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Les bouleversements amenés par le 19 ème siècle

Le patrimoine culturel dans une perspective historique

B. Le patrimoine culturel dans la pensée philosophique et les us et coutumesphilosophique et les us et coutumes

2. Les Temps modernes 1. Propos introductifs1.Propos introductifs

2.4. Les bouleversements amenés par le 19 ème siècle

La fin du 18èmesiècle et le début du 19èmesiècle en Europe, sont marqués par les bouleversements transnationaux qu’apportent la Révolution française et l’Empire napoléonien. Au plan politique, l’Europe sera à nouveau le théâtre de guerres, mais, à l’inverse des conflits du siècle précédent, ces dernières de-viendront de véritables guerres de masse225. Napoléon Bonaparte a adopté le système de la conscription qui lui permit de lever de nombreuses et importan-tes armées qu’il a ainsi pu envoyer dans l’Europe entière, et au-delà. Les guer-res napoléoniennes, laissant présager par leur amplitude celles qui déchireront le 20èmesiècle, affecteront largement les populations civiles des pays où elles se déroulaient. La distinction entre ces conflits et les précédents reposait moins sur l’apport d’innovations majeures dans le domaine de l’armement que sur l’ampleur des forces militaires déployées, dont les performances étaient décu-plées par l’ingéniosité des tactiques adoptées résultant du développement qu’a connu l’art de la guerre à cette époque.

Face à ces bouleversements, les acquis du siècle précédent en matière de protection, tant du patrimoine culturel que des civils et de leurs biens, furent battus en brèche. La pratique des cartels et capitulaires tombait en désuétude et elle fut progressivement abandonnée226. Parallèlement, les troupes n’étaient plus formées au respect, dans la conduite des hostilités, des principes de dis-tinction et de nécessité militaire. Par ailleurs, les guerres napoléoniennes n’avaient plus seulement des motivations d’expansion territoriale, elles avaient dorénavant également une dimension idéologique. Les peuples, et non plus seulement les armées des Etats en guerre, s’affrontaient227. Ce facteur, addi-tionné à ceux évoqués plus haut, exerça une incidence considérable sur la na-ture des guerres menées alors.

Aux phénomènes de destruction menée à grande échelle, s’ajouta celui du pillage qui prit au cours des guerres napoléoniennes des dimensions sans pré-cédent228. Paris devait devenir le centre mondial de la culture, et le Louvre le musée le plus riche qui ait jamais existé. Ainsi, ordre était donné aux armées d’acheminer en France toutes les œuvres « dignes de figurer dans les collec-tions et musées de la République »229. Les églises, les musées, les palais, les bi-bliothèques, furent dessaisis de leurs biens, et au pillage d’Etat s’ajouta celui mené par les troupes elles-mêmes. Les traités de paix conclus par les troupes

225 Picte t,J.,Développement et principes du droit international humanitaire,Genève, 1983, p. 31.

226 Ibid.,p. 32.

227 Ibid.

228 OKe efe,R.,The Protection of Cultural Property . . ., op. cit.,p. 21-22.

229 Ar no ux(H),Objets et monuments d’art devant le droit des gens,thèse, Paris, 1934, p. 26 in Nahlik, S.

E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 78.

napoléoniennes avec les ennemis battus, ou les clauses d’armistice, ou encore les accords de suspension d’armes, incluaient des clauses expresses prévoyant l’enlèvement de biens culturels230. L’ampleur des dégâts ainsi causés conduisit à une prise de conscience des conséquences occasionnées par l’exercice du droit de butin lorsque celui-ci se réalisait à l’échelle d’un continent, voire plus. Cette conscience devait notamment se traduire dans les traités de paix conclus à la chute de Napoléon en 1815 au Congrès de Vienne avec les nations européennes victorieuses, qui exigèrent le rapatriement de ces biens vers leur lieu d’origine.

Dans une note circulaire adressée lors du Congrès de Vienne par le ministre des Affaires étrangères britannique, le Vicomte Castlereagh, ce dernier stipulait que les actes ainsi perpétrés étaient :

« . . . contrary to every principle of justice and to the usages of modern warfare. . . ».

Il relevait en outre que la conclusion des accords qui prévoyaient l’enlèvement de biens ne pouvait légitimer de tels actes, et que ces derniers ne visaient qu’à masquer des rapines flagrantes. Il soulignait à cet égard que :

« . . . the principle of property regulated by the claims of the territories from whence these works were taken, is the surest and only guide to justice »231.

