• Aucun résultat trouvé

Chapitre 3 : L’activité et l’organisation comme socle du KM: quelles dimensions pour un modèle

2  L’encastrement des process de KM dans l’organisation : la communauté de pratique et le

2.3  L’expert dirigeant au sein de la communauté : le cas de la gestion des connaissances

2.3.1  Définition de l’expert

Nous mobilisons à cet effet, la notion « d’expert » développée en sciences de l’éducation (Tynjälä, 1999) pour analyser la capacité à transmettre les connaissances. L’entrepreneur est ici considéré comme expert organisateur de la communauté. Dans cette perspective d’analyse, l’accent est mis sur l’importance de l’activité métacognitive de l’expert au cœur de l’activité, relativement au non expert. L’expertise se définit alors par un corpus de connaissances et pratiques intégrées, de façon avancée, dans un tout cohérent (Bereiter, 1997 ; Ohlsson et Lehtinen, 1997).

Les définitions données sur les connaissances de l’expert par les chercheurs dans ce champ convergent autour de trois composantes principales (Tynjälä, 1999) :

 Les connaissances déclaratives qui sont des connaissances explicites et factuelles, également désignés comme plus conceptuels (en référence aux travaux de Piaget).  Les connaissances procédurales ou pratiques qui sont plus tacites et intuitives

(Haapasalo 2003). On retrouve sur ce point la notion de connaissances tacites en gestion (Nonaka, 1994 ; Nonaka and Von Krogh, 2009).

 Les connaissances autorégulatrices qui correspondent à une activité de réflexion sur ses propres connaissances et apprentissages, appelée métacognition.

Les analystes de l’expertise mettent alors l’accent sur cette troisième composante en précisant le comportement volontaire de l’expert. Il met en œuvre de façon prononcée des savoirs autorégulateurs correspondant à une activité de réflexion sur ses propres connaissances et apprentissages, appelée métacognition. Les sciences de l’éducation, ont approfondit la question de la métacognition de l’expert. La métacognition est dans son sens profond, « la

cognition sur la cognition » (Flavell, 1985). Paris et Winograd (1990) définissent la métacognition « comme la connaissance des processus et des étapes cognitives et comme le contrôle de l'exécution des processus et des étapes cognitives » (Paris et Winograd (1990) dans Moffet (1995) p12). Elle est alors caractérisée au travers de deux éléments, l’autocritique cognitive, et l’autogestion cognitive.

Le renouvellement permanent de la connaissance de l’expert est une partie indispensable de son activité. En sciences de l’éducation, cette activité de remise en question de la connaissance de l’expert est appelée l'autocritique cognitive. Elle est le fait de réfléchir sur l'état d'une connaissance ou d'une habileté (Paris et Winograd, 1990). Cette connaissance métacognitive s'applique à la fois aux connaissances déclaratives, conditionnelles et procédurales auprès d'un sujet. Par l’autocritique cognitive, l’expert questionne en permanence son expertise dans le cadre de la métacognition. Elle est constitue une caractéristique majeure de la métacognition de l’expert en lien avec sa nature identitaire. L’autocritique cognitive représente la première caractéristique de la métacognition au travers d’une dimension plus réflexive de la connaissance, la seconde caractéristique est l'autogestion cognitive. L'autogestion cognitive est la métacognition en action. C’est-à-dire la forme que prend la métacognition pour orchestrer les différents aspects de la réalisation d'une tâche (Moffet, 1995) dans notre cas l’acquisition ou le développement de connaissance. Pour Parent et al. (1991), les experts utiliseraient spontanément des mécanismes autorégulateurs adéquats dans l’acquisition et le développement de connaissances. Notons que si cette approche de l’expert se fait au travers de l’analyse du dirigeant, nous mobiliserons cette approche dans la suite de ce travail en l’attribuant également aux experts de la communauté de pratiques au sein de la PME de hautes technologies.

Dans le cadre de l’entrepreneur expert de la PME, cette métacognition conduit à une intégration, fondée sur l’expérience dans un domaine particulier, de connaissances conceptuelles et procédurales modifiant en retour la base de schémas d’actions opératoires (Gadille et Machado, 2012). C’est pourquoi, dans le cas de la PME, nous suggérons que le créateur dirigeant utilise l’expertise dans l’activité de conception d’un environnement de création et partage de connaissances permettant la genèse et l’entretien d’une base commune des connaissances des collaborateurs. Cet espace interne est assimilable à la matrice organisationnelle de l’entrepris. Cet espace construit à la fois de façon intuitive et intentionnelle est supposé favoriser, l’apparition d’une communauté de pratiques (Wenger et

Snyder, 2000) au sein de la PME de hautes technologies favorisant l’autonomie de gestion des connaissances de ces membres. Cette évolution, loin de résoudre le problème de la légitimité des pratiques de gestion des compétences en égard à leur efficacité, vient le complexifier. Dans le contexte de la PME, l’autonomisation des connaissances dans la communauté vient relativiser les prescriptions directes du responsable de l’entreprise en même temps qu’elle appelle une activité de contrôle à distance. La mise en place, par le dirigeant expert, de gestion des connaissances dans l’entreprise consiste à établir des mécanismes et dispositifs de structuration, et d’incitation des individus à déployer des comportements de partage des connaissances. La contrainte de gestion des compétences est relâchée au profit de la gestion des connaissances nouvelles dans la communauté. Cependant, les difficultés d’évaluation de la connaissance entraînent une asymétrie informationnelle et cognitive entre l’expert dirigeant et la communauté d’experts avec qui il coopère et se coordonne. Selon la règle de rationalisation de la théorie de l’Agence (Jensen et Meckling 1976), le dirigeant expert n’aura pour solution que de limiter l’autonomie et circonscrire la gestion des connaissances des collaborateurs notamment au travers de l’activité, nuisant de fait à l’innovation. C’est pourquoi nous assistons à la création d’une communauté de pratique. En effet, cette communauté connait la valeur de la connaissance pertinente et sait reconnaître l’expertise de ces membres.

La communauté favorise le développement d’une gestion autonome des connaissances co-construites autour d’un rapport de prescription souple entre le dirigeant et la communauté, dans lequel la gestion des compétences telle qu’elle est normalisée par la grande entreprise n’a pas réellement sa place.

Nous pouvons alors présenter le schéma d’encastrement du KM suivant :

Nous observons alors que la connaissance et les process de KM en PME de hautes technologies se trouvent encastrés dans l’organisation au travers des communautés de pratique et de son dirigeant créateur. Ces deux éléments constituent alors la base de notre modèle d’analyse du point de vue de l’encastrement dans l’organisation. Nous les présentons comme conjointement liés voire complémentaires dans une dynamique continue d’acquisition, développement et transfert des connaissances en milieu innovant et renforcé par les activités de GRH.

Les communautés de pratique représentent donc le concept d’apprentissage organisationnel et un lieu d’encastrement du KM mais se rapproche également directement des notions de GRH en particulier dans l’émergence et la recognition de l’informel et des process d’apprentissage. Cela implique une approche de l’apprentissage qui reconnait la construction social de la connaissance et la recognition par les praticiens de la GRH (De jong et Versloot, 1999).

Documents relatifs