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Organisation des séquences didactiques

3. L’exploitation de la chanson

Le cours optionnel que nous avons conçu privilégie l’utilisation de la chanson et propose son exploitation en vue de susciter des actions, dont la réalisation aura lieu non seulement en salle de classe, mais aussi en dehors du contexte institutionnel. Jusqu’ici nous avons fait l’état des lieux de l’introduction de ce « texte » dans l’enseignement/apprentissage de langue en dépeignant ses caractéristiques, ainsi que ses apports bénéfiques tant pour l’enseignant que pour les apprenants. Nous voudrions à présent faire connaître au lecteur la manière dont nous nous sommes servies de ce document. Pour cela, nous présenterons la chanson d’abord en tant que de document déclencheur pour les activités proposées. Ensuite, nous illustrerons comment ses différents supports peuvent être exploités en classe de langue et enfin, nous nous intéresserons plus spécifiquement aux activités linguistiques, puis aux actions langagières, culturelles et sociales que la chanson pourraient éventuellement générer.

3.1. Document déclencheur

Un document déclencheur, c’est un « texte » (écrit ou oral) qui sert de point de départ à des activités différentes proposées en situation d’enseignement/apprentissage. Il peut s’agir d’un document authentique ou fabriqué qui donnera lieu à des activités de réception. Lorsqu’un enseignant introduit dans son cours un document « importé » de l’extérieur du cadre scolaire, c’est souvent dans un but d’y faire pénétrer la langue « authentique », telle qu’elle est utilisée dans les conversations ordinaires. Il est nécessaire de souligner avec Lemeunier que

Le choix du document déclencheur est stratégique puisqu’il va non seulement être le support de

l’exposition et du traitement des informations qu’il contient mais également être source d’inspiration pour les activités de fixation et de production. […] [Il faut] qu[‘il] soit également adapté au public visé et qu[‘il] corresponde à ses centres d’intérêts. (Robert & al., 2011 : 101)

Pour Boiron (2001 : 55), « La chanson en classe de langue est un support d’expression orale et écrite, un déclencheur d’activités et point de départ d’une ouverture sur le monde et la diversité culturelle… ». Le lien étroit que la chanson entretient avec la langue et la culture en fait un outil permettant un travail à la fois sur le contenu, sur des éléments phonologiques, sur les registres différents

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et bien sûr, sur des informations d’ordre culturels. Dans le cadre de notre cours optionnel, nous avons surtout utilisé la chanson en tant que document déclenchant des activités de réception permettant la découverte de thèmes, de vocabulaire, de certains points grammaticaux, d’éléments culturels. En gardant à l’esprit la logique actionnelle, nous avons recouru à la chanson pour lever les obstacles linguistiques, sans toutefois oublier que « Le but n’est pas de faire du texte un prétexte pour travailler un point de grammaire, mais de faire prendre conscience aux élèves que la connaissance de la langue facilite l’accès aux informations dans ce texte. » (Bourguignon, 2010 : 44)

3.2. Supports textuels, audio et visuels

Pour Robert & al. (2011 : 100), « Les médias marquent leur époque… et la dynamique des cours » et Boiron (2001 : 55) ajoute qu’« Une chanson, c’est de la musique, un texte, une interprétation et aujourd’hui d’une façon presque indissociable également un clip vidéo, des images et si possible un spectacle vivant par la participation à des concerts, lors des tournées des artistes. »

Riche de par sa présentation textuelle, visuelle et audio, une chanson se prête à une exploitation variée. En effet, les activités portant sur des éléments linguistiques, phonologiques, communicatifs ou socioculturels peuvent être facilement organisées en fonction du support que l’on privilégie. L’enseignant choisira par conséquent de travailler à partir de la forme écrite, sonore ou visuelle du texte en fonction des objectifs visés. Il pourra également superposer deux ou trois supports en facilitant ainsi l’accès aux informations contenues dans la chanson. Par exemple, en projetant un vidéo-clip, « de vraies œuvres artistiques », on apport e« un univers supplémentaire à la chanson, celui de l’image » (Boiron, 2005 [en ligne]). Le décodage du texte est rendu plus facile grâce à cette dimension visuelle supplémentaire. Ensuite, l’enseignant pourra exploiter de différentes façons le même document en proposant notamment de visionner un vidéo-clip une première fois sans la bande sonore, puis un seconde fois avec le son. En procédant de la sorte, il invite les apprenants à émettre des hypothèses sur le contenu, la musique du clip, hypothèses qu’il pourra confirmer ou infirmer après. Enfin, il est également possible d’introduire un spectacle vivant en salle de classe, grâce à la retransmission de certains concerts donnés par les artistes sélectionnés. C’est une autre possibilité d’accéder à la chanson que d’observer le chanteur interpréter sa propre chanson, ou celle d’un autre compositeur, en direct. Cette authenticité d’expression que l’artiste donne à sa chanson, lorsqu’il chante en concert, n’est pas souvent perceptible dans un vidéo-clip enregistré, dans lequel l’artiste est mis en scène, voire invisible parfois.

