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CHAPITRE 4 CONCLUSION-OUVERTURE « Connais-toi toi-même » : la préservation de

2. Les modèles du stress

2.3. Modèles transactionnels spécifiques

Le modèle de Cooper et Mackay (1987) ou "Transactional Model of Occupational Stress" est un modèle d’application au domaine du travail du modèle de Lazarus et Folkman. Il appréhende l'inadéquation entre les exigences de l'environnement de travail et la capacité du collaborateur à faire face aux exigences du poste et l'écart entre les aspirations de l'individu et la réalité professionnelle. Cette évaluation entre les composantes "réalité et exigences de l'environnement professionnel" avec les "capacités et aspirations de l'individu" va déterminer le déséquilibre ou non et ses conséquences à court et à long terme. Il repose sur le principe du coping aux composantes cognitives, comportementales et physiologiques. Le degré de complexité de la tâche est ainsi souvent mis en cause, qu'il s'agisse d'une tâche trop simple conduisant à une sous- utilisation des capacités de l'opérateur ou d'une tâche trop complexe dépassant ses compétences.

Ce modèle est intéressant à étudier dans la mesure où il met en avant la manière dont ressources, demandes au travail, stress et santé vont interagir au cours du temps. Le déséquilibre générateur de stress est lié à l'inadéquation entre les exigences de l'environnement de travail et la capacité de l'individu (aptitudes, ressources) à combler ces exigences. Il peut illustrer le cas du stress ressenti par l’aide-soignant dont les demandes internes élevées et les ressources fournies par l’institution sont ou non en correspondance et dont la vocation d’apporter de l’aide restera frustrée en raison de la disposition ou non des moyens nécessaires par l'institution. Dans cette approche, ce n'est pas le stresseur qui est au cœur du mécanisme mais bien l'évaluation personnelle du moment de l’aide-soignant qui va être source ou non de stress. Avec ce modèle une même situation sera vécue de manière différente en fonction des ressources intrinsèques et extrinsèques dont dispose l'individu.

Représentation du modèle transactionnel du stress professionnel de MacKay et Cooper (1987) d’après De Keyser et Hansez, 1996.

2.3.2. Modèle des caractéristiques perçus de la tâche - Job Charateristics Model

Dans les différents modèles de coping que nous venons de voir, l’approche s’intéresse avant tout aux dimensions psychologiques et cognitives du stress du personnel et à sa maîtrise et non à l’impact de son environnement. Or le niveau d'analyse doit aussi être ancré à la réalité du travail et à ses conditions de réalisation. Parmi les modèles d’analyse soulignant l’importance de la perception des caractéristiques du travail, l’un des plus utilisés et validés est le modèle des caractéristiques de la tâche (Job Charateristics Model) de Hackman et Oldham (1975 et 1976 ). Les travaux effectués à partir de ce modèle mettent en évidence cinq aspects du travail à accomplir, susceptibles d’engendrer du stress (mais également de l’insatisfaction au travail, de l’absentéisme, une diminution de la performance, du turnover). Ces aspects concernent la variété (complexité) de la tâche, l’impact de la tâche (portée ou importance de son travail pour les autres), l’identité de la tâche (possibilité d’identifier clairement le produit de son travail, sa propre contribution dans la production de biens ou de services), l’autonomie, et le feedback sur l’efficacité de son travail. Ces caractéristiques centrales de la tâche ont des effets personnels et organisationnels via des états psychologiques intermédiaires (figure 3.2 ).

Figure 12 Modèle des caractéristiques de la tâche (Hackman et Oldham, 1976)

2.3.3. Modèle composite Exigences-Ressources (Job Demand-Ressource, JD- R) de préservation des ressources

Dans la suite du modèle des caractéristiques des tâches, la théorie de préservation des ressources d’Hobfoll (1989, 1993) et le modèle exigences-ressources de l’épuisement professionnel de Demerouti (2001) (« Job Demands-Resources », modèle JD-R) offrent un cadre théorique synthétique permettant d’appréhender les différents types de réactions pouvant subvenir dans des situations de travail diverses. Selon la théorie de préservation des ressources quand des employés font l’expérience d’une perte de ressources, d’un échec de gain suite à un investissement de ressources, ou sentent que leurs ressources sont menacées, ils vont subir un stress (Hobfoll, 1989). Les ressources

sont, notamment, des facteurs protecteurs de la santé. Les ressources professionnelles désignent les aspects physiques, psychologiques, sociaux ou organisationnels de l’emploi qui peuvent être opératoires dans la poursuite d’objectifs professionnels, la réduction de contraintes professionnelles ou la contribution au développement personnel (Demerouti and al., 2001, p. 501). Les ressources externes, c’est-à-dire organisationnelles ou sociales, sont distinguées des ressources internes (traits cognitifs ou modèles d’actions).

