• Aucun résultat trouvé

Chapitre I : Mise en place de l’enquête de terrain et méthodologie

E) Méthodologie de l’enquête

1) Méthodologie : le recueil des données

a) Méthodologie d’entretien

La méthode de recueil des données que j’ai mobilisée s’inspire des méthodes d’entretien ethnographique semi-directif (Savoie-Zajc, 1997, Imbert 2010) et compréhensif (Kaufmann, 1996) développées en sciences sociales et humaines pour la recherche qualitative148.

Comme je l’ai précédemment indiqué, j’ai eu l’occasion de me familiariser avec ce type de méthodologie d’entretien lorsque je travaillais au Centre d’éthique clinique de l’hôpital Cochin. Toutefois, je me suis distingué de la manière dont procèdent les chercheurs du Centre dans le cadre des protocoles de recherche qu’ils sont amenés à développer en raison du fait que, contrairement à ce que suppose la méthodologie de la structure, je travaillais seul et non en équipe.

Je souhaite ici préciser la méthodologie propre que j’ai adoptée en l’articulant aux références sur lesquelles je me suis appuyé. J’ai choisi, par souci de clarté et en vue d’éviter une multiplication de renvois bibliographiques, de me rapporter essentiellement dans cette partie consacrée au recueil des données à l’ouvrage de Van Campenhoudt et Quivy, intitulé «  Manuel de recherche en sciences sociales  » (Van Campenhoudt, Quivy, 2011). Celui-ci présentant d’une part l’avantage d’être extrêmement clair. Ceci ne m’empêchera toutefois pas - dans cette partie consacrée au recueil des données - de mobiliser d’autres auteurs que ceux de l’ouvrage précédemment cité lorsque cela m’apparaîtra pertinent, ou lorsqu’il me semblera intéressant de rattacher l’idée développée

La littérature dans le domaine de la recherche qualitative en sciences sociales est abondante, il existe un

148

nombre important de méthodologies et d’ouvrages aux variations plus ou moins importantes, qui se rapportent à une longue tradition de l’enquête sociologique et ethnographique (notons parmi eux notamment : I. Aubin-Auger, 2008 ; S. Beaud 1996, S. Beaud et F. Weber, 1998 ; A. Blanchat, 1985 ; Glaser et Strauss, 1967 ; Kaufmann, 1996, 2011 ; J. Kivits et al, 2016 ; Michelat, 1975 ; Paillé et Muchielli, 2012 ; Van Campenhoudt, Quivy, 2011).

à l’un ou l’autre de ses illustres représentants dans le domaine des sciences sociales. Notons par ailleurs que le manuel rédigé par Van Campenhoudt et Quivy est bien entendu lui-même nourri de multiples sources et se base sur une pratique de la sociologie qui s’inscrit dans une longue tradition.

Comme annoncé, la méthode de recueil des données que j’ai mobilisée renvoie à la méthode d’entretiens ethnographiques semi-directifs et compréhensifs. L’«entretien semi- directif apparaît comme le meilleur compromis entre le ‘‘laisser-aller’’ de l’entretien non- directif et le dirigisme de l’entretien directif qui prend quasiment la forme d’un interrogatoire plutôt que d’un entretien » (Fugie, 2010). Quant à l’entretien compréhensif, il « ne s’oppose aucunement à l’entretien semi-directif mais le prolonge » (Fugier, 2010), en enjoignant le chercheur à travailler sur le mode de la conversation et de l’adaptation. Ce type d’entretien est exigeant en ce sens qu’il nécessite de provoquer l’engagement de l’enquêté, ce qui suppose inévitablement celui de l’enquêteur.

