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catégorisation prudente

2.3 Le « locuteur natif » : la mort d’un paradigme ? paradigme ?

Le lexicographe, Thomas Paikeday, a mis à mal le concept de « locuteur natif » dans son célèbre ouvrage The Native Speaker Is Dead! (1985), affirmant, dès la préface, qu’il pense avoir affaire à un mythe plutôt qu’à une réalité : « the more I study it (the native speaker), the more it seems a myth propagated by linguists » (Paikeday, 1985 : xiv). Non sans humour, l’auteur prétend que le concept nous échappe un peu, à la manière du Yéti138. Parmi les arguments avancés se trouvent ceux qu’Alan Davies et d’autres vont développer plus tard : la naissance ne peut être le principal critère pour dire si tel ou tel locuteur est un « natif » ; la « langue maternelle », la « première langue » et la « langue native » ne sont pas nécessairement identiques ; certains « locuteurs natifs » sont plus compétents dans une langue autre que leur « langue maternelle » ; les « locuteurs natifs » ont des lacunes en ce qui concerne leur connaissance de la langue139 ; un des professeurs interrogés souligne le fait que tous les « locuteurs natifs » ne s’expriment pas bien140. L’analyse de Paikeday relève avant tout du domaine de la linguistique et n’a pas les résonances politiques des textes d’auteurs comme Phillipson, Pennycook ou plus tard Braine. Il est, en quelque sorte, un précurseur du « mouvement non natif » et sa publication de type pamphlet, a ouvert la voie à des débats qui se poursuivent encore aujourd’hui, débat que Rampton reprend en 1990 dans son article Displacing

138 Op. cit., p. 3.

139 Paikeday cite Christophersen (1973): « It should not be forgotten that so-called “native speakers” often have surprising lacunae in their knowledge of the language, and yet we react differently to these. We may be amused:

“Fancy not knowing that!” But we let the mistake pass because, “After all, it is his own language!” With a foreigner, the expectation that sooner or later he is going to slip up sometimes lead to the presumptions of mistakes which do not exist », p. 3.

140 Prof Chambers: “One need not be proficient at all – not unusually articulate, or rhetorically gifted, or endowed with a large vocabulary – to be a NS” op.cit., p. 30.

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the ‘native speaker’: expertise, affiliation and inheritance141. Rampton, qui donne une orientation sociolinguistique à sa contribution, commence par dresser le constat suivant : les termes « native speaker » et « mother tongue » posent problème et sont très résistants malgré des tentatives de modification qui témoignent, sans doute, du pouvoir de ceux-ci. L’auteur relève cinq définitions du

« locuteur natif » (Rampton, 1990 : 97) liées au contexte d’enseignement, et qui sont largement contestées :

1. A particular language is inherited, either through genetic endowment or through birth into the social group stereotypically associated with it.

2. Inheriting a language means being able to speak it well.

3. People either are or are not native / mother tongue speakers.

4. Being a native speaker involves the comprehensive grasp of a language.

5. Just as people are usually citizens of one country, people are native speakers of one mother tongue.

Cette présentation binaire reprend des définitions déjà en circulation depuis Paikeday, et souligne l’aberration de l’équation un pays-une langue qui ne tient pas compte des réalités multilingues très différentes que nombre d’enseignants connaissent dans leur métier ou dans leur vie. Rampton pense que le paradigme dominant du « locuteur natif » permet de maintenir le Royaume-Uni et les États-Unis au centre de la profession (ELT) et que ces deux pays ont intérêt à ce que le concept reste en circulation. Aujourd’hui, dans un contexte hyper-globalisé où l’anglais est devenu la lingua franca moderne, cette présentation des choses semble quelque peu schématique, car les enjeux commerciaux ne concernent plus que ces deux pays. Le monde a profondément changé depuis la publication de cet article, ce qui peut expliquer un tel décalage. Rampton propose de remplacer le terme « native speaker » par celui d’« expert »142, car un expert acquiert sa compétence qui n’est pas innée (Rampton, 1990 : 98). Un expert peut être mis en cause ; il ne sait jamais tout : « In addition, the notion of expert shifts the emphasis from ‘who you are’ to ‘what you know’, and this has to be a more just basis for the recruitment of teachers » (Rampton, 1990 : 99). Et surtout ici, la notion d’expert déplace le sujet de l’inné vers l’acquis, de l’identité reçue à l’identité construite.

