• Aucun résultat trouvé

D’APPRENTISSAGE : UNE APPROCHE EMPIRIQUE

CHAPITRE 4 : METHODOLOGIE DE LA RECHERCHE

1. Positionnement épistémologique

1.4 Les critères de scientificité

Selon Wacheux (1996), la validité d’une recherche peut être définie comme la capacité de celle-ci à apprécier effectivement et réellement l’objet de l’étude pour lequel elle a été créée.

Yin (1989) la décompose en différents types de questionnements, notamment la validité externe et interne des résultats. Tout d’abord, la validité externe désigne l’application des connaissances au-delà de la base empirique à partir de laquelle elles ont été élaborées, c’est-à-dire au-delà des cas considérés. Il s’agit donc de se demander si les conclusions sont généralisables et transférables à d’autres contextes (Lincoln et Guba, 1985). Ensuite, la validité interne consiste à vérifier si les contributions tirées de l’analyse des données recueillies reflètent bien la réalité étudiée. Dépendante à la fois de la rigueur et de la cohérence interne du processus de recherche, la validité interne s’applique non seulement à la phase de constitution du matériau empirique (recueil de données) mais également à la phase de traitement de ce matériau (analyse de données) qui conduit à l’élaboration des résultats.

Dans le cadre des recherches constructivistes, les validations externes et internes sont souvent interrogées, voire mises en cause. En effet, leurs positionnements épistémiques posent des problèmes de rigueur et ces démarches souffrent ainsi de faiblesses en matière de justification de la valeur des connaissances produites (Pratt, 2009). Il en résulte des problématiques de deux types : premièrement, l’absence de repères méthodologiques acceptés par tous pour collecter et analyser des matériaux empiriques variés – et principalement de nature qualitative – complique la validation interne des travaux constructivistes (Pratt, 2009).

Deuxièmement, concernant la validité externe de ces travaux, se pose la question de la généralisation des connaissances produites à partir d’un ou plusieurs cas étudiés. Dès lors, les constructivistes ont dû élaborer des critères de validation spécifiques à leurs cadres paradigmatiques dans le but de garantir la scientificité de leurs recherches. Nous décrivons à présent plus particulièrement les critères qui ont guidé nos travaux.

La question de la validité externe des travaux constructivistes a été traitée dans la littérature bien que la généralisation des résultats issus de ces recherches soit difficilement envisageable.

Ainsi, Avenier et Thomas (2012) nous invitent à examiner si les connaissances produites offrent des repères fonctionnels adaptés pour comprendre d’autres situations que celles dans lesquelles elles ont été élaborées. Il s’agit de considérer la connaissance produite comme une hypothèse plausible ou un guide qui mène la réflexion et éclaire des situations problématiques en d’autres circonstances. Ainsi, les connaissances créées ne s’expriment pas sous la forme de théories prédictives et normatives généralisables mais elles peuvent être à l’origine d’outils adaptés pour comprendre et intervenir dans une nouvelle situation d’étude. Dès lors, il est important de produire les résultats les plus complets possible. Cela nous a conduit à mettre en œuvre les deux stratégies suivantes dans notre projet de recherche : la stratégie d’échantillonnage théorique et le principe de saturation.

Si l’échantillonnage théorique permet de redéfinir les paramètres du recueil de données (population, guide d’entretien, conduite des échanges, etc.) à partir des thèmes émergents tout au long du travail d’analyse (Glaser et Strauss, 1967), cette méthode intégrative optimise les opportunités de découverte de nouvelles dimensions et interrelations. Le principe de saturation, quant à lui, ne se réduit pas à la notion de redondance. Dans le cadre de notre échantillonnage, il nous a conduit à intégrer des sources d’information différentes des sources antérieures jusqu’à ce que les techniques de recueil et d’analyse des données ne nous fournissent plus aucun élément nouveau permettant d’actualiser les résultats produits. Censés améliorer la transférabilité des résultats, l’échantillonnage théorique et le principe de saturation offrent la possibilité d’une description plus exacte de l’objet de la recherche et un compte rendu pertinent de l’ensemble des faits à l’intérieur des situations étudiées. Ils représentent l’opportunité d’assurer la validité externe de notre recherche constructiviste via la production de données riches et complexes reflétant notre objet d’étude.

