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Introduction de la première partie

CHAPITRE 1 : Le manuel scolaire et le numérique

2. L’arrivée du multimédia dans l’enseignement

2.4 L’évolution des illustrations

2.4.1 Les illustrations animées

L’illustration animée, autrement appelée animation graphique, implique un mouvement dans le temps et dans l’espace alors que l’illustration interactive ou active n’implique pas de mouvement.

L’animation affiche successivement plusieurs images présentant les différentes phases d’un mouvement de sorte que chaque image soit la transformation de l’image précédente. Y.K. Baek et B.H. Layne définissent l’animation comme « un processus qui génère une série

d’images contenant un ou plusieurs objets, de sorte que chaque image apparaisse comme

125 Idem.

65

une altération de l’image précédente afin de montrer un mouvement » (Baek & Layne,

1988126, notre traduction).

Image 9 : Animation découpée image par image.

Elle est définie par M. Bétrancourt et B. Tversky comme « une application composée d’une

série d’images, de sorte que chaque image apparaisse comme une transformation de l’image précédente, et dont le séquençage est déterminé par le concepteur ou par l’utilisateur127 » (Bétrancourt et Tversky, 2000, notre traduction). Mais l’image animée peut

être composée d’une image fixe (appelée sprite) affichée à différentes positions successives de l’écran. Les positions de l’élément animé sont calculées en fonction de la trajectoire définie préalablement.

Pour R.K. Lowe et W. Schnotz128, l’animation va reproduire le « réalisme comportemental » des phénomènes présentés. L’animation va reprendre comme dans la réalité, le processus décrit, son organisation visuo-spatiale et son comportement à la vitesse réelle. Une animation représentant un phénomène dynamique, va permettre à l’élève de visualiser le processus animé alors qu’une image statique, impose à l’élève d’inférer mentalement le processus présenté et donc de simuler mentalement le processus. Certains auteurs ajoutent à leur définition le développement d’un modèle mental. C. Gonzales indique ainsi que l’animation est « une série d’images variables présentées dynamiquement en fonction des

actions de l’utilisateur, de manière à l’aider à percevoir un changement continu dans le temps et à développer un modèle mental approprié de la tâche129» (Gonzales, 1996, notre traduction). Les actions de l’utilisateur sur l’animation vont lui permettre de percevoir le changement et développer un modèle mental.

126

Baek, Y.K., Layne B.H. (1988). Color, Graphics, and Animation in a Computer-Assisted Learning Tutorial Lesson. Journal of Computer-Based Instruction, 15, 131-135. p.132.

127 Bétrancourt, M., Tversky, B. (2000). Effect of computer animation on user’s performance: a review. Le travail

humain, 63(4) 311-329. p.5.

128 Lowe, R. K., Schnotz, W. (2005). Traitements cognitifs et fonctions pédagogiques des animations. In J.-M. Boucheix & J.-F. Rouet, Rôle des animations graphiques dans le cadre des technologies pour l’apprentissage. Rapport de synthèse « cognitique » du CNRS.

129

Gonzales, C. (1996). Does animation in user interfaces improve decision making? In proceedings of the International Conference in Computer Human Interaction CHI’96 (pp.7-34). New York, NY: ACM Press. p.1.

66 Il existe ainsi plusieurs formes d’animations, pouvant être :

 Non contrôlables par l’utilisateur. Celui-ci reste passif devant le déplacement ou l’évolution de l’objet animé.

 Contrôlables par des boutons (lecture, pause, marche arrière, arrêt, etc.) ou sur une barre de progression. L’utilisateur est plus actif sur son apprentissage et peut revenir à un passage de l’animation s’il n’a pas compris.

 Contrôlables et paramétrables. L’utilisateur à la possibilité de gérer la vitesse ou choisir le sens de lecture.

Les animations contrôlables et paramétrables sont dites interactives puisqu’il y a échange d’information entre l’individu et l’application. Pour certains auteurs, ces propriétés interactives amènent de meilleures performances au niveau de la compréhension d’une animation. L’étude de R.E. Mayer et P. Chandler130 sur l’augmentation minimale de l’interactivité sur une présentation animée de la formation des éclairs (rythme fixé par l’ordinateur) comparée à la même présentation animée mais contrôlable par l’utilisateur avec des « clics », montre une meilleure performance de compréhension pour la version contrôlable. Aussi, la présence d’une animation dynamique accompagnant sa présentation en audio facilite la mémorisation et la résolution de problèmes de compréhension (Mayer & al., 1991131, 1992132) par rapport à une présentation purement sonore. L’étude de C. Hidrio et de E. Jamet133 montre que les animations sont plus efficaces pendant la compréhension que les illustrations statiques. L’étude portant sur le fonctionnement des pompes à air à double effet montre que l’animation facilitait la compréhension du fonctionnement du système et des différents mouvements.

