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Chapitre 5 : La pratique du KM en PME de hautes technologies : quelles dimensions pour un

2  L’expert et l’expertise distribuée: l’acquisition, le développement et le transfert des

2.1  La nature de l’expert comme process de KM dans la construction des connaissances

2.1.2  La métacognition dans l’action de l’expert

Nous avons vu dans la sous-section précédente que la nature identitaire de l’expert est de chercher à alimenter son expertise de façon continue en identifiant ses connaissances manquantes. Par une autocritique cognitive, l’expert questionne en permanence son expertise dans le cadre de la métacognition. Si nous avons vu que l’autocritique cognitive représentait la première caractéristique de la métacognition au travers d’une dimension plus réflexive de la

connaissance, la seconde caractéristique de celle-ci est l'autogestion cognitive. Nous rappelons que l'autogestion cognitive est la métacognition en action. Dans la gestion des connaissances de l’expert, l’autogestion cognitive est l’utilisation spontanée des mécanismes autorégulateurs adéquats dans l’acquisition et le développement de connaissances.

Nous disposons, après le traitement de nos matériaux, de 30 références issues de14 entreprises sur les 15 suivies de façon longitudinale, expliquant que l’expert mobilise naturellement des mécanismes issus du quotidien dans son autogestion cognitive en PME de hautes technologies. Parmi les références codées, nous présentons ici quelques extraits :

Entreprise 6

Tout est prétexte à apprendre la veille les réunions hebdomadaire les déplacements chez les fournisseurs, la discussion simple. On apprend tout le temps (Reference 4 - 0,95% Coverage)

Cet extrait met en évidence deux éléments majeurs de l’autogestion cognitive.

Nous pouvons tout d’abord observer la diversité des moyens d’apprendre en situation quotidienne (« veille les réunions hebdomadaire les déplacements » entreprise 6).

Puis nous voyons que l’autogestion se fait dans un espace temps continu, long et homogène (« On apprend tout le temps » entreprise 6).

2.1.2.1 La diversité des mécanismes de gestion des connaissances pour 

l’expert 

Par son autogestion cognitive, l’expert va chercher à préserver sa compétitivité et son expertise, en mobilisant l’ensemble des ressources de développement des connaissances en lien avec son activité et son expertise.

Entreprise 8

L’expert lui, ça fait partie de lui, il utilise son activité en général. (Reference 2 - 0,74% Coverage)

Le dirigeant de la PME explique que l’expert utilise l’intégralité de son activité pour enrichir et développer ses connaissances. Si ce propos peut s’interpréter d’une manière très large il est selon nous, relativement précis dans la façon d’appréhender la capacité de l’expert à extraire une connaissance de tous les éléments de son activité.

Entreprise 2

[…] la veille, les projets bref tout ce qui constitue l’environnement de notre activité… (Reference 7 - 0,79% Coverage)

Entreprise 12

On le fait avec tout et rien. Chaque fois qu’il y a un problème à résoudre ou que l’on planche sur les projets R&D, qu’on part rencontrer le client…(Reference 3 - 0,93% Coverage)

Nous comprenons que l’expert mobilise aussi bien les activités quotidiennes de veille, les projets, que la résolution de problème. Il y a donc une grande diversité des mécanismes pour que l’expert puisse développer sa connaissance. La pratique de l’expert apparaît comme une ressource à son développement des connaissances.

Entreprise 4

Ça peut être par le manager ou un collègue qualifié, on a beaucoup d’expert avec le temps (Reference 1 - 0,91% Coverage)

Le dirigeant nous explique que si la pratique est utilisée par l’expert, il nous faut également considérer l’interaction quotidienne avec ces pairs qui favorise le développement des connaissances par l’échange.

2.1.2.2 Une gestion continue des connaissances au quotidien 

Dans notre définition de l’autogestion cognitive, nous avons révélé le caractère spontané de l’expert dans ce type de démarche cognitive. Lorsque nous analysons les matériaux, nous comprenons que l’expert mobilise de façon continue la pratique pour développer ses connaissances.

Entreprise 2

Notre connaissance c est notre cœur de métier on doit la préserver en continue, […] tout au long de notre travail. (Reference 3 - 0,59% Coverage)

Entreprise 3

[…], c’est tous les jours, on fait de la veille en permanence, nous discutons tous ensemble, et comme nous n’avons que des spécialistes de leurs domaines, tout le monde se forme au quotidien. (Reference 2 - 1,14% Coverage)

Nous comprenons que le développement des connaissances est une activité quotidienne, qui se fait alors naturellement par la mobilisation permanente et continue des différentes activités de l’expert.

2.1.2.3 Une gestion autonome des connaissances par l’expert 

A l’image de l’autocritique favorisant une auto-identification des connaissances, l’autogestion favorise le développement autonome de connaissances par l’expert. Lorsque nous parlons d’autonomie nous le faisons ici par rapport à une potentielle prescription par le dirigeant de la PME.

