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Analyse de l’évolution des espèces chimiques en extrême surface

V. ETUDE DES MECANISMES PHYSICO-CHIMIQUES DE VIEILLISSEMENT ELECTRIQUE DES

V.3 Caractérisations des évolutions physico-chimiques après détérioration sous irradiation

V.3.2 Analyse de l’évolution des espèces chimiques en extrême surface

Un des échantillons de rec-BN/Al2O3 irradié à 20 keV sous fort flux électronique égal à 0,75 µA, a été caractérisé par la méthode XPS (II.4.4). Ces analyses élémentaires, chimique et quantitative des zones irradiée et non irradiée a eu pour objectif d’identifier les mécanismes

de dégradation et les contaminants en extrême surface. Il est évident que la concentration de contaminants adsorbés pour une dose ionisante injectée, ne peut être déterminée étant donné que l’échantillon a été remis sous air pour le transférer entre les deux moyens de caractérisation. Toutefois, il est tout à fait possible de comparer en relatif la concentration des espèces, entre la zone vieillie (ZI) sous irradiation et la zone non irradiée (ZNI) de rec-BN/Al2O3.

L’analyse élémentaire de ZNI de rec-BN/Al2O3 a mis en évidence certaines espèces chimiques telles que Si, F, Na, Au, C qui sont des contaminants, contrairement à B, N, Al et O qui constituent initialement l’échantillon. Les éléments chimiques qui composent majoritairement l’extrême surface de rec-BN/Al2O3,sont Al, O et C. Les carbonates sont donc les contaminants prédominants et les autres ont une faible concentration totale (< 5 %). Le faible pourcentage atomique ( 2%) de B et N identifié dans la première dizaine de nanomètres corrobore l’hétérogénéité du dépôt d’alumine et démontre qu’il n’est pas totalement recouvrant. Dans le cas de ZI, le pourcentage atomique de bore et d’azote est devenu négligeable (< 0,65 %). L’intensité relative au pic du carbone est devenue majoritaire. Des analyses chimiques et quantitatives de rec-BN/Al2O3 ont donc dû être réalisées afin de comparer l’évolution chimique entre ZNI et ZI. Les valeurs déterminées des énergies de liaison, des intensités et des largeurs de pics à mi-hauteur (FWHM) des niveaux d’énergies (orbitales) O1s, C1s et Al2p, du rapport O/Al et de la concentration de C, pour les zones irradiée et non irradiée, sont récapitulées dans le Tableau 13.

Tableau 13 – Données déterminées par analyse XPS des zones non irradiée (ZNI) et irradiée (ZI) de rec-BN/Al2O3

Conditions expérimentales Excitation : Al Kα (1486,6 eV) Calibration : C1s (284,6  0,1 eV)

Zones caractérisées Non irradiée (ZNI) Irradiée (ZI)

O1s Energie (eV) 530,9 532,1

FWHM (eV) 1,8 2,9

C1s Energie (eV) 284.8 284,7

FWHM (eV) 1,7 1,5

Al2p Energie (eV) 74 74

FWHM (eV) 1,4 1,4

Rapport O/Al 1,34 2,69

La Figure 87 représente l’évolution de l’intensité et de l’énergie de liaison du pic correspondant au niveau électronique 1s de l’oxygène (noté O1s), entre les ZNI et ZI du même échantillon. Cette analyse chimique du niveau de cœur de l’oxygène montre que le pic O1s dont le maximum est localisé à 530,9 eV est asymétrique dans le cas de la ZNI. Il est en effet davantage étalé vers les hautes énergies de liaison. La décomposition de ce pic représentée sur la Figure 88, met en évidence la superposition du pic caractéristique (530,9 eV) de O dans Al2O3 (liaisons O-Al) et de pics de faible intensité relatifs au contaminants (liaisons O–C El = 533,0 eV, eau adsorbée El  532,5 eV, et liaisons O–H El 532,1 eV) [« Handbooks of Monochromatic XPS - Al2O3.pdf », BARR 1978, JIN et al. 1987, KLOPROGGE et al. 2006, SHI et al. 2010]. Pour des raisons de clarté lors de l’analyse entre ZI et ZNI, ces pics caractéristiques de contaminants, notamment liés à O, sont représentés sur un seul pic noté D (532,4 eV). Dans la ZNI, les liaisons O-Al sont majoritaires et la concentration atomique élevée d’O ( 40,3 %) est intrinsèque au dépôt d’alumine. Toutefois, dans le cas de la ZI, l’intensité de O1s a diminué et un déplacement chimique ( 1,6 eV) vers les hautes énergies a été mis en évidence (Figure 87). Cela s’explique par une diminution brutale du nombre de liaisons O–Al en extrême surface de la zone irradiée sous fort flux d’électrons. De plus, une augmentation du maximum du pic D est observée, ce qui est dû à une augmentation du nombre d’espèces adsorbées et de liaisons avec les contaminants. Par conséquent, ZI est davantage contaminée que ZNI. La forte diminution (supérieure à un facteur 5) du signal relatif aux liaisons O–Al (de l’alumine) s’explique alors par l’augmentation de contaminants et l’altération chimique de l’extrême surface du dépôt.

