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Apprendre à écrire des récits, entre imitation et invention

Figure 6 : Organisation des apprentissages scripturaux selon le modèle du texte libre

4.3.5. La didactisation de l’écriture scolaire (1985-2008)

Les ateliers d’écriture où l’on prend l’habitude de produire des textes, de les soumettre à l’écoute bienveillante des pairs et de l’enseignant, de les reprendre et de les modifier, fournissent d’excellentes conditions pour apprivoiser l’idée qu’un texte se retravaille et apprendre à le faire. (Plane, 2015 : 8).

Conclusion

Pendant la période 1972-1985 une fracture s’opère avec le système d’enseignement traditionnel de la rédaction. La fonction de l’écrit est orientée vers la communication et le développement personnel du « sujet écrivant » qui entre dans un rapport singulier avec le langage (Bautier et Bucheton, 1995). Le modèle de l’expression écrite (Chabanne et Bucheton, 2002) postule en effet que tout élève une fois soulagé de ses inhibitions de diverses natures peut libérer ses potentialités. Par ailleurs, en proposant des entrées variées (jeux, variations, contraintes), ce modèle offre une conception de l’apprentissage qui passe par des « situations problèmes d’écriture », des expérimentations sur la langue, et se démarque d’un apprentissage applicationniste par exercices. L’écriture est plus subjective que normative et l’évaluation s’effectue collectivement. L’imitation est donc officiellement abandonnée au profit de l’imagination et de l’invention, et la langue se veut dépouillée de la référence au littéraire. Bien sûr, le texte littéraire reste présent dans le processus de création comme source de contrainte d’écriture, réserve de modèle scriptural, mémorisation de tournures et reconstitution. Mais cette articulation avec « le lire » n’est qu’un moyen de l’expression.

Ces évolutions ne sont pas pour autant généralisées. Ainsi, l’institution dresse encore en 1992 le constat suivant :

Les instructions officielles de 1972 ont introduit l’exigence d’entrainements à l’expression et à la communication qui restent encore des situations pédagogiques rares, faute d’exercices spécifiques permettant de les mettre en œuvre, faute aussi de perspectives claires sur les objectifs poursuivis. (La maitrise de la langue à l’école, 1992 : 35).

Autour des années 1980, intervient un nouveau remaniement de l’enseignement de la rédaction tirant profit de la recherche en didactique. Les textes officiels vont progressivement se détourner du seul travail d’écriture à proprement parler (la mise en mot) pour envisager l’organisation du texte (sa planification) sa relecture et sa réécriture en vue d’une son amélioration (révision).

4.3.5. La didactisation de l’écriture scolaire (1985-2008)

En janvier 1984, un rapport rendu au Premier Ministre, Des illettrés en France40, alerte : « il est aujourd’hui reconnu que l’analphabétisme existe dans ce pays et qu’il n’est pas marginal ».

40 Véronique Espérandieu, Antoine Lion, Jean-Pierre Benichou, Des Illettrés en France, Rapport au Premier Ministre, Paris, La Documentation française, 1984.

Dans ce contexte, l’école et l’enseignement du français sont questionnés. De leur côté, les praticiens sont confrontés aux premiers jets des élèves parfois inconsistants, stéréotypés ou ne répondant pas aux normes scolaires, sans savoir toujours comment les faire évoluer ni les évaluer. Les modèles de la rédaction et de l’expression écrit vont faire l’objet de critiques sur la base de nouvelles références théoriques (Chabanne et Bucheton, 2002) qui ébranlent le postulat de l’auto développement des compétences scripturales, par imprégnation ou imitation d’une part, et par émergence naturelle de potentialités individuelles d’autre part. Nous rappellerons les modèles qui se sont développés au cours de cette période avant d’interroger les textes officiels.

• Le modèle de la production écrite

Les travaux des psycholinguistes permettent d’avancer dans la compréhension des processus rédactionnels en décrivant ses composantes, et en soulignant la complexité des opérations pouvant plonger les apprenants dans une surcharge cognitive les rendant incapables de gérer simultanément toutes les compétences sollicitées. Ces contraintes ne sont pas situées seulement au niveau orthographique et phrastique mais aussi au niveau global et donc le texte est envisagé comme une unité spécifique. Le modèle des chercheurs révolutionne la réflexion didactique en centrant l’attention sur la planification et la révision, et Garcia-Debanc (1986) propose d’en tirer des applications.