Lors des entretiens, il s’agissait pour moi d’inviter mon interlocuteur à s’inscrire dans un récit narratif concernant l’histoire de la situation qui était en cause, en l’encourageant à insérer celui-ci au sein de sa propre « histoire de vie », dans son «  vécu  »149 ( Van Campenhoudt, Quivy, 2011, p. 70). J’ai systématiquement veillé à tenir compte du contexte d’énonciation dans lequel ce récit s’inscrivait lorsque je me rapportais aux propos de mes interlocuteurs, comme le suggèrent Van Campenhoudt et Quivy. Il s’agissait essentiellement d’inciter la personne rencontrée à décrire la situation telle qu’elle l’avait vécue et de l’encourager à indiquer la façon dont elle percevait le vécu que pouvaient en avoir les différentes parties impliquées directement dans la situation. La démarche vise principalement à comprendre comment la personne perçoit la situation en cause, la manière dont elle se situe en tant qu’agent moral vis-à-vis de celle-ci et ce qu’elle implique à ses yeux, autant d’un point de vue personnel que collectif. D’autre part, notons que j’ai également accordé une attention particulière à ce qui n’émergeait pas des entretiens, alors que j’aurais pu imaginer que cela serait le cas (Goffman, 1961).

Van Campenhoudt et Quivy ne précisent pas ce qu’ils entendent par « vécu ». En ce qui me concerne,

149

lorsque je mobilise le terme de « vécu » dans ce travail, il renvoie à l’éprouvé, au ressenti et à la perception que peuvent décrire les personnes rencontrées au regard de la situation investiguée. L’usage que je fais de ce terme renvoie en définitive à la « subjectivité » de mon interlocuteur, et à la manière dont il se positionne en tant qu’agent moral par rapport à la situation en question.

Il s’agissait pour moi de formuler mes interventions de manière aussi ouverte que possible, afin que l’interviewé puisse exprimer sa propre «  réalité, dans son propre langage, avec ses propres cadres de référence (Van Campenhoudt, Quivy, 2011, p. 63). Bien que le chercheur soit nécessairement impliqué dans l’entretien, il s’agissait pour moi de ne pas imposer mes catégories de pensées à travers la manière dont j’intervenais durant l’entretien, notamment lorsqu’il m’apparaissait nécessaire de recentrer ce dernier ou d’en relancer la dynamique. Le chercheur doit en effet veiller à «  s’abstenir de s’impliquer lui-même dans le contenu de l’entretien, notamment en s’engageant dans des débats d’idées ou en prenant position à l’égard des propositions du répondant  » (Van Campenhoudt, Quivy, 2011 p. 63).

Mon parti-pris était de me positionner dans une posture d’«  apprentissage  » et de considérer que chaque personne rencontrée était légitime de son point de vue. Il s’agissait de faire sentir à mon interlocuteur que je venais apprendre auprès de lui, en le plaçant en « position haute » (Grell, 1986). « L’accès à un dialogue authentique nécessite, voir exige, pour le chercheur d’être à l’écoute, attentif, patient, et curieux de l’Autre, de son histoire, afin d’entrer dans son univers de sens pour le décrypter ensuite tout en gardant la “ juste distance “ » (Imbert, 2010). 

Il est important de préciser ici, qu’un point distingue la méthode que j’ai mobilisée de celle proposée par Van Campenhoudt et Quivy : alors que ces deux auteurs considèrent l’enregistrement des entretiens comme indispensable, je n’ai pas souhaité procéder de cette manière. En effet, comme mentionné, l’expérience m’a permis de constater que la présence d’un enregistreur génère un phénomène de rétention de la parole auprès des personnes interviewées et est susceptible de les perturber, car l’enregistreur semble donner l’impression aux personnes enquêtées que les propos qu’ils délivrent sont comme « figés dans le marbre », davantage que lorsque la prise de note est réalisée sous leurs yeux. J’ai donc opté pour la prise de note à main levée et je me suis astreint à retranscrire ces notes rapidement après les entretiens. Bien entendu, la prise de note est un exercice difficile car elle peut vite distraire le chercheur si celui-ci n’est pas rompu à l’exercice. Mais c’est une manière de procéder qui s’apprend et j’ai largement eu l’occasion de la mettre en application de par le passé. Par ailleurs, contrairement à ce qui est généralement reproché à cette technique, loin de mettre une distance entre le chercheur et son interlocuteur, car la prise de note distrairait ce premier, mon expérience tend plutôt à souligner qu’elle permet davantage de proximité que la technique impliquant la présence

d’un enregistreur. La prise de note comporte un autre avantage, elle permet au chercheur de passer en revue durant l’entretien les propos de la personne interviewée et d’ainsi pouvoir creuser certains points si le besoin s’en fait sentir. La technique de l’enregistreur fait reposer ce passage en revue en cours d’entretien sur l’unique mémoire du chercheur.

