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Titre I. Les CCI : une institution séculaire

Section 2. Les fondements statutaires

2. Les domaines d’intervention

Le décret du 17 septembre 1851 déclarant les Chambres de commerce établissements d’utilité publique a été signé par Louis-Napoléon BONAPARTE. Il organise les Chambres de commerce et fixe leurs attributions. L’article 11 identifie d’abord deux domaines d’intervention143 :

- donner au gouvernement les avis et renseignements qui leur sont demandés sur les faits et les intérêts industriels et commerciaux ;

- présenter leurs vues sur les moyens d’accroître la prospérité de l’industrie et du commerce ; sur les améliorations à introduire dans toutes les branches de la législation commerciale, y compris les tarifs de douanes et octrois ; sur l’exécution des travaux et l’organisation des services publics qui peuvent intéresser le commerce ou l’industrie, tels que les travaux des ports, la navigation des fleuves, des rivières, les postes, les chemins de fer, etc. …

Dans l’article 12 du même décret, il est question des cas où la consultation des Chambres est obligatoire144. Leur avis concerne les changements projetés dans la législation commerciale ; les érections et règlements des Chambres de commerce, les créations de bourses, l’établissement d’agents de change ou de courtiers ; les tarifs de douanes ; les tarifs et règlements des services de transports et autres, établis à l’usage du commerce ; les usages commerciaux, les tarifs et règlements de courtage maritime et de courtage en matière d’assurances de marchandises, de changes et d’effets publics ; les créations de tribunaux de commerce dans leur circonscription ; les établissements de banques, de comptoirs d’escompte et de succursales de la Banque de France ; les projets de travaux publics locaux relatifs au commerce ; les projets de règlements locaux en matière de commerce et d’industrie.

143 PLESSIS (A.). Op. cit.

L’intervention des Chambres concerne également l’administration par elles- mêmes des organismes qu’elles ont créés au bénéfice de l’économie et/ou pour l’usage du commerce. L’article 14 du précédent décret les énonce145 : les entrepôts, les conditions pour les soies, les cours publics pour la propagation des connaissances commerciales et industrielles.

Dans son article 1, la loi du 9 avril 1898 désigne la Chambre de commerce comme l’organe des intérêts commerciaux et industriels de sa circonscription. Dans son article 11, sa mission est clairement définie : « elle présente au gouvernement ses vues sur les moyens d’accroître la prospérité de l’industrie et du commerce. Ses membres sont élus par un collège de représentants des différentes entreprises du commerce, de l’industrie et des services de sa circonscription »146.

Les CCI possèdent ainsi un large domaine d’intervention. Selon l’arrêt Sieur RETAIL du 21 février 1936147, les Chambres de commerce d’industrie ne sont pas des établissements publics nationaux148. La commission centrale des marchés a affirmé, dans sa lettre du 18 mars 1992, qu’elles ne sont rattachées ni à l’État, ni à aucune collectivité territoriale149. Il faut distinguer ici le champ de compétence géographique et la collectivité de rattachement de l’établissement public. Comme le souligne le commissaire du gouvernement LAMY : « les Chambres consulaires départementales ont, comme leur statut le prévoit, une compétence départementale

145

Idem.

146 Loi du 9 avril 1898. Op. cit.

147 Mission interministérielle d’enquête sur les marchés et les conventions de délégation de service public, Op. cit., p. 25.

148

Notons qu’il existe des établissements publics nationaux, régionaux, communaux, départementaux, interdépartementaux. Cette distinction est opérée rationae loci c’est-à-dire en raison du lieu ou du champ territorial de leurs activités.

149 Mission interministérielle d’enquête sur les marchés et les conventions de délégation de service public, Op. cit..

mais comme tous les autres établissements publics, elles sont nécessairement rattachées à une personne publique, celle qui les a créées, les contrôle, et auprès de laquelle elles exercent leur mission »150.