Ces propos reflétaient, semble-t-il, la position unanime de l’Europe à cette époque232. De nombreuses voix se sont élevées, dont des voix françaises, comme celle de l’archéologue Quatremère de Quincy, pour affirmer que les œuvres d’art devaient désormais être exemptées du droit de butin233. Il décla-rait en effet :

« (. . .) dans l’Europe civilisée, tout ce qui appartient à la culture des arts et des sciences est hors des droits de la guerre et de la victoire »234.

Aux profondes mutations évoquées ci-dessus au regard du droit de butin, formalisées dans de nombreux traités de paix exigeant la restitution de biens pillés, s’ajoutèrent également au 19èmesiècle certaines décisions de tribunaux.

Ainsi, au cours de la guerre opposant l’Angleterre aux Etats-Unis en 1812, le juge à la Cour de la vice amirauté de Halifax en Nouvelle-Ecosse, ayant été appelé à statuer sur la légalité d’une prise par un navire britannique,The Mar-quis de Somerueles, d’une collection d’œuvres d’art italiennes destinée à un musée de Philadelphie, a interdit cette capture au motif que :

230 Nahlik, S.E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 78-79.

231 Ibid.,p. 79.

232 Hall , W. E.,A Treatise on International Law,6ème. éd.. Oxford, 1909, p. 417 in Nahlik, S. E., Cours de lacadémie de La Haye,op. cit.,p. 80.

233 Nahlik, S. E.,Recueil des cours de lAcadémie de La Haye, 1967, p. 80.

234 Quatr emère de Quincy,A. C.,Lettres à Miranda sur le déplacement des monuments de l’art de lItalie(1796), 2èmeéd., Introduction et notes,par E. Pommier, Paris, 1996, p. 88.

Chapitre 1 : Le patrimoine culturel dans une perspective historique

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« The Arts (. . .) are considered not as the peculium of this or of that nation, but as the property of mankind at large, and as belonging to the common interest of the whole species : as such they were admitted amongst all civilized nations as forming an excep-tion to the severe rights of war, and as entitled to favour and protecexcep-tion »235.

Face à cette prise de conscience qui, en ce début de 19ème siècle, a traversé l’Europe de part en part, il semble que le Congrès de Vienne de 1815, où furent signés de nombreux traités de paix prévoyant notamment la restitution de biens culturels saisis, marquera la date à partir de laquelle, de l’avis général, le droit de butin sur de tels biens devait être aboli. L’on peut en effet relever qu’il existera dans les décennies qui suivirent peu d’exemples manifestes de prises de butin importantes dans les guerres européennes236. Il en ira bien évidem-ment différemévidem-ment lors des guerres de colonisation menées par les puissances occidentales, principalement en Asie237 et en Afrique, le pillage perpétré en Amérique latine ayant débuté préalablement. Au-delà de la condamnation du droit de butin évoquée ci-dessus, c’est la protection des biens culturels dans leur ensemble qui connut un essor considérable dans l’Europe du 19èmesiècle.

La France, qui avait connu des destructions importantes de son patrimoine culturel lors de la Révolution de 1789, fut la première à institutionnaliser au plan national cette protection. Après la création en 1790 d’une Commission de-vant traiter des monuments confisqués à la noblesse et à l’Eglise, désormais qualifiés de « patrimoine de tous, patrimoine national »238, la Conventionœ u-vra pour la défense de ces biens après les années de terreur qui prirent fin dès 1794.

L’un de ses députés, l’Abbé Grégoire, qualifiant les destructions perpétrées de « vandalisme », déploya durant trois décennies des efforts considérables pour que soit protégé le « patrimoine » architectural, archéologique, artistique français, afin que ce dernier puisse être transmis à la postérité239. En 1830, à l’initiative de l’Abbé Grégoire notamment, un Comité des travaux historiques fut constitué, suivi sept ans plus tard par la création de la Commission des

mo-235 The Marquis de Somerueles,Stewarts Vice-Admiralty Reports (Nova Scotia), p. 482 (1813) inOK ee fe , R,The Protection of Cultural Property . . ., op. cit.,p. 16 ; Moore (J. B.),A Digest of International Law,VII, Washington, 1906, p. 460 in Nahlik, S. E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 80.

