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Chapitre I : Sources normatives (nationales et supranationales)

A) Introduction du chapitre

Depuis le procès de Nuremberg, la notion de consentement du sujet a acquis une place centrale, dans le champ de l’expérimentation d’abord, puis dans celui des pratiques de soin médical. (Beauchamps, Childress, 2001)

La notion de consentement en médecine est devenue une pierre angulaire du soin. Du serment d’Hippocrate, réactualisé en 1996 (Serment de Genève, 1996), aux textes récents sur les droits des malades, en passant par le code de déontologie médicale et les recommandations de bonnes pratiques, l’accord du patient est aujourd’hui systématiquement mis en avant comme socle de la relation médecin-malade. Escamoter cette exigence, c’est nier un droit fondamental.

Comme cela a été mentionné en introduction, l’exigence contemporaine qui vise a fonder l’éthique et le droit sur la notion de consentement renvoie directement à l’idéal kantien d’autodétermination du sujet. Le droit médical ainsi que l’éthique biomédicale contemporaine - qui ont intégré la perspective kantienne de l’autonomie du sujet - partent du présupposé anthropologique de l’«  agentivité humaine  » (human agency), qui repose sur une convention normative selon laquelle chaque individu serait indépendant, rationnel et libre d’agir selon sa propre volonté.

La primauté accordée au principe d’autonomie - que ce soit dans le domaine de la recherche ou du soin - se retrouve sous diverses formes aussi bien dans les normes de source supranationale - Convention du conseil de l’Europe sur les droits de l’homme et la biomédecine d’Oviedo (1997), Convention des Nations Unies (2014), Déclaration universelle sur la bioéthique et les droits de l’homme (2005), Charte des droits fondamentaux de l’Union européenne (2012), Déclaration d’Helsinki (2013) etc. - que nationales , les premières se trouvant au sommet de la pyramide des normes et devant 46 théoriquement s’appliquer aux différents états ayant signé et ratifié ces chartes et conventions.

Parmi ces textes, la Convention du conseil de l’Europe sur les droits de l’homme et la biomédecine d’Oviedo constitue une source normative supranationale majeure, notamment dans le champ qui nous occupe. Bien que la Belgique n’ait (contrairement à la

Belgique : loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie ; loi du 14 juin 2002 relative aux soins

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palliatifs ; loi du 22 aout 2002 relative aux droits des patients ; loi du 17 mars 2013 réformant les régimes d'incapacité et instaurant un nouveau statut de protection conforme à la dignité humaine. France : loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ; loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie ; loi du 5 mars 2007 portant sur la réforme de la protection juridique des majeurs ; loi du 5 juillet 2011 relative aux droits et à la protection des personnes faisant l'objet de soins psychiatriques et aux modalités de leur prise en charge.

France) ni signé ni ratifié la Convention du conseil de l’Europe sur les droits de l’homme et la biomédecine d’Oviedo pour des raisons que je n’exposerai pas ici, de manière 47 générale, le droit commun belge, aussi bien que le droit français, se calque en grande partie sur les règles édictées par le Conseil de l’Europe. Dans son article 5, la Convention d’Oviedo déclare qu’« une intervention dans le domaine de la santé ne peut être effectuée qu’après que la personne concernée y a donné son consentement libre et éclairé ». Le texte poursuit en mentionnant à l’alinéa 2 que : « Cette personne reçoit préalablement une information adéquate quant au but et à la nature de l’intervention ainsi que quant à ses conséquences et ses risques. La personne concernée peut, à tout moment, librement retirer son consentement ».

Cet impératif du recueil du consentement dans le secteur du soin a été consacré en France et en Belgique en 2002. Ces deux pays ont en effet de manière contemporaine adopté une loi relative aux droits des patients qui stipule qu’aucune atteinte à l’intégrité 48 physique n’est légitime si la personne concernée n’y consent pas. L’adoption de ces textes de loi en France et en Belgique s’inscrit dans une dynamique dite de « démocratie sanitaire  » qui a vu fleurir au début des années 2000 une augmentation croissante de dispositions législatives permettant aux patients de disposer d’une plus grande autonomie face à l’offre de soins. L’apparition en France et en Belgique début des années 2000 de ces différentes lois «  marque le passage d’un modèle à un autre : le professionnel 49 ‘sachant’ n’est plus celui qui décide à la place du patient, compte tenu de ses compétences et de ses connaissances, mais celui qui lui transfère les informations

disponibles afin de le mettre en mesure de pouvoir prendre une décision  » (Thouvenin,

2011, p. 310).

Je reviendrai plus longuement sur les spécificités de ces dispositions législatives ; notons à ce stade qu’en principe, ce droit fondamental du respect de l’autonomie dans le domaine du soin - qui se traduit notamment par l’impératif du recueil du consentement - est

C’est la cour européenne des droits de l’homme (CEDH) qui est chargée de veiller à la bonne

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application des droits proclamés par la Convention du conseil de l’Europe d’Oviedo. En effet, les droits édictés par cette Convention sont contraignants pour tout pays l’ayant signé et ratifié.

Belgique : Loi du 22 août 2002 relative aux droits du patient.

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France : Loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé. Belgique : loi du 28 mai 2002 relative à l’euthanasie ; loi du 14 juin 2002 relative aux soins

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palliatifs ; loi du 22 aout 2002 relative aux droits des patients.

France : loi du 4 mars 2002 relative aux droits des malades et à la qualité du système de santé ; loi du 22 avril 2005 relative aux droits des malades et à la fin de vie.

désormais bien ancré dans la loi et il doit, en principe, s’appliquer à tous. Par ailleurs, ce droit à l’autonomie implique également que toute personne «  capable  » a aujourd’hui, aussi bien en Belgique qu’en France, la possibilité de refuser un traitement ; le médecin ayant l’obligation de respecter la volonté de la personne après l’avoir informée des conséquences de son choix . Le médecin  ayant cependant également l’obligation de 50 «  tout mettre en oeuvre  » pour convaincre la personne d’accepter les soins indispensables.

B) Normes relatives aux personnes dont l’autonomie décisionnelle est fragilisée par