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Les itinéraires dans les sources manuscrites : l’exemple de Houël

Chapitre 2 – À la découverte de la Sicile

2.3 Les itinéraires dans les sources manuscrites : l’exemple de Houël

Jean-Pierre-Laurent Houël se trouve en Sicile entre 1776 et 1779. C’est un des rares voyageurs pour lequel nous disposons de nombreux documents sous divers formats. Son

Journal du voyage de Sicile, se composait initialement de dix-neuf cahiers, chacun étant

numéroté. Seulement douze ont été conservés aujourd’hui. Ces Cahiers contiennent le récit quotidien de son voyage en Sicile, aux îles Lipari et à Malte et, bien sûr, les itinéraires parcourus. À côté de ces Cahiers, nous disposons de nombreuses notes de tout genre, de formats variés et de qualité de papier différente. Ces notes concernent des informations supplémentaires obtenues par son entourage et ses visites de personnalités siciliennes, de ses lectures d’ouvrages, le plus souvent sur l’histoire des villes visitées, et, enfin, sur ses propres observations. Certaines de ces notes forment de petits cahiers qui devaient être facilement transportables. Pour d’autres, il s’agit seulement de feuilles – voire de tout petits morceaux de papier – et qui furent réintégrées et recopiées dans le Journal. Nous reviendrons en détails sur ces différents supports d’écriture dans le chapitre suivant. Pour le moment, il s’agit de comprendre l’itinéraire suivit dans le Journal manuscrit.

Autant dans les sources imprimées que manuscrites, l’auteur revient toujours, à un moment donné, sur son travail de composition et d’écriture. C’est ce que nous apprenons dans les Premières Réflexions Sur La quantité des tableaux En gouasse peint par le Citoyen

Houël qui Se voient dans le Museum de tableaux des peintures de l’école française de Versailles409. Il s’agit d’un cahier manuscrit relié de 12 folios, non daté et sans nom. Il revient

sur la carrière de Houël et de son voyage en Sicile. Nous apprenons que « de retour à Paris, il fit des recherches et des études […] en trouvant dans ses papiers de voyage de Sicile qu’il épura de tout ce qui était inutile. Dans un cahier, il trouva des feuilles qu’il avait faites en Sicile […] dans ce beau climat, il avait faites en feuilles par la force du sentiment de la poésie que l’aspect de la belle campagne inspire forcément à tout homme qui trouve en lui les moyens en contemplant le spectacle de la nature, d’en transmettre la beauté à d’autres personnes, en d’autres instants »410. Au-delà de la contemplation du voyageur face au « spectacle de la nature », c’est le travail de refonte du texte qui nous intéresse et de

409 F.C.C.F., 1998_A.492. 410 Ibid., fol. 10.

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l’épuration « de tout ce qui était inutile ». Cet aveu nous porte à questionner l’itinéraire suivi et à savoir si celui-ci a aussi subi des retouches ou de profondes transformations. N’ayant pas les 19 Cahiers de conservés, nous ne pouvons pas établir l’itinéraire « réel » dans son entièreté. Néanmoins, nous disposons de suffisamment d’éléments pour mettre en lumière les différences entre le trajet du manuscrit et celui de la version imprimée.

Au fil des pages des différents Cahiers, Houël ne semble pas avoir eu un itinéraire bien défini dès son départ pour Palerme et les fréquents allers et retours d’une ville à l’autre viennent nous compliquer la tâche. Nous avons tout de même établit l’itinéraire suivant, par ordre chronologique : Naples, Palerme, Monreale, Alcamo, Ségeste, Calatafimi, Trapani, Marsala, Mazara, Castelvetrano, Selinonte, Avola, Noto, Guglia di Marcello, Palazzolo Acréide, Syracuse, Lentini, Augusta, Melilli, Catania (par bateau de Syracuse), Acireale, Nicolosi, Realmonte411, Leonforte, Caltagirone, Caltanissetta, Girgenti, [ voyage à Malte], il revient ensuite en Sicile, à Licata, Sambuca di Sicilia, Naro, Palma, Aragona, Cattolica Eraclea, Castronovo (région de Palerme), Camarata, Prizzi, Palazzo Adriano, Busachino, Giulana, Santa Maria del Bosco, Antella. Nous reprenons l’itinéraire avec le 18ième Cahier et

