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VII. L’AUTONOMISATION DE l’APPRENTISSAGE :

4. Approche des sciences humaines de l’autonomie et le retentissement sur l’éducation

5.2 L’autonomie dans la théorie de Vygotsky

En partant de sa conception socio-constructiviste et historico-culturelle Vygotsky, envisage l’autonomisation intellectuelle comme un processus social. Vygotsky insiste sur le fait que la relation que le sujet entretient avec le monde des objets (physiques et conceptuels) est toujours médiatisée par des tiers, parents, enseignants, pairs, avec lesquels il co-construit ses connaissances(Larroze-Marracq, 2014).

D’après la théorie de Vygotsky, l’autonomie est le résultat d’un mouvement qui va de l’inter-psychique (les interactions avec les adultes et les pairs) à l’intrapsychique (intériorisation de procédés appris au cours des interactions sociales).

D’un point de vue développemental, il s’agit de la « zone de proche développement » conceptualisée par Vygotsky depuis l’année 1933 (Vygotsky, 1985).

Elle est définie comme nous l’avons mentionné dans le précédent chapitre ( théories d’ apprentissage) comme une distance entre deux niveaux : celui du développement actuel, mesuré par la capacité qu'a un enfant de résoudre seul des problèmes, et le niveau de développement mesuré par la capacité qu'a l'enfant de résoudre des problèmes lorsqu'il est aidé par quelqu'un (Vygotsky ,1985, p. 45). L'écart entre ces deux niveaux de compétence

 .' détermine l'écart entre processus d'apprentissage et processus de développement, et constitue donc une Zone de développement potentiel (ZDP).

D’un point de vue praxéologique, il s’agit d’un espace-temps qui suppose un des étayages progressifs. L’interactionnisme Vygotskienne en fait est un processus social. L’autonomie se conçoit comme le résultat du passage de l’interpersonnel à l’intra personnel (par appropriation et intériorisation :Friedrich, 2010 ; Vygotsky, 1934/1997, cité par Raab, 2016). Le processus d’autonomisation conduit ainsi l’apprenant à dépendre de moins en moins, du recours à la régulation directe de l’enseignant. La situation d’autonomie correspond aux temps de classe au cours desquels l’apprenant doit agir selon ses propres forces, en dehors de la présence directe de l’enseignant, soit que celui-ci n’est pas disponible, soit qu’il organise volontairement son retrait de la situation. Dans cette perspective Vygotsky précise par sa célèbre expression : « ce que l’enfant sait faire aujourd’hui en collaboration, il saura le faire tout seul demain »(Vygotsky, 1934/1997, p. 355).

5.3 L’autonomie d’après la théorie de Bruner

L’autonomie pour Bruner (1983) se situe entre le moment où l’apprenant bénéficie d’un étayage « Scaffolding », direct par l’adulte ou un pair plus avancé et le moment où il est capable de réussir l’activité de façon autonome. Selon Bruner « la plupart du temps, l’intervention d’un tuteur comprend une sorte de processus d’étayage qui rend l’enfant ou le novice capable de résoudre un problème, de mener à bien une tâche ou d’atteindre un but qui auraient été, sans cette assistance, au-delà de ses possibilités »(Bruner, 1983, p.263).

En milieu clinique nous pouvons emprunter l’idée de Bucheton (2009) qui considère l’étayage comme un geste professionnel, partagé soit de manière soit explicite, soit implicite par les membres d’une communauté professionnelle. Ces gestes ont besoin de « formats » d’étayage qui sont identifiés et reconnus par l’ensemble des apprenants (Bruner, 1983). L’étayage « c’est ce que l’enseignant fait avec son élève pour l’accompagner dans ses apprentissages et dans la mise en place de conduites et d’attitudes qui leur sont propices. C’est l’intervention du maître dans un espace d’apprentissage que l’élève ne peut mener seul »(Bucheton, 2009, p.59).

L’approche pédagogique de l’enseignant est ainsi très importante, il peut à l’opposé de l’étayage, avoir recours à des méthodes et des outils pédagogiques qui n’aident pas l’apprenant dans son processus d’apprentissage. L’activité développée par le PEC dans l’étayage doit avoir pour but de développer l’autonomie de l’apprenant, de lui donner confiance en lui et de lui permettre de progresser dans son apprentissage(Vallat, 2012).

 .( En somme, le cognitivisme, le constructivisme et le socio-constructivisme fournissent l’arrière-plan qui constitue la base théorique de l’apprentissage autonome. Les idées et postulats des réformateurs pédagogiques, par exemple l’enseignement centré sur l’apprenant, sont confirmés par les conclusions des sciences cognitives (Lang, 2010).

Dans le même ordre de réflexion Brunot et Grosjean (1999), s’attachent davantage au

processus concourant à l’acquisition de l’autonomie en l’opposant à l’apprentissage centré sur les contenus et savoir-faire caractéristiques de la pédagogie traditionnelle.

Ainsi, ils définissent, la pédagogie de l’autonomie comme étant le fait « d’essayer de faire trouver à l’élève son propre chemin, de lui faire construire son propre parcours. C’est une démarche mise en place pour qu’il réponde à un problème qui lui est personnel, dans une situation où il y a un vrai enjeu » (p. 25). Ce courant moderne novateur s’oppose avec les principes de l’éducation traditionnelle. Il s’inscrit dans l’héritage de Rousseau qui place la liberté de l’enfant et l’émancipation humaine comme principe central de l’éducation, nécessaire pour former un homme libre et autonome.

Ce courant est fondé sur trois principes fondamentaux qui sont « la prise en considération de la réalité enfantine (puer-centrisme) , l’organisation d’une vie sociale au sein de la vie scolaire et la relation de l’acte à la pensée » (Morandi, 1997/2005, cité par Raab, 2016, p. 12).

De ce paradigme émergent quelques idées qui deviendront des lieux communs de l’éducation : « c’est l’enfant qui apprend et lui seul », « l’enfant apprend ce qui fait sens pour lui », « en étant actif », « en collaborant avec les autres », « il n’y a pas deux apprenants qui apprennent de la même manière » (Burns, 1972, cité parAstolfi, 1995).

Warchol, (2007) précise que « la pédagogie de l’autonomie est avant tout une pédagogie de la communication et de l’expression ». L’autonomisation est présentée comme un processus comportant cinq étapes: faire des choix, prendre des responsabilités, se situer, se donner des règles et se prendre en charge.

Pour conclure ce paragraphe, l’autonomie est une notion largement commentée et débattue dans différentes sphères des sciences humaines et sociales ; de la philosophie de la biologie et surtout dans le domaine de l’éducation et l’enseignement. Plusieurs conceptions s’affrontent, portant chacune des définitions particulières et des enjeux différents, voire opposés. La notion d’autonomie recouvre ainsi une véritable panoplie qui nous pousse à nous demander quelle définition accorder à ce concept dans le domaine de l’éducation et l’enseignement ?

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