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A - À missions constantes, des marges de manœuvre à exploiter

Dans le document LA POSTE (Page 133-136)

Le contrat d’entreprise 2013-2017 souligne dans son préambule que le contexte financier dans lequel il s’inscrit est particulièrement contraint pour le groupe La Poste. Le montant des compensations ne suffisant pas à assurer l’équilibre économique et financier des missions de service public, les contraintes de La Poste devraient être prises en compte dans la définition du cadre d’exercice de ces missions. Or, des marges de manœuvre existent pour la plupart d’entre elles qui, sans remettre en cause ni dégrader le contenu de la mission, permettraient de desserrer ces contraintes.

Ainsi que l’a indiqué la Cour dans le cadre de l’insertion au rapport public annuel 2016176 sur les facteurs et la distribution du courrier, faciliter la desserte des boîtes aux lettres, démarche qui ne nécessite que des évolutions réglementaires, pourrait contribuer à cet objectif. Les conditions d’exercice du service universel postal en France étant par ailleurs plus exigeantes que les normes arrêtées au niveau européen, notamment en termes de fréquence de distribution, certains paramètres pourraient être modifiées afin d’atténuer le coût de ces exigences. Sans même évoquer le passage, pour le courrier177, d’une distribution de six jours sur sept à une distribution de cinq jours sur sept, plusieurs solutions intermédiaires pourraient être envisagées, notamment grâce aux outils de tri dont s’est dotée La Poste dans le cadre du plan « Cap Qualité Courrier

». Le principe d’une distribution six jours sur sept pourrait être conservé

176 Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, Tome 1. Les facteurs face au défi de la baisse du courrier : des mutations à accélérer. La Documentation française, février 2016, 696 p., disponible sur www.ccomptes.fr

177 Pour mémoire, l’écrasante majorité des flux de colis ne relève pas du service universel postal, à l’exception des Colissimo guichet, qui correspondent, pour l’essentiel, à des envois entre particuliers. La tendance pour le colis est inverse et la fréquence de distribution devrait s’accroître.

mais avec un caractère pleinement effectif uniquement pour les colis et les courriers prioritaires, en constituant la « liasse du facteur » de manière telle que celui-ci ne s’arrête pas pour desservir une adresse s’il n’y a pas de courriers prioritaires ou de colis pour cette adresse, et que les lettres

« vertes » et « économiques » soient considérées comme pouvant encore attendre (distribution dite « à date »).

De même, la création d’une offre en « J+2 » dans le cadre du service public de transport et de distribution de la presse (là où le choix s’opère aujourd’hui entre du « J+1 », du « J+4 » et du « J+7 ») pourrait donner un peu plus de souplesse à La Poste. Le resserrement des titres éligibles à ces tarifs préférentiels constitue également une piste que la Cour avait mise en avant dans sa communication à la Commission des finances du Sénat sur « Les aides de l’État à la presse écrite »178. Lancée en 2015, la réforme visant à distinguer, au sein de la presse magazine, une catégorie de titres dits « de la connaissance et du savoir » bénéficiant de tarifs plus avantageux et d’imposer aux autres titres un rythme plus élevé d’augmentation des tarifs (5 % par an contre 3 %) participait de cette idée179.

S’agissant de la présence postale territoriale, l’adaptation du réseau par transformation des bureaux de poste en points de contact constitue une démarche à poursuivre. Les exigences en densité et en nombre de points de contact pourraient s’accommoder par ailleurs d’une plus grande diversification des formats des points de contact soit par une plus grande spécialisation (évoquée supra au I-B 1) susceptible de produire des économies et des gains de technicité soit par le développement des mutualisations :

- entre deux branches de La Poste, comme c’est le cas des facteurs-guichetiers, qui assurent à la fois les missions de distribution du courrier et de guichet180 ;

- avec d’autres services publics, comme dans les maisons de service au public (MSAP) accueillies en bureau de poste (voir encadré au chapitre II, IV- B), avec la possibilité d’enrichir, à terme, les services rendus par le point de contact postal, comme cela a été le cas au Portugal.

