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Les campagnes américaines et l’économie-monde depuis les années

Dans le document Villageois sans agriculture ! (Page 62-72)

Le cas américain, tel qu’il vient d’être défini, est le résultat d’un concours de circonstances particulières : outre la mise en place pré- coce d’une agriculture de type capitaliste peu dispendieuse en main d’œuvre, par-delà les puissants moyens techniques et technologiques affectés aux développements des communications, et nonobstant le climat de violence urbaine des années , il tient aussi en partie à l’attrait profondément exercé par l’habitat isolé, sur des populations fascinées par l’échelle spatiale du pays.

The american country life

Si l’on se réfère, selon la célèbre distinction opérée par Taylor et Jones, à l’organisation rurale, forme d’intégration dans laquelle les

institutions déterminantes ont une base agraire, force est de constater que lui a succédé une organisation sociale urbanisée, dans laquelle les institutions déterminantes s’articulent sur une base urbaine. Les fondements d’une telle ferveur urbaine sont à rechercher au niveau des mutations de l’ex-métropole britannique, elle-même définie

. A.E. Luloff, American Rural Communities, Boulder, Westview Press, . . Edward Taylor, Village Economics in Rural Area, Cambridge, Cambridge Uni- versity Press, .

. J. Halpern, The Changing Village Community, Prentice Hall, Inc. Englewood Clffs, N.J., .

. Taylor and Jones, Rural Life and Urbanized Society, New York, Oxford, Univer- sity Press, .

comme un pays où les civilisations successives se sont superposé : « d’abord une civilisation à dominante rurale (...) Puis une civilisation industrielle dont l’origine remonte à deux siècles à peine. » Logique- ment, Taylor et Jones continuent : « l’orientation américaine vers l’or- ganisation sociale urbanisée date du temps de sa période coloniale. La naissance de la période coloniale coïncidant, en outre, avec la Révolution industrielle en Angleterre. » Longtemps caractéristique du Sud cotonnier, la vie rurale se présentait en fort contraste avec la vie urbaine laquelle fleurissait puissamment, plus particulièrement sur la bordure côtière du Nord-Est.

Paradoxalement, du moins à première vue, une telle organisation portait en germe un renouveau rural. En effet, après que les évolu- tions révolutionnaires enregistrées par les États-Unis au cours des deux siècles de leur histoire les aient dotés d’un peuplement d’âge industriel, d’une agribusiness de pointe, et d’une hiérarchie urbaine fort puissante, les campagnes affichent de bons indices de dyna- misme. L’étirement des populations urbaines sur des aires au rayon sans cesse croissant a suivi l’expansion automobile dans l’entre-deux guerres mondiales. La volonté de satisfaire des préférences person- nelless’est ici dotée de moyens de ne pas s’en priver ; les facilités de

transport routier ont ainsi précocement bénéficié aux petites villes, voire aux agglomérations rurales. Autant de ruptures précoces avec l’histoire du continent européen ayant entretenu des rapports sou- vent conflictuels entre leurs villes et leurs campagnes.

Posé sous un tel éclairage, le problème de la spécificité du nou- veau rapport villes/campagnes, analysé depuis longtemps déjà par les sociologues américains, prend toute sa dimension : l’évolution rurale « à l’américaine » suppose que soient rompus les liens tradition- nels hommes-terres, caractéristiques de sociétés paysannes et agri- coles. Ce qui signifie que les agriculteurs ne subsistent que dans les

proportions minimales, sur les terroirs agricoles les plus productifs,

tandis que la majeure partie des campagnes se peuple de membres

. Glen Fuguitt and David Brown, Rural and Small Town in America, New York, Russel Sage Foundation, , p. .

. R. Platt, G. Macinko, Beyond the Urban Fringe : Land Use in Non-metropolitan

America, Minneapolis, University of Minnesota Press, .

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actifs de professions non agricoles, ayant comme lien exclusif avec la terre, l’entretien des pelouses.

