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Etude de l’évolution des liaisons et des espèces chimiques dans le substrat de

V. ETUDE DES MECANISMES PHYSICO-CHIMIQUES DE VIEILLISSEMENT ELECTRIQUE DES

V.3 Caractérisations des évolutions physico-chimiques après détérioration sous irradiation

V.3.1 Etude de l’évolution des liaisons et des espèces chimiques dans le substrat de

Les modes de vibrations relatives aux liaisons chimiques du dépôt d’alumine et au substrat de nitrure de bore de rec-BN/Al2O3 ont été caractérisés par spectroscopie Raman confocale (II.4.3). Deux points de la zone non irradiée (repère vert sur la Figure 83) et deux points de la zone vieillie sous irradiation électronique (repère rouge sur la Figure 83) ont été analysés. Ces caractérisations ont été réalisées en utilisant un faisceau de longueur d’onde (exc) égale à 532 nm (vert) et un réseau de diffraction de 600 traits/mm, notamment pour augmenter l’intensité diffusée et la gamme spectrale et diminuer le temps d’analyse. La Figure 85 compare un des spectres (en nombre d’onde noté ῦ) de la zone irradiée à 10 keV et 0,75 µA.cm-2 (215 min) de rec-BN/Al2O3 avec un des spectres de la zone non irradiée. L’intensité des bandes a été normalisée par rapport à leur base. La bande du BN (ῦBN = 1365 cm-1) est caractéristique du mode de vibrations E2g [REICH et al. 2005]. Le réseau vibre majoritairement dans le plan des feuillets du nitrure de bore, comme illustré dans la Figure 85. La double bande R2-R1 (ῦR2 = 4361 cm-1R1 = 4391 cm-1) est caractéristique de la fluorescence (transitions radiatives) des impuretés de Cr3+ [COLLINS et al. 1960, JASINEVICIUS 2009] insérées dans le revêtement d’alumine (ruby) recuit à haute température sous vide (ce ne sont donc pas des spectres de vibration Raman). Cela confirme la présence des impuretés de Cr3+ qui ont été identifiées par cathodoluminescence au cours de cette étude. En effet, les nombres d’onde de R2 et R1 (5324361 cm-1 et 5324391 cm-1) correspondent à la longueur d’onde (Cr3+) environ égale à 693 nm [GAFT et al. 2005] du pic majoritaire intrinsèque aux Cr3+ :

1

𝑒𝑥𝑐(𝑛𝑚)− 10−7. ῦ𝐶𝑟3+(𝑐𝑚−1) = 1

𝐶𝑟3+(𝑛𝑚) (43)

La fluorescence caractéristique de ces centres colorés est tellement intense qu’elle a été majoritaire lors de la caractérisation de rec-BN/Al2O3 par spectroscopie Raman, tout comme la luminescence lors des mesures par cathodoluminescence. Ces bandes ont donc submergé toutes les bandes Raman liées aux vibrations (phonons) des réseaux d’atome de BN et d’Al2O3, sauf le mode E2g de BN. Au premier abord, une diminution significative de

l’intensité de la double bande entre les zones non irradiée et irradiée est observée, contrairement à celle de la bande caractéristique du substrat de nitrure de bore. En effet, une diminution relative de l’intensité égale à 27 % ( 12 %) est observée pour la bande E2g, tandis qu’elle est supérieure à 74 % ( 6 %) pour les bandes R1 et R2 dans la zone où le matériau a été irradié sous fort flux électronique. Une interprétation est donnée dans le prochain paragraphe (Figure 86) pour expliquer cette différence notable. En résumé, la diminution relative d’intensité est presque trois fois moins grande pour E2g (BN) que pour R1 et R2. Le rapport des intensités normalisées de R2 et R1 (IR2/IR1) est sensiblement le même pour la zone vieillie sous irradiation et la zone non irradiée. IR2/IR1 est respectivement égal à 66% et 65 %. Par conséquent, aucunes des deux transitions radiatives n’est défavorisée au détriment de l’autre, au sein du dépôt d’alumine après vieillissement électrique.

Figure 85 – Spectres Raman (exc =532 nm) des zones vieillie sous faisceau électronique (10 keV, 0,75 µA.cm-2, Tamb °C) et non irradiée de rec-BN/Al2O3

L’analyse de cette perte d’intensité de la double bande R2 et R1 peut s’expliquer par une diminution de la concentration d’espèces au sein du dépôt par dégradation chimique. La création d’un film mince superficiel de contaminants pourrait expliquer la diminution de l’intensité lumineuse intrinsèque au BN et à l’Al2O3. Ces mécanismes physico-chimiques de dégradation chimique et superficielle peuvent s’additionner. La Figure 86 illustre les effets de la dégradation chimique et de la contamination pour expliquer la diminution d’intensité des bandes caractéristiques du substrat et du dépôt recuits.

