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VII. L’AUTONOMISATION DE l’APPRENTISSAGE :

6. Quelle définition attribuée à l’autonomie dans le domaine de l’éducation et de

6.8 Autonomie et compétence

Autonomie et compétences sont indissociablement liées. Pour certains auteurs, une maîtrise minimale des compétences est nécessaire pour atteindre un certain niveau d’autonomie (Quintin, 2013). Comme l’affirme Perrenoud (2002, p.17), « de même que l’argent ne fait pas le bonheur, les compétences ne font pas l’autonomie, mais elles y contribuent ».

Mais quels sont les liens qui unissent ces deux facettes de l’action en situation ?

Au sujet de la profession infirmière, Boudier (2012, p.75), écrit que : « le cadre général de l’exercice professionnel s’est complexifié ; il repose désormais sur un champ de compétences de plus en plus large, et prédomine le souhait d’accéder à une plus grande autonomie professionnelle. »

Pour d’autres auteurs, l’autonomie est l’un des critères indispensables à la compétence : « L’autonomie est une condition incontournable d’un déploiement de la compétence. » (Zarifian, 2001, p.41). Cette différence de vision dépend de la conception donnée au but de l’autonomie. Pour notre part, comme nous l’avons souligné plus haut, l’autonomie est considérée à la fois comme un moyen et une finalité.

Pour la compétence, nous pouvons remarquer que la plupart des auteurs qui ont défini d’une manière classique la compétence et la professionnalisation du parcours des apprenants y compris dans le domaine des sciences de la santé, se construisent progressivement à travers l’acquisition de quatre typologies de « savoirs » : « savoir théorique », « savoir-faire », « savoir-être » et « savoir agir », on rectifié cette conception on démontrant que la compétence réside essentiellement dans la réflexion comme une obligation et une condition essentielle à ces quatre types de savoirs.

 &'( Par ailleurs, ajouter le « savoir analyser, évaluer et améliorer » à chaque type de savoir définit le mieux la compétence en milieu clinique. Toujours, dans une concordance avec l’évolution de la conception de la compétence, plusieurs auteurs (Jonnaert, 2009, Tardif, 2006, Le Boterf, 2006, Perrenoud, 2003) nous le rappellent, une compétence est toujours spécifique à une situation, même si cette dernière peut être rattachée pédagogiquement à une famille plus vaste de situations considérées comme similaires du point de vue des savoirs qu’elles mobilisent (Quintin, 2013). Ainsi, Jacques Tardif définit (2006) une compétence par « un savoir agir complexe qui prend appui sur la mobilisation et la combinaison efficaces d’une variété de ressources internes et externes à l’intérieur d’une famille de situations » (Tardif, 2006, p.22). Pour Le Boterf, une compétence est un agencement et non pas un geste

élémentaire ni une opération. La compétence réside dans l’enchaînement, la combinaison, la réalisation d’une séquence. Elle « est la résultante de trois facteurs : le savoir agir qui suppose de savoir combiner et mobiliser les ressources pertinentes (connaissances, savoir-faire, réseaux) ; le vouloir-agir qui se réfère à la motivation et l’engagement personnel du sujet ; le pouvoir-agir qui renvoie à l’existence d’un contexte, d’une organisation du travail, de conditions sociales qui rendent possibles et légitimes la prise de responsabilité et la prise de risque de l’individu » (Le Boterf G., 2006). Quant à Vecchi, il définit une compétence comme une aptitude à agir efficacement dans une situation complexe en utilisant des acquis élémentaires (ensemble de capacités, d’attitudes, de connaissances notionnelles) (Vecchi, 2011, p. 95).