En conséquence, les campagnes se trouvent progressivement ali- gnées sur la généralisation du mode de vie urbain. Certes, elles gardent quelques comportements spécifiques, et non des moindres puisque les ruraux s’affichent volontiers hostiles envers toute mani- festation « libérée » et avant-gardiste ; les sondages et enquêtes montrent qu’ils sont généralement plus conservateurs pour ce qui concerne les croyances, les mœurs ou les choix politiques. Mais ils

présentent de nombreuses caractéristiques de la société englobante dans laquelle ils se trouvent intégrés, voire absorbés. C’est bien le fait urbain qui génère une nouvelle forme d’utilisation de l’espace rural, désormais largement soustrait aux lourdes activités agricoles d’autrefois. Et même là où celles-ci se maintiennent, les différences s’estompent entre agriculteurs et non-agriculteurs. Tous azimuts, les modèles en cours sont ceux de l’organisation urbaine, qu’il s’agisse des activités professionnelles, des groupes sociaux, ou du style de vie (habitat, rythmes quotidiens, régimes alimentaires), ou encore de la diffusion commerciale (shopping malls).

Les comtés ruraux, après avoir attiré et retenu les populations dans les décennies  et , ont été affectés par les conséquences d’une globalisation économique fortement aiguillonnée au niveau mondial. Depuis les années , ledit peuplement s’est maintenu,

cahin-caha, tandis que les phases de contraction et de récupération

se relayaient : une rapide mise au point statistique devrait permettre d’analyser les effets locaux du phénomène de mondialisation, et d’en tirer des enseignements.

Résultats des récentes stratégies compétitives

La décennie  enregistre un spectaculaire accroissement de la demande en produits agricoles, notamment en provenance de l’étran-

. Emery Castle, Rural People and Places, Laurence, University Press of Kansas, , p. .

. Michel Goussot, Les États-Unis dans la nouvelle économie mondiale, Paris, A. Colin, .

. Thomas R. Ford (direct.), Rural U.S.A.Persistence and Change, Ames, Iowa State University Press, .

ger où de fortes sècheresses ont, en maints endroits, endommagé les récoltes. Les récurrentes pratiques inflationnistes aidant, l’admi- nistration Nixon réussissait à convaincre de tout mettre en œuvre pour compenser les déficits de la balance commerciale. L’euphorie a conduit certains fermiers « à penser et à agir comme des gens riches, achetant des équipements et des logements onéreux, des bateaux de plaisance, rejoignant les country clubs, hivernant sous des climats chauds». Cela ne dura que pour les fermiers les plus dynamiques.

Un secteur primaire laminé

Au tournant des années -, l’agriculture américaine s’est trou- vée en butte à une concurrence aggravée sur le marché mondial ; les déficits accumulés dans la balance commerciale, la hausse des taux d’intérêt destinée à assainir la situation financière se retournaient en boomerangs contre les exploitations agricoles, et contre les indus- tries rurales en butte à de massives importations à bas prix. Rien n’allait plus dans les zones rurales. Le nombre d’exploitations agri-

coles (farms) s’est contracté une nouvelle fois pour se stabiliser sous la barre des deux millions à la fin du siècle. Un paysage de désolation

s’étalait, ponctué d’habitats d’où la vie s’était retirée. Ici et là, des

fermes abandonnées qui pourrissaient au soleil, avec leurs bâtisses aux pans de mur effondrés, aux toitures affaissées, envahies par les ronces. Le chômage se faisait menace ou réalité pour un nombre croissant d’actifs ; la pauvreté étalait ses filets comme dans les mau- vais souvenirs des années  ou .

Liées à la globalisation économique mondiale, les difficultés ont stimulé la réflexion de groupes d’hommes et de femmes préoccu- pés de leur avenir ; seuls ou en cheville avec des membres de l’admi-

. David Danbom, Born in the Country, a History of Rural America, Baltimore, John Hopkins University Press, , p. .

. Dana L. Hoag, Agricultural Crisis in America, Santa Barabara, Coclif, . P. H. Mooney, T.J. Majka, farmers’ and Farm workers’ Movement : Social Protest in

America Agriculture, New York, Twayne Publisher, .

