• Aucun résultat trouvé

Le CAS au Bangladesh   : 2011-2014

Dans le document Pablo DAVALOS AGUILAR (Page 177-182)

Framework (CPF) • Systematic

III.2. Expériences spécifiques de Country Partnership Framework

III.2.3. Le CAS au Bangladesh   : 2011-2014

L’accord de crédit Country Assistance Strategy (CAS) pour la période 2011-2014, souscrit par le gouvernement du Bangladesh, est la continuation d’un accord CAS pour la période 2006-2009. La CAS 2011-2014 accorde des emprunts pour environ 6 milliards de dollars et près de 24 projets sectoriels. La CAS 2011-2014 avec le Bangladesh est une

des stratégies les plus complètes et les plus vastes menées par la Banque Mondiale (World Bank, 2010).

Le Bengladesh appartient au groupe des pays les plus pauvres, avec un taux de pauvreté de 40%. Malgré cela, le taux de croissance est fort : une moyenne de 6% pour la période 2002-2009, une inflation qui s´établit à une moyenne de 6.5% pour la même période, et une dette publique représentant 45% du PIB pour l'année 2009. En outre, les exportations sont passées de 5.9 milliards de dollars en 2002 à 15.6 milliards de dollars en 2009. Les transferts effectués par les migrants ont augmenté de 2.5 milliards de dollars en 2002 à 9.7 milliards de dollars en 2009, et sont la source de revenu la plus importante pour le pays, après les exportations de produits textiles(World Bank, 2010). Par ailleurs, le pays a souffert d’une très forte instabilité politique, et a vécu une transition démocratique à la fin de l'année 2008. Le parti Awami League a gagné les élections et a réussi à prendre le contrôle du Parlement. Cependant, pour la Banque Mondiale, le problème le plus important du Bangladesh est la gouvernance.

Dans l'accord CAS 2006-2009, la Banque Mondiale considérait que la réforme structurelle la plus importante pour le pays était, justement, celle de la bonne gouvernance, parce qu’elle permettait de créer et d'instaurer un cadre institutionnel qui pourrait supporter les futures réformes structurelles. C’est la raison pour laquelle la Banque Mondiale a rebaptisé l'accord CAS 2006-2009 avec le Bangladesh comme le

« CAS de la gouvernance » (World Bank, 2010).

C’est pour cela aussi que le CAS 2006-2009 insistait tellement pour travailler à la mise en place d’une architecture institutionnelle et avait créé 27 projets sectoriels engageant 2.9 milliards de dollars(World Bank, 2010, p. 81).

De la même façon que pour le Mexique ou les Philippines, la CAS a été intégré au Plan de Développement du gouvernement du Bangladesh, la National Strategy for

Accelerated Poverty Reduction (NSAPR II). La NSAPR a recueilli les principaux objectifs

stratégiques CAS de la Banque Mondiale. Cependant l'axe du développement dans le pays n’était pas la NASPR, mais plutôt le CAS de la Banque Mondiale. La NASPR jouait le rôle de légitimation de l’intervention de la Banque Mondiale.

Les dimensions de la réforme structurelle entreprise avec le CAS 2006-2009 sont les suivantes :

Maintain Macroeconomic Stability

Remove Trade Restrictions and Reduce Administrative Barriers

Improve Governance and Efficiency in Infrastructure Services

Deepen and make more efficient financial intermediation

Strengthen Policies for Rural Growth

Improve the Quality of Health Services for the Poor

Enhanced access to and quality and relevance of education

Strengthen Local Governance

Enhance Voice and Participation through Community Driven Development

Improve the Effectiveness of Safety Nets

Improve Public Financial Management

Strengthen Institutions of Accountability

Support Legal and Judicial Reform

Strengthen Demand for Reform and Enhance Right to Information

(World Bank, 2010)

Avec cette CAS, on peut parler d’une véritable emprise sur le pays de la part de la Banque Mondiale et de la Coopération internationale au développement. L’intervention sur le pays s’est déployée dans plusieurs directions : par l’intervention directe sur la Banque Centrale, à travers le projet Enterprise Growth and Bank Modernization Project, qui cherchait à développer un régime autonome pour le taux de change et la politique monétaire(World Bank, 2010, p. 70), en consolidant l’autonomie de la Banque Centrale, et en créant un grand réseau d’intervention sociale au nom de la lutte contre la pauvreté. En effet, il y avait dans le pays 30 programmes de lutte contre la pauvreté et 13 agences pour les gérer(World Bank, 2010).

De plus, la Banque Mondiale est intervenue en faveur de la privatisation d'entreprises publiques, comme par exemple l’entreprise Adamjee Jute Mill, et la mise en marche d’un programme de licenciements des fonctionnaires publics nommé Voluntary

Retirement Scheme (World Bank, 2010). La Banque Mondiale est intervenue également

en faveur de la libéralisation de l’économie, de la réduction de tous les coûts de transaction pour le commerce extérieur, de la privatisation des autoroutes, du secteur électrique, des ports, des aéroports et des télécommunications(World Bank, 2010).

