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La liberalisation des prix, suppression des subventions à la consommation et institutionnalisation de la concurrence

STRATEGIES D’INDUSTRIALISATION EN ALGÉRIE DE 1967 À1990

10. Garantie des droits de propriété: les droits de propriété doivent être biens définis et

3.3. La liberalisation des prix, suppression des subventions à la consommation et institutionnalisation de la concurrence

Le pays a connu un système de prix totalement contrôlé jusqu’en 1989. Durant les précédentes décennies, les prix connurent plusieurs réaménagements mais ces actions n’altèrent pas le caractère administré du régime des prix qui constitue le « ventre mou » de la politique économique en Algérie. Hamid Bali la résume comme un « nombre de

systèmes des prix élaborés est mis en oeuvre depuis le lancement de la planification est un indicateur des tâtonnements opérés et des difficultés à définir une politique des prix

appropriés » 1. Il se trouve aussi que l’économie centralement planifiée est dominée par

deux séries de distorsions :

a) Le niveau des prix d’équilibre est supérieur à celui des prix officiels. Ce gap révèle l’existence d’un excédent de demande globale se résolvant en files et en listes d’attente, en une épargne involontaire et une accumulation de liquidités, etc.

b) « La structure des prix relatifs diverge à la fois du système des prix mondiaux, de la

structure des coûts de production locaux et […] de la demande exprimée. »2

Dans tout ces cas, les prix étaient fixés à des niveaux non rémunérateurs qui conduisirent au déficit chronique des EPE et les exploitations agricoles. Et, c’est l’Etat qui comble les déficits des unités productives par le biais du budget, de l’émission monétaire et le recours à l’épargne extérieure. L’ancien système des prix, fortement contrôlé par l’Etat, s’adapte mal avec les nouvelles orientations économiques du pays - performances des EPE et l’ajustement structurel - donc il va être l’objet de réforme en 1989.

La libéralisation des prix conjugué avec les autres mécanismes du marché, devraient éradiquer les effets pervers auxquels a conduit l’ancien système de prix administrés (marché parallèle, déficits des EPE, sous-évaluation des coûts des entreprises et gaspillage des ressources).

Le système des prix connaîtra d’abord une première réforme au début des années 1980.Cette approche consiste en l’application de la « vérité des prix » accompagnée d’une discipline financière plus rigoureuse, de l’autonomie des EPE et l’agriculture collectiviste. Cette expérience a mené à la fin des années 1980, à la persistance et à l’amplification du

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1Hamid Bali (1993), Inflation et mal développement en Algérie, OPU, Alger, p.87.

système des prix relatifs et donc à la poursuite d’allocation irrationnelle des ressources (assainissement financier des EPE et subvention des prix de certains produits ).

Il était inéluctable de revoir encore une fois le système des prix. La seconde approche consista donc à introduire simultanément la liberté des prix. Et l’autonomie des EPE, une loi sur la concurrence (législation anti-monopole) tout en imposant une forte discipline financière. C’est l’idée défendue par le Gouvernement Mouloud Hamrouche 1989. Cette thèse vise l’alignement des prix officiels du secteur public sur ceux en vigueur sur le marché parallèle. Cette idée prétend que les prix qui se forment sur le marché parallèle sont les prix d équilibre car ils reflètent l’état de l’offre et de la demande. Cette réorientation du « profit social » au « profit privé » est couplée à l’introduction de la concurrence, l’amélioration de la qualité, d’une meilleure maîtrise technologique et d’une généralisation plus rationnelle de la production. A cet effet, le nouveau système des prix distingue deux grandes catégories de prix :

- les prix administrés (ou réglementés) ; - les prix libres (ou déclarés).

La libéralisation des prix en 1989 a été appliquée en mars 1990. Un mini bilan en septembre 1991 a fait sortir que « les prix d’environ une trentaine de catégories de produits

industriels de première nécessité sont plafonnées. En revanche, seules les marges de production et de distribution sont plafonnées pour environ 70 catégories de produits

essentiels au fonctionnement de l’industrie » 1. Tous les autres prix sont libérés, sous

réserve de déclaration. L’objectif de l’ensemble du dispositif est de donner aux entreprises les moyens de fixer des niveaux de prix qui leur permettent d’être rentables.

