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Niveau 4: Des contradictions entre le système d’activité et les systèmes voisins qu

4.3 Le lieu sous-groupes en tant que coÉco

4.3.1 L’émergence de la grande tension des sous-groupes

La sélection des 20 élèves a été accomplie dans le but de créer des pairs aidants pour les prochaines années du projet et pour voir comment le démarrage du projet se déroulerait. Il s’agissait d’une idée de l’équipe des ÉSF en collaboration avec l’équipe de recherche. Cette méthode a fait émerger la plus grande tension relevée chez les enseignants dans notre étude, dans le repérage des manifestations discursives et dans la catégorisation des vignettes, c’est-à-dire le choix d’offrir la possibilité du projet @CTIF à tous les élèves en jouant sur la qualité de la démarche de coÉco ou le choix d’offrir le projet à quelques élèves, mais en permettant une démarche plus soutenue de la part des élèves concernés. « Pour que ce soit utile, il faut que tout le monde soit touché. Ça ne doit pas être quelque chose, ça ne doit pas être marginal. Voilà, donc, ça veut dire qu’il faut qu’on trouve un moyen pour que tout le monde participe. » (Document Sujet enseignant 2, ligne 28). Cette grande tension, qui est une double contrainte puisque les sujets font face à des alternatives urgentes et inacceptables, se positionne entre les pôles de la communauté, de l’objet et du sujet, soit le sous-triangle 3 dans le grand système d’activité.

Figure 11. Le sous-triangle 3 : sujet – communauté – objet

Une tension dans ce sous-triangle de la distribution évoque que l’objet visé de la coélaboration de connaissances chez les élèves n’est pas utilisé par la communauté comme

91 le sujet le voudrait. Les enseignants avaient de la difficulté à se résoudre à sélectionner des élèves et à ne pas faire profiter à tous de la chance de travailler avec une approche qu’ils considéraient comme avantageuse pour eux, malgré le fait qu’ils avaient conscience que leurs groupes sont trop nombreux pour intégrer aisément les outils.

[…] il y a tout un problème d’effectif dans nos classes. Il y a des classes de 120, 130 élèves, des fois 140. Bon, si on veut appliquer ces méthodes, il va falloir carrément trouver des procédures pour le faire. Et, sinon, c’est pas possible. Le travail qu’on a fait, c’est 20 élèves, bon ça c’est gérable. Mais si on devait gérer ça avec une centaine de petits bonshommes, ça va être beaucoup plus difficile. Or, on est obligé de gérer avec ça, puisque nos effectifs là, je ne pense pas que ça va diminuer.

(Document sujet enseignant 2, ligne 6)

De plus, malgré leur réserve en matière de sélection, les enseignants ont affirmé qu’elle était bien faite, car les élèves savaient demander de l’aide et c’était plus facile à gérer: « Ça un peu quand même allégé, comme on le dit, l’apprentissage. Parce que c’était un petit groupe réduit, donc c’est plus facile. » (Document Sujet enseignant 1, ligne 11). Pour résoudre cette grande tension, dès le départ avec les sous-groupes de 20 élèves, les enseignants ont entamé une réflexion sur la façon de faire pour intégrer toute la classe. Ils avaient en tête que dès l’année suivante, ils allaient organiser la classe de sorte que tous leurs élèves profitent du projet. Par exemple, un enseignant a dit lors de l’an 1 : « Dans la semaine, il faudrait qu’un premier groupe passe, qu’un deuxième groupe passe, qu’un troisième passe, soit chaque semaine, qu’il y ait au moins un groupe qui passe, parce que tous les élèves ne pourront pas passer en même temps vu qu’on n’a pas assez d’ordinateurs. » (Document Sujet enseignant 1, ligne 17). Cet extrait dénote une tentative de résolution de tension par double contrainte. En effet, l’enseignant décide qu’il doit agir, car il résiste au fait de se limiter à l’intégration des TIC pour seulement quelques élèves. Il est en train de formuler une action concrète qu’il posera l’année suivante. On voit ici l’action en transition entre les pôles règles et routines – outils – communauté du sous-triangle 9.

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Figure 12. Le sous-triangle 9 : règles et routines – outils – communauté

L’action proposée de roulement des groupes permet de donner un plus large accès aux outils à toute la communauté et, par le fait même, de résoudre une partie de la grande tension de ne pas pouvoir donner accès au projet à tous les élèves. Les deux enseignants impliqués lors de la première année du projet ont donc réfléchi en ce sens et ils ont même vu l’apport du petit groupe de 20 pour leurs futures actions, soit de créer des pairs aidants pour les aider dans l’intégration des TIC selon l’approche de coélaboration de connaissances dans la classe pléthorique : « Si on a les 20 là, on peut les, ils peuvent nous suppléer en quelque sorte, apprendre à d’autres élèves par la même méthode de coélaboration, c’est-à-dire de collaboration avec les autres élèves pour rentrer aussi dans les mêmes méthodes. » (Document sujet enseignant 2, ligne 7). Cette reconnaissance de l’apport de la sélection est également vue ici comme une action en transition correspondant à une résolution par double contrainte qui se situe dans le sous-triangle 4 objet – communauté - division du travail.

93 Une répartition des actions est faite entre le sujet enseignant et ses élèves afin de distribuer l’activité de coélaboration de connaissances dans son grand groupe. À ce stade, l’enseignant n’a pas encore posé l’action de faire appel aux pairs aidants, mais il voit cette possibilité et c’est cette réflexion qui lui permettra plus tard de transformer concrètement sa pratique. Par les diverses tentatives de résolution de la grande tension, on voit que les actions se situent à certains endroits du système d’activité. Ceci vient réaffirmer l’importance de tenir compte de l’ensemble du système, car les solutions se situent parfois dans un autre pôle et c’est en partie ainsi que la dynamique systémique du modèle prend son sens.

Précisons ici que lors de la période d’initiation avec les sous-groupes de 20, les enseignants n’avaient pas encore vu les effets d’utiliser les nouveaux outils avec leurs classes pléthoriques complètes, donc ils ont réfléchi sur des aspects qui selon eux leur faciliteraient la tâche pour la suite, comme de faire appel aux élèves déjà initiés à la démarche. Ils ne pouvaient pas encore être pleinement conscients que la démarche de coÉco n’atteindrait peut-être pas la même efficience avec tous les élèves, même s’ils en avaient l’intuition et qu’ils ont abordé les aspects qui seraient difficiles.