Le modèle de Demerouti s’inscrit parfaitement dans la perspective développée par Hobfoll. La réflexion centrale de Demerouti est d’affirmer que si chaque emploi comporte un certain nombre de facteurs de risque qui lui sont propres, ces facteurs peuvent néanmoins être classés en deux groupes : les facteurs qui constituent des exigences, et les facteurs qui constituent des ressources. Les exigences se réfèrent aux aspects de l’activité qui nécessitent des stratégies d’ajustement ou de compensation et qui entraînent de la fatigue. Les ressources, quant à elles, sont vues comme génératrices de motivation en ce qu’elles permettent aux professionnels de se développer, d’être dans un processus d’apprentissage et de développement personnel. Par exemple, une ressource comme l’autonomie permet de valoriser l’individu en lui donnant une plus grande marge de manœuvre, en le responsabilisant, en lui témoignant par là même de la confiance comme preuve de reconnaissance de ses qualités.

Précisément, le modèle JD-R de Demerouti (2001 et al.) s’inspire de quatre sources : une extension du modèle JD-C de Karasek (1979), la théorie des deux facteurs de Herzberg (1966), le modèle des caractéristiques des tâches de Hackman et Oldham (1980) et le modèle de Effort/Récompense de Siegrist, (1996).

C’est à l'interaction entre les variables environnementales et les caractéristiques de la personne qui détermine l'apparition d'un stress (French et al., 1982). Deux aspects de l'adéquation interviennent : le degré selon lequel les attitudes, capacités, motivations et besoins des personnes rencontrent les demandes, ressources, opportunités et gratifications professionnelles, d’une part, et le degré selon lequel l'environnement professionnel rencontre les besoins des travailleurs. Dans ce second aspect, une importance particulière est accordée à la façon dont l'individu est encouragé à utiliser ses connaissances et aptitudes dans le cadre de sa profession.

Le stress, est défini conformément à l’approche transactionnelle, comme résultant de la perception de la rupture de l’équilibre du système cognitif-émotionnel-environnemental. Les exigences de l’emploi (Job Demands) renvoient à des aspects physiques, sociaux ou organisationnels de l’emploi qui requièrent des efforts mentaux ou physiques soutenus. Les ressources de l’emploi (Job Resources) désignent les aspects physiques, psychologiques, sociaux et organisationnels qui ont une des trois conséquences suivantes :

- elles réduisent les exigences de l’emploi et les coûts physiologiques et psychologiques qui leur sont associés,

- elles stimulent la croissance, l’apprentissage et le développement personnel - et elles contribuent à atteindre les objectifs professionnels.

Les ressources peuvent se trouver à différents niveaux :

- au niveau de l’organisation (salaires, perspectives de carrières, sécurité de l’emploi), au niveau interpersonnel ou social (soutien du supérieur et des collègues, ambiance de l’équipe de travail),

- au niveau de l’organisation du travail (clarté de rôle, participation à la prise de décision) ou au niveau de la tâche (retour sur expérience, diversité des tâches, intérêt des tâches, autonomie) (Bakker et al., 2004).

Il peut inclure une grande variété de ressources et d’exigences et il doit ainsi permettre d’éviter la fatigue et d’encourager l’engagement dans l’emploi par la définition appropriée des tâches et des conditions de travail.

Figure 13 Modèle de Job's Demands-Resources

Le modèle JD-R explique le développement de l’épuisement professionnel selon deux processus. Le premier explique la fatigue par le fait de subir des exigences importantes et le second décrit les comportements de désengagement, tel que le retrait, comme conséquences d’un manque de ressources. Le stress apparaît lorsqu'il y a un déséquilibre, relatif à un de ces aspects au moins. En référence à l’approche interactionniste, les caractéristiques de la situation sont prises en compte, mais, conformément à l’approche transactionnelle, les perceptions de l’individu ont aussi avoir leur place. Les contraintes perçues subies par l’individu aussi bien que les ressources perçues dont il dispose doivent donc être mesurées. Demerouti et al. (2001) ont testé ce modèle dans lequel l’épuisement professionnel apparaît quand les exigences de l’emploi sont élevées et que les ressources de l’emploi sont limitées en raison de mauvaises conditions de travail, qui conduisent à des pertes d’énergie et qui réduisent la motivation des salariés. Ce modèle va inspirer notre approche en terme de capacitation au travail et de qualité de vie au travail.

2.4. Approche et modèles d’épuisement professionnel, de capital émotionnel et