la ville de Taormina, Messine, Milazzo, îles Lipari412. Houël semble avoir traversé la Sicile de long en large. C’est du moins ce qu’il exprime au duc d’Angiviller dans une lettre datée du 19 septembre 1777 et envoyée de Palerme : « Me voici à Palerme, il y a un an que je suis parti. J’ai fait le tour des deux tiers de la Sicile depuis Palerme jusqu’à Catania, recueillant dans toutes les villes ce qu’il y avait d’intéressant, puis j’ai pris de l’Etna tout ce qui pouvait en donner une idée la plus complète […] de tout cela j’ai rapporté cent gouasses »413.

Houël se déplace majoritairement selon les lettres de recommandation qu’il reçoit des personnes dont il est l’hôte414. Dès le premier Cahier, il rappelle l’importance de ces lettres : « cet ami me procura des lettres de recommandation très bien faites pour plusieurs villes de

411 À partir d’ici, il nous manque toute une partie de l’itinéraire car Houël réapparaît dans la province d’Agrigento, à l’autre extrémité de la Sicile. Le texte est très confus et il manque des parties. Les deux premiers folios du 7ième Cahier sont tous raturés. Certains paragraphes ne sont pas achevés. À partir du folio 3, Houël

recommence le 7ième Cahier pour compléter l’itinéraire de Catania à Palerme puis, à partir du fol. 6, continue

l’itinéraire de Palerme, à Girgenti et à Malte. Nous pensons que ces pages ont été écrites bien plus tard, en revenant de Malte, le 29 octobre 1777.

412 Il nous manque les cahiers 12, 13, 14, 15, 16, 17. 413 1998_A.365, non folioté.

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la Sicile. Avec la provision qu’on peut faire, on en demande en les présentant pour le reste de la Sicile. On fait la même chose dans chaque ville »415. Houël réitère cet avertissement en marge de la même page : « Il faut avoir grande attention d’en être bien pourvu. Il faut, en partant de Paris, en avoir pour Naples, pour l’ambassadeur et toutes les personnes de grande considération »416. Au-delà des sites et des villes connues, Houël se fie à ce que ses contacts lui disent sur les curiosités à voir dans la région. On peut observer qu’il loge très souvent dans les villes de moyenne à grande taille durant plusieurs jours, voire plusieurs semaines, puis il fait de courtes excursions dans les campagnes environnantes, le plus souvent à cheval. On ne peut à proprement parler de circuit balisé, mais plutôt d’une série de destinations à visiter sans forcément en suivre un ordre précis. Ces fréquents allers et retours se traduisent par une chronologie qui n’est pas toujours évidente à suivre. Houël rajoute des dates après coup, entre deux paragraphes, ou bien il se trompe tout simplement de date pour un même événement. Le départ de Naples est daté du 12 mai 1776 à la première page du premier cahier, puis, la page suivante, il écrit « qu’il parti le dimanche à six heures du soir, 12 mars 1776, par un vent frais du nord »417. L’usage de feuilles et de petits cahiers de notes qui sont probablement retranscrits en fin de journée peut expliquer ces erreurs.

La question financière peut aussi durablement affecter l’itinéraire suivi. Houël connait dès la première année des difficultés qui l’oblige à demander de l’aide de la part de ses bienfaiteurs. La lettre adressée au duc d’Angiviller, citée auparavant, est surtout une demande d’aide financière supplémentaire pour couvrir les frais liés au voyage. Houël est dans une situation difficile et il doit convaincre ses bienfaiteurs de la pertinence de son projet :

J’ai reçu en deux paiements la somme de douze cents livres que voys avez eu la bonté de m’envoyer, mais j’ai été fort surpris quand on m’a annoncé une somme si modique pour continuer une entreprise aussi longue, et aussi dispendieuse que celle de mon voyage en Sicile. Quand je vous ai prier de m’envoyer de l’argent, je croyais que vous auriez eu la bonté de m’envoyer une somme semblable à celle que vous me donnâtes lorsque je partis de Paris afin que, dans le cours de cette entreprise, je n’ai pas l’inquiétude la plus capable de nuire à l’ojet de mon voyage, ni la peine encore plus grande et plus désagréable de vous porter sans

415 F.C.C.F. 1998_A.441, non folioté. 416 Ibid.

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cesse de misère, de détresse, de faim, de toutes les pauvretés qui caractérisent un homme dans le plus grand besoin418.