Entreprise 6

Chacun est responsable de son expertise (Reference 1 - 0,74% Coverage)

Entreprise 13

Les collègues font ça seul et ça fonctionne bien. Comment ? Par la veille, les activités au quotidien (Reference 4 - 0,63% Coverage)

Entreprise 9

Quand on a des gens d’une telle compétence on leur fait confiance pour entretenir ça. (Reference 2 - 1,19% Coverage)

Cette activité métacognitive favorise l’expert à accroître ses connaissances de façon spontanée et selon toutes les possibilités et opportunités qui s’offrent à lui. Ce développement des connaissances n’apparaît pas comme prescrit par le dirigeant qui laisse l’expert libre dans son fonctionnement. Le dirigeant exprime alors un accord tacite de confiance entre l’expert et le dirigeant pour « entretenir » la connaissance.

La réflexion métacognitive de l’expert sur son activité vise non seulement à rationaliser l’objet de son travail, mais également à capitaliser, construire et gérer son potentiel de connaissances au travers des situations de travail dans un contexte favorisant l’initiative individuelle : 

Entreprise 9

Toutes les situations à problèmes dans l’activité sont une source d’apprentissage. Dans le process de travail ou même le contenu, tous et tout le monde nous sert à apprendre et donc à suivre l’évolution technologique. (Reference 4 - 1,76% Coverage)

Par ces propos, nous pouvons comprendre que la capacité de l’expert à appréhender des situations de travail telles que la résolution de problèmes seul ou en collectivité favorise une acquisition et un développement autonome de connaissances.

2.1.2.4 L’autogestion cognitive comme process de KM  

Par la métacognition de l’expert dans l’action, et au travers des mécanismes d’autogestion, l’expert va étayer sa connaissance initiale par la recontextualisation de la connaissance mobilisée dans l’activité quotidienne de la PME. Par ce résultat, nous soutenons alors que l’autogestion cognitive de l’expert telle que nous venons de l’appréhender constitue un process de KM pour la PME de hautes technologies.

Le dirigeant de la PME semble même l’identifier en tant que tel dans la mesure où il l’envisage comme un mécanisme d’acquisition et de développement de connaissances propres à l’expert.

Entreprise 3

On les recrute aussi pour cela, pour qu’il soit capable d’être expert dans nos domaines et qu’ils sachent le rester. (Reference 1 - 1,26% Coverage)

On a un groupe d’experts que l’on a constitué au départ par le recrutement, qui maintenant est autonome dans la recherche et l’acquisition de connaissances. (Reference 2 - 1,36% Coverage)

Entreprise 5

Nous attendons de nos collaborateurs qu’ils soient dans une démarche individuelle de formation en allant vers l’information (Reference 1 - 1,10% Coverage)

Pour le dirigeant, l’autogestion cognitive semble être un pré-requis allant avec le statut de l’expert. Elle apparaît même comme un critère de recrutement et une exigence spécifique dans la construction cognitive de la PME. Le dirigeant de la PME identifie véritablement cette autogestion cognitive comme un process individuel spontané de KM pour l’expert

Synthèse

L’étude de la métacognition réfère à l’étude des connaissances et du contrôle exercé par un individu sur sa propre cognition, au sens de Brown (Baker &Brown, 1984; Brown, 1978, 1987; Brown, Bransford, Ferrara et Campione, 1983) et de Flavell (1979, 1981, 1987). Nous pouvons conclure que la nature identitaire de l’expert et sa métacognition sont favorables à l’acquisition et au développement de connaissances en PME de hautes technologies. Dans une approche du KM en PME de hautes technologies, la compréhension de l’expert apparaît alors comme une dimension du KM incontournable.

Les dirigeants de la PME de hautes technologies semblent identifier au travers de la catégorie sociale fortement revendiquée de l’expert, un process de KM distinct, tacite mais implicitement opérationnel face aux exigences de la PME. En fait, par la mobilisation de sa connaissance dans l’activité quotidienne de la PME et sa métacognition, l’expert complète de façon continue son expertise. Nous comprenons que l’expertise, en tant que process de KM favorisant l’innovation, est encastrée dans la pratique de l’activité de la PME. Ainsi dans le cadre d’une intervention en matière de soutien à l’innovation, nous devons tenir compte aussi bien de la pratique de l’expert que de sa nature identitaire et de son activité métacognitive située dans l’action. Si la dimension située de la connaissance en PME a déjà été travaillée par de nombreux auteurs tel que Clancey et Sierhus (1997), peu d’entre eux se sont concentrés sur les pratiques de la PME favorisant l’acquisition et le développement de connaissances en dehors des phénomènes de socialisation (Desouza et Awazu, 2006). Il convient à présent d’approfondir la pratique de l’expert dans l’activité quotidienne pour comprendre quelles sont les pratiques favorables d’acquisition et développement de connaissances dans l’activité de la PME.

Ce que nous retenons de cette partie

 La catégorie sociale de l’expert est fortement revendiquée par la PME

 La nature identitaire et l’activité métacognitive de l’expert sont considérées comme des process de KM individualisés pour la PME

 L’autocritique cognitive de l’expert est un process d’identification des connaissances et de renouvellement permanent des connaissances

 L’autogestion cognitive de l’expert est un process de développement des connaissances individuelles

 Lors d’une intervention de soutien à l’innovation, nous devons considérer l’expert et ces process cognitifs dans la construction du KM

2.2 Le travail de l’expert : de la mobilisation au développement de la

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