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La photographie au centre du dispositif communicationnel

Macro-structure du catalogue de jouets

Chapitre 2 La communication catalogue Le catalogue présente un dispositif particulier par rapport aux textes

2.1. Une communication visuelle

2.1.1. La photographie au centre du dispositif communicationnel

Dans le module descriptif constituant la microstructure du catalogue de jouets, la photographie est la première à être « lue ». Petitot (1979), dans son étude du catalogue Manufrance, parle même de « préhension » de l’objet-image. En tant que signe, son rôle dans la communication, et plus particulièrement dans la transmission du message, est primordial. L’approche sémiologique permet une première approche des spécificités de la communication par l’image dans le catalogue.

Parmi les trois grands types de signes proposés par Peirce – les icônes, les

indices (ou index) et les symboles – la photographie, comme image collectant et reproduisant les traits perceptifs de l’objet, appartient à la catégorie des icônes. La photographie, par sa dimension iconique, rend l’objet représenté immédiatement

accessible au récepteur (au plan cognitif) puisque l’icône reproduit les traits perceptifs de l’objet. De plus, dans l’habitus de l’interprète, il existe un savoir acquis selon lequel les photographies présentées dans le contexte du catalogue sont des reproductions fidèles du jouet, donc dénotatives du jouet. On remarque d’ailleurs que, dans la mesure où celui-ci est lui-même, très souvent, une imitation de la réalité, la photo du catalogue est une icône au second degré. La photographie de la CUISINE A MOI MARIE (§1.2.3), est l’icône d’un jouet, mais le jouet est lui-même l’icône d’une vraie cuisine.

La photographie est également un indice, une trace, puisqu’elle résulte de l’empreinte de la lumière réfléchie par l’objet photographié sur une surface photosensible ou sur un support magnétique. De fait, la photographie, par sa dimension indicielle, en tant qu’« empreinte du réel » accède à un statut de forte crédibilité ; cela a été largement souligné dans la littérature sur l’image (Joly 1994). Les journaux, par exemple, utilisent de façon stratégique cette fonction de restitution du réel pour lui octroyer une dimension d’authentification : une photographie ne peut « mentir ». Dans le catalogue de jouets, la photographie, par sa dimension indicielle opère également une mise en contact du récepteur avec l’objet représenté. En effet, l’indice agit sur le mode de la présence réelle (puisqu’il est « prélevé » dans le monde réel). Les spécialistes de la communication parlent pour l’indice de pôle « chaud » ou « attachant », comme les indices que sont l’intonation, les gestes, les regards dans une communication de face à face, puisqu’ils facilitent l’acheminement et la compréhension du message (Bougnoux 1998 : 24). A l’effet de représentation (qu’une image quelconque accomplirait), la photographie ajoute « l’effet de réel », gage d’authenticité…

La photographie peut être également un symbole, le symbole étant « un signe qui renvoie à l’objet qu’il dénote en vertu d’une loi, d’ordinaire une association d’idées générales, qui détermine l’interprétation du symbole par référence à cet objet [...] » (Peirce 1978 : 140) Le symbole est arbitraire, il véhicule une signification qui résulte d’une convention. Si l’on interprète la photographie de l’illustration 4 dans son ensemble – une fillette jouant à la cuisine – on peut également voir dans la photographie un symbole dans la mesure où est réactivé le stéréotype de la ménagère préparant le repas. L’ensemble renvoie à une signification abstraite et la photographie fonctionne alors comme un symbole. On étudiera plus en détail ce type de photographie au ch. 10 dans le cadre de l’étude du dispositif persuasif.

modélisation des classes de signes en refusant de considérer le signe uniquement comme élément factuel. Il insiste sur le fait que l’approche de Peirce permet de rendre compte de phénomènes de communication, phénomènes qui vont au-delà de l’émission d’un message conscient de personne à personne. D’une part, le signe n’est pas assimilable à un simple message (puisque certains signes sont sans émetteurs : les nuages noirs dans le ciel, par exemple), d’autre part, l’interprétant tel que le conçoit Peirce n’est pas tant récepteur/interprète du signe mais plutôt « l’habitus social dont dispose l’interprète », une sorte de réseau interprétatif – le code ou le savoir constitué, ou la convention de lecture permettant de rapporter tel signe à tel objet (Benazet 2004a ; 2004b). Cette notion d’interprétant nous intéresse car elle permet d’analyser la photographie relativement à la notion d’espace partagé et d’horizon d’attente et plus loin relativement à la question du genre.

Barthes a analysé des systèmes de signes qui renvoient à des échanges linguistiques au travers de textes littéraires mais également à des échanges beaucoup plus flous comme la mode, des « mythologies » de la culture de masse – publicités diverses comme OMO ou Panzani, l’Abbé Pierre en tant qu’homme public – (Barthes 1964, 1965, 1980, 1985). Il considère que le sémiologue fournit une explication qui fait nécessairement appel à la raison langagière. Dans ce parti pris logocentriste, même les communications non langagières doivent être éclairées par le langage. Un des premiers à avoir réfléchi sur l’image (avec, entre autres, Péninou 1966 ; Durand 1970), Barthes a contribué à fonder une théorie et une pratique de la sémiotique appliquée à l’image et aux techniques de la persuasion publicitaire. L’intérêt de la sémiotique est de fournir des outils d’analyse opératoires et de pouvoir s’articuler avec d’autres approches. Il s’agit de mieux comprendre comment s’opère non seulement la production mais la saisie du sens. L’approche sémiotique se caractérise par une relation concrète au sens, replaçant les « objets de sens » dans le contexte de communication, lui-même constitué en objet de sens (Floch 1990). Les signes, comme variables permettant de remonter au système de relations que forment les invariants des productions et des saisies du sens, sont le point de départ de l’analyse. Ils sont considérés comme les éléments de surface qui rendent compte de significations sous-jacentes, et doivent être étudiés dans leur contexte puisque, pris isolément, « aucun signe n’a de signification […] toute signification de signe [naissant] d’un contexte » (Hjelmslev 1971 : 62).

2.1.2. Les photographies du catalogue de jouets : typologie