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Le rôle d’Internet dans la communication politique

LORS DES ELECTIONS PRESIDENTIELLES AUX É TATS U NIS ET EN F RANCE

1.7 E TUDE QUANTITATIVE ET QUALITATIVE DE L ’ ESPACE OCCUPE PAR N ICOLAS S ARKOZY ENTRE LES ELECTIONS

1.7.3 Le rôle d’Internet dans la communication politique

Lors d’une journée d’études dans le cadre des Rencontres Ina-Sorbonne108,

Dominique Cardon, Chercheur au laboratoire des usages de France Telecom R&D et auteur de La compétition politique sur Internet, a noté que la campagne de 2007 était marquée par l’apparition des blogs109 de journalistes mais aussi de candidats ainsi que

par l’apparition de pure players110 de l’information sur Internet. Il a également

soulevé la question de la campagne présidentielle de 2007 en se demandant s’il y avait un contre-usage pour Internet. En effet, la plus grande partie de l’intérêt politique des citoyens se manifeste dans d’autres espaces médiatiques et surtout à la télévision. Cette tendance n’est pas propre à la France. Selon Dominique Cardon, en 2008, aux États-Unis, Internet n’a été que l’organisation de soutien pour mobiliser les électeurs déjà acquis par Barack Obama.

En effet, Internet s’est imposé comme un support important sans devenir primordial. Comme nous avons pu le constater plus haut, la télévision reste le premier support car il reste le plus démocratisé par son accessibilité et celui qui demande le moins de connaissances pour être utilisé avec, en outre, une consommation passive. D’autre part, la ponctualité des événements politiques et notamment celle des élections présidentielles ne requiert pas d’Internet de façon constante comme outil de mobilisation.

108 Le 10 décembre 2011, Salle Cognacq-Jay, 83-85 rue de Patay, 75013 Paris

109 Blog n.m. (Abréviation de weblog, carnet de bord sur le web) Site Web sur lequel un internaute tient une chronique

personnelle ou consacrée à un sujet particulier. Source : http://www.larousse.fr/dictionnaires/francais/blog/10910049

110 Pure Player : L'expression fut utilisée à l'origine pour désigner une entreprise dont l'activité était exclusivement menée sur

l'Internet. Par extension, elle permet de désigner une entreprise qui concentre ses activités sur un seul métier ou en tout cas sur un seul secteur d'activité. Source : http://www.e-marketing.fr/Definitions-Glossaire-Marketing/Pure-player-6233.htm

Toujours selon Dominique Cardon, en 2007, trois mois après la campagne présidentielle, la blogosphère UMP avait quasiment disparu. En plus, la quantité de l’espace occupé n’est pas nécessairement un facteur influent pour obtenir une victoire. La représentation du Modem dans la blogosphère n’a pas permis à François Bayrou de gagner les élections ni d’asseoir son influence par la suite111. Enfin, on

peut également remarquer qu’Internet sert plus aux acteurs politiques comme terrain de guerre d’opposition avec des commentaires critiques sur l’adversaire.

En temps d’élections, la focalisation se faisant sur les attentes des électeurs via les sondages et sur l’attaque des adversaires, il n’y a pas de possibilité d’interagir en donnant une réponse personnalisée comme c’est le cas lors d’un contact direct à l’occasion d’une visite. Facebook et Twitter posent le même problème avec en plus, le danger d’envoyer des messages « à chaud » que l’on peut regretter juste après. Le malheureux tweet de Valérie Trierweiler112 est un bon exemple en ce qui concerne

l’utilisation des réseaux sociaux. Jusqu’à présent, l’usage qui se fait d’Internet reste traditionnel sans exploiter réellement les spécificités de cet outil. Au lieu de profiter des possibilités d’échanges et de débat pour mieux construire un projet en tenant compte d’avis divergents, les hommes politiques se contentent de fédérer des opinions semblables et des soutiens déjà acquis pour la plupart. Autrement dit, le compte Facebook et Twitter de Nicolas Sarkozy lui sert uniquement à dénigrer ses adversaires et à prêcher des convaincus. En ce qui concerne les blogs politiques, on sait qu’ils ont tendance à rassembler les mêmes sensibilités sans qu’il y ait d’interaction constructive entre les participants. Par conséquent, il y a très peu de débats sur Internet car les bloggeurs se referment sur eux mêmes en s’autoalimentant de messages qui les confortent dans leurs opinions.

Sur Internet, les conversations politiques se font par la base car les connecteurs centraux sont les commentateurs-électeurs. Les échanges politisés se font à la vitesse de circulation des connections Internet (automonitoring) comme cela se fait sur Facebook et sur Twitter. Mais jusqu’à présent aucun homme politique n’a pris

111 Voir notamment : http://www.internetactu.net/2010/10/07/dominique-cardon-pourquoi-linternet-na-t-il-pas-change-la-

politique/

112 Voir notamment : http://www.lexpress.fr/actualite/politique/valerie-trierweiler-renonce-a-son-projet-d-emission-avec-

le temps de construire un modèle d’usage des réseaux sociaux favorisant le recrutement de nouveaux soutiens issus des camps adverses.

Il faut aussi prendre en compte les contenus à caractère ironique tels que les détournements humoristiques, le cynisme et la moquerie qui sont pris plus ou moins au sérieux et dont il serait intéressant de voir l’influence sur les choix des électeurs. Une étude plus approfondie des réseaux sociaux est souhaitable pour analyser son contenu politique et son influence véritable. Il serait également intéressant de suivre et décrypter les conversations des minorités actives sur les réseaux sociaux. Selon Dominique Cardon, en France, la communauté Twitter penche à gauche alors qu’aux États-Unis, c’est le Tea Party (considéré d’extrême droite) qui est le plus actif sur cette même plateforme. On parle aussi d’une « fachosphère » sur Internet. En effet, on peut trouver du contenu jugé politiquement incorrect de façon très ordinaire sur Internet. Enfin, on peut se poser la question de l’alignement d’Internet avec les médias concernant les règles de diffusion lors des campagnes présidentielles.

En définitive, lors des campagnes de 2007 et de 2012, la communication en ligne des candidats était très différente de la communication hors ligne. Si la communication hors ligne, largement conçue pour la télévision, sert à mobiliser les militants en les incitant à voter et à partager leurs idées afin d’obtenir de nouveaux votes, qu’ils viennent de personnes indécises ou avec des opinions opposées, Internet s’avère être un simple renforcement des soutiens déjà acquis. En effet, Internet sert le candidat de façon instrumentale pour renforcer, confirmer ses acquis et concrétiser les votes de ses partisans mais n’est pas efficace pour une mobilisation idéologique car il ne peut pas convertir des opposants, ou alors de façon peu significative. Pour l’heure, les électeurs restent en relation avec leurs semblables et cherchent uniquement contact avec des personnes qui leur ressemblent.

1.8 L’

IMPORTANCE DU PATHOS DANS LA COMMUNICATION