0 1 2 3 4 5 6 7 8 1330 1355 1380 1405 4330 4355 4380 4405 Nombre d’onde (cm-1) hBN E2g: 1365 cm-1 R2 : 4361 cm-1 R1 : 4391 cm-1

B

N

Zone irradiée Zone non irradiée

In te n si n o rm al isée ( u .a )

Figure 86 – Représentation schématique du volume d’interaction du faisceau (exc = 532 nm) et des intensités dans (a) rec–BN/Al2O3 non irradié, puis dans la zone vieillie sous irradiation électronique avec (b) une dégradation chimique du dépôt, (c) une contamination (sans dégradation) et (d) les deux mécanismes

physico-chimiques

La résolution axiale du laser est environ égale à 2 µm. Dans le cas où la configuration du dépôt de 300 nm d’épaisseur est admise parfaite sur le substrat, c’est-à-dire homogène et continue, alors le volume d’interaction du laser avec le revêtement (Vf-Al2O3) est environ égal à 15%. Le volume d’interaction avec le BN (Vf-BN) est alors bien plus grand ( 85 %) et la majorité des interactions se produisent de ce fait au sein du substrat. Dans le cas des analyses Raman de la zone vieillie sous irradiation électronique, si le processus de vieillissement n’était dû qu’à la dégradation du dépôt (Figure 86 - b), l’intensité de la bande E2g n’aurait pas diminuée. Hari et Al. ont démontré que le désordre atomique d’une monocouche de graphène déposée sur un substrat de hBN irradié à 5 keV (avec une dose électronique de 20 nC.µm-2) était négligeable contrairement à celui d’un même dépôt sur substrat de SiO2

[HARI et al. 2014]. En effet, les chaines pendantes et les atomes d’oxygène au sein de SiOx

favorisent la dégradation sous irradiation électronique et donc le désordre atomique du dépôt de graphéne. Autrement dit, cela démontre que le BN est un isolant plus stable que les oxydes,

e(conta) 10ainesnm BN exc= 532 nm z = 2 µm e(Al2O3) = 300 nm x < 1 µm BN exc= 532 nm z = 2 µm e(Al2O3) < 300 nm x < 1 µm BN exc= 532 nm z = 2 µm e(Al2O3) = 300 nm x < 1 µm BN exc= 532 nm z = 2 µm e(Al2O3) < 300 nm x < 1 µm a b c d IE2g IR2et IR1  IE2g  IR2et IR1  IE2g  IR2et IR1 e(conta) 10ainenm   IE2g   IR2 et IR1

sous irradiation électronique. De plus, des travaux expérimentaux ont montré que la création de défauts au sein d’échantillons de hBN (notamment nanostructurés) intervient lorsque l’énergie des électrons incidents est supérieure à 80 keV [ALEM et al. 2011, CRETU et al. 2015]. Cela est notamment dû à l’énergie thermique fournit par le faisceau incident qui entraîne la dégradation du matériau (formation de lacunes). Cette analyse permet donc de considérer que le vieillissement de BN est négligeable par rapport à celui de l’oxyde d’aluminium, notamment dans le cas de cette étude où E0 < 20 keV. De ce fait, la diminution de la couche d’Al2O3 ou son altération chimique aurait augmenté l’intensité du signal lumineux lié au BN au détriment de celui de l’alumine (diminution du volume d’interaction Vf-Al2O3). Dans le cas où rec-BN/Al2O3 aurait seulement été contaminé par des hydrocarbures sous irradiation électronique critique (Figure 86 - c), la diminution de Vf-BN ainsi que l’addition du film de contaminant aurait contribué à une diminution substantielle de l’intensité diffusée de E2g. Le dernier cas d’analyse qualitative (Figure 86 - d) représente un effet cumulé du vieillissement chimique du dépôt et de la création d’un film mince de contaminants sur l’évolution de l’intensité diffusé des bandes E2g et R2/R1 (par rapport à la zone non irradiée de ce même échantillon). L’addition de ces deux mécanismes physico-chimiques engendrerait une diminution accrue de l’intensité diffusée de la double bande R2 et R1 en raison de la diminution de Vf-Al2O3 et de l’écrantage par le film de contaminants. Toutefois, leurs effets seraient moindres sur l’intensité diffusée de E2g qui ne diminuerait que faiblement en raison de Vf-BN qui resterait inchangé. Par conséquent, l’analyse quantitative des spectres Raman est en adéquation avec l’argumentation de ce dernier cas. La diminution de l’intensité de E2g serait donc due à l’effet de la contamination, tandis que la diminution de l’intensité de R2 et R1 serait due en plus au vieillissement chimique du dépôt d’Al2O3. De plus, cette diminution du signal de luminescence caractéristique des impuretés de Cr3+ a également été observée lors de l’étude de cathodoluminescence, sous irradiation critique (5 keV, 0,5 µA.cm-2, 1177 min soit 3,5.10-2 C.cm-2).

Néanmoins, ces deux mécanismes physico-chimiques doivent être confirmés. Une analyse chimique complémentaire de l’extrême surface d’un échantillon de rec–BN/Al2O3 a donc été effectuée sur les zones vieillie et non irradiée.