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Le modèle de l’alignement stratégique selon Henderson et Venkatraman

D ’ INVESTIGATION ENCORE PEU EXPLORE

1. La présentation et la définition du concept d’alignement (« Fit »)

1.1. Le modèle de l’alignement stratégique selon Henderson et Venkatraman

1.1.1 Présentation

Henderson et Venkatraman, dans leur article fondateur du modèle de l’alignement stratégique (« Strategic Alignment : Leveraging Information Technology for Transforming Organizations », 1993), suggèrent que le développement de la stratégie et des systèmes d’information doit être cohérent. On parle alors d’alignement stratégique entre la stratégie de l’entreprise et celle des systèmes d’information.

L’adéquation ou « Fit » constitue « le juste dosage permettant l’harmonisation entre les choix

stratégiques de l’entreprise et les ressources technologiques qui contribuent à fournir le support de leur déploiement » (Kéfi et Kalika, 2003, p. 3).

Ce modèle de l’alignement stratégique permet de mieux comprendre les enjeux des TI pour l’entreprise. Il se décline à travers quatre perspectives qui font ressortir un domaine d’ancrage (le domaine que l’entreprise maîtrise et contrôle le mieux à l’origine du changement), de pivot (le domaine dans lequel l’entreprise doit trouver des solutions) et d’impact (domaine pour lequel s’appliquent les principaux changements) :

- La voie de l’application de la stratégie dans laquelle les TI sont considérées comme une simple fonction de l’entreprise au service de la stratégie générale de l’entreprise (la stratégie d’entreprise constitue l’élément conducteur pour les choix en matière d’organisation de l’entreprise et l’élaboration de l’infrastructure TI, utilisation de critères financiers reflétant un centre de coût pour mesurer la performance),

- La voie du potentiel technologique suppose de choisir une stratégie TI pour la réalisation de la stratégie de l’entreprise qui nécessite une infrastructure TI adéquate (la stratégie d’entreprise constitue l’élément conducteur pour les choix en matière de

stratégie TI et d’élaboration de l’infrastructure TI, utilisation de critères de benchmarking par rapport aux TI pour évaluer la performance),

- La voie du potentiel compétitif consiste à développer une technologie émergente pour en tirer un avantage compétitif. Les capacités d’une TI émergente influencent les choix faits en matière de stratégie de l’entreprise, qui doit alors repenser son organisation (la stratégie TI constitue l’élément conducteur pour les choix en matière de stratégie et d’organisation de l’entreprise, utilisation de critères comme la part de marché, la croissance, l’introduction de nouveaux produits),

- La voie du niveau de service se base sur l’utilisation des TI pour assurer un service d’un certain niveau, correspondant aux besoins du consommateur. A partir d’une stratégie TI définie il faut choisir l’infrastructure TI et l’organisation de l’entreprise appropriée (la stratégie TI constitue l’élément conducteur pour les choix en matière d’infrastructure TI et d’organisation de l’entreprise, utilisation de critères basés sur la satisfaction du consommateur pour mesurer la performance).

Dans chacun de ces cas, le modèle nous permet d’analyser et de comparer les objectifs et les activités de la fonction TI avec les objectifs et les activités de l’entreprise. La représentation schématique du modèle est la suivante:

Activité de l’entreprise Activité TI

Cohérence stratégique Intégration fonctionnelle

Alignements des dimensions opposées

Interne Externe Infrastructure TI Compétences Processus Compétences Processus Infrastructure administrative Compétences

distinctes Direction de l’activité Positionnement stratégique Positionnement technologique Compétences Direction TI Intégration fonctionnelle Cohérence stratégique Infrastructure et processus organisationnels Infrastructure et processus TI Stratégie de l’entreprise St té i d l’ t i Stratégie TI

Modèle de l’alignement stratégique

Source : adapté d’Henderson et Venkatraman, 1993.