Chez les jeunes rédacteurs, la surcharge cognitive a pu être révélée par l’étude des avants-textes ce qui fait naitre l’idée de mettre en place des facilitations procédurales pour préparer, accompagner, réviser et évaluer les écrits. Ce nouveau modèle d’écriture, celui de la production d’écrits (1985) et de l’évaluation critériée (1995), trouve également sa source dans les recherches du Groupe de l'École Normale d'Ecouen (1988-1992) et dans celles du groupe EVA de l'INRP (Évaluer les écrits, 1991, et De l’évaluation à la réécriture, 1996). Il répond à un besoin, un « trou noir », concernant l’évaluation (Mas, 1989). Ces critères formels manifestent les structures textuelles prototypes issus de différents travaux en narratologie et en linguistique (Genette, 1969 ; Greimas, 1973 ; Larivaille, 1974, Ricardou, 1978, Bronckart et al. 1985 ; Adam, 1992). La recherche de critères propres à un type d’écrit aboutit à des listes de critères d’évaluation, puis à un outil pour les classer et analyser les écrits. Finalement, le va-et-vient entre l’expérimentation sur le terrain et la confrontation avec les théories permet d’affiner la grille de CLID (classement des lieux d’intervention didactique). Le tableau est un outil destiné à l’enseignant pour dépasser les aspects morphosyntaxiques et envisager les aspects sémantiques et pragmatiques.

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unité entrée

Discours Liens entre les

phrases

Phrases Espace graphique

Pragmatique Sémantique Morphosyntasique

Tableau 2 : Classement des Lieux d’Intervention Didactique, (Garcia-Debanc, 1988 : 24)

Les critères ainsi définis sont de réalisation, d’ordre opératoire et de réussite. Par ailleurs, les enseignants et les élèves sont invités à construire de leur côté des critères explicites, évolutifs et provisoires (Gadeau, 1989) tirés de l’observation méthodique de textes d’experts aidant à l’écriture et à la réécriture. Cette approche s’appuie aussi sur des dispositifs d'aide au cours des différentes étapes de la rédaction. En outre, les travaux des psycholinguistes permettent d’inscrire la démarche dans une conception systémique de l’écriture où sont modélisées des compétences d’écriture.

Cependant, des dérives sont constatées avec des tentations visant à l’exhaustivité, la fidélité excessive à un modèle, ou une conception figée des outils valant tables de loi. Un décalage entre le dire et le faire des enseignants est observé, certains centrant leur attention sur les problèmes d’ordre morphosyntaxique-phrastique, tandis que « le traitement des écrits produits par la classe, par contre, est global et ne se réfère pas à des critères explicites » (Garcia-Debanc, 1989a : 69). Même chez les enseignants expérimentés aguerris à l’évaluation formative, il existe des distorsions comme la récitation du schéma quinaire censé fournir le « plan » du récit (Séguy, 1989 : 85).

Pendant plus de quinze ans, ce modèle s’impose à l’école en postulant « qu’écrire est avant tout une affaire de savoirs sur les textes et les discours, sur les contextes et supports nécessitant des analyses précises » (Bucheton, 2014 : 168). Les revues Pratiques et Repères, l’ouvrage de Jolibert Former des enfants producteurs de textes (1988), les manuels et séquences didactiques produits par l’équipe genevoise (Schneuwly, Dolz, Bronckart) en permettent la diffusion et font entrer dans les classes le principe de clarté cognitive par le développement métalinguistique (Gombert, 1990). Le brouillon est consacré par les I.O de 1995.

Ce modèle considéré « techniciste » (Bucheton, 2014 : 168) a aussi montré ses limites : le temps consacré à l’analyse, à l’élaboration de grilles ou à une correction méthodique et ciblée (Garcia-Debanc, 1990) l’emportant sur la rédaction et laissant peu de place à l’écriture singulière et l’invention. Surtout, il s’est montré insuffisamment pertinent pour les élèves en difficulté ou en résistance pour qui les grilles sont devenues des « consignes absconses et opaques » (Bucheton, 2014 : 169), cette centration sur les « savoirs sur le texte » augmentant l’écart entre les élèves, tandis que les postures dominantes des maitres restaient majoritairement de contrôle (ibid.).