3.3. Activités linguistiques

Pedreira (2011 [en ligne]) définit la chanson en tant que document authentique, sonore, écrit et culturel qui intègre un élément non-linguistique : la musique. Nous noterons encore la présence du support visuel que nous venons d’évoquer. C’est en exploitant chacune de ses caractéristiques que

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l’enseignant introduira des tâches de types différents (sous-tâches, tâches de communication pédagogiques) et grâce auxquelles les apprenants pourront mobiliser, développer et pratiquer les connaissances linguistiques nécessaires, puisque, comme le note Bourguignon, « Il n’y a pas d’apprentissage sans construction de connaissances et de capacités. » et que « […] tout type de tâches communicatives que les apprenants pourront d’autant mieux TOUS mener à bien, qu’ils ont les mots pour le faire et les capacités pour s’exprimer. » (2010 : 49-50) Dans ces conditions, le rôle significatif que l’enseignant doit jouer sera de « Lever les obstacles linguistiques […] [en repérant] les éléments langagiers que les apprenants vont devoir maîtriser pour pouvoir extraire les informations utiles pour accomplir la tâche. » (Ibid., p 44)

3.4. Actions langagières, culturelles et sociales

Les tâches auxquelles on porte beaucoup d’attention dans la perspective actionnelle sont celles qui donnent lieu à des actions communic’actionnelles authentiques proches de la vie réelle lorsqu’elles se déroulent en classe, ou effectivement réalisées lorsqu’elles ont lieu en dehors du cadre institutionnel. Pour rendre ces actions possibles et réalisables, il est nécessaire, dans le contexte scolaire, de passer par la phase d’appropriation d’outils langagiers. Outillés de la sorte grâce à la pratique des tâches d’apprentissage, les apprenants deviennent des usagers préparés à effectuer des tâches d’usage.

Le fait de proposer la chanson en classe de FLE permet d’y introduire des éléments langagiers, culturels et sociaux que ce document véhicule dans ses paroles, son message, son interprétation, sa mélodie. Utilisée en tant que document déclencheur à des activités langagières de réception, une sélection musicale peut aussi servir de pont ou de référence à des activités de production réalisées en classe, mais aussi à l’extérieur. Notre projet d’organiser un festival de la chanson française et un blog en lien avec cet événement, montre une exploitation possible de la chanson en tant que document suscitant à la fois des activités langagières et des actions socio-culturelles. Cette variété d’exploitation de la chanson en fait une source de choix dans le but de favoriser des actions d’apprentissage et d’usage.

Exemples d’exploitation de chansons donnant lieu à une activité langagière et à une action socio-culturelle

Séquence n°4 « Travailler de manière efficace : Comment être efficace dans son travail ?68

Après avoir écouté deux chansons portant sur le sujet du travail (Henri Salvador Le travail c’est la santé et Je peux

pas travailler) et une autre présentant l’utilisation répétée de l’impératif (Jacques Dutronc Fais pas ci fais pas ça), les

apprenants doivent concevoir une charte pour un travail efficace qui sera postée par la suite sur le blog. Séquence n°3 « Travailler en équipe : Comment choisir son équipe de travail ?69

Suite à l’écoute de la chanson de Gérard Lenorman Si j’étais Président, les étudiants constituent d’abord une équipe

fictive pour le nouveau gouvernement français en y introduisant des personnages de bandes dessinées ou de dessins

animés. Ensuite, c’est une vraie équipe de travail qu’ils doivent constituer et dont la tâche consistera à préparer le

festival de la chanson. Les candidats seront choisis parmi les apprenants.

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Cf. Volume 2 : De la chanson à l’action. Livret Enseignant : fiche de l’action n°4, p78.

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4. Synthèse

Lorsque nous avons décidé de la structure et de l’organisation du cours optionnel, le besoin de présenter les séquences de façon uniforme est assez vite apparu afin de faciliter leur animation. Deux types de fiches ont ainsi été créés pour aider l’enseignant dans la préparation et la mise en place des séances : une fiche informative et une fiche d’action, pour chacune des neuf séquences. Les deux fiches comprennent des rubriques ou des étapes fixes, afin de rendre plus aisée leur exploitation et de servir de guide à l’animateur(trice) du cours.

Ainsi, la fiche informative contient-elle tous les paramètres de la séquence didactique dont l’enseignant pourra prendre connaissance avant de pénétrer en salle de classe. Ce survol lui permettra d’avoir une vue d’ensemble de la séquence à donner. Tandis que la fiche d’action, servant de feuille de route, déploie le déroulement minuté de la séance en quatre étapes et huit activités ainsi que les devoirs et le prolongement constitué de deux activités supplémentaires. Pour garantir la progression des actions proposées d’une séance à l’autre, un travail d’anticipation, grâce aux devoirs annoncés, et une évaluation commune de la réussite de la tâche au cours suivant ont été instaurés.

Enfin, les chansons, sélectionnées et exploitées dans le cadre de notre cours optionnel, ont pu donner lieu en tant que document déclencheur, à des activités linguistiques, elles ont aussi suscité des actions langagières et socio-culturelles à travers l’introduction de tâches différentes et grâce aux supports variés adaptés à la nature de la tâche visée.

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Bilan

Le stage effectué à l’Institut de français langue étrangère du campus adventiste à Collonges-sous- Salève a abouti à la création d’un cours optionnel organisé autour de neuf séances hebdomadaires intégrant la chanson, selon la perspective actionnelle. La conception de ce cours a été le fruit d’une commande émise par la directrice précédente de l’école. En effet, cette dernière a cherché à élargir l’offre d’options proposées par l’institut en répondant ainsi aux attentes et aux intérêts grandissants pour ce type de cours. Les étudiants étatsuniens qui constituent la grande majorité du public de l’I.fle recherchent des cours qui correspondent non seulement à des besoins linguistiques mais aussi ceux qui représentent des avantages personnels et académiques. C’est pourquoi, la thématique de la chanson ainsi que la démarche privilégiant la communication et l’action avaient de fortes chances de répondre positivement à ce que recherchent les apprenants. De ce fait, nous avons établi la problématique suivante : Pourquoi et comment la chanson pourrait-elle devenir génératrice d’actions dans un cours de FLE ? Comment organiser et structurer un cours optionnel de FLE exploitant la chanson selon la perspective actionnelle ? Nous avons recouru à une recherche-action qui se déroule selon les trois étapes suivantes : la phase initiale, la phase de réalisation et la phase finale.