Leur spécificité a amené la haute assemblée à constater par deux avis, le 26 septembre 1940 et le 18 juillet 1950, que l’activité des CCI s’exerce tantôt dans le cadre local défini par leur circonscription, tantôt sur le plan régional, tantôt à l’échelle nationale, notamment lorsqu’elles sont appelées à entreprendre des travaux ou à gérer des services qui intéressent la nation tout entière, ce qui conduit à la conclusion selon laquelle une classification des Chambres de commerce en établissements publics nationaux, départementaux et communaux est impossible. C’est donc par une interprétation particulière faite au cas par cas qu’il convient d’assimiler la catégorie des Chambres de commerce et en se référant à chacune des dispositions législatives ou réglementaires visant les divers établissements publics (sans mentionner expressément les Chambres de commerce) et de voir si ces dispositions leur sont applicables. Tout cela revient à dire que le domaine d’intervention des Chambres de commerce et d’industrie ne connaît pas de limite territoriale. Cela introduit un certain vide juridique quant à l’autorité de rattachement des Chambres de commerce et d’industrie et leur accorde le statut d’établissement public d’un genre particulier : les établissements publics administratifs sui generis. En effet, n’étant ni nationales, ni locales, elles n’ont aucune autorité de rattachement. Loin d’handicaper les Chambres, un tel « flou leur offre de nombreuses possibilités d’adaptation »151.

Mais dans l’arrêt CRÉPIN/Chambre d’agriculture des Ardennes du 29 novembre 1991, le Conseil d’État a déclaré, certes implicitement innovant clairement, que les compagnies consulaires sont des établissements publics de

150 Idem. p. 26.

151 LEMERCIER (C). Un si discret pouvoir : aux origines de la chambre de commerce de Paris. 1803 – 1853, Paris : La Découverte, 2003, p.20.

l’État152. Cet arrêt veut réaffirmer que tout établissement public a nécessairement une autorité de rattachement, indépendamment du champ territorial de son activité, et que cette autorité de rattachement, pour les compagnies consulaires, ne peut être que l’État. Par conséquent, les textes applicables aux établissements publics à caractère administratif « rattachés à l’État » sont applicables aux CCI, à l’exception du statut du personnel des CCI qui s’applique à la place du statut de la fonction publique, des règles budgétaires comptables propres aux CCI à la place des règles de la comptabilité publique, de principe d’élection des membres, les emprunts qui sont contractés en dehors de la caisse des dépôts et consignations, des trésoriers qui n’ont pas la qualité de comptables publics, de la mission légale des commissaires aux comptes du fait qu’elle ne s’applique plus seulement aux entreprises privées mais qu’elle a été étendue aux établissements publics à caractère administratif que sont les Chambres de commerce et d’industrie.

Les domaines de compétence des Chambres de commerce et d’industrie découlent de leur mission de représentation. Selon le code du commerce (art.710-1), ce sont des établissements publics, « placés sous la tutelle de l’État, et qualifiés par la loi de corps intermédiaires de l’État ». Leur fonction de caractérise par la « représentation des intérêts de l’industrie, du commerce et des services auprès des pouvoirs publics ou des autorités étrangères ». Ils assurent également l’interface entre les différents acteurs concernés. De ce fait, ils contribuent au développement économique des territoires et au soutien des entreprises et de leurs associations. Les établissements du réseau remplissent ainsi des missions de service public et d’intérêt général153. Conformément au décret n°2007-574 du 19 avril 2007154, la tutelle de

152 Mission interministérielle d’enquête sur les marchés et les conventions de délégation de service public, Op. cit., p. 26.

153

Pour voir l’intégralité du texte :

http://www.legifrance.gouv.fr/affichTexte.do?cidTexte=JORFTEXT000022511227&dateTexte=&cat egorieLien=id, consulté le 27/08/14.

l’État sur les établissements du réseau des CCI s’exerce dans le respect de leur autonomie (article 1).

Concrètement, les domaines dans lesquels les CCI formulent des avis et des propositions sont : le développement des activités économiques, l’aménagement et le développement du territoire, l’environnement, les transports, le tourisme, la formation et l’emploi, l’urbanisme, le commerce, le commerce international, la mise en sécurité des sites économiques.

En plus de représenter les intérêts de l’industrie, du commerce et des services auprès des pouvoirs publics (article L. 711-2 du code de commerce), il y a une autre mission des CCI : « Les CCI contribuent au développement économique du territoire » (art. L.711-4 du code de commerce). Elles sont donc aussi un acteur économique à part entière. À cet effet, elles ont le soin, sous la tutelle de leur ministre, de la réalisation de travaux et d’administration de services nécessaires aux intérêts qu’elles représentent.