236 Nahlik, S. E.,Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 86.

237 Ainsi, lors de la Guerre de lopium, en 1860, les troupes anglo-françaises semparèrent de la résidence dété de lempereur de Chine, composée de nombreux palais contenant dinnombrables biens cultu-rels qui, sous leffet des destructions et du pillage, disparurent en quelques jours ;Nahlik, S. E., Re-cueil des cours de lacadémie de La Haye,op. cit.,p. 88-89.

238 Desvallées, A., « Emergence et cheminement du mot patrimoine », in Musées et collections publiques de France, no208, septembre 2005, p. 6-8.

239 « Rapport sur les destructions opérées par le Vandalisme, et sur les moyens de le réprimer », inŒuvres de lAbbé Grégoire, Tome II, Grégoire, député à la Convention nationale, (Nendeln/Paris : KTOPress/ED-HIS, 1977), p. 257 in OKeefe, R.,The Protection of Cultural Property . . ., op. cit.,p. 15. LAbbé rédigea à lattention de la Convention trois rapports sur ces destructions.

numents historiques, dotée d’un mandat légal de protection et de fonds alloués à cette fin. Des commissions similaires furent créées dans plusieurs pays euro-péens, et l’émulation se poursuivit au-delà, tel que dans les nations récemment créées d’Amérique latine et au Japon240.

Une préoccupation semblable s’est aussi manifestée dans la conduite des hostilités lors des guerres qui se déroulèrent au 19ème siècle. Selon la pratique observée lors de ces conflits, il semble qu’en cas bombardement une attention était portée par les belligérants pour que les biens qui ne constituaient pas des objectifs militaires, au premier chef desquels figuraient les biens culturels, soient épargnés. Le respect du principe de distinction, désormais reconnu de tous comme constitutif des us et coutumes de la guerre, a notamment prévalu lors de divers bombardements, comme par exemple ceux perpétrés par les for-ces françaises à Vera Cruz au Mexique en 1838 et à Rome en 1849, par les Alliés à Sébastopol en 1852 lors de la guerre de Crimée, et par les Anglais à Alexan-drie en 1882241. En revanche, lors de la guerre franco-prussienne de 1870-1971, Paris, parmi d’autres cibles, fut bombardée par les Prussiens en 1871242, déci-sion prise sous l’influence probable de la conception de laKriegsraison préva-lant à l’époque dans cette armée, et qui s’était substituée à laKriegsmanier,la première doctrine autorisant contrairement à la seconde que la coutume soit transgressée dans des situations d’extrême nécessité243.

De telles limitations, visant à la protection des biens culturels, ont bénéficié également aux biens civils sis dans ces villes, à savoir la propriété privée des personnes ne participant pas aux hostilités. Le bombardement de villes ouver-tes était strictement interdit, et contrevenir à cette règle équivalait, au regard de l’éminent juriste argentin Carlos Calvo, « (. . .) à violer tous les principes du droit des gens et se placer hors la loi des nations qui marchent à la tête de la civilisation »244. Quant aux villes défendues, le bombardement était alors auto-risé mais il convenait de l’annoncer préalablement, pour permettre aux civils et à leurs biens de trouver refuge245. Ainsi, au même titre que les biens culturels, les biens civils ne devaient faire l’objet ni de destruction, ni de pillage. Un juge-ment rendu lors de la Guerre de Sécession de 1861,United States v. Klein, por-tant sur les biens privés de civils, vient confirmer l’existence de cette pratique.

240 Choay, F.,The Invention of the Historic Monument,translated by L. M. OConnel (Cambridge, Cam-bridge University Press, 2001), p. 84.

241 Nahlik, S.E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 85-86.

242 Ibid.,p. 88.

243 Ibid.,p. 84.

244 Le droit international théorique et pratique, IV, 5èmeéd., Paris, 1896, p. 148 in Nahlik, S. E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 84.

245 Nahlik, S. E.,Recueil des cours de lAcadémie de La Haye, 1967, p. 86

Chapitre 1 : Le patrimoine culturel dans une perspective historique

61 La Cour y ordonnait que ces biens ne devaient pas, lors d’attaques, faire l’objet de droit de butin. Se fondant sur le droit des gens, elle déclarait en effet :

«The (American) Government recognized to the fullest extent the humane maxims of the modern law of nations, which exempt private property of non-combatant enemies from capture as booty of war»246.

