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La stratégie de développement Monrovia-Lagos

PRÉSENTATION DES STRATEGIES INDUSTRIELLES DE DEVELOPPEMENT

1.4. Les modèles de développement autocentré

1.4.2. La stratégie de développement Monrovia-Lagos

Au début des années 1980, la politique et la philosophie de développement des pays africains ont connu deux importantes réflexions. D’abord, le plan Lagos 2 a été proposé par l’Organisation de l’Unité Africaine (OUA). Et, en réaction à ce plan, la Banque Mondiale a présenté le rapport Berg. Les propositions du plan de Lagos sont assez intéressantes. C’est pourquoi, nous nous attacherons, d’abord, à examiner les apports du plan Lagos et les conditions internes et internationales de sa mise en œuvre. Ensuite, nous examinerons le défit lancé par le rapport Berg à la volonté de développement des pays africains.

Premièrement, les ministres des pays africains, réunis à Menrovia en mars 1979, ont fait un constat d’échec des stratégies, politiques et programmes de développement dans la région. Pour ces pays le bilan de deux décennies de développement est négatif. La cause c’est que les stratégies expérimentées ont été profondément influencées par les théories et stratégies erronées. Ces politiques n’ont fait qu’accentuer la dépendance extérieure du continent sur le plan alimentaire, des compétences, la technologie, des biens d’équipements et services, etc. A cette occasion, les leaders des pays africains ont proposé une stratégie autocentrée qui a été, ensuite, formalisée dans le plan de Lagos en avril 1980. La thèse fondamentale défendue par le plan Lagos est que : « le développement économique de

l’Afrique ne peut être le sous-produit automatique du fonctionnement de l’économie

mondiale » 3. La proposition du plan rejette l’idée d’un développement incident de la

dynamique des mécanismes de l’économie mondiale. Explicitement, les conditions internationales de transferts de technologies et les retondonces de connaissances conjuguées aux situations actuelles de concurrences monopolistes sur le marché mondial excluent l’idée

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1 L’analyse du modèle de développement algérien 1967-1978 basé sur les industries industrialisantes est l’objet d’analyse au chapitre 2.

2 La résolution adoptée à Menrovia en mars 1979 par les ministres des pays africains sur la " stratégie de développement " puis modifiée et entérinée en avril 1980 par les chefs d’Etats africains.

3

Abdelatif Benachenhou (1982), Développement et coopération internationale, OPU, Alger, p.141.

conventionnelle qu’il suffit que l’économie mondiale se développe pour que l’ensemble de ses sous parties et en particuliers ses sous parties sous développées en tirent un quelconque bénéfice. En conséquence, l’idée fondamentale sur laquelle s’appuie le plan de Lagos et que le développement soit autonome. Les partisans du développement souhaitent qu’une priorité soit donnée au développement rural, mais ils ne récusent pas l’industrie qui doit

fournir les équipements dont elle a besoin pour la valorisation des produits agricoles. Le contenu de cette stratégie s’articule autour de trois points1.

1 - L’instauration de processus auto entretenu et endogène de croissance économique au niveau national et/ou multinational passe par :

- L’autosuffisance alimentaire qui ne peut être obtenue que dans le cadre d’un programme intégré renforçant les moyens d’équipements et les institutions en amont et en aval à l’agriculture. Il faut améliorer, d’une part, les moyens techniques, comme les infrastructures, l’irrigation, la qualité des intrants (semences, engrais) et, d’autre part, vulgariser les moyens d’encadrement, par un programme de recherche, de formation et de sensibilisation des agents économiques (petits producteurs agricoles et les consommateurs). Enfin, la réalisation, d’un tel projet nécessite l’intervention de l’Etat qui doit démontrer une forte volonté de réalisation1. Par ailleurs, la priorité a été accordée à l’installation d’un secteur industriel dont la première tache est de jouer un rôle intégrateur de l’économie. Les activités visées, dans le moyen terme, sont celles qui concourent aux objectifs suivants : - une industrialisation adaptée ;

- la production d’une quantité suffisante d’inputs pour l’agriculture (engrais, pesticides et les outils et machines agricoles) ;

- la production de matériaux de construction nécessaires au secteur de l’habitat et les infrastructures ;

- la valorisation locale des matières premières et afin de diminuer l’exportation des produits primaires ;

- la satisfaction de la demande du secteur agricole, en biens intermédiaires et biens d’équipements.

2 - Autonomie collective régionale et sous régionale : _____________________________

1 Hamid Temmar (1983), Elément pour une stratégie de développement africaine, in H. Benissad (dir.), Le développement économique : théories et politiques en Afrique, OPU, Alger, p.61-67.

L’autonomie collective vise la réalisation de l’autosuffisance et la croissance auto entretenue. La concrétisation de ces objectifs appelle les mesures suivantes1 :

- la création des institutions adéquates nécessaires à l’intégration sous régionale.

- créer les moyens de communications nécessaires à l’intégration physique de la région par le biais des moyens de communication incluant l’amélioration des réseaux routiers, de

chemin de fer et aériens.

- Compléter les réseaux des télécommunications panafricains.

Libéralisation du commerce panafricain par des liaisons inter Etats verticales et horizontales, la promotion d’un marché commun interafricain.

- Créer les conditions nécessaires à une intégration industrielle exige l’harmonisation des stratégies politiques industrielles afin de surmonter les limites de chaque pays : pénurie de main d’œuvre qualifié, maîtrise de la technologie et réalisation d’économies d’échelles. 3 - L’application d’un programme de mise en valeur des ressources humaines. Ce programme a pour objectifs :

- une adéquation du système de l’éducation nationale avec les objectifs du développement économique et social ;

- Le renforcement de la capacité de la recherche scientifique, et ; - la maîtrise et la diffusion de la technologie, etc.