b) La procédure d’entretien dans le cadre de l’enquête

Les entretiens proposés, dans le cadre de ma recherche, aux soignants et aux proches - à condition que les proches de ces derniers existent et qu’ils soient d’accord pour s’entretenir avec moi - ont consisté en une conversation suffisamment longue - de 45 à 60 minutes, parfois plus - pour bien comprendre les difficultés rencontrées concernant le respect de l’autonomie de la personne malade ainsi que celles liées au consentement de cette dernière concernant un ou plusieurs soins particuliers. Comme cela sera développé plus loin, le type d’entretien semi-directif que j’ai mobilisé dans le cadre de mon projet de recherche consistait pour moi à inviter mon interlocuteur à un récit narratif et comprendre le contexte personnel dans lequel ce récit s’inscrit (voir Quintin, 2014). L’entretien était aussi mené de façon à connaître les éléments utiles pour bien comprendre la singularité de la situation étudiée (Farmer et al, 2013). « L’entretien semi-directif est une conversation ou un dialogue qui a lieu généralement entre deux personnes. Il s’agit d’un moment privilégié d’écoute, d’empathie, de partage, de reconnaissance de l’expertise du profane et du chercheur. Ce dernier ayant établi une relation de confiance avec son informateur va recueillir un récit en s’appuyant sur un guide préalablement testé et construit à l’issue de travaux de recherche exploratoire » (Imbert, 2010, p. 23-34).

Les moments de dialogue avec les patients étaient accomplis selon le même modèle que celui mobilisé pour les entretiens avec les soignants et les proches, mais adaptés en fonction du degré de compréhension des patients et du temps qu’ils pouvaient consacrer à la rencontre, en fonction de leur état.

La grande majorité des entretiens ont été réalisés à l’hôpital, hormis quelques entretiens avec les proches qui pouvaient se dérouler à domicile ou dans un lieu public. Les entretiens avec les patients se faisaient généralement dans leur chambre, tandis que ceux avec les soignants - et ceux avec les proches lorsqu’ils se déroulaient à l’hôpital - avaient lieu dans une salle à l’écart, calme et propice à la situation d’entretien.

Avant l’entretien, je ré-expliquais les grandes lignes du projet, répondais aux questions de la personne rencontrée, rappelais le droit au refus et au retrait de l’enquête, recueillais le consentement au moyen d’un formulaire qui était accompagné d’explications adaptées, et donnais la lettre d’information si celle-ci n’avait pas encore été reçue par l’enquêté.

Lors de l’entretien, si celui-ci s’avérait être trop éprouvant pour la personne rencontrée ou tout simplement lorsqu’elle semblait ne plus comprendre la nature de l’activité dans laquelle nous étions engagés, je n’hésitais pas à interrompre celui-ci. Ce fut le cas à plusieurs reprises lors d’entretiens réalisés avec certains patients.

Je vous propose ici rapidement d’envisager la situation d’entretien que j’ai vécue avec Monsieur Edmond150 (comme pour chaque personne ayant accepté de participer à cette enquête, les noms ont été changés en vue de préserver l’anonymat des intéressés) afin d’illustrer un des cas de figure qui a pu m’amener à renoncer à la poursuite de l’entretien.

Monsieur Edmond a été hospitalisé dans un service parisien (P2) suite à une chute survenue dans la maison de retraite où il résidait depuis plus d’un an. J’avais eu l’occasion, avant de m’entretenir avec Monsieur Edmond, de rencontrer son épouse, qui m’avait dit que son mari était d’accord et même «  ravi  » de rencontrer un «  jeune étudiant » dans le cadre de son travail. Le médecin n’avait pas émis d’objection à ce que je rencontre ce patient qui présentait, selon les mots du médecin, «  un Alzheimer modéré » (stade 2).