Les efforts menés en vue de la protection de la propriété privée progressent dès lors également au cours du 19èmesiècle. Une unanimité se profile entre les na-tions européennes portant sur la condamnation de toute destruction intention-nelle de tels biens en cas de conflit armé247. Une convention portant sur l’im-munité de la propriété privée en temps de guerre, a d’ailleurs été sur le point d’être conclue en 1823. Ce texte, présenté par le secrétaire d’Etat américain John Quincy Adams, était soutenu par de nombreuses puissances, et son adop-tion n’a échoué qu’à cause de la Grande-Bretagne, soucieuse de préserver son droit de prise maritime. Cette dernière en excluait toutefois lesœuvres d’art, ceci témoignant de l’attention particulière dont faisaient l’objet à cette époque les biens culturels248.

Il faut toutefois souligner que la conscience d’une nécessité d’apporter pro-tection au patrimoine culturel en cas de conflit armé portait essentiellement, tant au 18èmequ’au 19ème siècle, sur le patrimoine culturel matériel. Précédem-ment, notamment pendant l’Antiquité et le Moyen-Age, le patrimoine culturel protégé était principalement sacré et la protection dont il bénéficiait s’étendait aux valeurs qu’il symbolisait ainsi qu’aux rituels et traditions qui y étaient liés.

Or, pendant la période des Temps modernes, la nature du patrimoine culturel s’est considérablement transformée. Dorénavant, et ce depuis la Renaissance déjà, s’est également imposée l’obligation de protéger, en cas de conflit armé, le patrimoine culturel profane. Le fondement de cette obligation s’avère dès lors être double car il peut désormais relever tant de l’appartenance nationale que de l’appartenance universelle.

L’évocation du terme de « patrimoine » se généralise à partir de la Révolu-tion française, principalement. Regroupant les biens culturels dont l’Etat a l’obligation d’assurer la transmission aux générations futures, il est désormais associé non plus à des valeurs strictement spirituelles, à l’instar du patrimoine culturel sacré, mais à des biens symbolisant l’identité nationale. L’Etat se posi-tionne alors comme garant de l’existence de tels biens qui, sans appartenir à personne, appartiennent à toute la nation. Le patrimoine culturel national est dès lors incontestablement public. Dans un siècle où le sentiment

d’apparte-246 Mo ore , J. B .,A Digest of International Law,VII, Washington, 1906, p. 289 in Nahlik, S. E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 83.

247 Nahlik, S. E.,Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 85.

248 Mo ore , J.B.,A Digest of International Law,VII, Washington, 1906, p. 462 in Nahlik, S. E., Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 84.

nance collective ou communautaire cédait le pas à l’individualisme, l’ identifi-cation de l’individu à une nation exigeait l’existence de repères auxquels il pourrait s’identifier. Ainsi, l’émergence du concept de patrimoine culturel au 19ème siècle est dès lors avant tout d’inspiration « nationaliste ». Les mouve-ments d’unité nationale en Europe en attestent également. L’exigence de resti-tution par les Autrichiens à l’Italie des biens culturels italiens, à savoir des ob-jets d’art, de science, ainsi que les archives, en est une illustration249. Ces biens, symboles de la nation, devaient être protégés en cas de conflit armé, et ne faire l’objet ni de destruction délibérée, ni d’enlèvement.

Parallèlement, un courant de pensée humaniste, issu de la Renaissance et du Siècle des Lumières, visait également à la protection du patrimoine culturel en cas de conflit armé. Contrairement à celui qui a conduit à l’émergence d’un patrimoine culturel national, ce courant fonde quant à lui l’obligation de res-pect dû à de tels biens du fait de leur appartenance à un patrimoine universel, regroupant des biens dont la qualité esthétique ou historique est telle qu’ils ne peuvent être rattachés à une seule nation, ou à une seule culture, mais appar-tiennent à l’humanité entière. Ces biens, à l’instar de ceux précédemment évo-qués, ne sont la propriété de personne mais appartiennent à tous, ainsi que l’exprime Quatremère de Quincy, notamment, lorsqu’il dit de telles richesses qu’elles « (. . .) appartiennent à tout l’univers »250.