Les Chambres de commerce et d’industrie se trouvent au cœur de l’activité économique d’un territoire. Aucun problème économique ne leur est étranger. Cela recouvre un champ d’action très large. Leur création, au XVIème siècle, répondait déjà au souci d’organiser le commerce. La création de la première Chambre à Marseille ne fut sans doute pas un hasard. Marseille est avant tout un port, donc un lieu d’échange entre différents commerçants de différents pays. Elles assurent encore aujourd’hui la gestion de la plupart des ports, y compris, jusqu’à une date récente, de quelques-uns des plus grands d’entre eux, et de la quasi-totalité des aérodromes.

Une CCI agit principalement dans sa circonscription mais peut, en tant qu’établissement public national, mener seule ou en partenariat, des actions en dehors de cette limite. Leur rôle de représentation des intérêts généraux des entreprises par les Chambres de Commerce et d’Industrie s’exerce dans le cadre de leurs quatre grandes missions : consultation, appui aux entreprises, formation et appui aux territoires.

Leur compétence recouvre alors tous les domaines où le développement économique est en jeu et est l’enjeu : enseignement, zones industrielles et commerciales, tourisme, hôtellerie, loisirs,…. Elles concourent ainsi au développement socio-économique de leur circonscription. Les CCI gèrent alors, soit directement, soit indirectement, ou animent la gestion de branches et établissements d’enseignement et de formation professionnelle (à l’instar des Ecoles supérieures de commerce ou ESC), elles sont responsables de la création, du développement et de la gestion d’établissements industriels ou commerciaux tels que les aérodromes et aéroports, les gares routières, les ports maritimes ou fluviaux de pêche ou de commerce. Elles participent aussi à la création de nombreuses zones industrielles, d’infrastructures routières, fluviales, portuaires et aéroportuaires, des technopoles. Elles fournissent leur soutien aux lignes aériennes concourant au développement de l’infrastructure régionale, leur assistance technique au commerce, à l’hôtellerie et à l’industrie (essentiellement pour les PME). En tant que collecteur du 1% patronal, les CCI participent à la réalisation directe ou indirecte de programmes de constructions de logements et d’amélioration de l’habitat.

La mission de service public caractérise également la fonction des CCI françaises. Cette mission s’incarne essentiellement dans les services fournis aux entreprises par le biais du Centre de Formalité des Entreprises (CFE) qui doit respecter les principes du service public comme celui de la spécialité. C’est également ce qui leur permet d’être rémunérées sur la partie des produits de l’impôt payés par les ressortissants.

L’article L710-1 du code de commerce (modifié par la loi n°2010-853 du 23 juillet 2010) spécifie les missions que les établissements consulaires peuvent remplir.

- les missions d’intérêt général confiées par les lois et les règlements, - les missions d'appui, d'accompagnement, de mise en relation et de

conseil auprès des créateurs et repreneurs d'entreprises et des entreprises, dans le respect des dispositions législatives et réglementaires en vigueur en matière de droit de la concurrence,

- la mission d'appui et de conseil pour le développement international des entreprises et l'exportation de leur production, en partenariat avec

- la mission en faveur de la formation professionnelle initiale ou continue grâce, notamment, aux établissements publics et privés d'enseignement qu'il ou elle crée, gère ou finance,

- la mission de création et de gestion d'équipements, en particulier portuaires et aéroportuaires,

- les missions de nature marchande qui lui ont été confiées par une personne publique ou qui s'avèrent nécessaires pour l'accomplissement de ses autres missions,

- toute mission d'expertise, de consultation ou toute étude demandée par les pouvoirs publics sur une question relevant de l'industrie, du commerce, des services, du développement économique, de la formation professionnelle ou de l'aménagement du territoire, sans préjudice des travaux dont il ou elle pourrait prendre l'initiative.

L’intervention des Chambres de commerce et d’industrie est ainsi fixée légalement et statutairement. Il apparaît qu’elle recouvre un champ large et diversifié dès lors que l’intérêt des entreprises et de l’activité économique du territoire est concerné. Une telle étendue de compétence doit se financer. Le type de financement est-il aussi varié ?