1.1.2 Analyse

L’alignement stratégique dans le modèle d’Henderson et Venkatraman se réalise autour de deux mouvements principaux :

- d’une part, « la cohérence stratégique » (« strategic fit ») entre les dimensions externes et internes de l’entreprise, entre la formulation et l’implémentation de la stratégie,

- d’autre part, « l’intégration fonctionnelle » (« strategic integration ») des TI au sein de l’entreprise.

Ces deux mouvements s’effectuent autour de quatre dimensions : la stratégie d’entreprise, l’infrastructure organisationnelle et les processus de l’entreprise, la stratégie TI, l’infrastructure et les processus TI.

Au niveau de la stratégie d’entreprise, on distingue trois domaines : « le positionnement stratégique » correspondant aux choix relatifs aux produits et aux marchés ; « les

compétences distinctes » comme les attributs de la stratégie (prix, qualité, service à valeur ajoutée, meilleur canal de distribution), qui permettent d’acquérir un avantage compétitif par rapport aux autres concurrents ; « la direction de l’activité » à propos des choix relatifs aux mécanismes structurels pour organiser les opérations de l’activité de l’entreprise (alliances stratégiques, joint-ventures, licences).

Au niveau de l’infrastructure organisationnelle et des processus de l’entreprise, on

trouve : « l’infrastructure administrative » incluant les structures organisationnelles, leurs rôles, et les relations entre les différents systèmes de reporting ; « les processus » correspondant à l’articulation des flux de travail et des flux d’information qui en découle pour mener à bien l’activité de l’entreprise ; « les compétences » traduisant les capacités des individus à exécuter les tâches principales en soutien de la stratégie de l’entreprise.

Au niveau de la stratégie TI, de manière analogue à la stratégie d’entreprise, on distingue

trois dimensions : « le positionnement technologique » comme le type ou le niveau des systèmes TI ainsi que leurs capacités, potentiellement disponibles au sein de l’organisation ; « les compétences » contribuant positivement à la création d’une nouvelle stratégie d’entreprise ou supportant des stratégies d’entreprises existantes ; « la direction TI » prenant des choix pour les mécanismes structurels (joint-ventures, contrats de long terme, entente équitable, R&D commun) pour obtenir les capacités TI nécessaires, impliquant des sujets comme le développement de la propriété ou le partage des réseaux.

Au niveau de l’infrastructure et des processus TI, de manière analogue à l’infrastructure

organisationnelle et aux processus de l’entreprise, on distingue trois dimensions :

« l’architecture » correspondant aux choix d’application, de données, de configuration technologique ; « les processus » de travail pour les opérations de l’entreprise par l’infrastructure TI, incluant les processus de développement des systèmes et leur maintenance mais également la surveillance et le contrôle des systèmes ; « les compétences » dépendant des choix concernant les connaissances et les capacités à gérer de manière effective l’infrastructure TI au sein de l’organisation.

Après l’approche centrée sur les ressources, visant à réaliser un système d’information fonctionnel le plus efficient possible et l’approche globale se limitant au rapprochement entre stratégie de l’entreprise et stratégie TI, l’alignement stratégique renouvelle la vision portée sur les relations entre l’entreprise et les TI.

En effet, le modèle d’Henderson et Venkatraman va plus loin que le traditionnel rapprochement entre activité de l’entreprise et activité TI en réalisant de manière innovante une véritable césure au sein de la fonction TI qui implique la séparation entre d’une part la stratégie TI et d’autre part l’infrastructure et les processus TI.

De plus, le modèle met en avant l’importance du rôle joué par les différents managers, dans chaque perspective d’alignement.

Là où le modèle est le plus novateur, c’est lorsqu’il suppose que l’objectif le plus important pour les dirigeants n’est pas d’atteindre l’alignement mais la bonne perspective d’alignement parmi toutes celles envisageables.

Enfin, le modèle est d’autant plus intéressant qu’il ne se limite pas à une recherche de cohérence partielle, par couple de relations. Il intègre simultanément un certain nombre de relations, représentant la complexité des liens entre stratégie, organisation, technologie et compétences.