D’autre part, la Banque Mondiale a aussi influencé toute la politique agricole du pays et a élaboré un programme agricole engageant des ONG afin de développer des mécanismes de marché et de propriété privée dans les territoires communautaires (World Bank, 2010, p. 71). La Banque Mondiale s’est engagée dans une refonte du système politique du pays et a mis en place le projet « Legal and Judicial Capacity

Building project», pour séparer le pouvoir judiciaire du contrôle de l’exécutif et réduire

les coûts de transaction de la réforme structurelle, et en même temps renforcer la bonne gouvernance dans le pays et protéger les investisseurs étrangers (World Bank, 2010, p. 84).

La CAS 2006-2009 a aussi créé les conditions d´une intervention encore plus profonde. Dans la CAS 2011-2014, la Banque Mondiale a considéré les objectifs stratégiques suivants :

Accelerated Growth: Increase Transformative Investment and Enhance the Business Environment

Sustainable growth: Reduce Environmental Degradation and Vulnerability to Climate Change and Natural Disasters

Inclusive growth: improving social service delivery.

Stronger governance: enhancing accountability and promoting inclusion” (World Bank, 2010, p. iii).

Avec les axes transversaux suivants : (1) Fostering regional cooperation; (2) Strengthening gender mainstreaming;

(3) Partnering for aid effectiveness (World Bank, 2010, p. iii)

Pour atteindre son but, la Banque Mondiale propose pour chaque objectif stratégique des projets sectoriels précis. Pour l’objectif stratégique concernant « l’accélération du développement», la Banque Mondiale propose l´axe (1) « Increased

public investment and improved revenue generation ». Pour ce faire, la Banque Mondiale

promeut le travail en équipe avec le FMI afin de maintenir la stabilité macro-économique :

“Bangladesh will need increased fiscal space for priority development spending, while maintaining the sound macroeconomic management that has benefitted growth in the past decade. The Bank will continue to work with the IMF providing analytical support

on macroeconomic and fiscal issues” (World Bank, 2010, p. 21).

Ce cas illustre le lien concret entre les politiques d’ajustement du FMI et la réforme structurelle de seconde génération de la Banque Mondiale. Le deuxième axe (2) définit un  « improved environment for private sector investment ». À cet effet, la Banque Mondiale propose d'encadrer les futurs projets sectoriels  :

“The Bank Group will support regulatory reform, promotion of public-private partnerships and vibrant economic zones, expanded access to finance and land as well as skills development for a more competitive labor force … The IFC and the Bank are also working together to support further development of a modern Economic Zone regime in order to accelerate and diversify export-led growth.” (…) “The Bank Group will continue its engagement in the financial sector, supporting further enhancement of regulatory standards and the independence of the Central Bank, enhancing corporate governance of banks and listed companies, enacting a movable collateral law, and strengthening risk assessment in banks.” (World Bank, 2010, pp. 21-22).

La Banque Mondiale propose également un axe (3) « Increased infrastructure

provision, access and efficiency» et un axe (4) « Improved planning and management of

urbanization » pour le premier objectif stratégique. Le sens est le même pour le reste des

axes qui vont encadrer les projets sectoriels de réforme structurelle.

Les objectifs stratégiques et leurs débouchés programmatiques sont établis dans la description suivante :

“Strategic Objective 2: Sustainable growth: reducing environmental degradation and vulnerability to climate change and natural disasters

Outcome 2.1: Strengthened water resource management and coastal protection Outcome 2.2: Improved agriculture production and food security

Outcome 2.3: Reduced environmental degradation Outcome 2.4: Enhanced disaster preparedness

Strategic Objective 3: Inclusive growth: Improve Social Services Delivery

Outcome 3.1: Improved access to quality health, population and nutrition services Outcome 3.2: Expanded access to safe water and sanitation services

Outcome 3.3: Enhanced and more systematic social protection

Outcome 3.4: Improved student learning based on quality education services

Strategic Objective 4: Stronger governance: enhancing accountability and promoting

inclusion.

Outcome 4.1: Increased effectiveness and efficiency of public resource use

Outcome 4.2: Enhanced transparency and accessibility of public services through information technology

Outcome 4.3: Increased effectiveness of public service delivery at the local level

Outcome 4.4: Expanded participation in local development and women’s economic

empowerment” (World Bank, 2010, p. 19)

La CAS mise en œuvre par la Banque Mondiale et ses alliés au Bangladesh relève de l’intervention totale dans le pays. Un programme d’intervention si détaillé agit, en réalité, au-delà du cadre du développement ou de l’aide au développement. Les politiques publiques sont pilotées depuis l´extérieur, et la coopération n´est plus encadrée par des règles strictes définies par l’État. En fin de compte, le cas du Bangladesh va au-delà de la coopération au développement.

Les politiques de libéralisation et de dérégulation mises en place par la Banque Mondiale ont affaibli la capacité politique des syndicats à s’organiser et à lutter pour de meilleures conditions salariales. Malgré la libéralisation et toutes les réformes structurelles mises en place, le Bangladesh reste un des pays les plus pauvres du monde.

Dans le document Pablo DAVALOS AGUILAR (Page 177-182)