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Texte 2 : résumé de l’épopée réalisé par Kwenzi Mikala

3.4 Les informateurs

Mes idées initiales en ont été une fois de plus remises en question.

Au total, c’est donc auprès d’un groupe constitué d’hommes, de femmes et de jeunes que j’ai réalisé mon enquête. Cependant, tous ne constituent pas des informateurs privilégiés.

Il s’agit dans ce point de présenter les personnes qui m’ont servi d’informateurs. Il serait difficile de tous les présenter ici. En effet, la devise étant quelque chose de personnel, j’ai été amenée à demander à toutes les personnes interrogées ce qu’elle représente pour elles et quelle est la place de la devise dans la société. D’une certaine manière, toutes les personnes interrogées ont été soumises au questionnaire évoqué dans le point précédent.

Au total, j’ai interrogé soixante-trois personnes dont soixante hommes et quatre femmes. Ce nombre limité de femmes s’explique d’abord par le fait que je ne m’attendais pas à rencontrer des femmes porteuses de devise comme je l’ai dit plus haut. Ensuite, quand j’ai commencé à m’intéresser à ces dernières, il était difficile de les rencontrer pour un entretien. Elles étaient peu disponibles car prises par les travaux champêtres. Il faut aussi avouer que ma position de femme ‘’étrangère’’ à la communauté suscitait une certaine curiosité, voire un attrait pour les hommes qui étaient plus ouverts, disponibles à se laisser questionner.

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Je présenterai donc une brève notice biographique des principaux informateurs, ceux avec qui j’ai travaillé pendant plusieurs heures et auprès de qui j’ai recueilli non seulement des informations sur la devise mais aussi les données anthropologiques et historiques nécessaires pour ce travail.

3.4.1 Bakita Mbadinga Florent (Yaya)

Plus connu sous le surnom de Yaya96

3.4.2 Bissagou Kombila Jean Ernest

, Bakita Mbadinga Florent est né le 1er janvier 1953 à Mokab dans la province de la Nyanga. Il y vit actuellement où il tient un bar avec son épouse.

J’ai fait la connaissance de Yaya lors de mon premier passage à Moabi en 2009. Il m’avait vivement été recommandé par les personnes interrogées avant lui. Devant une telle insistance de la part des habitants de Moabi, l’accompagnateur jugea utile d’organiser une rencontre avec ce dernier. Très rapidement, il s’est avéré être un informateur privilégié. Considéré par ses pairs comme un détenteur du savoir patrimonial, il m’a tout de suite ouvert les portes de chez lui.

En effet, Yaya considère que le patrimoine oral punu court à sa disparition si rien n’est fait très rapidement. C’est donc avec beaucoup de joie qu’il s’est livré à nos entretiens qui ont eu lieu à plusieurs reprises en 2009 et 2011.

Les entretiens réalisés avec Yaya représentent plus de quatre heures d’enregistrement, sachant que tous les moments passés auprès lui n’ont pas été enregistrés.

Il a entrepris depuis mon dernier passage à Moabi en 2013 l’écriture d’un recueil de proverbes et s’attèle à enseigner aux enfants à compter et à parler en yipunu.

Bissagou Kombila Jean Ernest naît le 1er janvier 1945 à Mouila. Ses parents

l’inscrivent tardivement à l’école97

96Ce terme est employé pour désigner un ainé. On s’adresse à un grand frère ou une grande sœur en l’appelant yaya. C’est aussi une marque de respect.

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car il a dépassé l’âge requis pour y accéder au moment de l’obtention de son certificat d’étude primaire. Il est alors inscrit dans un centre de formation pédagogique pour devenir enseignant en 1960.Il en sort trois ans plus tard et est affecté dans la ville de Dilolu près de Ndéndé en

196498. Il exerce ses fonctions d’enseignant puis de représentant de l’enseignement

catholique auprès de l’inspection académique jusqu’en 2000, année de sa retraite après vingt-quatre ans de service. Il a été vice-président puis président de l’assemblée départementale de la Douya-Onoye. 99

J’ai été marquée par l’humilité de cet homme qui disait qu’il n’était « pas garant du vrai yipunu mais s’appliquant à faire comme les anciens le faisaient autrefois ». Selon lui il n’apportait qu’un morceau (ibuku

C’est un homme aux multiples facettes avec qui j’ai eu l’occasion de m’entretenir à plusieurs reprises. En effet, au moment où j’effectuais cette enquête à Mouila il était chef de quartier, maître de chœur et aussi « nzontsi », c’est-à-dire qu’il était considéré à la fois comme un maître de la parole et juge coutumier. De par son rôle de chef de quartier, il était très souvent sollicité pour gérer des conflits, trancher dans des situations opposant des riverains ou tout simplement apporter des conseils quand c’était nécessaire.

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97Il a dix ans lorsqu’il commence sa scolarité

98Ces deux villes font partie de la province de la Ngounié dont la capitale est Mouila

99Il obtient ce poste qui correspond à la fonction de président de région en France grâce à son engagement politique.