Davies (2003) explore le sens commun du terme native speaker, qu’il définit comme un individu qui peut revendiquer ce statut en vertu de son lieu de naissance ou de son pays d’adoption : « The native speaker is for a start one who can lay claim to being a speaker of a language by virtue of place or country of birth (or adoption) » (Preface : viii). Ce concept va de pair avec le fait que le

141 ELT Journal, vol. 44, n° 2, April, Oxford, Oxford University Press.

142 Ce terme est accompagné de deux autres : « inheritance » et « affiliation » qui sont problématiques même pour Rampton, cf. p. 100.

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« locuteur natif » ne choisit pas de l’être : « The cognate of native is naïf (both through old French) meaning natural, with the sense of “not being able to help it”» (Davies, 2003 : viii). Dans le domaine de la linguistique appliquée, le « locuteur natif » est quelqu’un qui a une connaissance intime de la langue, de l’intérieur (Davies, 2003 : 1). Pour Péter Medgyes, en revanche, dans un article sur le native speaker (in Byram et al., 2004), l’une des difficultés rencontrée par le linguiste ou le sociolinguiste réside dans le flou qui entoure les critères définissant l’appartenance ou non à cette catégorie sociale, le critère de naissance, comme nous l’avons vu avec Rampton, étant pour le moins problématique :

Who then is a native speaker? A native speaker is traditionally defined as someone who speaks a language as their ‘native language’, also called mother tongue or ‘first language’. The trouble is that all the criteria for determining ‘native speakerness’

are fuzzy and controversial, including birth, the most oft-cited prerequisite (Medgyes, in Byram et al., 2004 : 436).

Medgyes rappelle la théorie des cercles concentriques de Kachru (1985), qui place les pays anglophones historiques (Royaume-Uni, USA, Australie, etc.) dans le cercle central (inner circle), car ces pays fournissent la norme linguistique par rapport aux pays du cercle extérieur (outer circle) qui sont dépendants de celle-ci. Pour Ward (cité par Kachru), la notion même de Standard English est une vue de l’esprit : « No one can define [standard English], because such a thing does not exist143 ».

Nous avons vu précédemment qu’un mouvement des professeurs d’anglais non natifs avait pris de l’ampleur depuis le début des années 2000, mouvement qui reprend à son compte le terme même de non-native English-speaking teacher (NNEST), catégorisation qui, paradoxalement, pourrait sembler perpétuer le clivage et les tensions entre ces deux groupes, car il s’agit d’une catégorisation construite contre le modèle dominant. Medgyes rappelle que des substituts ont été proposés à plusieurs reprises pour remplacer les termes de native speaker / non-native speaker, mais qu’aucun n’a réussi à s’imposer face à une étiquette si commode :

For example, Edge (1988) offered ‘accomplished users of English’; Rampton (1990) coined ‘expert speakers and affiliation’, while Jenkins (1996) extended the traditional use of ‘bilingual speakers’ to include both natives fluent in another language and non-natives fluent in English (Medgyes in Byram et al., 2004 : 437).

Visiblement, le terme « locuteur natif » est utile : il offre un raccourci commode et la difficulté à en donner une définition précise en arrange certains, comme le pense Medgyes à propos de Halliday

143 Cf. Medgyes, op. cit., p. 436.

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que cite Thomas Paikeday (1985). Une des notions clés dans ce débat est celle d’appartenance : Davies estime que l’on est un LN ou un LNN à partir du moment où l’on revendique son appartenance à tel groupe. Kramsch (1997) ajoute qu’il faut être reconnu comme tel par le groupe en question or, le plus souvent, les apprenants d’une langue étrangère n’ont pas pour but de devenir de simples imitations/copies conformes du LN. Pour Kramsch, être « locuteur non natif » est même un privilège144. Cette affirmation forte permet de retourner le paradigme, car habituellement, ce sont les « locuteurs natifs » qui sont perçus comme des privilégiés. D’où vient ce privilège ? Pourquoi le mythe est-il si pérenne ?