178 Cour des comptes, communication à la commission des finances du Sénat : Les aides de l’État à la presse écrite, juillet 2013, 184 p., disponible sur www.ccomptes.fr

179 Comme indiqué précédemment, cette réforme n’a toutefois pas vu le jour.

180 En 2015, 256 bureaux de poste facteurs-guichetiers ont été créés, auxquels s’ajoutent 91 bureaux créés entre janvier et avril 2016.

Les mutualisations de services publics au sein du réseau postal : l’exemple du Portugal

En novembre 2013, un protocole d’accord a été signé entre CCT Correios181, la poste portugaise, et le gouvernement portugais afin de lancer un large programme de création d’ « Espaces citoyen ».

L’Espace Citoyen constitue un nouveau modèle de service assisté regroupant les services disponibles sur l’internet de plusieurs organismes publics sur un seul point d’accès physique. Complémentaire du réseau existant, ce dispositif ne vise pas, selon le gouvernement portugais, à remplacer les formes traditionnelles de services de l’administration publique mais à favoriser l’acculturation au numérique de la population

Ces nouveaux « Espaces citoyens » permettent, entre autres, la délivrance des permis de conduire, le traitement des questions relatives à l’emploi et à la formation professionnelle, la réalisation d’un changement d’adresse, la gestion des demandes de carte européenne d’assurance maladie ou de renouvellement de carte d’identité et permis de séjour.

À titre expérimental, des guichets sont déjà en place dans 24 bureaux de poste et assurent une large gamme de services pour le compte de 15 entités administratives. Le gouvernement vise à terme la création de 1 000 Espaces citoyen en bureaux de poste et mairies. Dans les établissements postaux, ces services sont assurés à un comptoir réservé, par des guichetiers formés au préalable par l’Agence pour la modernisation administrative (AMA). CTT-Correios est rémunéré en fonction du nombre d’opérations effectuées.

Source : Observatoire national de la présence postale territoriale.

S’agissant enfin de la mission d’accessibilité bancaire, plusieurs de ses paramètres étant définies par voie réglementaire ou par la convention signée entre LBP et l’État, il serait également possible de les faire évoluer sans recourir à la loi. Néanmoins, les bénéficiaires de cette mission étant des personnes financièrement et socialement fragiles, il ne serait vraisemblablement pas opportun de jouer sur ces critères, sans reconsidérer, plus globalement, l’objectif et les modalités de la mission.

En dépit d’une définition universelle, la mission d’accessibilité bancaire bénéficie en effet essentiellement aux détenteurs de livrets A ne disposant

181 Société anonyme totalement privatisée depuis septembre 2014, CTT-Correios a réalisé en 2014 un chiffre d’affaires de 719 M€. L’entreprise compte actuellement 12 253 employés et gère un réseau de 2 317 bureaux (dont plus des deux-tiers sont gérés en partenariat). Le courrier représente 72,2 % de son chiffre d’affaires, le colis/express 17,6 % et les services financiers 10,2 %.

pas d’autre compte et utilisant celui-ci comme un quasi-compte courant182. Pour ces publics, pour lesquels l’utilisation d’espèces reste le moyen de paiement privilégié, l’accès à de l’argent liquide au guichet, rendu possible par le réseau dense des bureaux de poste, semble constituer un critère important. Mais cette fonction sociale du guichet, qui concerne également les détenteurs de comptes courants de La Banque postale, dépasse largement le champ de la mission d’accessibilité.

Ce dernier exemple démontre que toute réforme de grande ampleur des missions de service public de La Poste ne peut être menée sans une réflexion de fond sur les besoins à satisfaire, les objectifs assignés aux missions et les attentes des bénéficiaires. Il apparaît par ailleurs indispensable que La Poste soit à même de fournir des évaluations précises des économies attendues des différents scenarii d’évolutions des missions susceptibles d’être proposés, ainsi que la Cour l’avait déjà souligné, au sujet du service universel postal, dans le cadre de l’insertion au rapport public annuel 2016 sur les facteurs et la distribution du courrier et des colis.

B - Quels services pour quel coût ? Des options de fond

Dans le document LA POSTE (Page 133-136)