Que le patrimoine culturel soit qualifié de national ou d’universel, au-delà de la qualité intrinsèque des biens qui le composent, il convient de souligner que ce sont aussi les valeurs que ceux-ci incarnent, qui justifient la protection qui leur est due en cas de conflit armé, même si ces valeurs n’étaient plus, de-puis longtemps, exclusivement sacrées. En ce sens, le patrimoine culturel pro-tégé au 19èmesiècle présente, outre une dimension matérielle avérée, également une dimension immatérielle.

Certes, l’évocation de la protection susceptible d’être apportée au patri-moine culturel immatériel en cas de conflit armé n’a jamais été formellement formulée au 19èmesiècle. Cela étant, certains comportements proscrits dans ces situations permettent d’illustrer que des considérations de cet ordre étaient présentes, même si elles n’en étaient qu’à leurs balbutiements. Trois domaines permettent de l’affirmer : le maintien du mode de vie des populations civiles au travers de la protection de la propriété privée, la préservation de leurs prati-ques spirituelles par une protection renforcée des biens culturels, notamment des lieux de culte, et la valorisation des traditions, valeurs, rituels commémora-tifs et usages propres à une identité culturelle nationale dont le patrimoine

249 Le traité entre lItalie et lEmpire Austro-Hongrois stipule à lart. XVIII que ces biens devaient être ren-dus à lItalie ;Nahlik, S. E.,Recueil des cours de lAcadémie de La Haye,op. cit.,p. 87.

250 Quatr emère de Quincy,A. C.,Lettres à Miranda sur le déplacement des monuments de l’art de lItalie(1976), 2èmeéd.,Introduction et notes,par E. Pommier, Macula, Paris, 1996, p. 88.

Chapitre 1 : Le patrimoine culturel dans une perspective historique

63 culturel est protégé. Ainsi, si le 19ème siècle a clairement posé les prémisses d’une codification visant à la protection d’un patrimoine culturel matériel, à travers la reconnaissance de l’existence de patrimoines nationaux, et celles de l’attribution d’un statut exceptionnel à desœuvres d’art et à des monuments historiques, l’élément immatériel à protéger de ces biens, désormais non seule-ment religieux mais égaleseule-ment profane, se profilait égaleseule-ment.

Conclusion

Le survol historique réalisé dans le cadre de ce chapitre a permis d’identifier des biens qui, en cas de conflit armé, devaient être préservés tant des effets des combats que des multiples formes de déprédation et spoliation dont ils peuvent faire l’objet. L’identification de ces éléments, essentiellement associés jusqu’à la Renaissance à l’expression de croyances spirituelles, a aussi permis de constater qu’au-delà des biens eux-mêmes c’était la permanence de valeurs qui devaient par là être préservées. Du souci d’assurer la transmission aux gé-nérations futures de ces croyances et valeurs, symbolisées par les biens que les belligérants étaient, en vertu de la coutume, tenus de protéger, est né le concept de patrimoine, à savoir des biens et des valeurs qui devaient se transmettre de génération en génération.

Outre le qualificatif de culturel, celui de spirituel lui a aussi fréquemment été adjoint. Depuis l’Antiquité, en passant par le Moyen-Age, ce sont principa-lement les lieux sacrés, les lieux de culte qui ont été protégés, accompagnés du respect de traditions, telles que l’asile, la Paix de Dieu, premières manifesta-tions de ce patrimoine qualifié d’immatériel. Les bouleversements multiples survenus depuis la Renaissance ont vu l’apparition desœuvres d’art profanes, véhiculant une qualité additionnelle à celle des biens usuels. Leur transmission s’est dès lors elle aussi imposée, et le patrimoine s’est enrichi de cet apport. Le

Outre le qualificatif de culturel, celui de spirituel lui a aussi fréquemment été adjoint. Depuis l’Antiquité, en passant par le Moyen-Age, ce sont principa-lement les lieux sacrés, les lieux de culte qui ont été protégés, accompagnés du respect de traditions, telles que l’asile, la Paix de Dieu, premières manifesta-tions de ce patrimoine qualifié d’immatériel. Les bouleversements multiples survenus depuis la Renaissance ont vu l’apparition desœuvres d’art profanes, véhiculant une qualité additionnelle à celle des biens usuels. Leur transmission s’est dès lors elle aussi imposée, et le patrimoine s’est enrichi de cet apport. Le