. , millions en , , en , , en  (cf. U.S. Bureau of the Census). En ,  % des fermes ont moins de  acres, la moitié de  à ,  % plus de  acres. La moyenne se situe autour de  acres ; cf. U.S. Department of Agriculture.

. Peggy F. Barlett, American Dreams, Rural Realities, Family Farmers in Crisis, Chapel Hill, University of North Carolina Press, .

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nistration locale ou fédérale, ils ont mis au point des ripostes qu’ils espèrent efficaces en matière de résultats. Tandis que pour les popu-

lations locales les principaux gains doivent se traduire en offre crois- sante d’emplois, pour les bureaucrates du Department of Agriculture la mise au point d’une productivité maximale se fait essentielle dans la nouvelle donne commerciale: il s’agit pour eux d’assurer la com-

pétitivité des prix agricole sur les marchés du monde. Pour vaincre le défi — le déclin inexorable du nombre d’emplois — que lance d’une part la course à la productivité et, d’autre part, la délocalisation des entreprises en quête de main-d’œuvre bon marché, aucun effort n’est minimisé ; les investissements étrangers, notamment japonais et alle- mands sont encouragés. Jamais, la recherche du développement rural ne s’était faite aussi pressante.

À partir de , inégalement certes, mais efficacement par endroits, la remise sur pieds du secteur agricole se manifeste par la rétraction de l’endettement, une concentration structurelle encore plus forte : moins de fermes, mais des fermes de plus grosse taille, fortes de leurs robots et innovations technologiques. L’élevage rapporte désor-

mais davantage que les céréales (blé, maïs) ou le soja ; de nouvelles cultures se répandent : l’amarante à usage pharmaceutique et cosmé- tique, des produits « bio ». Parfois d’ailleurs, la prise en compte de la réduction de la biodiversité, de la dégradation rapide des sols, l’ob-

servation de surfaces épuisées et de sous-sols endommagés, se tradui- sait par des rejets de la science, et de nouvelles attitudes, non seule- ment en vue de la réduction des dépenses, mais aussi dans le but

. Alex McCalla, Rural Development : from vision to action, Washington D.C., World Bank, .

. Le General Agreement on trade and taxes (G.A.T.T.) est l’ancêtre de l’Organi- sation Mondiale du Commerce (O.M.C.), qui lui succède au terme du cycle de l’Uruguay Round (-) ; par l’accord de Marrakech ( avril ) est institué l’O.M.C. qui sort de l’O.N.U. ; il organise le libre-échange à échelle mondiale, avec promesses de plein-emploi, hausse des salaires et amélioration du niveau de vie...  pays contrôlent  % du commerce mondial.

. Thomas Rowley, Rural Development Research : a Foundation for Policy, West- port, Greewood Press, .

. Lyle P. Schertz, Another Revolution in United States’ Farming, Washington, US Department of Agriculture, .

. U.S. Agricultural Stabilising and Conservation Service, Agricultural Conserva-

d’améliorer les conditions de production. La mise à l’index des pro-

duits chimiques les plus nocifs pour la faune, les ressources en eau ou la santé humainesuscite de spectaculaires engagements écologistes.

Cependant, quelles que soient les farouches résistances des fermes familiales, des part-time ou hobby farms, les puissantes sociétés agri- coles soucieuses d’intégrer leurs opérations « de la semence au super- marché » sont les grandes bénéficiaires de la restructuration; Corpo-

rations et Sociétés deviennent de puissants actionnaires. Désormais, les intérêts industriels régulent étroitement les activités agricoles par le biais des nouvelles méthodes de culture et de gestion, et seules les marges bénéficiaires intéressent les hommes d’affaires plus avisés que jamais. Au début des années , la population agricole ne repré- sente plus que , % de la population totale (contre : , % en ). Il

semble qu’il n’y ait eu aucune limite à la réduction du nombre d’agri- culteurs. Le complexe agroindustriel emploie dix fois plus de popula- tion que le secteur agricole proprement dit, mais acquis aux robots et machines que les avancées techniques vulgarisent, il enregistre de lourdes pertes d’emplois.