Lorsque je suis arrivé devant la chambre du patient, j’ai frappé à la porte et, n’ayant pas de réponse, ai doucement ouvert. Monsieur Edmond était assis dans son fauteuil et m’a regardé, sourire aux lèvres ; je me suis présenté, Monsieur Edmond en a fait de même et apparaissait en effet heureux de ma visite. J’ai commencé la discussion en lui expliquant l’objet de ma démarche : il me posait des questions cohérentes, paraissait curieux de savoir à quoi son histoire allait bien pouvoir me servir et avait bien compris que je m’intéressais dans le cadre de ma recherche à la manière dont les soignants respectaient les choix qu’il était amené à exprimer par rapport aux soins qui lui étaient proposés.

L’ensemble des noms des personnes ayant participé à l’enquête ont été anonymisés. Dans la

150

suite du texte, j’utiliserai des noms de famille pour me rapporter aux patients et des prénoms lorsqu’il s’agira des soignants, ces derniers s’étant généralement présentés à moi lors des entretiens en utilisant leurs prénoms.

L’échange dura quelques minutes, l’attention de Monsieur Edmond semblait assez inégale mais ses propos restaient relativement cohérents. Cependant, alors que j’essayais de comprendre les raisons pour lesquelles il refusait de garder le bandage qui servait à lui immobiliser le poignet droit qui avait été luxé en raison de sa chute, Monsieur Edmond se mit à manger, par petits bouts qu’il déchirait, le bandage en question. Je l’ai alors interrogé sur son geste en essayant de le confronter au danger potentiel d’une telle ingestion, mais il m’a rétorqué que c’était  la meilleure manière selon lui de soigner son poignet. Il m’a demandé pourquoi je l’empêchais de se soigner, je lui ai dit que ce n’était pas mon intention, que je souhaitais simplement lui éviter d’ingurgiter son bandage. Il m’a alors demandé pourquoi j’étais là, je lui ai à nouveau expliqué l’objet de ma présence, tout en percevant bien que mes propos ne faisaient plus guère l’objet de la même réceptivité qu’il y a quelques instants. J’ai été surpris de la rapidité de ce décalage. La discussion que nous avions engagée il y a quelques minutes semblait d’un seul coup avoir perdu toute intelligibilité, et l’attitude de Monsieur Edmond me confortait dans l’idée qu’il ne saisissait plus la raison de ma présence à ses côtés. Il n’avait plus l’air de comprendre ce que je lui voulais, il continuait à manger son bandage, avec application et délectation. J’ai alors décidé de ne pas prolonger la rencontre et d’appeler quelqu’un pour lui extraire les morceaux de tissu qu’il mâchonnait consciencieusement. Je lui ai dit que je reviendrais la semaine prochaine, et que, s’il en avait l’envie, je serais heureux de repasser le voir. Monsieur Edmond n’a pas réagi. Alors qu’il était quelques instants auparavant avenant envers moi, curieux de ma démarche, m’interpellant de manière appropriée et pertinente, Monsieur Edmond m’est subitement apparu hagard, détaché, absent. La semaine d’après, lorsque je suis revenu dans le service, Monsieur Edmond était reparti dans sa maison de retraite. Ainsi, lorsque le sens de ma présence ne semblait plus être perçu ou lorsque celle-ci apparaissait indésirable, je me retirais, comme ce fut le cas avec Monsieur Edmond.

• Guide d’entretien

Les entretiens semi-directifs tels qu’ils sont généralement mobilisés dans le cadre de recherches qualitatives de ce type se basent sur un guide d’entretien. Le choix d’un guide destiné aux entretiens semi-directifs est crucial, car ce guide détermine en partie la qualité de l’enquête et de ses résultats. La réalisation de l’entretien semi-directif implique la prise en compte d’un certain nombre d’éléments parmi lesquels figurent les « buts de l’étude, le cadre conceptuel, les questions de recherche, la sélection du matériel empirique, les

procédures méthodologiques, les ressources temporelles personnelles et matérielles disponibles (Flick, 2007) » (Imbert, 2010, §11). Il s’agit, lors de l’entretien, de proposer des questions ouvertes, en opposition aux questions fermées, qui se limitent à une réponse par l’affirmative ou la négative. Le guide doit permettre une certaine souplesse, il est davantage un support permettant de circonscrire les thèmes à explorer qu’un questionnaire à suivre scrupuleusement. Le but étant d’encourager la personne rencontrée à se conduire de manière «  endogène  » (Bazsanger et Dodier, 1997) et à déployer librement son propos, tout en la recadrant au moyen d’une nouvelle question lorsqu’elle s’éloigne du champ d’investigation travaillé. Il s’agit tout à la fois de créer de la connivence, d’encourager la personne à accorder une attention aux tensions internes de son propre propos, mais aussi de se méfier des « fables », de relever quand cela s’avère pertinent les contradictions dans le discours, etc.