Cette situation va donner lieu à un échange de lettres dont le ton n’est pas toujours clément face aux demandes de Houël419. Ce cas n’est pas unique, le comte de Borch la connaît aussi. Sa correspondance nous montre les importantes difficultés que subit le voyageur qui contracte de nombreuses dettes et manque de peu de faire de la prison420. Dans son cas, le manque de ressources financières a particulièrement orienté son itinéraire à travers l’Europe. Nous y reviendrons dans les chapitres suivants.

Parmi les papiers de Houël, nous avons une partie d’un second manuscrit dans lequel on peut observer les corrections effectuées par lui-même et, probablement, par les ouvriers de l’imprimerie de Monsieur421. Ce document, certes incomplet, nous montre comment Houël réorganise la structure de son récit en paragraphes distincts et en chapitres pour former un ensemble beaucoup plus clair, facilitant la lecture et qui doit s’arrimer aux centaines de gravures devant y être incluses. À ce second manuscrit, nous pouvons y joindre des documents faisant mention des descriptions des planches 24, 43 et 44, ainsi que des notes de bas de page à y inclure et des commentaires de Houël sur leur disposition422. Les différentes destinations et les fréquents allers et retours deviennent, après un exercice de réécriture, un véritable itinéraire « rectiligne » et qui prendra sa forme définitive dans la carte que Houël publiera dans le premier volume de la version imprimée (voir la figure 4).

418 F.C.C.F. 1998_A.365, non folioté.

419 F.C.C.F. 1984_A.153 Lettre du 7 janvier 1778 à d’Angiviller, de Girgenti ; 2008_A.638a Lettre du 24 octobre 1777 à Wattelet, s.l. ; 2008_A.638 Lettre à Wattelet, de Girgenti.

420 C’est ce que l’on apprend dans sa correspondance avec son père. BSNU, Archiwum Borchów z Warklan, fonds 13, fichier 90 - Lettre du 5 septembre 1776, de Lyon : « Je suis obligé de comparaître devant un tribunal respectable, mais fait pour connaître du crime, et de la mauvaise foi, et non pas pour condamner un fils plein d’honneur, mais oublié par ses parents. Heureusement, le jude est de mes amis, il me demande en particulier les raisons de mon manque. Je suis forcé de lui découvrir la vérité. Il s’attendrit sur mon malheur, me fait trouver l’argent nécessaire, et renvoie mon créancier en le tançant sur son peu d’honnetteté ».

421 F.C.C.F. 1998_A.494. 422 F.C.C.F. 1998_A.498_1/68.

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Figure 4 : Carte de la Sicile avec l’itinéraire représenté, Houël, vol. 1

Le second manuscrit reprend à peu près le même itinéraire de Palerme à Sciacca, mais celui-ci commence à diverger pour les villes suivantes. Ces divergences deviennent flagrantes dans le récit imprimé. Par exemple, le voyage de Lipari, qui est décrit dans le

Journal manuscrit, ne se trouve que dans le 19ième Cahier, c’est-à-dire, qu’il est une des

dernières étapes du voyage en Sicile, avant que Houël ne rentre à Naples. Or, dans la version imprimée, le voyage de Lipari se retrouve dans le premier volume423. La suite de l’itinéraire est aussi surprenante. Dans le récit imprimé, Houël décrit le retour des îles Lipari par Milazzo, Messine, Taormina. Or, dans les 18ième et 19ième Cahiers, Houël a fait le trajet

contraire. Ensuite, deux dessins du canal de Messine effectués à la fin le 19ième Cahier

viennent aussi illustrer la planche soixante-treizième du second volume imprimé (annexe 1 et 2). Des annotations dans les marges et des commentaires insérés entre les paragraphes du

18ième Cahier nous confirment la volonté de Houël de récupérer la description du trajet vers Lipari pour l’intégrer ailleurs. On peut lire en marge « fin du 10ième chapitre »424 et « Il faudra observer en rédigeant cet écrit de mettre ces articles précédant de suite selon les numéros qui

423 Jean-Pierre-Laurent Houël, Voyage pittoresque, vol. 1, p. 108. 424 F.C.C.F. 1998_A.441, fol. 15.

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sont à la marge »425. Ces notes ont été rajoutées à son retour à Paris et dans la perspective d’une publication.