Les secteurs secondaire et tertiaire contraints à accumuler les performances

Nombreuses sont les catégories professionnelles à avoir subi le contrecoup des secousses économiques qui affectent le pays dans les années . La stabilisation du taux rural d’embauche obtenue dans les années  grâce aux emplois qui avaient suivi les populations à la campagne, s’est momentanément s’effritée ; de  à , l’emploi rural n’augmenta en effet que de  % ( % pour l’emploi urbain), le salaire rural moyen perdit  %, le chômage demeura deux fois plus élevé que dans les zones urbaines. Au total, le taux de pauvreté est

. Cf. Larry Waterfield, Conflict and Crisis in Rural America, New York, Praeger, .

. U.S. Departement of Agriculture, Food from Farm to Table, Washington, Gov- ernment Printing Office, . Ronald C. Winberley, The Social Risks of Agriculture :

Americas Speak out on Food, Farming and Environment, Westport, Praeger, .

. Gérard Dorel, Agriculture et grandes entreprises aux États-Unis, Paris, Econo- mica, . Richard T. Roger, The Industralization of Agriculture : Vertical Coordina-

tion in the U.S. Food System, Aldershot, Ashgate, .

. La population agricole est de , millions, , millions dix ans plus tard ; (cf.

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plus élevé sur les aires rurales que sur les aires urbaines (le différen- tiel est de  %). Seule, la constance des emplois gouvernementaux (bases militaires, prisons, administrations des parcs et forêts natio- naux) a permis de compenser les pertes du secteur industriel pen- dant la crise des années . Cette dernière a donc particulièrement

affecté les aires rurales.

Celles-ci ne sont pas restées inertes, cherchant à renforcer de nou- velles branches. Dix ans plus tard, les secteurs de la forêt, du tou-

rismeet de son marketing, de la haute technologieaugmentent

en puissance, attirent des investissements étrangers, multiplient les nouveaux emplois industriels dans les zones rurales. À la fin du siècle, les services y totalisent la moitié des emplois, l’industrie le cin-

quième, l’agriculture le dixième. L’emploi se fait toujours plus diffi- cile à maintenir dans chacun de secteur, toujours plus mobile vers les secteurs les plus en pointe, toujours plus menacé par les avancées technologiques. L’installation des ménages se compte plus en années qu’en décennies, les opérations immobilières accélèrent leur rythme d’achats et de ventes, les liens d’interconnaissance se distendent.

En , bien qu’ayant grossi de quelque deux millions d’habi- tants, la population rurale a perdu quelques dixièmes de point en

pourcentage puisqu’elle représente alors moins du quart de la popu-

. Rural Economic Development in the eighties, Washington D.C., Agriculture and Rural Economy Division, U.S.D.A., .

. Thomas Bonnet, Strategies for Rural Competitivitness, Policy Options for State

Governement, Washington D.C., Council of Governors’ Policy Advisors, , p. 

cite un réseau d’agents spécialisés dans les produits forestiers pour conseiller les industriels du bois (abattage des arbres, récolte, traitement, conditionnement du bois). La fabrication des charpentes et du papier constitue un débouché inextin- guible.

. William Gahr, Rural America, Blueprint for Tomorrow, Thousand Oaks, Sage, . Les parcs de récréation ou de divertissement ont proliféré, parallèlement aux parcs nationaux, lacs et circuits de montagne.

. Mark Lapping, Rural Planning and Development in the U.S., New York, Guilford Press, .

. Amy Glasmeier and George Glickman, The High-Tech Potential : Economic

Development in Rural America, New Brunswick, Center of Urban Policy Research,

.

. Le secteur de la restauration rapide est particulièrement dynamique ; cf. William Galston, Rural Development in the U.S., Washington D.C., Island Press, , p. .