Figure 87 – Comparaison des spectres O1s de rec-BN/Al2O3 entre les zones irradiée sous faisceau

électronique (rouge) et non-irradiée (vert)

Figure 88 – (a) Ajustement et (b) décompositions des spectres O(1s) de la ZI (en rouge) et de la ZNI

(en vert) de rec–BN/Al2O3 O(1s) :

Zone irradiée Zone non-irradiée

Energie de liaison (eV)

Co u p s (u .a )

La Figure 89 compare l’intensité du pic caractéristique de l’orbitale 2p de l’Al, entre la ZNI et la ZI. L’énergie de liaison égale à 74 eV est caractéristique des liaisons Al–O [KLOPROGGE et al. 2006]. Une diminution de l’intensité maximale a été observée pour la zone vieillie sous irradiation électronique. Néanmoins, cette diminution (facteur 2) est bien moins marquée que celle du pic O1s. Cette différence de diminution peut être expliquée par la réoxydation de la surface (lors de la remise sous air) qui entraine une recombinaison de l’O (ambiant) avec l’Al. Paradoxalement, le rapport O/Al (Tableau 13) est alors supérieur au sein de la zone irradiée (2,69) par rapport à celui de la ZNI (1,86) qui est faiblement contaminée.

Figure 89 – Comparaison des spectres Al2p de rec–BN/Al2O3 entre les zones irradiée sous faisceau électronique (rouge) et non-irradiée (vert)

La différenciation de la contamination sous vide et de la contamination intervenant lors de la remise sous air n’est pas possible dans ces conditions de caractérisation. Néanmoins, il a été mis en évidence que la contamination par l’O et le C est plus faible dans la ZNI de rec-BN/Al2O3 (Figure 88 et Figure 90). De ce fait, il est évident que l’irradiation sous fort flux électronique active la surface de telle sorte à ce que les contaminants réagissent avec l’extrême surface du dépôt d’alumine. La tâche brunâtre est perceptible au cours des essais sous irradiation critique avant la remise sous air. Par conséquent, la contamination de l’échantillon sous irradiation électronique (en fonction de la dose [AJLONY et al. 2014]) atteint un stade avancé avant la remise sous air. Toutefois, la remise sous air est susceptible de participer à l’oxydation du matériau qui a été mise en évidence dans la ZI. Le carbone est le contaminant majoritaire et celui-ci est présent dans l’enceinte sous vide secondaire. L’analyse

Al(2p) :

Zone irradiée

Zone non-irradiée

Energie de liaison (eV)

C o u p s (u .a )

quantitative a démontré que la concentration atomique de C est environ égale à 68 % dans la ZI contre 24 % dans la ZNI (Tableau 13). L’analyse chimique a permis d’identifier les différentes liaisons chimiques créées suite à la réaction de ces contaminants. La Figure 90 montre l’analyse chimique de l’orbitale C1s dans les zones irradiée et non irradiée. Le pic principal localisé à environ 284,7 eV est caractéristique des liaisons C-C et C-H. La largeur de la base de ce pic C1s de la ZI est plus élevée que pour la ZNI. En effet, cette asymétrie vers les hautes énergies de liaison est due à la création dans la zone irradiée de liaisons C-OR(H) à 285,9 eV et COOR(H) à 289 eV [« Handbooks of Monochromatic XPS - Al2O3.pdf », SHI et al. 2010]. Cela corrobore l’oxydation en extrême surface du matériau (ZI).

Figure 90 – Comparaison des spectres C1s de rec–BN/Al2O3 entre les zones irradiée sous faisceau électronique (rouge) et non-irradiée (vert)

L’analyse « post-mortem » d’un échantillon de rec-BN/Al2O3 qui a été irradié au sein de l’application électronique industrielle en fonctionnement a également mis en avant la contamination par le carbone et d’autres espèces présentes dans son environnement. De plus, le vieillissement chimique du dépôt a aussi été identifié dans les zones irradiées de ces échantillons. Les mécanismes physico-chimiques qui interviennent sous irradiation au sein de l’application et au sein de CEDRE sont alors comparables.

Un des échantillons de BN brut irradiés à 10 keV et 0,75 µA.cm-2 (V.1.2) a été caractérisé afin d’identifier l’évolution chimique du substrat. L’analyse quantitative et chimique de cet échantillon a permis de démontrer que le substrat est principalement contaminé par du C (44,6 %) par rapport à l’O ( 9 %). De plus, le rapport B/N reste inchangé

C(1s) :

Zone irradiée

Zone non-irradiée

Energie de liaison (eV)

Co u p s (u .a )

entre la ZI et la ZNI. Aucun vieillissement chimique significatif n’a donc été identifié (pour le BN) et la diminution de concentration atomique de B et de N semble alors principalement due à la contamination par le C qui crée un film mince en extrême surface.