Cette recomposition s’observe encore dans la suite du second volume. Les étapes suivantes du voyage de Lipari reprennent l’itinéraire des 5ième et 6ième Cahiers cette fois-ci. Dans ces Cahiers, Houël relate l’arrivée à Syracuse, puis à Lentini, Augusta, Catania, le lieu- dit Faraglione, Trizza, l’Écueil des Cyclopes, Acireale (qu’il appelle le port d’Ulysse), son

Voyage au Mont Etna, le volcan Monte Rosso, la visite de St-Nicolas et Nicolosi. La version

imprimée continue, quant à elle, avec Taormina, le site de l’antique Naxos, le lieu-dit Faraglione, Trizza, l’Écueil des cyclopes, Acireale, la visite du Châtaigner aux Cent Chevaux, Nicolosi, le volcan Monte Rosso et sa montée de l’Etna. L’itinéraire est à peu près identique au manuscrit dans lequel nous pouvons voir les notes en marge de Houël indiquant les titres de la version publiée, à l’exception des villes de Syracuse et de Taormina426. L’arrivée à Syracuse est mentionnée dans le troisième volume imprimé, après un voyage à l’intérieur de la Sicile. Quant à la visite de Taormina, le 18ième Cahier révèle qu’elle a lieu en avril 1779, à la fin du voyage427.

On retrouve plusieurs exemples de ce genre à travers le récit, et qui ne sont pas facilement décelables. Le travail de refonte a été particulièrement efficace et longuement réfléchi. Parmi les papiers de Houël, nous avons d’autres manuscrits sur la préparation et la disposition des planches ainsi que les descriptifs qui doivent les accompagner. Ils contiennent de nombreuses notes en marge et des parties raturées qui apportent un éclairage supplémentaire sur les choix opérés par Houël. On peut lire, dans une de ses notes : « ne faites pas cet article en sa suite, il y manque des choses essentielles. Je le referai »428.

425 Ibid., fol. 6. 426 Ibid., fol. 17. 427 Ibid, fol. 18.

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Figure 5 : Extrait du descriptif de la planche CCLVII

En plus d’une refonte de l’itinéraire, ce sont aussi des changements dans l’indication de la date des événements qui sont apportés. Le second manuscrit s’apparente beaucoup à la version imprimée, mais il reste encore largement annoté de commentaires relatifs à la disposition des différentes parties, à certains passages qui doivent être supprimés ou bien à des références à inclure dans certaines descriptions. La date des déplacements est encore bien présente, mais dans la version imprimée nombre de ces marqueurs de temps vont disparaître. Houël utilisera à la place des termes comme « la veille », « le lendemain » ou bien il donne l’heure à laquelle il visite un site afin de créer une continuité et une cohérence de l’itinéraire qui n’apparaissait pas aussi clairement dans les notes manuscrites. Le second manuscrit témoigne néanmoins d’une des étapes de refonte du récit de voyage. Ces changements apportés à l’itinéraire « réel » et tel que Houël le représente dans l’ouvrage imprimé font partie d’un processus qui s’applique à toutes pratiques d’écriture du voyage. Certaines stratégies discursives sont mises en place, et Houël, ainsi que les correcteurs de l’imprimerie, semblent particulièrement bien les maîtriser. Le travail entourant le Voyage pittoresque de Houël a été long et exigeant. Il a duré huit ans. Le souci du détail et la volonté de donner au public un ouvrage de référence ont guidé l’exécution de ce travail.

