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une décision complexe

A. Le principe de bienfaisance

Les adultes doivent agir selon le bien de l'enfant. En effet, leur relation à l'enfant est par nature dissymétrique. Les droits de l'enfant sont des droits-créances, en ce qu'ils obligent les parents prioritairement et secondairement l'Etat26.

Le bien de 1' enfant est pluridimensionnel: il s'agit de son bien physique (santé, développement corporel), de son bien intellectuel (formation, inté-gration sociale), de son bien moral et affectif.

- L'intérêt de l'enfant formule d'abord une norme de conduite à l'attention des parents. Il consiste à assurer la protection de l'enfant par ses deux parents.

La Constitution énonce que les enfants et les jeunes ont droit à une pro-tection particulière de leur intégrité et à 1' encouragement de leur dévelop-pement27. La loi rappelle que la responsabilité d'assurer leur développe-ment incombe aussi bien à leur père qu'à leur mère28.

26 DOMINIQUE YOUF, Introduction à la philosophie des droits de l'enfant, Villeneuve d'Ascq 1999, p. 341.

27 Art. 11 al. 1 Cst. féd.

28 Art. 302 CC, 18 par. 1 CDE.

LA FIN DES RÈGLES FIXES EN DROIT CIVIL

L'intérêt de l'enfant est en principe d'avoir des relations personnelles avec ses deux parents29 ; le nouveau droit du divorce l'a consacré comme un droit de l' enfant30.

Son intérêt est également axé sur son éducation qui renvoie aux respon-sabilités que les parents doivent assumer à son égard. Les parents ont un droit et un devoir d'éduquer l'enfant31 . L'art. 27 par. 1 CDE reconnaît «le droit de tout enfant à un niveau de vie suffisant pour permettre son déve-loppement physique, mental, spirituel, moral et social».

Il commande d'agir selon son bien et de favoriser le mieux possible son développement. Il s'agit d'un principe qui prend en considération la fra-gilité et la vulnérabilité de l'enfant. «Les père et mère déterminent les soins à donner à l'enfant, dirigent son éducation en vue de son bien et prennent les décisions nécessaires [ ... ]»32 .

Mais le bien de l'enfant est évolutif, corrélativement à sa croissance.

C'est ainsi que l'autorité parentale encadre la volonté du mineur, en par-ticulier lorsqu'il est incapable d'exercer lui-même ses droits conformé-ment à son intérêt33 .

Les responsabilités des adultes à son égard sont modulées par son degré de maturité et sa propre capacité. Les art. 410 et 411 CC (applicables par analogie) confèrent aux parents un droit de veto en rendant caduc un contrat qu'ils désapprouvent.

L'intérêt de l'enfant joue aussi le rôle de norme protectrice légitimant 1 'intervention de 1' autorité judiciaire dans la sphère privée.

Néanmoins, cette intrusion dans la sphère privée n'est qu'un ultime re-cours dans l'intérêt de l'enfant. Il convient de rappeler que l'art. 13 Cst.

féd. garantit le dmit au respect de la vie familiale34 et que la CDE stipule que l'enfant doit être protégé contre toute séparation arbitraire de ses parents. Elle prévoit que «les Etats parties veillent à ce que l'enfant ne soit pas séparé de ses parents contre son gré, à moins que les autorités compétentes ne décident [ ... ] que cette séparation est nécessaire dans

29 Art. 9 CDE.

30 Art. 133 al. 1 CC et 273 al. 1 CC.

31 Art. 18 par. 1 CDE.

32 Art. 301 CC.

33 Voir l'art. 301 al. 1 CC <<sous réserve de sa propre capacité» et l'art. 5 CDE.

34 De même que l'art. 8 CDE.

DoMINIQUE MAN Aï

l'intérêt supérieur de l'enfant»35. Ainsi, le placement d'enfants ou la sup-pression du droit de garde constitue une atteinte grave à ce droit consti-tutionnel. Comme toute atteinte à un droit constitutionnel, la mesure ne doit, de surcroît, pas être disproportionnée.

C'est ainsi que l'invocation du bien de l'enfant est déterminante pour l'attribution de l'autorité parentale36, pour l'adoption37, pour accorder un droit de visite à un tiers38, pour refuser ou retirer le droit de visite à l'un des parents39 , pour ordonner des mesures protectrices40 •

Toutefois, en matière d'adoption, la loi prévoit qu'il est possible de se dispenser du consentement du parent qui ne s'est pas soucié sérieusement de l' enfant41 . Dans l'interprétation de cette disposition légale, le Tribunal fédéral a considéré que «l'intérêt de l'enfant n'est pas décisif quand il s'agit d'appliquer l'art. 265c ch. 2 CC. Néanmoins, il n'est pas possible d'en faire totalement abstraction dans de telles circonstances [ ... ]» 42. Face à un conflit d'intérêts entre celui de l'enfant à être adopté et celui du parent, le Tribunal fédéral a opté pour la protection de la personnalité de ce dernier, en retenant qu'il ne se soucie pas sérieusement de l'enfant non seulement lorsqu'il n'y a pas de liens vivants entre eux, mais encore lors-qu'il n'a fait aucun effort pour maintenir ces liens43.

La jurisprudence a concrétisé la notion d'intérêt de l'enfant en matière d'attribution de l'autorité parentale44 • Il s'agit de promouvoir le meilleur épanouissement de l'enfant, c'est-à-dire celui qui favorise le mieux son devenir adulte.

L'intérêt de l'enfant consiste à lui assurer des conditions de vie stables45 ,

à être pris en charge par un parent qui s'occupe de lui et l'élève

persan-35 Art. 9 CDE.

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nellement46 , à prendre en compte la nature de la relation parentale, en particulier la faculté d'écoute de ses père et mère, la qualité des appuis éducatifs dont pourrait bénéficier l'un et l'autre parent de la part des membres de la communauté familiale47 , le maintien des liens d'affection de la fratrie48•

En ce qui concerne le changement de nom pour de justes motifs49 , le Tribunal fédéral a jugé qu'il n'était plus dans l'intérêt de l'enfant de pren-dre le nom du père à la place de celui de la mère en cas de concubinage de ses parents50.