. , millions d’habitants, soit une hausse de , %, tandis que la population totale croissait de  % ; (cf. U.S. Bureau of the Census).

lation totale (, % de la population contre , en ). Si cela ne paraît pas suffisant pour conclure à un essoufflement du nouveau peuplement rural, cela souligne cependant, outre le choix de rési-

dence urbaine fait par les nouveaux migrants, les déceptions qui

peuvent accompagner certains rêves de romances champêtres : non seulement les récessions économiques ne les épargnent pas, mais elles peuvent les affecter plus ou moins durement. Le vieillissement

de la population, accentué par l’arrivée massive, dans les comtés de l’Ouest et du Sud, de jeunes retraités, ne va pas sans faire rebondir les prévisions en cours en matière de services de santé. Sans tou-

tefois faire l’unanimité, les plus enthousiastes des nouveaux-venus associent aux avantages climatiques et environnementaux de la cam- pagne, d’autres charmes déclinés en termes de valeurs personnelles, d’esprit communautaire, d’amabilité et de sociabilité des populations rurales. Des résultats de sondages aisément confirmés par les témoi- gnages de ceux qui ont séjourné dans l’un ou l’autre des comtés ruraux ; quelques mois passés dans le Meklenburg County l’attestent aussi.

Plus prosaïques, les Sociétés grosses consommatrices d’informa- tions et communications établissent leurs bureaux dans les zones urbaines où les équipements sont plus perfectionnés, et les coûts moins élevés. L’avance prise par la Silicon Valley dans la baie de San Francisco, par la Silicon Beach à San Diego, par la Tech Island à New York, ou par la Road à Boston, toutes intégrées à des aires métro- politaines, n’est pas prête d’être rattrapée par les comtés ruraux de Californie, du Massachusetts, du Michigan ou de Pennsylvanie. Aussi, le Center for Rural Affairs appelle-t-il à plus de responsabilité les orga-

. Selon T.W. Schultz, prix Nobel d’Agriculture, le mouvement de millions de per- sonnes qui s’est déroulé durant la Révolution rurale aux États-Unis est qualifié de « la plus grande migration paisible », cité par Wilkinson Kenneth, The Community in

Rural America, New York, Greenwood Press, , p. .

. Lorraine Garkovich, Population and Community in Rural America, New York, Greenwood Press, , note p. , « un afflux de mains travailleuses » issues de l’im- migration.

. Cf. Michael Murray, Revitalizing Rural America : a perspective on Collaboration

and Community, Chichester, John Willey, .

. Mark Popovitch, Entrepreneurship and Rural Development, Washington D.C., National Governors’Association, , p. .

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nisations qui gèrent et distribuent les aides gouvernementales desti- nées aux investissements de pointe.

Le cas américain relève d’une Révolution rurale capable de se réa- liser aussi dans le cadre des vieilles civilisations paysannes. Et elle s’y réalise. Partout en Europe, le mouvement de la population rurale s’est redressé dans les dernières décennies du vingtième siècle, par- fois même avec un taux de progression supérieur à celui de la popula- tion urbaine qui, après avoir enregistré des taux avec record de crois- sance, semble s’essouffler dans les dernières décennies du vingtième siècle. Déjà en , Claude Moindrot estimait que « la répartition des hommes ne répondait plus aux exigences du progrès économique et social» sur le territoire britannique. À l’instar de fermiers améri-

cains, les agriculteurs européens sont soumis à l’impitoyable concur- rence commerciale et, comme eux, condamnés à n’exister qu’en petit nombre. Parallèlement, le gonflement des métropoles pousse les populations à repousser toujours plus loin les limites du tissu périur- bain.

Mais c’est en France plus qu’ailleurs, en raison du lourd héritage paysan qui a longtemps façonné son destin, que les débats sur la désertification, l’extension de la friche, et plus généralement, l’avenir du monde rural sont portés sur la scène politique et médiatique. Alors que la réforme de la Politique agricole commune (P.A.C.) et la signa- ture des accords de l’Organisation Mondiale du Commerce (O.M.C.) achevaient de régler le sort de l’agriculture, le Gouvernement fran-

çais lançait une vaste consultation nationale sur l’orientation future à donner à l’aménagement du territoire() ; les intentions peuvent

être mesurées à l’aune des ultimes résistances des racines terriennes françaises.

. Claude Moindrot, Villes et campagnes britanniques, A. Colin, . . Cf. note  p. .

. Mende (Lozère, juillet ), Projet d’aménagement du territoire soumis au Par- lement à l’automne .

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