Dans un article intitulé Post 9/11: Foreign Languages between knowledge and Power145, Kramsch revient sur les orientations de la recherche sur l’acquisition d’une langue seconde aux États-Unis:

The fact that second language acquisition research in the USA initially gravitated towards models of language learning developed by Universal Grammar linguists and by psycholinguists, like Larry Selinker and Steven Krashen, rather than by linguistic anthropologists, like Dell Hymes, says something about the way it viewed the language learner – as an autonomous brain, equipped with a built-in syllabus, a natural order of acquisition, and with learning and communicating strategies to deal with problems arising from mismatches between the individual mind and the social context (Kramsch,2005 : 548).

Si nous lisons entre les lignes, ici, nous pouvons détecter l’influence de Noam Chomsky sur les représentations du « locuteur natif » en didactique des langues : « everyone is a native speaker of the particular language states that the person has grown in his/her brain. In the real world, that’s all there is to say »146. Le « locuteur natif » est à la fois une personne en chair et en os, mais aussi une abstraction idéalisée, et c’est sans doute cette idéalisation qui a contribué à perpétuer un mythe en ce qui concerne la compétence linguistique des personnes LN :

Noam Chomsky (1965 : 34) refers to the native speaker as being both the arbiter of the grammar and (when idealized) as somehow being the model for the grammar. “A grammar is…descriptively adequate to the extent that it correctly describes the intrinsic competence of the idealized native speaker147.

144 Kramsch (1997, p. 368), cité par Medgyes, op. cit., p. 437. Kramsch revient sur ce point dans un article qu’elle a co-écrit avec Patricia Sullivan en 2005 : le locuteur non natif a le privilège de « braconner sur le territoire de l’autre ».

Voir Appropriate Pedagogy, in ELT Journal, vol. 50, n° 3, July 1996, Oxford University Press, p. 199-212.

145 Applied Linguistics, 2005, 26/4 : p. 545-567.

146 Cité par Davies, op. cit., p. 3.

147 Cité par Davies, op. cit. p. 5. George Braine reconnaît également le rôle joué par le modèle chomskyen dans la construction du modèle LN dominant : « This ‘superiority’ of NS teachers had been bolstered by Chomsky’s (1965)

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N’y a-t-il pas un conflit évident entre le « locuteur natif » incarné avec sa compétence linguistique variable et parfois défaillante, et l’abstraction idéelle ? Davies explore les notions importantes de langue maternelle, langue première, langue seconde, langue dominante afin de démontrer que notre langue dominante peut changer au cours de la vie et que la définition proposée par Bloomfield (1933), à savoir que l’on est le « locuteur natif » de la langue que l’on parlait « sur les genoux de sa mère » n’est pas toujours tenable :

The mother tongue and the first language may be different. / What was one’s first language can change over time. One language may be dominant in certain areas of life. / Native speaker means having language X as one’s mother tongue, as one’s first language, as one’s dominant language, as one’s home language (Davies, 2003 : 17-18).

Le « locuteur natif » en chair et en os ne peut donc pas être défini selon des critères communs à tous les « locuteurs natifs ». La réalité derrière le « locuteur natif » stéréotypé (qui, selon Kramsch (2005 : 549) correspondait, au tout début de l’approche communicative, à une personne blanche appartenant à la classe moyenne : « the authentic white middle-class native speaker ») est complexe, variée et sujette au changement, loin de l’image de l’expert monolingue véhiculé par le mythe. Voici une synthèse des aspects linguistiques du LN d’après Davies (2003 : 41-42) :

 On ne finit pas d’apprendre une langue.

 Il existe une très grande variété de LN si l’on tient compte de la chronologie, de la géographie et de la dimension sociale qui modélise la langue (cf. accent, intonation, dialecte, etc.).

 La grammaire de deux LN ne sera pas nécessairement identique.