Au préalable, ce sont les prix des produits alimentaires qui vont tirer l’indice des prix vers le haut. En 1990, la contribution des produits alimentaires dans l’indice général des prix est de 70,5% 2. L’évolution des prix de la consommation de la ville d’Alger évolue, par exemple dans le même sens que l’indice national qui est en nette accélération, du fait des hausses importantes des prix de l’ensemble de groupes des biens et services.

Au total, l’indice général des prix à la consommation passe de 175,5 à 188,0 de septembre à décembre 1989 enregistrant une augmentation trimestrielle de 7,1%. Sur une année seulement (mars 1991-mars1992) il s’est situé à 123,3% alors qu’il était de 127% au cours de la précédente période (février 1990-février 7991). Le taux d’inflation à continuer sa

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Document ronéotypé, Ministre de l’Economie 1989.

progression pour atteindre les 30% en 19941. A l’inflation des produits alimentaire s’ajoute celle de produits industriels puisque les entreprises économiques sont aussi autorisées à augmenter leur prix. Cette vision des prix déclenche un emballement des prix des intrants qui s’est manifesté par une augmentation des produits manufacturés et des matériaux de construction. A titre d’exemple, les prix des matériaux de construction ont enregistré plus de 177,5% d’augmentation, et le ciment, par exemple à augmenter de plus de 243% au cours de la même période. A cela il faut ajouter l’augmentation des prix des secteurs en aval de l’importation dont les prix se sont accrus de 20% en 1990.

Globalement le taux d’inflation de l’économie a connu pendant ces dernières années la progression suivante :

Tableau : 3.11. Taux d’inflation global, (en %)

Années 1990 1991 1992 1993 1994 1995 Taux d’inflation 17,8 23 21 32,5 32 30 Années 1996 1997 1998 1999 2000 2001 Taux d’inflation 18,69 5,73 4,95 2,64 0,34 4,23 Années 2002 2003 2004 2005 2007 2007 Taux d’inflation 1,42 2,59 3,56 - -

[Sources : Rapport d’exécution du plan 1993, CNP ; M. Benachenhou, Inflation (1991) ; Banque d’Algérie]

Enfin la continuité de libéralisation totale des prix est mal acceptée par les citoyens qui étaient habitués à des prix relativement stables durant les années 1970. Les partenaires sociaux (syndicats), par exemple incriminent le ministre du commerce qui est capable, selon eux, de vouloir « affamer le peuple »2.

Aujourd’hui, tous les prix des produits industriels et /ou destinés à la consommation finale ont été libéré, excepté le lait, la semoule et la farine qui devraient être libérés Mais le déclic du travail et de la production attendu par les gestionnaires est loin d’être réalisé, pourquoi ?

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1 Propos avancés par Ahmed Benbitour, Ministre des Finances, 20 / 01 / 1995.

2 El-Watan du 29/06/1995.

La réponse à cette question renvoie à ce qui est propre à tous les secteurs : la valorisation du facteur travail.

Concernant l’agriculture, il faut motiver les agriculteurs en tranchant la question de la propriété. Les résultats de cette politique sont décevants .On assiste à une paupérisation des couches sociales affectant leur niveau de vie. Avec les rentes spéculatives, l’argent thésaurisé, les rentes de situation les marchandises destinées à la consommation semi-durable continuent à trouver acheteur. Cette situation signifie qu’une action par les prix n’est pas toujours meilleure pour améliorer le sort de l’entreprise. Dans le cas de l’Algérie, rien n’a été fait pour encourager la production réelle (offre) afin de rétablir les grands équilibres de l’économie. En fin de compte, « l’idée de vérité de prix » lancée en 1982 était perçu comme un slogan. En mars 990, son application avec rigueur a permis la libéralisation des prix de tous les biens et services industriels et de consommation.

La libéralisation des prix s’inscrit donc dans la logique des prix d’équilibre rémunérateur des facteurs de production selon la loi économique naturelle de l’offre et de la demande du marché mais qu’en est-il du facteur travail, l’impact de l’ajustement structurel sur le marché de l’emploi et les relations du travail dans l’entreprise publique.