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L’organisation de la thèse

Cette thèse se structure en trois parties, chacune d’elles comprenant plusieurs chapitres28. La première partie intitulée « L’alimentation : de nouveaux enjeux pour la cancérologie », présente notre cadrage théorique (Chapitre 1, 2 et 3) et la construction de notre problématique et de nos hypothèses de recherche (Chapitre 4). La deuxième partie est exclusivement consacrée à « La méthodologie de la recherche » (Chapitre 5, 6 et 7). Enfin, la troisième et dernière partie de cette thèse, intitulée « La réorganisation du rapport à l’alimentation des mangeurs-malades » expose et analyse les différents résultats de cette recherche (Chapitre 8, 9, 10).

La Partie 1 « L’alimentation : de nouveaux enjeux pour la cancérologie » a pour objectif d’éclairer le lecteur sur les théories qui ont façonné cette recherche et qui nous ont permis de positionner le fait alimentaire comme une nouvelle problématique en cancérologie.

En entrant directement dans le vif du sujet, le Chapitre 1 : « Les places de l’alimentation en cancérologie » se propose de présenter le cadre contextuel de notre recherche. Il explore les relations entretenues entre l’alimentation et le cancer, en exposant tout d’abord celles relatives à l’espace du préventif, c’est-à-dire avant le diagnostic du cancer, puis celles s’inscrivant dans l’espace du thérapeutique, c’est-à-dire après le diagnostic. Les problèmes engendrés par la prise de poids, la perte de poids ainsi que les perturbations sensorielles chimio-induits sont ainsi exposés. Nous intéressant exclusivement au contexte de perte de poids et de perturbations sensorielles, nous questionnons par la suite la prise en charge diététique proposée aujourd’hui dans les services de cancérologie français. Les deux chapitres qui suivent proposent le cadrage théorique de notre réflexion construit à l’intersection de la socio-anthropologie de l’alimentation et de la santé.

28 Nous avons procédé à une numérotation successive des chapitres pour d’une part donner de la visibilité à notre processus de réflexion, et d’autre part pour faciliter la lecture lors des renvoies dans le texte.

31 Le Chapitre 2 : « Les dimensions sociales de l’alimentation » expose l’approche interactionniste de l’étude du fait alimentaire. Les mécanismes de la décision alimentaire des mangeurs contemporains y sont dans un premier temps présentés. Puis, ils sont dans un second temps confrontés au phénomène pathologique où nous explorerons notamment les concepts de médicalisation de l’alimentation, de l’observance nutritionnelle et des rationalités alimentaires.

Le Chapitre 3 : « L’expérience de la maladie chronique : donner un sens à son cancer » présente la réflexion entreprise sur l’expérience de la pathologie cancéreuse en se focalisant sur deux éléments. Le premier s’attache à décrire le contexte informationnel dans lequel se retrouvent les malades suite à l’annonce du diagnostic. Sont notamment présentés ici la relation médecin-malade et le soutien informationnel des proches. Le second s’intéresse aux conceptions socio-anthropologiques de la maladie en définissant les formes de causalité de la pathologie cancéreuse.

A l’issue de ces trois chapitres, le Chapitre 4 : « Pour une socio-anthropologie des mangeurs atteints de cancer » présente notre problématique et nos hypothèses de recherche, organisées autour des quatre thématiques identifiées comme étant centrales de ce travail de thèse. La première est consacrée aux modèles explicatifs de la pathologie cancéreuse. La deuxième s’intéresse aux connaissances des malades (et de leurs proches) relatives à l’alimentation et au cancer. La troisième questionne les restructurations du modèle alimentaire engendrées par le diagnostic du cancer et des traitements lui étant associés. Enfin la quatrième resitue notre réflexion dans la dimension temporelle des traitements par chimiothérapie. Nous abordons ces quatre thématiques en exposant dans un premier temps leur inscription dans la relation entre l’alimentation et le cancer, puis nous recentrons notre propos sur le cas des cancers bronchiques, auxquels nous nous intéressons exclusivement, afin de dégager les hypothèses de notre recherche.

32 La Partie 2 : La méthodologie de la recherche présente les outils et les méthodes mobilisées pour la collecte des données réalisée au cours de ce travail. Elle s’articule autour d’une enquête qualitative et d’une enquête quantitative réalisées auprès des malades dans les structures de prise en charge médicale, au cours desquelles des observations de la prise en charge générale des malades ont été effectuées, avec une attention particulière pour la prise en charge diététique. La grande particularité de notre approche réside dans le fait qu’elle soit longitudinale. Elle s’inscrit dans la dynamique de la temporalité de la prise en charge des cancers bronchiques où les personnes atteintes bénéficient d’une administration de chimiothérapie toutes les trois semaines. Nous avons ainsi rencontré toutes les trois semaines les mêmes personnes sur les lieux des soins, afin de retracer leur vécu alimentaire suivant les quatre ou six premières séances de chimiothérapie.