En somme, le plan Lagos est un document politique qui met en exergue la nécessité d’une coopération sud-sud. Du fait de la diversité des expressions de développement, ce document représente un compromis entre les différents pays africains. Même si les retondonces et les difficultés ne manquent pas, toutes les caractéristiques, d’une telle stratégie, témoignent que c’est un modèle autocentré de développement. La stratégie de développement, de l’OUA, donne la priorité aux investissements agricoles et aux infrastructures (route, ports, aéroports et chemin de fer). Moins de trois ans après l’élaboration du plan d’action de Lagos la crise économique mondiale a remis en cause toutes les projections des économies africaines. Etranglés financièrement, tous les pays africains basculent vers la gestion de court terme de leurs économies. Les plans de long terme perdent de leur consistance lorsqu’on dispose des réserves en devises équivalant à

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1 Hamid Temmar (1983), op.cit., p.6.

une semaine d’importation et d’autre part la non crédibilité augmente la réticence des fournisseurs étrangers, etc. Le résultat c’est que les uns après les autres les Etats acceptent les mesures libérales inspirées des conseils du FMI et de la Banque Mondiale : programme d’ajustement structurel (PAS).

sur « le développement en Afrique ». Le rapport sur le développement accéléré en Afrique est rédigé par le professeur Berg. Ce dernier repose sur une hypothèse fondamentalement contradictoire avec le programme de l’OUA. Il énonce que : « le

développement africain ne peut être que le sous produit du développement de l’économie

mondiale et ne peut être réalisé pleinement que par le jeu des forces du marché » 1. Au

fond le rapport Berg ne présente pas une stratégie en soi mais il souligne, surtout, les insuffisances des politiques adoptées par les pays africains, comme : « la politique commerciale et celle des taux de change qui ont fait échec à la mise au point d’un système efficace des stimulants de la production agricole et des exportations »2. En d’autres termes, l’échec est du, d’une part, à l’absence de mécanisme de régulation des prix, à la fois, comme mécanisme de rationnement et comme stimulant de la production et, d’autre part, à la conviction que l’on peut répartir efficacement les ressources en faisant appel aux moyens de contrôle matériel et la préférence accordée aux organismes d’Etat au détriment des petites unités des autres secteurs (public, privé, coopératif). Eu égard de ce constat, des actions à entreprendre ont été proposées, sans pour autant constituer un modèle de développement en soi. Dés lors, pour prendre la voie du développement, le rapport recommande d’appliquer les mesures suivantes :

- le relèvement de la productivité et de la rentabilité du secteur agricole, sur une base privée des moyens de production ;

- la suppression des subventions et l’application d’une politique de libéralisation des prix. Car, l’application de la vérité des prix encourage l’approvisionnement en intrants (semences améliorées, engrais, la vulgarisation et la formation technique) ;

- la libéralisation du commerce extérieur : le rapport souligne, que la politique protectionniste, entourée de barrières commerciales et une politique de non convertibilité et

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1Abdelatif Benachenhou (1983), op.cit., p.155.

2

Hamid Temmar (1983), op.cit., p.60.

négatifs sur le développement. Enfin, comme l’a rapporté Hamid Temmar l’Etat doit se désengager de l’économie : pour atteindre les objectifs de croissance adéquate les Etats doivent restreindre leurs taches. « Les autres activités peuvent être abandonnées aux

mécanismes du marché et être confiées […] à l’initiative privée » 1. Enfin, ces différentes

propositions recommandent que :

pays ;

ii) le désengagement de l’Etat du secteur économique ;

iii) l’ouverture à l’échange international est porteuse de progrès, etc.

En général, ce sont là des propositions qui vont s’incarner dans les conditions du programme d’ajustement structurel (PAS).

Pour conclure, dans la stratégie de développement de l’OUA, la priorité des investissements est donnée au secteur agricole et aux infrastructures (route, ports, aéroports et chemin de fer). Quant au programme de la banque mondiale, il recommande, impérativement, un désengagement de l’Etat et la libéralisation du marché local et extérieur. Moins de trois ans après l’élaboration du plan d’action de Lagos la crise économique mondiale a remis en cause toutes les projections des économies africaines. Etranglés financièrement, tous les pays africains basculent vers la gestion de court terme de leurs économies. Les plans de long terme perdent de leur consistance lorsqu’on dispose des réserves en devises équivalant à une semaine d’importation et d’autre part la non crédibilité augmente la réticence des fournisseurs étrangers, etc. Le résultat c’est que les uns après les autres les Etats acceptent les mesures libérales inspirées des conseils du FMI et de la Banque Mondiale : le PAS.

En général, les expériences de développement autocentré n’ont pas donné les résultats escomptés, à l’exception de la Chine et de l’Inde qui ont une portée continentale.

Enfin, le modèle de développement autocentré est un modèle socialiste, introverti et autarcique, qui s’intéresse peu à peu à satisfaire à court terme les besoins de la population et vise à ériger les bases techniques, industrielles d’un développement économique soutenu et stable2.

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1Hamid Temmar (1983), op.cit., p.63.

2

Ibid, pp.61-62.

Dans tous les cas, le modèle autocentré, suivant la voie de la descente ou la remontée, a coïncidé avec le développement de la stratégie de substitution à l’importation.