Figure 10 : Organisation des apprentissages scripturaux selon le modèle de la production écrite

• Le modèle de l’intention

Un autre modèle sévit entre 1972 et 2002 marqué par la question de la destination de l’écrit : « apprendre à écrire c’est apprendre à produire et à réaliser une intention explicite dans un contexte de communication identifié. » (Baptiste, 2005 : 140). Le terme d’ « intention » est employé une première fois dans les instructions de 1972 et concerne alors la « mise au point » des textes laquelle doit être rapportée au « but » et à « l’intention » de l’auteur (ibid.). Il est présent dans les programmes de 1980 qui évoquent « l’adéquation du texte [...] aux intentions de l’auteur et à la situation ». Ce modèle s’exprime surtout dans les instructions de 1992, La Maitrise de la

langue à l’école, dans lesquelles écrire relève prioritairement d’une intention de communication :

l’élève ajuste son travail aux buts qu’il s’est fixé et a le souci de produire un texte adapté à son usage. Les programmes de 2002 quipréconisent une écriture référée à la littérature, valorisent davantage l’imitation que l’intention de communication. (Baptiste, 2005).

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• Le modèle du sujet-écrivant, sujet-auteur

À cette époque, Chabanne et Bucheton (2002, chapitre 2) proposent le modèle du sujet-écrivant et des pratiques culturelles diversifiées de l’écriture. Pour ces auteurs, l’évaluation critériée aboutit à se focaliser sur le produit fini au détriment du développement propre du sujet. La séance de français se transforme en un apprentissage « à vide » des outils descriptifs (schéma narratif, genres) sans réussir à faire signifier le texte produit qui peut être évalué positivement alors qu’il n’a pas d’intérêt pour son auteur. Ce modèle s’intéresse davantage au parcours affectif et intellectuel du sujet écrivant, au progrès de l’écriture, qu’au produit fini et évaluable.

Pour nourrir la production, ce modèle valorise la lecture mais à travers une éducation non plus littéraire, mais culturelle « car la culture donne forme à l’esprit » (Bruner, 1990), nourrit l’imaginaire et la pensée et favorise « le surgissement des mots sous la plume » (Bucheton, 2014 : 178). L’élève est donc appréhendé aussi comme sujet de culture. La priorité est donnée aux tâches d’écriture « qui ne doivent pas être confondues avec les activités de structuration (soit grammaire et orthographe, soit élaboration de règles) » (Chabanne et Bucheton, 2002). Les écrits intermédiaires (Chabanne et Bucheton 2000 : 23-27) et la réécriture font l’objet d’une grande attention. Le brouillon joue pleinement le rôle d’« instrument psychologique » que lui attribue Alcorta (2001 : 95-103) dans le développement conjoint de l’écriture et de la pensée. Bucheton insiste encore sur des « espaces spécifiques stables et ritualisés » (cahier d’écrivain, cahier de pensées, de lecture...), le temps long de l’écriture appelant par des arrêts, des reprises, des retours-modifications à un « épaississement » du texte, et enfin le rôle de l’enseignant et des pairs qui écoutent, aident et conseillent (2014 : 180).

De son côté, Tauveron s’interroge sur la place de l’écriture littéraire (1996). L’auteure refuse de « privilégier les constantes au détriment des variables, les modèles de textes entendus comme principes généraux de construction au détriment en particulier, des menus faits stylistiques portant sur la phrase ou le mot » (1996 : 196). L’outil d’évaluation est normatif et ne tient pas compte des caractéristiques stylistiques des écrits. Le récit, en particulier, protéiforme par nature aurait été sacrifié. Il s’agit de se donner comme objectif de valoriser l’investissement et l’originalité du sujet-lecteur/sujet-écrivant et Tauveron préconise donc un retour de la littérature en classe :

Ce qu’il faut saisir, et la chose ne peut être notée dans une grille, c’est l’idiosyncrasie de chaque auteur, éventuellement imitable car, comme le remarquait G. Poulet (1968) à propos de Proust, « s’il est abandonné si fréquemment au plaisir des imitations, nous devons comprendre que c’est en raison du caractère véritablement fondamental de cette première activité de l’esprit. Qui imite cesse d’être soi-même. Il s’évade du réseau des routines mentales qui menacent de le garder perpétuellement captif…Imiter, mimer, pasticher, ce n’est pas encore critiquer mais c’est déjà ressembler et recréer, deux actions qui constituent le premier temps de la pensée critique ». (Tauveron, 1996 : 202).

