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Pourquoi un Cédérom ?

Pourquoi les Goncourt ?

Pourquoi leur œuvre dramatique ?

Et pourquoi ce corpus restreint de quatre œuvres ?

Voici quatre questions auxquelles il est nécessaire de répondre de prime abord.

Il semble nécessaire de rappeler, à ce stade, les raisons d’être de ce travail : une précision qui permettra, par la suite, d’éclaircir à la fois le premier choix que tous les autres.

Ce travail tente de répondre à une question initiale : L’informatique peut-elle servir la critique littéraire ?

Cette question initiale, posée il y a plus de cinq ans, lors de l’ébauche de ce tra-vail, semble aujourd’hui injustifiée ; les travaux publiés et en cours, les centres de re-cherche actifs sur le sujet, les thèmes et résultats publiés depuis, ainsi que le foisonne-ment des ressources électroniques portant sur la littérature et les corpus littéraires ont depuis longtemps répondu positivement à cette question, devenue aujourd’hui obsolète. Il semble même légitime d’affirmer qu’elle n’est plus, posée dans sa généralité, sujet de polémique.

De cette question découle une autre, ou une autre façon plus moderne de la po-ser :

Les domaines d’application de l’informatique sont nombreux et les travaux D’Alain Vuillemein1

et de Michel Bernard2 en dessinaient, depuis les années 90, les principaux traits et domaines d’application. Leur variété nous a poussé à choisir un champ qui semble couvrir d’une certaine manière le principe même de l’informatisation de la critique littéraire à savoir, l’édition.

L’édition constitue, en effet, à la fois le point de départ du processus d’informatisation à travers la numérisation et l’aboutissement de cet exercice sous la forme de la publication.

Le support informatique permet une mise côte à côte ou face à face du texte (ou des textes, des états du texte) avec le discours sur le texte ou autour de lui (outils de lecture, approches critiques, statistiques, etc.). Nous ne pouvons justifier, ici, le choix du support électronique : tout le travail tente de le démontrer ; nous nous limitons à dire qu’il s’adapte le mieux- sans exclure le support papier à une édition ouverte sur ce qui l’entoure : sur son intertexte et paratexte.

1.1. Pourquoi un Cédérom ?

La seule hésitation que nous avons eue est celle entre l’Internet et le cédérom : tandis que l’Internet offre l’accès à un public plus large, celui du cédérom semble plus restreint. De ce point de vue, la publication en ligne paraît nettement plus avantageuse.

Néanmoins, la nature du projet, à savoir le cadre universitaire de la thèse, et le fait qu’elle doive être considérée comme exercice, proposé pour évaluation et correc-tion, nous a poussé à le réaliser sur un support qui est, du moins pour le moment per-sonnel, et qui attendra, pour être publié, l’approbation du comité scientifique qui le ju-gera.

L’utilisation de l’HTML est dans ce cadre considérée comme un moyen de faire passer, avec peu de manipulations, le projet du cadre fermé du cédérom à celui ouvert et public de l’Internet.

1 Alain VUILLEMIN, Informatique et Littérature (1950- 1990), Paris_ Genève, Éditions Champion _ Slatkine, 1990

2

L’outil et le support utilisés ont pour caractéristiques principales le fait qu’ils soient :

Multimédia : le Cédérom est un espace assez dense et fortement adapté aux sup-ports iconographiques et textuels. Ce qui est suffisant pour la nature du projet et du corpus.

Hypertexte : le principe de l’hypertexte est le propre et la raison d’être de l’édition électronique, et s’adapte fortement à une œuvre des Goncourt.

1.2. Pourquoi les Goncourt ?

L’œuvre des Goncourt se caractérise par sa densité et sa diversité. Elle est mul-timédia dans le sens où elle fait appel à différents genres et qu’elle intervient dans des domaines très variés. L’œuvre touche ainsi à des domaines très variés : la littérature, l’histoire, la sociologie, l’histoire de l’art et bien d’autres ; elle s’intègre par ailleurs, dans des genres différents : les mémoires, le roman, le théâtre, l’essai et la critique.

Tout projet de publication semble en lui-même un défit et a du mal à cerner son sujet vu l’ampleur de l’œuvre et sa diversité, caractéristiques qui nécessitent un effort collectif et le recours à des spécialistes de différents domaines.

La correspondance entre les différents genres et domaines s’avère, par ailleurs, enrichissante et nécessaire. L’examen du processus de réécriture semble être l’une des pistes les plus attrayantes lorsqu’il s’agit de l’œuvre des frères Goncourt. Le texte se transforme, ici plus que chez d’autres, en un paratexte et un avant texte. Peut-on lire, à titre d’exemple, Charles Demailly, cette œuvre tirée d’une pièce de théâtre1

sans éplu-cher le Journal et la Correspondance ou sans effectuer un va-et-vient incessant entre l’œuvre dramatique et le roman ? Peut-on comprendre Manette Salomon, dont l’objet principal est la création artistique sans lire les œuvres de critique d’art et les notes du

Journal ? Il est indéniable, donc, que la navigation entre les textes est utile sinon

1 Les Goncourt ont écrit la première version de cette œuvre sous la forme d’une pièce de théâtre, une pièce appelée Hommes de lettres, dont ils ont détruit le manuscrit et qui a servi de support pour leur ro-man Hommes de lettres paru en 1860

saire pour la compréhension de certains textes et que l’hypertexte, en devient par consé-quent, le support le plus approprié pour cette lecture ouverte de l’œuvre.