100Morceau en yipunu, ce terme est aussi sa devise. Je la présenterai et l’analyserai dans la suite du travail.

) à la valorisation du patrimoine punu.

Les entretiens que nous avons eus concernent essentiellement l’histoire et l’organisation sociale des Punu. Mon plus grand regret est de ne pas avoir pu m’entretenir avec lui lors de mon second séjour de terrain en 2013, car il était décédé avant l’achèvement de ce travail qu’il avait vivement encouragé.

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3.4.3 Mamadou Moussavou

C’est sous le nom Dissaki qu’il est le plus connu. Dissaki qui est en fait son surnom n’est autre que la devise de son père. Il serait difficile de donner son âge. 101

La première qui eut lieu le 9 juillet 2011 portait essentiellement sur l’organisation sociale et la devise. J’ai pu recueillir auprès de Dissaki vingt devises

Actuellement l’un des derniers sculpteurs de masques punu, il vit à Mouila avec ses enfants.

Le premier contact avec celui-ci a été agréable. En effet, présentée à lui par mon oncle, il s’est tout de suite rendu disponible car il avait connu ma mère enfant. J’ai ensuite eu deux rencontres avec lui.

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, contournant ainsi l’une des difficultés de l’enquête à Mouila. En effet, les porteurs de devises se raréfient dans cette région.103

3.4.4 Mounguengui Nyonda Lié Luc

Ce dernier se souvenait parfaitement des devises que portaient les membres de sa famille qu’il n’a pas hésité à déclamer à ma demande.

La deuxième rencontre concernait les autres genres littéraires, il était question de recueillir des données sur la littérature orale punu. Cette rencontre a été à ma grande surprise une occasion de déclamation de plusieurs genres. De manière fortuite, j’ai pu collecter quelques contes, devinettes et chansons traditionnelles.

Lié Luc Mounguengui n’est pas la personne vers qui je me serais tournée en premier pour obtenir des informations. Ce dernier est pourtant un membre de ma famille, mais une fois de plus je m’étais enfermée dans ma conception concernant ceux qui pouvaient être des informateurs. Pour moi, l’informateur ne pouvait être qu’une personne très âgée. C’est donc

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Il fait partie des gens qu’on appelle communément au Gabon des ‘’né vers’’. Au moment de leur naissance le système de registre de naissances n’était pas encore mis en place. Il est donc difficile aujourd’hui de dater ces naissances.

102Elles correspondent aux devises 49 à 69 du corpus

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La ville de Mouila fait partie des grands pôles urbains du pays. Elle attire donc des personnes d’origines diverses. Ce brassage tend à faire disparaitre l’usage de la langue yipunu et des pratiques langagières qui en découlent.

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au cours d’une conversation ordinaire que nous avons été amenés à discuter de ma recherche. Son degré de connaissance de la culture m’a motivée à organiser un entretien avec lui. Il s’est déroulé à son domicile. Nous avons essentiellement discuté de la devise et de l’organisation sociale. J’ai aussi recueilli le récit de la fondation des clans qu’il détenait sous forme d’enregistrement audio.

Lié Luc Mounguengui est professeur de français en service au collège Saint Gabriel de Mouila. Il est aussi l’auteur de deux ouvrages : Le sein d’Adomi, publié en 2006 chez l’Harmattan et Héritage le père d’Eraste publié en 2010 aux éditions publibook à paris.

3.4.5 Mbadingamoungogou Alias Chimène et Boussamba

Nyonda Jean de Dieu

Bien plus que des informateurs, ces deux personnes ont été aussi des accompagnateurs.

Le premier est actuellement professeur de français dans un lycée de la capitale gabonaise. Je l’ai rencontré alors qu’il était encore étudiant au département des Littératures Africaines de l’université Omar Bongo à Libreville. Réalisant lui-même un master sur la littérature orale punu, c’est grâce à lui que j’ai pu nouer des relations avec les différents informateurs à Moabi et Tchibanga. Par ailleurs, il a aussi été très utile au moment de la transcription des données recueillies chaque jour. Ce moment était pour nous l’occasion de faire un bilan sur ce que nous avions entrepris dans la journée. Ayant une meilleure connaissance de la société que moi, son avis a contribué à réorienter certains de mes points de vue et même à susciter des questionnements qui étaient soumis aux informateurs le jour suivant. Je lui dois en partie la réussite de ma collecte dans la province de la Nyanga.

Le second vit actuellement à Mouila, travaillant à son propre compte. Il s’est totalement rendu disponible pour m’accompagner dans une ville que je ne connaissais pas du tout. Bien avant mon arrivée à Mouila, il avait déjà noué des contacts avec les personnes qui allaient devenir des informateurs, notamment Mamadou Moussavou et le chef Bissagou Jean Ernest. Le fait qu’il m’a présentée comme sa fille a été bénéfique, cela a changé le regard de

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plusieurs personnes qui trouvaient plus de facilité à parler de la culture à un membre de la communauté. Il faut dire que Jean de Dieu Boussamba jouit d’une très bonne réputation dans cette ville.