Donc, nous pouvons admettre que confronter à une situation authentique et aux objectifs qu’il se fixe, l’apprenant mobilise spontanément des ressources internes (connaissances antérieures, expériences, habilités, capacités cognitives, émotionnelles, sociales) ou externes (soutiens par les outils didactiques, connaissances détenues par les pairs et les professeurs, informations accessibles) qu’il est amené à articuler pour intervenir avec succès. Cette mise en situation réelle et complexe incite au questionnent et favorise la construction des connaissances en approfondissant et en modifiant celles acquises antérieurement et enfin l’acquisition des compétences (Legendre, 2005). Compte tenu de ces définitions nonobstant quelques précisions, la proximité entre la compétence et la « capacité » d’autonomie est forte. Tout comme la compétence, l’autonomie ne peut effectivement se considérer qu’inscrite dans l’action, face à une situation qu’il s’agit de traiter dans la perspective d’obtenir des résultats plus ou moins à la hauteur de ce qui est attendu (Quintin, 2013). La compétence et l’autonomie ne peuvent se développer qu’en s’exerçant. Les capacités sur lesquelles reposent la compétence et l’autonomie sont entre autres procédurales et ne peuvent, par conséquent, se

 &') développer que par l’expérience. Dans cette logique Little (2000), a eu recours à l’exemple de comment apprendre à faire de la bicyclette, où seulement les instructions, ne suffisent pas pour devenir autonome. Il rapporte que: “Being told how to be an autonomous language learner-user and reading written instructions about how to ride a bike may well provide the learner-user with useful information and insights. But the language learner-user will become gradually more autonomous only through the practice of autonomy, just as the cyclist will become gradually more proficient only by riding their bike” (Little, 2000, p. 15).

Pour sa part, Quintin (2013), explique que l’autonomie et la compétence s’actualisent dans les mêmes conditions et composent avec les mêmes variables. Mais l’une et l’autre ne se situent pas tout à fait sur le même plan. L’autonomie est en effet une notion plus vaste et touche tantôt à l’exercice strict et limité de la compétence en situation, tantôt à une finalité éducative nettement plus large. Il explique que dans la première situation de nature pédagogique, l’autonomie peut nous aider à préciser la mesure selon laquelle la compétence mobilisée par l’apprenant est mise en œuvre avec l’appui d’une aide extérieure, apportée dans le cadre d’une relation « étayée » de tutelle. À ce niveau plus ingénierique, le but de l’enseignement est d’aider l’individu à traiter un vaste éventail de situations différentes, sans qu’il lui soit nécessaire d’appeler une aide fonctionnelle extérieure Quintin (2013, p 21), autrement dit à développer ce que Masciotra et Medzo, 2009 (cité par Quintin, 2013), appellent un « agir compétent situé » qui, dans son aboutissement, se déploie en totale autonomie.

Dans la seconde situation, l’autonomie est placée sur un plan éducatif plus large. Cette vision rejoint la conception du sujet autonome telle que proposée par Descombes (2011), soit un être foncièrement éthique, enraciné dans son environnement social, à l’opposé, d’un individu indépendant agissant plutôt « seul dans son coin ».

Notre réflexion porte sur les méthodes et les moyens pédagogiques et les outils didactiques que peut déployer l’enseignant pour soutenir et développer l’autonomie dans l’exercice des compétences en situation d’apprentissage en milieu clinique. Nous, nous situons donc dans la première situation dans laquelle, pour reprendre l’expression de Masciotra et Medzo (2009), notre préoccupation est celle du développement de « l’agir compétent situé », marqué par définition selon nous, d’un projet d’autonomie.

Surtout que dans l’apprentissage des soins le fait de juste suivre des instructions et disposer de connaissances ne suffit pas pour devenir autonome. Il est certainement utile pour l’étudiant stagiaire, comme pour l’apprenti cycliste, l’exemple, cité par Little (2000) qu’on leur dise

 &'* comment devenir autonome, mais l’un comme l’autre ne pourra progressivement gagner en autonomie que par la pratique.

En bref, les deux grands concepts l’autonomie et la compétence font référence à la psychologie cognitive et le paradigme constructiviste et socioconstructiviste. L’autonomie et la compétence sont inscrites toutes les deux dans l’action, face à une situation. Elles n’ont d’intérêt que lorsqu’elles sont mises en pratique. Enfin, l’autonomie va de pair avec la compétence, mais elle est plus vaste. La compétence favorise l’autonomie.

Notre étude s’intéresse à la question : comment aider les étudiants en sciences de la santé à mieux apprendre et à surmonter leurs difficultés d’apprentissage ?

