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européennes, modèle nord-américain et implications systémiques pour le supérieur

4. Le modèle APC américain

4.1. L’APC nord-américaine : un paradigme testé et confirmé

Dans le domaine de la formation industrielle technique – et plus tard tech-nologique, – on peut tracer les racines l’APC dans deux courants pédago-giques européens :

 ledit Système Russe, méthode d’analyse des tâches créée par Victor Karlovich Della Vos en Russie pendant les années 1860 pour la for-mation professionnelle ; et

 le système très méthodique et réfl échi dit “Educational Sloyd”, lancée en Finlande en 1865 par Uno Cygnaeus pour être exploité dès le pre-mier cycle, puis développé davantage en Suède au cours des années 1870 par l’éducateur Otto Salomon13. Cette méthode est répandue aux Etats-Unis dès 1880 par le biais de Gustaf Larsson, qui crée un centre de formation d’enseignants14. Or des concepts pédagogiques de ces deux systèmes furent récupérés pendant les années 1960 pour juste-ment former le dénommé « Competence-Based Organizational Training » (Entraînement Organisationnel Basé sur les Compétences), pour divers objectifs : des programmes de langue, d’orientation et d’alphabéti-sation de réfugiés ; le développement de programmes au secondaire et la formation des professeurs ; ou bien la formation destinée à tel

12 Soit simulation des conditions réelles, par exemple dans le domaine médical, du pilotage ou autres.

13 Ces pédagogues exploraient leurs concepts sur le terrain, théoriquement et à travers des échanges d’idées; les programmes proposés avaient pour objectif une formation non seulement technique, mais éducative aussi.

14 Ces enseignants vont contribuer à répandre ce système dans des centaines d’écoles à travers le pays.

personnel médical. David McClelland de Harvard University (1973 : 2) fut le premier à étudier le sujet des compétences plus systématiquement pendant cette décennie, après constatation du fait que le recrutement ne pouvait pas compter sur les seuls résultats des tests QI pour garan-tir de bonnes performances au travail. McClelland a donc mené des recherches auprès de ceux qui avaient fait preuve d’une grande réus-site professionnelle. – p. ex.  au sein du corps médical – pour com-prendre ce qui les distinguait de ceux qui étaient moins performants.

Ces recherches ont mené à la création d’un programme d’entraînement axé sur les compétences. L’histoire récente de l’éducation post-secon-daire nord-américaine voit ainsi l’émergence d’une Education Basée sur les Compétences (CBE), ce qui, avec la révolution du numérique, mène à de nouvelles approches de formation et de saisie des données relevant de l’apprentissage. En 2002, une étude subventionnée par le Département d’Education américain et menée au sein de huit insti-tutions éducatives confi rme les exigences de la société d’aujourd’hui en matière de compétences ainsi qu’au niveau de souplesse systé-mique – d’où l’importance du dispositif en ligne. Une composante TICE s’ajoute ainsi aux programmes classiques de différentes écoles, que celles-ci soient prestigieuses – Harvard Extension Classroom, ou Yale, Princeton ou MIT online – ou non. L’évolution WGU (Western Governors’ University), institution privée à but non-lucratif établie en 1997 par dix-neuf gouverneurs américains, est à noter pour certaines affi nités avec le contexte européen : on retrouve dans son discours des notions telles que compétences, pédagogie basée sur les tâches, fl exibilité, dialogue entre industrie et le monde politique ; partenariat entre écoles et industrie15 ; travail investi ; ou encore employabilité.

L’APC nord-américain a évolué au fi l des années en systématisation, profondeur psychologique (socio-constructivisme et constructivisme cogni-tif), et rigueur. Cette dernière ne se négocie pas, qu’il s’agisse des étapes de progression, de la validation à chaque étape décisive, ou du rôle précis du tuteur. Rigueur signifi e justement un parcours vers des objectifs discipli-naires pré-établi, balisé et conditionnel, où la promotion à l’étape suivante suppose la validation de l’étape sur laquelle on travaille.

L’exploration étendue de l’APC sur le terrain au fi l des années et l’évalua-tion de sa méthode, empiriquement ou à travers la recherche, fait que l’on est aujourd’hui à ce qu’on appelle APC-deuxième génération (Goudreau et al. 2009 : 1) – modèle d’apprentissage constructiviste et holistique16. Aussi

15 Ce qui inclut parrainage des écoles et subventions pour les études, donnant lieu au phénomène de disruptive education (« éducation de rupture » : accès à l’éducation des classes socio-économiques jusqu’ici exclues), à la différence de la traditionnelle sustaining education (éducation du maintien). (Cf. Soares 2012).

16 « …doctrine soutenant qu’un énoncé scientifi que dépend du domaine tout entier dans lequel il apparaît », Le dictionnaire.

ce modèle reste-t-il ouvert à tout nouvel apport méthodologique, tant que sa rigueur n’est pas compromise.

Les résultats positifs constatés dans l’APC ont conduit plusieurs pays dans le monde à l’adopter : parmi eux l’Australie, le Royaume Uni et la Nouvelle Zélande, où l’APC constitue une composante fondamentale de leur politique nationale de réformes en matière de formation. D’autres régions ou pays, comme l’Amérique Latine, l’Afrique du Sud, la République de Corée ou encore l’Inde, ont adopté l’APC dans un cadre régional de qualifi cations professionnelles permettant la reconnaissance mutuelle des compétences, la transférabilité des unités d’enseignement (credits) et des diplômes ou titres, et la gestion de la force ouvrière. Comme chaque région peut avoir des besoins spécifi ques en matière de compétences, le Conseil de l’Europe a mené sa propre enquête il y a dix ans, afi n d’identifi er ceux de son espace économique. Ces conclusions ont pu compléter les informations venant du secteur industriel.

4.2. Compétences et progression : le procédé méthodologique nord-américain

Que cela concerne l’approche actionnelle en salle de classe ou un parcours en ligne, en APC il s’agit de procéder dans le cadre d’un projet pédagogique, avec un objectif fi nal et les étapes d’un parcours à réussir progressivement jusqu’à cet objectif fi nal. Il est ainsi primordial que les participants soient au courant de toutes les étapes du processus : du niveau exigé ; du contenu et ses composantes ; de la manière dont les savoirs et les compétences sont évalués ; ou des étapes qui servent de tremplin dans la progression. Surtout en apprentissage auto-dirigé, et dans la limite du raisonnable, le rythme de travail dans l’APC peut être ajusté au rythme de progression de l’appre-nant17. La valorisation de l’autonomie impose aussi le développement de la compétence métacognitive (savoir apprendre), où l’apprenant est amené à découvrir des stratégies effi caces d’apprentissage pour mieux avancer.

Les organigrammes et les tableaux qui suivent ont pour but d’illus-trer le processus de constitution d’une approche par compétences – de la conception européenne jusqu’aux éléments pour la création d’une séquence didactique, en passant par la mise en place d’un dispositif de formation. Les organigrammes sont en effet fréquents dans l’APC, permettant de mettre en avant les aspects clés d’un système de formation, sa dynamique, ainsi que son degré d’évolution.

17 Selon le constructivisme (construire continuellement sur la base des acquis), l’appre-nant peut progresser selon son propre rythme d’apprentissage. Le présentiel impose la contrainte temporelle de la durée du cours (time-based), or l’apprenant n’est pas forcément en état de réceptivité (learning readiness) à tout moment.