Le premier chapitre de cette partie, Chapitre 5 « Les critères d’inclusion », présente les trois critères d’inclusion ayant permis le recrutement de notre population pour nos deux enquêtes à savoir, 1) la pathologie des cancers bronchiques ; 2) le suivi d’une chimiothérapie en quatre ou six séances ; et 3) le fait que les malades soient naïfs de chimiothérapie29.

Le Chapitre 6 expose les trois méthodes d’observations retenues pour notre recherche. La première concerne une enquête qualitative par entretiens semi-directifs réalisés auprès des personnes atteintes d’un cancer bronchique. Cette première phase de terrain, conduite dans le Service A, a débuté en mai 2011 pour s’achever en décembre 2012. Nous y avons rencontré entre une et six fois 21 malades entre le diagnostic et la sixième administration de chimiothérapie. Au total 60 entretiens ont été réalisés. Par une démarche compréhensive, ces entretiens ont été menés dans un but de saisir l’impact temporel des séances de chimiothérapie sur le rapport à l’alimentation des personnes atteintes. Il s’agissait de retracer la construction de la décision alimentaire, allant de la décision d’achat jusqu’à la consommation, dans un contexte fortement mouvementé par des effets secondaires chimio-induits engendrant des perturbations alimentaires. L’analyse de ces entretiens a permis de dégager trois principaux descripteurs de la réorganisation du rapport à l’alimentation des malades : 1) l’information et les connaissances dont disposent les

29 Nous empruntons directement ce terme au monde médical désignant que les malades n’ont jamais reçu de chimiothérapie.

33 malades de la relation entre leur alimentation, leur pathologie et les traitements anticancéreux ; 2) un vécu alimentaire marqué par des situations où les perturbations alimentaires sont plus ou moins présentes ; et enfin 3) la perception que les malades ont de leur propre cancer, tant dans les formes de causalités supposées que dans son issue. Une seconde méthode de recherche a donc été mobilisée pour renforcer et surtout confirmer ou infirmer la présence et l’interaction de ces trois descripteurs. Une enquête quantitative par questionnaire en face à face s’est déroulée entre avril et décembre 2013, dans les quatre services partenaires de la recherche. Nous y avons rencontré entre une et quatre fois 182 malades entre le diagnostic et la quatrième administration de chimiothérapie. Au total 404 questionnaires ont été réalisés. Pour mener à bien la collecte de ces données nous avons été épaulés par quatre étudiantes en sociologie. Enfin, la troisième méthode de collecte de données s’est structurée par des observations de la prise en charge médicale des malades dans les quatre services partenaires. Ces observations ont été menées quotidiennement dans l’ensemble des lieux dont nous avions accès : chambre des malades, salle de personnel et de pause, couloirs, accueil, salle d’attente. Elles se sont complétées par des entretiens informels réalisés auprès des différents personnels soignants30, ainsi que par des participations à une consultation d’annonce du diagnostic, deux consultations d’annonce infirmière et d’une présence systématique pendant les consultations et les soins médicaux et paramédicaux (excepté les consultations avec les psychologues)au cours des séances de chimiothérapie. Ces observations nous ont amené à rendre compte des informations, dont celles relatives à l’alimentation, pouvant être délivrées aux malades par les différents personnels soignants. Elles nous ont également permis de trouver notre place de « sociologue » au sein des équipes de soins.

Le Chapitre 7 : « Descriptif de l’échantillon de la Phase 2 : enquête quantitative » est le dernier chapitre de cette partie consacré à la méthodologie. Nous y exposons les caractéristiques de la population observée lors de l’enquête quantitative par questionnaire.

30 Nous entendons par « personnel soignant » l’ensemble des professionnels de la prise en charge médicale et paramédicale étant en interaction avec les malades dans les services de soins : médecin, responsable de service, interne/externe, infirmier/ères, aides-soignants/es, diététiciens/nes, psychologue, etc.

34 La Partie 3 : « La réorganisation du rapport à l’alimentation des mangeurs-malades » présente les résultats de cette recherche, nous amenant à définir un cadre contextuel de l’inscription de l’alimentation comme un élément du processus thérapeutique des personnes atteintes d’un cancer bronchique. Pour ce faire, nous exposons au cours de cette partie les quatre thématiques ayant construit notre problématique de recherche, dont la dernière s’intéressant aux dimensions temporelles des traitements par chimiothérapie est présentée tout au long de la présentation et de l’analyse de nos données.