Le sujet-auteur est au centre des préoccupations. L’élève doit apprendre à se jouer des normes, à tirer un parti littéraire de l’erreur, alors qu’est défendue « une conception modeste et réaliste de l’originalité dans la conquête du savoir écrire » qui s’appuie sur « l’ouverture d’esprit, la finesse et la curiosité [du maitre] envers la réalité multiforme des œuvres des écrivains et des élèves. » (Tauveron, 1996 : 208).

Figure 12 : Organisation des apprentissages scripturaux selon le modèle du sujet-écrivant

L’examen de ces différents modèles permet de constater que certains valorisent l’imitation (modèle de la rédaction), s’appuient sur l’étude des textes (modèle de la production écrite), ou concilient référence à la littérature et créativité (modèle du sujet écrivant/auteur). Ces modèles ont imprégné les textes officiels.

Tableau 3 : Modèles, imitation et invention

• Les programmes de 1985 ou la pédagogie de l’activité : imitation ou invention ?

Les programmes et instructions de l’école élémentaire publiés le 15 mai 1985 sous le ministère Chevènement s’appuient sur une pédagogie de l’activité. L’enseignement doit favoriser une pratique de l’écrit plus collective et motivante, et conduire à une production de textes écrits dans une langue courante. Le terme « expression écrite » n’a pas disparu, accolé aux autres

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dénominations traditionnelles (composition écrite, rédaction). Le découpage en niveaux est maintenu. Les programmes laissent subsister une conception classique de la rédaction : au CM, « composition écrite » avec plan, articulation des idées, organisation en paragraphes, et reconstitution de textes. L’articulation du lire et de l’écrire reste le fondement de l’enseignement. Ainsi une note de service du 30 octobre 1987 Mieux lire pour mieux écrire (Chervel, 1995b : 388) invite les élèves de CM à un concours destiné à récompenser ceux ayant produit, après l’étude « d’une œuvre littéraire de valeur attestée », un récit « dont le point de départ devra être l’un des thèmes, l’une des situations ou l’un des personnages de l’ouvrage analysé ». L’exercice penche du côté de l’imitation. Cependant, ces programmes intègrent également le principe d’une écriture plaisir, d’un langage simple et donne toute sa place à la révision, encouragée au CM. La liberté revendiquée pour l’élève renvoie aux capacités d’invention du sujet-écrivant.

• Les programmes de 1989 ou la pédagogie des cycles : l’articulation lire-écrire

La loi d’orientation sur l’éducation du 10 juillet 1989, dite loi Jospin, modifie l’organisation de l’école primaire en instituant des cycles d’apprentissage41. Sa conception de l’écriture repose toujours sur l’articulation du lire et de l’écrire. La question des types de textes est posée dans les deux cycles élémentaires. Au cycle 2, il est question d’écriture « d’un texte bref [...] répondant à des consignes claires » aux genres variés en tenant compte des « contraintes propres à chaque type d’écrit », et au cycle 3 la démarche va de la lecture à l’écriture après l’étude des types de textes qui peut aider à la planification. La brochure mentionne de nombreux exercices dont certains sont directement en lien avec la lecture42. Le rôle de la révision collective est souligné, comme le recours aux nouveaux moyens qu’offre désormais l’usage du traitement de texte. Les travaux en psychologie cognitive influencent la terminologie du document Les cycles

à l’école primaire (1991) qui introduit les termes « production d’écrits » sans toutefois bannir

ceux d’« expression écrite ».

• La maitrise de la langue à l’école (1992) : le rôle de l’intention

Le texte majeur de la période est sans doute La maitrise de la langue à l’école diffusé en 1992 sous le ministère Lang, rédigé par un groupe de travail associant enseignants, formateurs, chercheurs et universitaires et qui fait le point des acquis de la recherche en matière d’apprentissage de l’écriture. Le document replace l’écriture dans une intention. L’élève doit éprouver l’adéquation de son travail aux buts qu’il s’est assigné et avoir le souci de d’adapter son

41 Le cycle des apprentissages fondamentaux (GS-CP-CE1) est le cycle 2, et le cycle des approfondissements (CE2-CM1-CM2) est le cycle 3 pour la période s’étendant jusqu’aux programmes 2015 avec une mise en application à la rentrée 2016.