Cependant, les résultats d’études expérimentales comparant les animations aux illustrations statiques ne donnent pas systématiquement des résultats positifs aux animations. Les résultats sont même très contradictoires…

130 Mayer, R.E., Chandler, P. (2001). When learning is just a click away : does simple user interaction foster deeper understanding of multimedia messages. Journal of Educational Psychology, vol. 93, n° 2, p. 390-397.

131 Mayer, R.E., Anderson, R.B. (1991). Animations Need Narrations : An Experimental Test of a Dual-Coding Hypothesis. Journal of Educational Psychology, 83(4), 484-490.

132 Mayer, R.E., Anderson, R.B. (1992). The Instructive Animation : Helping Students Build Connections Between Words and Pictures in Multimedia Learning. Journal of Educational Pyschology, 84(4), 444-452.

133 Hidrio, C., Jamet, E. (2002). Compréhension d'un dispositif technique: Apports d'une illustration dynamique et de traitements multiples. Psychologie Française, 47(1), 61-67.

67 L’étude de R.K. Lowe (2003134, 2004135) sur l’effet des animations dans le domaine de la météorologie comparait une présentation animée contrôlable à une présentation statique de cartes météorologiques chez des étudiants sans connaissance dans ce domaine. Les sujets devaient dessiner, sur une carte vierge, le pattern des marquages prévisionnels à partir de la carte météorologique originale.

Image 10 : Exemple d’une carte météorologique utilisée par Lowe (2003)

Les résultats montrent que les étudiants se sont focalisés sur les traits saillants des cartes et non sur les aspects pertinents mais faiblement saillants. Ainsi, le traitement d’une animation contrôlable portant sur une carte météorologique est inefficace sur des novices.

J.M. Boucheix136 compare trois formes d’animations portant sur le fonctionnement des engrenages auprès des élèves de 10 à 11 ans. Il compare ainsi une animation non contrôlable (mais revenant au début à la fin de l’animation), une animation contrôlable (possibilité de faire bouger les roues de l’engrenage à la vitesse choisie), et une animation indirectement contrôlable (ajustement de la vitesse de rotation des roues, stopper l’animation, marche arrière, marche avant, pause).

134

Lowe, R.K. (2003). Animation and learning selective processing of information in dynamic graphics, Learning

and Instruction, 13, 157-176.

135 Lowe, R.K. (2004). Interrogation of a dynamic visualization during learning, Learning and Instruction, 14, 257-274.

136 Boucheix, J.M. (2007). Contrôle d’animations multimédias par des enfants de 10 à 11 ans : quels effets des dispositifs de contrôle ? In Boucheix J.M., Rouet J.F. « Les animations interactives multimédias sont-elles efficaces pour l’apprentissage ? » Revue française de pédagogie, 160, 133-156.

68 Image 11 : Leçon multimédia utilisée pour l’étude de Boucheix (2007)

Les apprenants ayant étudié sur l’animation contrôlable et sur l’animation indirectement contrôlable ont obtenu des résultats plus faibles que ceux ayant étudié sur l’animation non contrôlable. Les résultats de l’étude montrent que sur des enfants, des novices et sur des apprenants ayant de faibles habiletés spatiales, l’ajout d’un contrôle interactif sur une animation n’améliore pas la compréhension de processus dynamiques. L’apprenant se focalise sur la réalisation d’actions (faire tourner les roues avec la souris) et augmente son temps de consultation. Aussi ses manipulations interférent avec la tâche principale de compréhension et pénalisent la compréhension immédiate. Bien qu’elles disposent d’un côté dynamique, motivant et interactif, les études montrent que les animations ne sont pas toujours efficaces en termes d’apprentissage. Les raisons qui reviennent généralement des études (Lowe, 1999137, 2004138 ; Schnotz139; Mayer140, Tassini et Bétrancourt141 ; Hegarty et

137 Lowe, R.K. (1999). Extrating information from an animation during complex visual learning. European Journal

of Psychology of Education, 14(2), 225-244.

138 Lowe, R.K. (2004). Op. cit.

139 Schnotz, W. (2005). An Integrated Model of Text and Picture Comprehension. In R.E. Mayer (Ed.), The

69 Waller142) sont reprises par M. Bétrancourt143 qui fait remonter quatre grandes difficultés du traitement de l’information dynamique chez l’adulte :

 Des difficultés dues aux spécificités temporelles du déroulement des animations.  Des difficultés de partage de l’attention entre plusieurs sources de mouvements

simultanés.

 Des difficultés conceptuelles qui concernent le niveau d’abstraction du processus décrit en relation avec le niveau des connaissances préalables de l’apprenant.  Des difficultés cognitives.

Ces difficultés rencontrées au niveau du traitement de l’information montrent que les animations dynamiques ne peuvent être utilisées dans n’importe quel contexte. M. Bétrancourt et B. Tversky144 soulignent « qu’une animation est susceptible d’être utile

lorsque le contenu d’apprentissage implique un mouvement, une trajectoire ou un changement dans le temps afin que l’animation aide à la construction d’un modèle mental du processus dynamique » (Bétrancourt et Tversky, 2000, notre traduction).