Le Chapitre 8 : « Les conceptions profanes des cancers bronchiques » expose tout d’abord les trois principales formes de causalités supposées par les malades de leur cancer bronchique à savoir, le tabac, la fatalité/incompréhension et les événements de vie. Les temporalités supposées par les malades y sont ensuite explorées, où il est notamment dégagé une perception temporaire de cette pathologie. La définition de ces deux éléments nous amène ensuite à interroger l’impact de l’expérience de la maladie sur les perceptions profanes des cancers bronchiques. Cette première approche de la réorganisation du rapport à l’alimentation des mangeurs-malades montre que l’alimentation ne s’inscrit pas dans le modèle explicatif des cancers bronchiques. Alors que ce premier résultat pourrait être entrevu comme une faiblesse de notre approche, il y est plus abordé comme une force puisqu’il nous amène au cours des trois chapitres qui suivent à démontrer que bien que l’alimentation ne soit pas considérée comme une causalité supposée des cancers bronchiques, elle fait partie intégrante du modèle thérapeutique des malades.

Nous explorons dans un premier temps au cours du Chapitre 9 : « Le réseau informationnel des mangeurs-malades » les différentes sources d’informations relatives à l’alimentation dont disposent les malades. La présentation du contexte informatif institutionnel dégage la disparité présente de l’accès aux soins de support en cancérologie en France, dont de l’information nutritionnelle délivrée par le personnel soignant. Par la suite, nous y présentons les sources informatives mobilisées par les personnes atteintes à l’extérieur des services de prise en charge médicale. Les proches, les recours non conventionnels et Internet, y sont abordés. Ce chapitre tend à montrer que d’une part le réseau informationnel peut être lu comme étant inefficace, dû à une faible mobilisation des malades, mais qu’il vient surtout s’inscrire dans la temporalité de la maladie.

35 L’inscription de l’alimentation comme un élément du processus thérapeutique des malades et par la suite explorée au cours du Chapitre 10 : « L’organisation alimentaire des mangeurs-malades ». Pour ce faire, nous avons tout d’abord exposé de manière relativement descriptive l’organisation des prises alimentaires des malades. Nous dégageons les impacts d’une part de l’annonce du cancer et d’autre part des traitements anticancéreux (chirurgie et chimiothérapie) sur la trajectoire alimentaire des mangeurs-malades. Les quatre types de ruptures alimentaires dégagées montrent que la multiplication des administrations de chimiothérapie engendre un vécu alimentaire plus difficile à surmonter par les malades, les amenant notamment à mettre en place des stratégies d’adaptation. Puis, l’organisation relative aux préparations culinaires et aux contextes des repas est présentée au travers du soutien alimentaire des proches. Nous montrons tout d’abord comment la pathologie engendre une réorganisation des tâches domestiques relatives à l’alimentation et surtout impose pour certains malades une mise en place de stratégies pour déclencher le soutien matériel des proches pour les achats et la préparation des repas. Puis, nous exposons les temps de désocialisations et resocialisations alimentaires imputables au vécu alimentaire des malades et marqué par un soutien émotionnel des proches. Ce chapitre tend notamment à montrer que le vécu alimentaire des mangeurs-malades est le principal déclencheur du soutien alimentaire des proches.

En suivant les expériences de Jean, Madian, Louise, Jules et sa compagne Agnès, Mohamed, Jeanine, Gilles, Patrick, Renaud, Charles, Magda, Myriam, Joseph, Sophie, Diane, Pascale, Amélie et sa fille Fanny, Valentine, Adrien, Nadine, Clément, Georges et sa compagne Maryse, Jeanne, Justine et Audrey31, cette troisième partie de la thèse se propose de définir un cadre d’analyse aux expériences alimentaires des cancers bronchiques.

En guise de conclusion, nous présenterons les principaux apports qui, à notre sens, se dégagent de ce travail de thèse. Puis, nous identifierons les limites de notre approche laissant entrevoir des perspectives de recherche. Enfin, et pour clôturer ce travail, nous proposerons une réflexion sur le positionnement du socio-anthropologue comme un acteur même de la prise en charge des personnes atteintes de cancer.

31 Afin de garantir l’anonymat des personnes rencontrées au cours de ce travail et dont nous exposons ici les expériences, les noms utilisés ont été modifiés. Les noms ont été choisis au vu de respecter un maximum les origines culturelles des personnes rencontrées.

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PARTIE 1

L’ ALIMENTATION : DE NOUVEAUX