42 « Transformer un récit par changement de temps, de narrateur, de chronologie, etc. ; compléter un texte lacunaire ; reconstituer un texte [...] ; rédiger un résumé [...] ; rédiger, de façon simple et organisée, un compte rendu [...] de lecture [...] ; noter des informations recueillies à l’occasion de lectures »

« texte à son usage » (p. 47) : écrire procède d’une intention individuelle. Les termes « production de texte » ont définitivement remplacé ceux d’« expression écrite ». Cette production de textes est valorisée parce qu’elle est considérée comme moyen privilégié pour accéder à la langue écrite. Au cycle 3, les grands domaines de travail de la langue sont énoncés dans cet ordre : « langage, écriture, lecture ». Pour la première fois, l’écriture est placée avant la lecture dans l’énumération des contenus.

Le document s’intéresse avant tout aux processus rédactionnels. Il reprend les différentes phases de planification43, mise en mot, révision44. Au premier stade, il s’agit, collectivement surtout, de définir de manière explicite la situation de communication et un cadre d’objectifs, et d’en conserver des traces écrites qui deviennent « autant de morceaux d’écriture ». Le ministère souligne sur ce point l’insuffisance des manuels. Le travail d’écriture qui par le passé a fait l’objet de nombreuses batteries d’exercices (MEN 1992 : 39) doit s’enrichir désormais d’une réflexion sur la maitrise de la cohésion, comporter l’usage du brouillon et utiliser le raturage et la réécriture. L’étape de la révision est inscrite dans une pratique collective et l’élève apprend à s’auto-évaluer. La rédaction s’inscrit dans un temps long. Les compétences visées sont double : savoir structurer globalement un texte en l’adaptant à la situation de production (cycle 2) ; découvrir et maitriser les contraintes des différents types de textes (cycle 3). L’objectif du cycle 3 est de parvenir à écrire de manière autonome (et par un travail réflexif de tenir compte des attentes du lecteur potentiel). Le texte d’auteur sert de point de départ à l’apprentissage : restitution du texte lu, transformation de textes supports avant l’écriture d’un texte complet pour lequel la maitrise des différents types de textes est recherchée, et les formes littéraires restent travaillées. Le texte complet peut aussi relever de l’invention ou de la représentation du réel. L’articulation du lire et de l’écrire demeure, mais sans asservissement de l’un à l’autre.

• Les programmes de 1995 : des programmes laconiques, recentrés sur le texte produit Dans l’arrêté fixant les programmes pour chaque cycle de l’école primaire du 22 février 1995 sous le ministère Bayrou, l’attention est davantage portée sur le produit fini que sur les procédures. La progression est rapidement évoquée : « La rédaction dépasse progressivement le stade de la simple transcription ou relation pour faire appel aux facultés d’analyse et de jugement qui seront sollicitées au collège ». Les termes « production d’écrit », « expression écrite » et « rédaction » coexistent. La reprise du texte est envisagée sous un angle plus normatif : « l’élève reprend, corrige, améliore ses productions antérieures avec le souci de qualité de la forme et de l’expression ». L’interaction entre la lecture et l’écriture reste essentielle.

43 Le terme est utilisé à plusieurs reprises (MEN 1992 : 9, 10, 25, 38, 39, 45, 72)

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Pendant la période 1985-2002, la réflexion s’est donc déportée du produit fini aux processus mais aussi progressivement au sujet scripteur. Le modèle de la production écrite donne une place incontournable au travail de révision et modifie les conceptions de l’évaluation. Les élèves produisent leurs propres critères qui étayent leur travail tout au long du processus d’écriture et prennent ainsi en compte les caractéristiques des types de texte, la situation de communication, l’effet à produire. On cherche à expliciter ces critères au nom de la clarté cognitive : comprendre que l’on se réfère à des formes langagières issues des genres ou des types de textes (propriété du texte), ou à une grille de critères particulière utilisée en autoévaluation (consignes d’écriture ou de relecture) (Chabanne et Bucheton, 2002). Les interactions verbales sont susceptibles de favoriser une réflexion métalinguistique ou métascripturale. D’autre part, des outils sont créés qui balisent le travail et servent de référents, le brouillon et le traitement de texte entrent dans les classes. On tient compte d’une langue dans ses variations et c’est donc « l’émergence du sujet, de son inventivité, de son imaginaire » (Halté, 1999 : 249-250). Les textes littéraires ne sont pas absents. Bien au contraire, ils font l’objet d’une étude minutieuse pour organiser l’écrit ou à le modifier.

• Les programmes de 2002 : le sujet écrivant et une nouvelle conception de l’imitation Les programmes de l’école primaire du 25 janvier 2002 (JO du 10-2-2002) sont

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