Ce guide d’entretien doit davantage être compris comme un support servant à reprendre les différents points essentiels qui doivent être abordés que comme une liste de questions précises auxquelles il s’agirait de se rapporter selon un ordre préétabli. Lorsque l’intérêt du projet avait été bien exposé et compris, et que j’avais réussi à mettre en confiance - dans une dynamique bienveillante - la personne rencontrée, celle-ci pilotait généralement en grande partie elle-même son propre entretien (Van Campenhoudt, Quivy, 2011). Au fil de la rencontre, les personnes parlaient généralement spontanément de certains points sans que je n’aie à les aborder.

Comme mentionné, les entretiens étaient individuels et réalisés essentiellement sur un mode narratif et discursif.

Les entretiens avec les soignants commençaient systématiquement par l’histoire de leur parcours professionnel, par la manière dont ils se définissaient en tant que soignants, les raisons qui les avaient menés à faire ce métier, quels en étaient d’après eux les avantages, mais aussi les inconvénients.

Ensuite, aussi bien pour les entretiens avec les proches et les soignants, que pour les rencontres avec les patients, j’entamais toujours la discussion en m’intéressant à l’histoire de la personne malade, à ce qui a compté et compte dans sa vie, à ce qui la caractérise, et à son parcours, tant biographique que médical. Je souhaitais savoir si la personne hospitalisée avait anticipé une éventuelle entrée en maladie, si elle en parlait et si elle

avait communiqué certaines volontés sur la manière dont elle voyait les choses, aussi bien de manière formelle (dispositions particulières comme la désignation d’une personne de confiance, la rédaction de directives/déclarations anticipées) qu’informelle. Cette entrée essentiellement « biographique » dans l’entretien était valable aussi bien pour les patients et leurs proches que pour les soignants rencontrés, car il me semblait intéressant d’également questionner les soignants sur ces éléments, afin d’envisager l’importance qu’ils pouvaient y accorder dans leurs pratiques quotidiennes et ce que cela impliquait : s’ils recherchaient ce type d’éléments, ou si au contraire ils évitaient de le faire et pour quelle(s) raison(s). J’interrogeais également les uns et les autres sur la manière dont ils percevaient l’état du patient, aussi bien d’un point de vue physique que psychologique. Cette première phase d’entretien était importante, il fallait mettre les personnes en confiance et les inciter à s’exprimer librement, c’est pourquoi je faisais en sorte de ne pas donner l’impression d’être contraint par un questionnaire fixe qui pourrait donner le sentiment qu’il y avait de bonnes ou de mauvaises réponses. J’engageais les entretiens comme si je faisais une rencontre, il s’agissait pour moi de découvrir des manières d’être et d’agir différentes, permettre à celles-ci de se déployer afin de comprendre le ou les sens que pouvait accorder la personne à la situation dont il était question dans ces entretiens. L’objectif était bien de comprendre le sens, la perception que la personne avait de la situation et du contexte dans lequel celle-ci s’inscrivait. Bien que je ne m’y rapportais que très peu de manière formelle, les questions types pour cette première phase d’entretien étaient les suivantes :

> Le patient

Quelle est son histoire?

Comment s’est passée son entrée en maladie et quel est son état actuel?

Quels sont les principaux éléments qui affectent le patient depuis son hospitalisation ? Comment se passent sa prise en charge quotidienne et les relations avec les soignants ? Directives/déclarations anticipées et personne de confiance ? Existence ? Pertinence ?

Je m’intéressais ensuite à la difficulté soulevée par un ou plusieurs soignants au sujet du consentement et du respect de l’autonomie du patient concernant un ou plusieurs soins.