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II. DISPOSITIFS EXPERIMENTAUX ET METHODES DE CARACTERISATION

II.1 Dispositif de caractérisation du potentiel de surface des isolants

II.1.2 Mesure de potentiel par sonde de Kelvin

II.1.2.1 Principe de la méthode de mesure

Une sonde électrostatique a été utilisée dans CEDRE afin de caractériser le transport de charges au sein des diélectriques irradiés, en mesurant leur potentiel de surface (Vs) au cours du temps. Cette méthode sans contact de mesure de potentiel par effet capacitif, a été établie par Lord Kelvin [KELVIN 1898]. Ces sondes de potentiel ont ainsi été appelées « sonde de Kelvin » ou « Kelvin Probe (KP) » en anglais. Des dispositifs instrumentaux ont par la suite été développés et optimisés notamment par Robert Vosteen, dans le but d’améliorer cette technique de mesure [VOSTEEN]. Les sondes de Kelvin sont constituées d’un condensateur vibrant et sont connectées à un voltmètre électrostatique. Leur fonctionnement (Figure 22) est basé sur le principe du couplage capacitif entre le détecteur à vibration mécanique et la surface chargée de l’échantillon [DAVIES 1967, NORAS 2003]. La quantité de charges implantées dans le matériau est donnée par la formule :

𝑄 = 𝑈𝜀𝑟𝜀0𝑆

𝐷 (12)

Pour laquelle U (égal à U1 - U2) et D sont respectivement le potentiel et la distance entre le détecteur vibrant et la surface de l’échantillon. S est la surface de l’échantillon caractérisé.

r et 0 sont respectivement les permittivités relatives du matériau et du vide. La variation de distance D dans l’intervalle de temps dt, engendre une variation de charge dQ :

Cube porte échantillons (200 x 200) Support cubique (20 x 20 cm) Porte échantillon thermostaté

Ecran cryogénique Garage de la

sonde Canon à électrons Hublot de visualisation Sonde de mesure de potentiel de surface

𝑑𝑄 𝑑𝑡 = 𝑈𝜀𝑟𝜀0𝑆 𝑑 𝑑𝑡( 1 𝐷(𝑡)) = 𝑈𝜀𝑟𝜀0𝑆 −𝑑𝐷(𝑡) 𝑑𝑡 [𝐷0+ 𝐷1(𝑡)]2 (13)

D = D(t) = D0 + D1(t), sachant que D0 et D1(t) sont respectivement une constante initiale et une fonction décrivant l’évolution de la distance au cours du temps.

Figure 22 – Principe de la méthode de mesure du potentiel de surface par sonde électrostatique [NORAS 2003] Le capteur de la sonde vibre sinusoïdalement à une fréquence fixe (), dans la direction perpendiculaire à la surface de l’échantillon étudié. De ce fait, un courant proportionnel à la fréquence et à l’amplitude de vibration est induit :

𝐼 = 𝑈𝑑𝐶 𝑑𝑡 = 𝑈 𝑑 𝑑𝑡( 𝜀𝑟𝜀0𝑆 𝐷0+ 𝐷1sin (𝜔𝑡)) = −𝑈𝜀𝑟𝜀0𝑆 𝐷1𝜔𝑐𝑜𝑠(𝜔𝑡) [𝐷0+ 𝐷1sin (𝜔𝑡)]2 (14)

Par conséquent, le courant (I) s’annule lorsque la différence de potentiel (U) mesurée par la sonde est égale à 0. Un dispositif contrôlant le potentiel de l’électrode référencée à la masse (U1) permet alors de déduire le potentiel de surface de l’échantillon (U2) lorsque cette condition d’annulation est atteinte (puisque si U = 0  U1 = U2).

