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Comme nous l’avons constaté ci-dessus, le Sud est difficilement définissable. Alors comment définir la littérature Sudiste ? Ce genre comprend à la fois la littérature qui parle du Sud et la littérature écrite par des auteurs originaires du Sud, quel que soit le sujet traité. Néanmoins, dans la littérature sudiste, certains thèmes sont abordés régulièrement, tels que la famille, la religion et la communauté :

the South’s institutions and attachments to them have remained characteristic of twentieth-century southern literature. Southern writers are either personally attached to the past, to family, community, place, and religion, or they are keenly aware of the importance of these values. (Flora et al. 2001: 186)

Suite à la Deuxième Guerre Mondiale, et plus particulièrement depuis le mouvement des droits civiques, le racisme a également pris une place importante parmi les thèmes traités dans la littérature du Sud. Ce sujet a été revivifié plus récemment dans des romans contemporains tels que The Secret Life of Bees (Sue Monk Kidd, 2001) et The Help (Kathryn Stockett, 2009). Comme To Kill a Mockingbird, ces deux œuvres ont été adaptées au cinéma avec un succès remarquable. Nous allons voir plus tard comment le roman de Lee a pu influencer la littérature contemporaine, de la même manière que Lee s’est sans doute inspirée de ses précurseurs.

Grâce à son charme et à sa richesse culturelle, le Sud attire des écrivains depuis plus d’un siècle. Dans le journal de l’Université de l’Alabama, Crimson White , l’écrivain Thomas 15

Sigismund Stribling a confirmé cette attractivité : « the South, Stribling insisted, was still the most “writable” part of the United States » (Shields 2006 : 95). En 1922, Stribling a lui-même publié un roman, Birthright, dans lequel il a reconstitué le paysage sudiste de la ville provinciale Hooker’s Bend, dans le Tennessee. Dans cet œuvre, il a également abordé le sujet des tensions raciales et le chagrin que ces dernières peuvent provoquer dans un univers mythique. Selon T. S. Stribling, il existe trois personnages humoristiques que l’on trouve souvent dans les œuvres sudistes et que le lecteur reconnaît immédiatement : « the Negro, the southern aristocrat, and the “hill” man » (cité dans Shields 2006 : 95). Stribling prétend que cette familiarité avec les personnages plaît au lecteur et facilite la lecture :

These three characters, he said, would not tax the reader’s mind to interpret. “Characters that need description,” he warned, “give the reader one strike against the author in reader interest.” The reader’s mind should not be exerted, just carried along by the story. “It is best to have your reader without a thought in his head.” (Shields 2006 : 95)

En plus de ces trois personnages, Fender cite d’autres personnages stéréotypés qui sont présents dans To Kill a Mockingbird et qui, selon lui, sont essentiels pour comprendre le fonctionnement de ce roman : « the southern gentleman, along with various caricatures of African Americans and poor white trash » (Fender 2012 : 95). Parmi les caricatures des Afro-Américains qui sont parsemées dans la littérature américaine, Fender définit quatre sous-groupes : « There were four stock figures : the Tom, the zip coon, the buck and the mammy » (Fender 2012 : 98). Ensuite, il les décrit en plus de détail : « Toms were compliant and long suffering, religious and loyal to their masters, no matter how badly treated. Bucks were sullen, often violent and forever after white women » (Fender 2012 : 98). Il n’y a pas de bucks dans To Kill a Mockingbird mais les accusations de Mr Ewell dépeignent Tom Robinson comme s’il en était un. Cette idée est maintenue lors du procès par le procureur, Mr Gilmer, « Were you so scared that she’d hurt you, you ran, a big buck like you? » (p. 218). Le zip coon, absent dans To Kill a Mockingbird, était considéré « good for nothing more than eating watermelons, stealing chickens, shooting craps, or butchering the English language » (Bogle 1973 : 8), et les Mammies étaient les femmes de ménage

“Literary-est Part of US is South,” Crimson White, 29 March 1947, 5.

typiques qui s’occupaient des enfants blancs. Définie comme « the faithful, devoted family servant who is asexual because she is a surrogate mother to the white family’s children » (Grobman 2008 : 12), la plupart des mammies dans la littérature sont « big, fat and cantankerous » (Bogle 1973 : 9). Voici juste une sélection des personnages types qui apparaissent dans To Kill a Mockingbird :

Pendant tout son procès, Tom Robinson est fidèle aux stéréotypes. Il se montre docile et conciliant avec Mayella Ewell et Atticus, mais il commence à perdre patience vers la fin du roman. En essayant de fuir de la prison, Tom Robinson s’écarte du cliché susmentionné : 16

« Tom was tired of white men’s chances and preferred to take his own » (p. 260). Pourtant, le personnage qui diverge le plus des stéréotypes est Calpurnia. En effet, cette dernière est une mammy revisitée :

Harper Lee could not have overturned the mammy stereotype more deliberately. Far from being plump and rounded, Calpurnia is “all angles and bones” . In the absence 17 of their mother she is virtually a foster mother to Jem and Scout. She takes practical charge of their behaviour, and “Atticus always took her side”. Where Calpurnia really departs from the traditional mammy in fiction, commerce and popular entertainment, though, is having a life, family and friends of her own. (Fender 2012 : 101-2)

Malgré son style unique et la relative simplicité de la narration, qui différencient To Kill a

Mockingbird des autres œuvres typiquement sudistes (comme celles de William

Faulkner ), on ne peut pas mettre en question son appartenance à la littérature américaine, 18

Southern Aristocrat : Aunt Alexandra

The Hill Man : Mr Cunningham et sa famille Southern Gentleman : Atticus Finch

White Trash : La famille Ewell

The Tom : Tom Robinson

The Mammy : Calpurnia

Si le prénom Tom renforce le lien entre Tom Robinson et le cliché qu’il représente, Robinson est un nom

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patronymique typiquement anglophone. En choisissant un nom de famille très courant chez les descendants des anglais, Lee réduit l’écart entre les Blancs et les gens de couleur. En même temps, il se peut que le nom

Robinson ait été imposé aux ancêtres de Tom par leurs propriétaires à l’époque de l’esclavage, ce qui cache

sa véritable identité. Page 6.

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William Cuthbert Faulkner (1897–1962), écrivain américain originaire d’Oxford, Mississippi.

ni à celle du Sud. Dans le préambule de Scout, Atticus & Boo, Wally Lamb détermine la place de To Kill a Mockingbird dans l’histoire de la littérature américaine :

In terms of literary heritage, I think of Salinger’s The Catcher in the Rye as Mockingbird’s older brother and Huckleberry Finn as the father of both books. All three novels, each a product of its era, give voice to outsider American kids trying to negotiate an adult world full of hypocrites. All three counterbalance the pain of human failings with the the healing balm of humor. (dans McDonagh Murphy 2010 : x)

Ci-dessus nous avons mentionné le langage de Scout, qui fait rire le lecteur avec ses jeux de mots et ses figures de style. En matière d’humour, Lee se sert également de l’ironie, de la satire, et des épisodes de bouffonnerie. Ces notes humoristiques détendent l’atmosphère, soit avant ou après les événements douloureux. Par exemple, juste avant que Bob Ewell s’attaque aux enfants, Scout est déguisée en jambon pour la fête de Halloween. Si son costume ridicule et volumineux n’a pas suffi pour faire rire le lecteur, Scout d’endort dans les coulisses et loupe son entrée sur la scène, ce qui est au grand amusement du Juge Taylor.