Si nous partons du principe évoqué par Davies (2003 : 72) que le simple fait d’être un « locuteur natif » ne garantit pas la réussite aux études, nous pouvons mieux situer les remarques des membres de jury du CAPES externe citées précédemment : être anglophone ne suffit pas pour réussir le CAPES, etc. Être « locuteur natif » d’anglais et être PALN ne sont pas synonymes, comme le souligne à plusieurs reprises Martine Derivry-Plard dans sa thèse en abordant la question du

« pouvoir symbolique dominant de l’anglais » (Derivry-Plard, 2003 : 35) sur le marché international des langues où une « hiérarchie symbolique des langues » est le produit de « luttes historiques d’ordre politique, économique et culturel entre les nations ». Cependant, mieux comprendre les compétences du « locuteur natif » peut permettre de mieux cerner les points qu’il

notions that the native speaker is the authoriy on language and that he/she is the ideal informant on grammar », Nonnative speaker English Teachers: Research, Pedagogy and Professional Growth, 2010, p. 3.

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faudra travailler en tant que PALN, points que nous aborderons plus loin. En attendant, quelles sont les compétences que le « locuteur natif » est censé posséder ?

D’abord, selon Davies148, il est censé :

 Avoir des antennes pour reconnaître si tel ou tel énoncé est acceptable ou non ;

 Reconnaître sa langue ;

 Dire si tel ou tel énoncé, son, ou texte pourrait faire partie de sa langue, mais qu’il n’est pas tout à fait « conforme » ;

 Savoir si un nouveau mot ou une nouvelle expression qu’il entend pour la première fois ou qu’il décide d’inventer fait partie de la langue : « in other words, the NS has the capacity and authority for generative creativity in the language » (2003 : 90).

Nous pouvons ajouter à cette typologie les intuitions que le LN peut avoir à propos de sa langue (Paikeday, 1985 : 30), ainsi que la notion de continuum de la naissance à la mort évoquée par David Crystal dans l’ouvrage de Paikeday : « In an ideal NS149, there is a chronologically based awareness, a continuum from birth to death where there are no gaps. In an ideal non-native speaker, this continuum either does not start with birth, or if it does, the continuum has been significantly broken at some point » (Paikeday, 1985 : 69).

Pour Davies, c’est la capacité à maîtriser la syntaxe qui différencie le LN du LNN, sauf qu’être LN ne peut se réduire à la seule compétence linguistique et ne peut être séparé de la compétence de communication, c’est-à-dire l’utilisation de la langue dans un contexte social. Dans sa critique de la linguistique moderne, Hymes (1966) cible Chomsky qui ne tient pas compte de l’aspect socioculturel de la langue :

Consider a recent statement, one that makes explicit and precise an assumption that has underlain much of modern linguistics (Chomsky, 1965, p. 3):

Linguistic theory is concerned primarily with an ideal speaker-listener, in a completely homogeneous speech community, who knows its150 language perfectly and is unaffected by such grammatically irrelevant conditions as memory limitations, distractions, shifts of attention and interest, and errors (random or characteristic) in applying his knowledge of the language in actual performance (Hymes in Duranti (dir.), 1966 : 54).

148 Op. cit., p. 84.

149 Ici, nous comprenons le terme « ideal NS » dans le sens de « locuteur natif compétent » et non dans le sens chomskyen. Cette notion de continuum paraît ancrée dans une conception purement monolingue du LN.

150 C’est nous qui soulignons.

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Dans sa critique de la théorie de Chomsky, Hymes estime que l’absence de toute dimension socioculturelle et l’assimilation, dans cette théorie, de la performance linguistique réelle, concrète, à quelque chose d’imparfait (« fairly degenerate in quality », Chomsky (1965 : 31) cité par Hymes, 1966) ne relèvent pas du hasard151. Pour Hymes, la théorie linguistique chomskyenne est une théorie pour le jardin d’Eden :

Human life seems divided between grammatical competence, an ideal innately-derived sort of power, and performance, an exigency rather like the eating of the apple, thrusting the perfect speaker-hearer out into a fallen world. Of this world, where meanings may be won by the sweat of the brow, and communication achieved in labor (Bonhoffer, 1965, p. 365), little is said. The controlling image is of an abstract, isolated individual, almost an unmotivated cognitive mechanism, not, except incidentally, a person in a social world (Hymes, 1966 : 55-56) .

Davies inclut un chapitre sur la compétence de communication dans son ouvrage, rappelant que le LN sait improviser ou indiquer de façon tacite à son interlocuteur qu’il a compris. On peut s’attendre à ce que le LN sache également employer la langue de façon appropriée et qu’il fasse appel à des stratégies et à des compétences pragmatiques. D’autres avantages mentionnés par Davies concernent la capacité du LN à faire des enchaînements fluides, à effectuer des répétitions pour les besoins de la communication, à faire appel à son répertoire paralinguistique, et à avoir une certaine souplesse d’expression152. Il met l’accent sur le comportement approprié correspondant au groupe d’appartenance153.