Cette technique de mesure a été utilisée sous vide dans CEDRE car elle présente plusieurs avantages recherchés dans le cadre de cette étude. En effet, la sonde peut mesurer des potentiels élevés allant jusqu’à ± 10 kV. De plus, cet instrument ne rentre pas en contact avec l’échantillon lors de la mesure, ce qui permet d’éviter toute perturbation du potentiel de surface induit par la mesure. La sonde de potentiel et le voltmètre utilisés sont de type Monroe Electronics (Model 175). La sonde de Kelvin est fixée à un support motorisé le long d’un axe

Condensateur vibrant

Sonde

Surface de l’échantillon

vertical. Par conséquent, deux protocoles de mesure de potentiel peuvent être suivis grâce à ce montage instrumental. Le premier consiste à effectuer des balayages successifs le long de l’axe de déplacement afin d’obtenir des profils de potentiel au cours du temps. Le deuxième protocole nécessite de laisser la sonde fixe en face de l’échantillon de manière à mesurer l’évolution temporelle du potentiel à un point donné. Le premier protocole a été utilisé lors des phases d’irradiation et de relaxation, c’est-à-dire dès l’arrêt de l’irradiation du matériau. Toutefois, le deuxième protocole ne peut être utilisé que lors de la phase de relaxation. En effet, l’inconvénient majeur de cette technique lors de l’irradiation, est que la sonde coupe le faisceau électronique lorsqu’elle mesure le potentiel de l’échantillon (durant environ 20 secondes - Figure 24), ce qui amorce la relaxation des charges. De plus, les électrons incidents peuvent endommager la sonde et son support isolant puis engendrer une dérive de potentiel. Par conséquent, un blindage métallique a été spécifiquement conçu pour être monté derrière cette sonde installée dans CEDRE, afin de pouvoir réaliser la mesure de potentiel en phase d’irradiation avec un temps minimum d’interruption du faisceau sur l’échantillon.

Un programme Labview® (version 20133) a été développé afin d’automatiser les mesures de potentiel. Il a ainsi permis d’effectuer des mesures en continu, soit en balayant successivement l’échantillon, soit à un point fixe. La durée des essais peut donc varier de quelques secondes à plusieurs jours sans intervention de l’expérimentateur.

II.1.2.2 Etalonnage de la sonde de Kelvin

La sonde de Kelvin a été étalonnée avant de débuter la caractérisation du potentiel de surface des céramiques. Cet étalonnage a été effectué dans le but de déterminer l’erreur relative et la reproductibilité des mesures en fonction de la distance entre la sonde et l’échantillon, et de la largeur des échantillons. En effet, la résolution spatiale latérale de la sonde dépend directement de ces deux grandeurs [KELVIN 1898]. Les sondes de Kelvin utilisées au DESP étaient habituellement étalonnées en mesurant le potentiel de polarisation de bandes métalliques de différentes largeurs collées sur un support en polymère [HANNA 2012]. Toutefois, les effets de bord et de polarisation aux interfaces métal/polymère, perturbaient les mesures de potentiel au fur et à mesure des étalonnages. De ce fait, un nouveau support entièrement métallique a été développé afin de s’affranchir de ces effets néfastes. Ce support métallique est constitué de trois bandes de différentes largeurs (3, 6 et 9 mm) représentatives de la largeur des différentes céramiques caractérisées. Celles-ci sont

superposées à un plan de masse. Lors de l’étalonnage de la sonde, ces bandes ont successivement été polarisées à -1, -2 et -3 kV, avec une alimentation Haute Tension (Heinzinger LNC 10000-2 neg) étalonnée par une entreprise extérieure certifiée COFRAC. Lors de l’étalonnage, la sonde de Kelvin a été positionnée à une distance minimale de 3 mm, afin d’optimiser la mesure absolue du potentiel [HANNA 2012]. La Figure 23 représente les profils de potentiel des bandes du support métallique polarisé à -1, -2 et -3 kV. Les mesures ont été reproductibles et l’incertitude relative maximale a été inférieure à 8 %, dans le cas d’un échantillon de 3 mm de largeur présentant un potentiel de surface égal à -3 kV.

Figure 23 – Profils de potentiel du support métallique d’étalonnage avec des bandes larges de 3, 6 et 9 mm et polarisées à -1, -2 et -3 kV (distance sonde/échantillon = 3 mm)