximité au sein des micro-fissures, ce qui engendre une concentration élevée d’atomes désorbés. Lorsqu’une densité critique est atteinte, ce gaz est alors ionisé (une décharge est amorcée par les différences de potentiel et suivant la loi de Paschen) et le plasma généré est éjecté et se répartit sur l’extrême surface. La charge d’espace négative de surface est alors neutralisée par le plasma.

Pour synthétiser ce modèle, un mécanisme de neutralisation et de déstabilisation de la charge de surface par le plasma créé sous irradiation électronique expliquerait donc la décharge partielle de rec-BN/Al2O3 mise en évidence avec la méthode REPA.

La désorption de l’oxygène intrinsèque au dépôt d’alumine, l’émission puis la recollection du plasma et la contamination indirecte (carbone provenant de l’environnement) entraînent le vieillissement électrique de rec-BN/Al2O3 au cours du temps. De ce fait, à partir des évolutions critiques de la composition chimique et de la charge de rec-BN/Al2O3 qui ont été mises en évidence, un modèle est proposé afin de corréler et d’expliquer les vieillissements électrique et chimique au sein de ces céramiques rugueuses revêtues.