La piste de l’autonomisation de l’apprentissage semble être prometteuse. Elle va dans tous les cas dans le sens du développement d’une certaine autonomie de l’apprenant par rapport à son propre processus d’apprentissage.

Avant de passer au cadre méthodologique une pré-enquête a été réalisée pour valider le questionnaire de collecte des données qualitatives de notre recherche.

Résumé : nous considérons la motivation des étudiants et leurs utilisations des stratégies

d’apprentissage comme deux concepts importants qui déterminent l’autonomie de l’apprentissage. Ainsi, nous avons admis dans notre étude qu’un étudiant autonome dans son apprentissage est un étudiant motivé qui est capable de prendre en charge son apprentissage, de mobiliser ses connaissances dans les situations de soins, de réfléchir sur ses actions, de progresser vers l’auto direction.

Pour conclure ce chapitre, la revue des écrits nous a aidé à définir le cadre, théorique et conceptuel qui délimitera notre approche pédagogique et aussi à préciser le sens accordé dans cette étude au concept de l’autonomie. Les stratégies d’apprentissage et la motivation seront étudiées pour déterminer l’autonomie de l’étudiant dans son apprentissage.

Le cadre conceptuel retenu ayant été précisé, il convient à ce stade d’indiquer les choix méthodologiques opérés dans le cadre de notre recherche.

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TROISIÈME CHAPITRE

PRE-ENQUETE :

Validation transculturelle du questionnaire « Motivated Strategies for

Learning questionnaire » (MSLQ) dans un contexte d’apprentissage en

milieu clinique des étudiants en sciences de la santé

(les résultats obtenus de cette étude ont fait l’objet d’un article original qui a été soumis à la « revue européenne de psychologie appliquée » le 25 novembre 2017)

 &', Introduction

La valeur d'une recherche dépend inéluctablement de l'instrument de mesure utilisé. En effet, les données doivent être recueillies d’une manière fiable et valide. Ainsi, le choix des outils , des instruments et de la méthode de collecte des données constitue une étape importante dans le processus de la recherche. Parmi les multiples méthodes de collecte des données, les plus utilisées pour les recherches sont les questionnaires. Leur principale avantage c’est qu’ils permettent la participation d’un grand nombre de sujets, ce qui donne une image plus fidèle des caractéristiques de la population et assure une meilleure transférabilité des résultats (Savoie-Zajc et Karsenti, 2011). Ils permettent d’une manière générale de recueillir de l’information factuelle sur des évènements ou des situations connues, sur des attitudes, des croyances, des connaissances, des impressions et des opinions (De Singly, 2012).

Dans le cas présent, le but essentiel consiste à proposer un instrument servant à recueillir auprès du plus grand nombre possible d’étudiants des informations fiables sur les stratégies d’apprentissage et les orientations motivationnelles afin de mieux comprendre le rôle éminemment actif et autonome joué par chaque étudiant en situation d’apprentissage. Notre choix a été ainsi orienté vers l’un des instruments le plus utilisés dans ce but, le questionnaire MSLQ (Motivated Strategies Learning Questionnaire). C’est un questionnaire auto-administré fiable et valide dans sa version anglaise élaboré par Pintrich et ses collaborateurs (Pintrich, Smith, Garcia et McKeachie, 1991, 1993). Toutefois, la pertinence d’un questionnaire préconçu comme il le fait remarquer He et Van de Vijver (2012) réside dans l’importance accrue de son adaptation à un contexte nouveau et cela en prenant en considération les particularités linguistiques, socioculturelles et psychométriques. Ainsi, nous avons veillé à ce que l’instrument de mesure choisis soit effectivement ce qu’il prétend étudier (Detroz, 2008).

Il s’agit tout d’abord d’échapper aux biais culturels quand nous importerons un outil de collecte des données adapté à des situations trop différentes (Barbeer, 2004). Pour éviter ce désagrément, la version anglaise de MSLQ de Pintrich (1991) utilisée dans notre étude a été traduite et validée selon la méthode de Vallerand (1989).

Le but final sera de disposer d’une version probante de MSLQ en langue française portant les qualités psychométriques de validation spécifique à notre population et à notre contexte particulier d’apprentissage.