Selon Claire Kramsch154, l’approche communicative (Communicative Language Teaching ou CLT) a émergé en réponse à une demande sociale et commerciale croissante dans les années 1970.

L’importance du modèle du « locuteur natif » était le reflet d’une certaine conception de ce que

« bien communiquer » voulait dire : « Successful communication was seen as a matter of correct grammar, coherent discourse, and appropriate sociolinguistics. But it was also in part the outcome of an expanding market place » (Kramsch, 2005 : 548). Pour Kramsch, l’approche communicative constitue une première tentative de démocratisation de l’apprentissage des langues, dans la mesure

151 « I do not think the failure to provide an explicit place for sociocultural features to be accidental. The restriction of competence to the notions of a homogeneous community, perfect knowledge, and independence of sociocultural factors does not seem just a simplifying assumption, the sort that any scientific theory must make », Hymes, op. cit., p. 55.

152 Op. cit., p. 200. Cela rejoint ce que Hartmann avance : « The communicative competence of the NS includes the ability to vary their usage according to the situation in which they find themselves as well as the ability to recognise such variation », cité par T. Paikeday, p. 39.

153 Op. cit., p. 98.

154 Op. cit., p. 548.

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où celui-ci est ancré dans l’aspect fonctionnel de la communication ordinaire avec, comme point de référence incontournable, le « locuteur natif » :

The initial purpose of CLT was to understand each other’s intended meanings by comprehending not only the words but the speech acts and notions behind the words.

In this respect CLT represented a first attempt to democratize language learning by wrestling it from the exclusive control of philologists and literature scholars. It brought language use down to the functional level of streets and supermarkets, under the emulation of the authentic white middle-class native speaker (Kramsch, 2005 : 549).

Mais derrière la question des normes linguistiques et sociolinguistiques à atteindre se profile celle, complexe, du pouvoir. Holliday (2006) propose une courte synthèse du concept de native-speakerism, l’idéologie qui, selon lui, domine le champ de l’enseignement de l’anglais (ELT). Le terme « native speaker » et son pendant « non-native speaker » sont des constructions idéologiques qui servent les intérêts du groupe dominant, ce même groupe qui fait preuve, selon l’auteur, d’attitudes essentialistes envers les apprenants et les collègues qui ne sont pas du monde occidental anglophone (Holliday, 2006 : 385). Si les enseignants LN souhaitent comprendre les discours et les réalités de leurs étudiants et collègues venant de pays situés en dehors de l’Occident anglophone, et si l’on souhaite détricoter cette idéologie, il faudra que les membres du groupe dominant changent leur manière de penser afin de promouvoir de nouvelles relations qui permettent de rompre avec le mythe dans lequel l’enseignant « natif » apporterait « a ‘superior’ culture of teaching and learning to students and colleagues who are perceived not to be able to succeed on their own terms »

Mais derrière la question des normes linguistiques et sociolinguistiques à atteindre se profile celle, complexe, du pouvoir. Holliday (2006) propose une courte synthèse du concept de native-speakerism, l’idéologie qui, selon lui, domine le champ de l’enseignement de l’anglais (ELT). Le terme « native speaker » et son pendant « non-native speaker » sont des constructions idéologiques qui servent les intérêts du groupe dominant, ce même groupe qui fait preuve, selon l’auteur, d’attitudes essentialistes envers les apprenants et les collègues qui ne sont pas du monde occidental anglophone (Holliday, 2006 : 385). Si les enseignants LN souhaitent comprendre les discours et les réalités de leurs étudiants et collègues venant de pays situés en dehors de l’Occident anglophone, et si l’on souhaite détricoter cette idéologie, il faudra que les membres du groupe dominant changent leur manière de penser afin de promouvoir de nouvelles relations qui permettent de rompre avec le mythe dans lequel l’enseignant « natif » apporterait « a ‘superior’ culture of teaching and learning to students and colleagues who are perceived not to be able to succeed on their own terms »