Néanmoins, pour assurer la transférabilité des connaissances d’un contexte à un autre dans cette logique constructiviste, il s’agira d’effectuer un travail de réinterprétation des connaissances produites en fonction des spécificités de la nouvelle situation étudiée. Ainsi, une partie plus ou moins importante des savoirs élaborés dans le cadre de la recherche initiale pourra être discutée. Cette nouvelle production de sens pourra alors générer des données divergentes, voire contradictoires par rapport aux connaissances préalablement construites. Ce raisonnement nous conduit à clarifier notre positionnement : dans notre thèse, nous partons du principe qu’un objet d’étude ne peut pas être saisi dans sa totalité et son intégralité. En effet, il peut être examiné selon différentes perspectives (Glasersfeld, 1994). Le

paradigme constructiviste postule donc l’existence de réalités multiples au lieu de nourrir l’illusion d’une réalité unique. De ce fait, nous considérons qu’un modèle ne devrait jamais être vu comme la seule possibilité de résoudre les problèmes auxquels on l'associe. Notre conception nous amène à intégrer toutes les données différentes de nos résultats dans un processus d’accumulation de connaissances qui viendra compléter et enrichir notre modèle initial pour aboutir à une théorie explicative plus large. Dans cette perspective, nos constructions feront l’objet de révisions continues lorsque des résultats différents seront produits et cette logique de réplication dans d’autres contextes offrira l’avantage d’accroître la validité externe de notre recherche.

Concernant la validité interne des recherches constructivistes – qui consiste à vérifier si les résultats issus de l’analyse décrivent fidèlement la réalité étudiée – Barbier et Legresley (2011) considèrent qu’elle permet d’évaluer si les interprétations issues de la recherche correspondent aux données empiriques et sont donc pertinentes du point de vue des acteurs et des scientifiques. Ainsi, les recherches constructivistes – de nature qualitative le plus souvent – se réclament de théories mieux ancrées dans les réalités de terrain et nous inscrivons notre travail de thèse dans ce cadre. D’une part, nous nous fixons l’objectif de construire des savoirs dits locaux qui revendiquent des modèles contextualisés et qui permettent à un moment donné d’expliquer de manière suffisamment fine les spécificités d’une situation.

C’est la raison pour laquelle nous choisissons une méthodologie inductive centrée sur une démarche de type théorisation ancrée (Glaser et Strauss, 1967). D’autre part, le caractère significatif de nos résultats sera évalué grâce à la notion de « vraisemblance » qui caractérise la correspondance entre le sens produit par les acteurs et le sens qu’en retient le chercheur dans le cadre de son analyse (Valéau, 1997). Autrement dit, nous avons l’objectif que non seulement les acteurs mais également les lecteurs et la communauté scientifique se reconnaissent dans notre analyse et ses conclusions. Il s’agira pour cela de faire preuve de transparence et de rigueur dans notre discours scientifique pour susciter la conviction de ceux qui interpréteront nos résultats (Mukamurera, Lacourse et Couturier, 2006). Le lecteur devra pouvoir accéder à l’ensemble du matériau empirique et également suivre précisément l’ensemble des opérations qui ont permis de constituer et traiter ce matériau. Une attention particulière sera aussi portée sur la description du codage et des inférences en relation avec les données issues du terrain. Dans cette perspective, nous allons maintenant exposer le cheminement cognitif, les mouvements de pensée et la méthodologie que nous avons suivis pour détailler notre analyse qualitative au lecteur.

Outline

Documents relatifs