1.3. Pourquoi le théâtre ?

Si nous avons choisi ce genre en particulier, c’est parce qu’il n’y a, tout simple-ment, aucune édition du théâtre que celle effectuée par Edmond et qui ne comporte que deux œuvres. Cette publication me semble donc l’un des domaines les moins exploités dans l’œuvre des Goncourt. Deux des quatre textes de notre corpus n’ont jamais été réédités après la mort de leur auteur et n’ont subi que peu d’études critiques. Il est à noter, néanmoins, l’existence de quelques articles et courtes études de grande valeur nécessitant souvent une érudition, qui mériteraient, vue l’absence de documents, d’être regroupées ou du moins résumées. L’apparition en 2006 d’un numéro spécial des

Ca-hiers Goncourt traitant du théâtre goncourtien1 n’a fait que confirmer, chez nous, la conviction que la richesse de ce corpus mériterait d’être traitée de manière globale.

D’autre part, le théâtre des Goncourt bien que peu reconnu pour sa valeur litté-raire, occupe une place importante dans la carrière des deux frères : les essais et les réfé-rences au théâtre surviennent dans toutes les étapes de leur vie littéraire, et le Journal témoigne de cette obstination et de cette obsession. Cette édition tente de leur rendre hommage et à rendre hommage à leur persévérance à écrire du théâtre malgré les échecs successifs.

Le théâtre des Goncourt s’inscrit, par ailleurs, dans un mouvement littéraire qu’il définit et dont il instaure les règles. L’échec des Goncourt dans le théâtre fait partie d’un tout : l’échec plus ou moins spectaculaire du Théâtre naturaliste : ce mouvement a eu autant d’opposants lors de son émergence- malgré l’appui de noms déjà reconnus et célèbres tel que Zola- que d’ignorants dans l’histoire de la littérature. Les contempo-rains des Goncourt et leurs successeurs ont jugé inexistante ou peu importante toute une étape du théâtre français. Cette édition tente d’une certaine manière d’offrir le texte à un nouvel examen pour déceler soit des signes cachés de son ingéniosité soit les raisons

1 Anne-Simone DUFIEF (Éd.), Les Goncourt et le théâtre, Société des amis des frères Goncourt, n° spécial des Cahiers Goncourt, n° 13, 2006.

réelles de son échec. Ce travail tenterait donc de reposer la question déjà exposée par Zola et par les Goncourt : un Naturalisme au théâtre est-il possible ? et comment ? Nous ne prétendons pas répondre à cette question mais peut-on, plus d’un siècle après, la re-mettre au débat ?

Enfin, dans notre recherche de textes ouverts sur d’autres et nécessitant une na-vigation, le théâtre semble s’adapter le mieux à l’hypertexte. Il constitue, souvent, chez les Goncourt l’aboutissement d’un processus de réécriture de l’histoire, des mémoires ou de l’art et crée dans le Journal et la Correspondance une grande effervescence.

1.4. Pourquoi ce corpus ?

Les quatre pièces choisies constituent un échantillon de la carrière et des diffé-rentes expériences des Frères Goncourt.

Il est certainement impossible de penser une édition du théâtre des Goncourt sans Henriette Maréchal. Cette pièce qui a suscité tant de bruit et qui a, d’une certaine manière, brisé le début de la carrière dramatique de deux frères, est certes jugée- y com-pris par les Goncourt eux-même- comme celle de deux apprentis dans le théâtre ; elle contient néanmoins l’embryon de ce que voulaient faire les frères Goncourt au théâtre, de ce que devait être un théâtre naturaliste à leurs yeux.

Germinie Lacerteux constituera, plus tard, la première expérience d’adaptation

théâtrale ; elle semble appliquer ces principes tentés dans cette première expérience. La

Patrie en Danger est, par ailleurs, considérée par ses auteurs comme «

incontestable-ment la meilleure pièce que [nous ayons ] faite, elle a, cela, que [je] ne trouve nulle part, dans aucun drame du passé : une documentation historique qui n’a été encore tentée au théâtre» 1.

Manette Salomon constitue enfin la dernière des pièces des Goncourt et met fin à

la carrière du survivant des deux frères.

1

Le corpus que nous avons choisi comprend donc, d’une part, une pièce des dé-buts et une pièce de la fin, séparées par deux expériences intermédiaires. Il met face à face deux pièces originales et deux adaptations de romans. Il oppose deux textes cé-lèbres à deux pièces inconnues (La Patrie et Manette). Un ensemble d’œuvres toutes écrites uniquement par les deux frères ou par le survivant (contrairement aux textes adaptés au théâtre par des tiers), et qui tentent de représenter différentes caractéristiques du théâtre goncourtien.

Les pièces que nous avons exclues de ce corpus sont :

1. Celles qui ont été adaptées au théâtre par une tierce personne ; à savoir :

Renée Mauperin, adaptée par Céard en 1886 ;

Sœur Philomène, adaptée par Jules Vidal et Arthur Byl en 1887 ;

Les Frères Zemganno, adaptée par Paul Alexis et Oscar Métenier en 1890 ;

La Fille Elisa, adaptée par Ajalbert en 1891

Charles Demailly, adaptée par Paul Alexis et Oscar Métenier en 1893 ; 2. Trois autres œuvres dramatiques n’ont pu être intégrées à cette édition et

ce pour des raisons éditoriales que nous expliquerons ultérieurement. Il s’agit de :

La Nuit de la Saint-Sylvestre (1852)

À Bas le progrès (1893)

La Faustin (1893).