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Ce ne fut pas toujours le cas chez d’autres voyageurs pour qui nous n’avons certes pas autant de traces manuscrites, mais dont le récit imprimé fait part d’incohérences révélatrices d’une refonte du texte qui n’est pas toujours bien maîtrisée. C’est le cas de Carlantonio Pilati di Tassullo qui, dans ses Voyages en différens pays de l’Europe, consacre quelques pages à son voyage en Sicile429. Sous la forme de deux lettres écrites de Palerme et datées de mai 1775, l’auteur dresse un portrait très bref de ses excursions. Ses descriptions de Syracuse, des Latomies ou de la fontaine d’Aréthuse où « il y a encore les restes d’un théâtre, d’un amphithéâtre et de quantité de sépulcres », sont probablement les plus succinctes parmi tous nos voyageurs. Il y a aucune date qui puisse permettre de mieux comprendre l’itinéraire se résumant à une longue énumération des villes parcourues. C’est ce qui avait fait douter Giuseppe Pitré, puis Hélène Tuzet, sur l’authenticité de son voyage en Sicile. Elle écrira même « que nous pouvons négliger les quelques pages consacrées à la Sicile par Pilati di Tassullo , récit rapide, vague, inexacte, sans doute de seconde main »430. Les pages consacrées à la Sicile de Pierre-Marie de Pagès sont du même ordre. Elles furent rajoutées à un Voyage autour du monde effectué par l’auteur lors d’une réédition en 1797. Les descriptions de Pagès sont tout simplement reprises, presque mot pour mot, du récit de Riedesel, qu’il cite abondamment. Il voit la Sicile avec les yeux de Théocrite et seul Riedesel s’emporte de cette façon. Pagès a probablement fait une escale en Sicile, mais nous ne pensons pas qu’il ait parcouru toutes les villes dont il fait mention. Enfin, le récit du comte du Borch laisse planer un doute sur l’itinéraire suivi et dans lequel certaines contradictions apparaissent. Hélène Tuzet parle d’un « témoignage suspect »431. Une partie du trajet est faite en bateau et nous pensons que certaines villes n’ont pas été parcourues et seulement observées de loin, à bord du bateau. Hélène Tuzet écrit « qu’il se trahit à propos de Castelvetrano, « ville assez jolie », assure-t-il et dont il fait un port alors qu’elle se trouve à 12 kilomètres de la mer »432. La réponse se trouve peut-être dans sa correspondance dans laquelle il dit avoir été malade durant un certain temps, l’empêchant de débarquer à terre433.

429 Carlantonio Pilati di Tassulo, Voyages en différens pays de l’Europe, en 1774, 1775 et 1776 ou Lettres

écrites de l’Allemagne, de la Suisse, de l’Italie, de Sicile et de Paris, La Haye, Chez C. Plaat et comp, 1777.

430 Hélène Tuzet, La Sicile au XVIIIe siècle vue par les voyageurs étrangers, p. 10.

431 Ibid., p. 54. 432 Ibid., p. 54.

433 BSNU, Archiwum Borchów z Warklan, fond 13, fichier 90, lettre de Naples, du 29 avril 1777. Dans cette lettre, il revient sur son itinéraire et, en effet, il ne cite nullement avoir parcouru l’intérieur de la Sicile.

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Le comte de Borch semble avoir une santé fragile. Le but initial de son voyage, au départ de Varsovie, est d’ailleurs de se rendre en Suisse dans un but curatif. Le comte y fait quelques fois référence dans son récit : « Le mauvais état de ma santé, et la curiosité de voir les ruines de l’antique Ségeste m’ont déterminé à prendre le chemin de Palerme par terre, en laissant à gauche la ville de Castellammare et la montagne de St-Julien »434. De Borch écrit aussi qu’il fit un tour à l’intérieur des terres, mais ne fait qu’énumérer une longue liste désordonnée de 36 villes supposées avoir été visitées par le voyageur. Hélène Tuzet le juge sévèrement et, pour elle, « il est évident qu’il n’a rien vu de tout cela »435. Voici ce que nous écrit le voyageur sur son itinéraire : « Le peu de séjour que j’ai fait dans chacune d’elles, et le chemin indéterminé que j’ai suivi ne me permettent pas de vous en parler par ordre d’ancienneté, de grandeur, de force, ou de situation. Mes remarques ont été faites tantôt à pied, tantôt à cheval, il est naturel que le style et l’ordre de ma lettre se ressentent de cette manière de travailler »436. S’il reste difficile de se prononcer sur la véracité de cet itinéraire, nous pourrions au moins