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1.5 Motivations et contexte de l’exp´ erience

2.1.2 Historique et ´ etat de l’art

La faisabilit´e de r´ealiser des lasers stabilis´es en fr´equence sur une cavit´e externe au niveau de ∼ 10−16 en valeur relative a ´et´e d´emontr´ee par Ch. Salomon et al. au JILA (´Etat-Unis d’Am´erique) en 1988 [102]. Une mˆeme cavit´e de finesse 3500 est utilis´ee comme r´ef´erence pour deux lasers mettant ainsi en ´evidence que les limitations techniques, dues aux diff´erents effets qui perturbent l’asservissement de fr´equence, ne sont pas une limite jusqu’`a ce niveau de bruit. Les avanc´ees en spectroscopie laser sans effet Doppler, puis le d´eveloppement des ´etalons des fr´equences optiques ont ´enorm´ement stimul´e la r´ealisation de lasers stabilis´es, et donc le d´eveloppement de cavit´es de r´ef´erence, avec pour objectif d’atteindre un niveau de stabilit´e relative inf´erieure `a 10−15.

L’un des premiers r´esultats remarquables est obtenu par J. Dirscherl et al. du Max-Planck-Instutut f¨ur Quantenoptik (Allemagne) en 1992 [103], avec une stabilit´e relative de fr´equence estim´ee par l’´ecart type d’Allan `a σy(τ ) ' 10−14 pour τ allant de 10−5 s `a 1 s. Pour parvenir `a ce r´esultat, des pr´ecautions particuli`eres sont prises pour att´enuer les bruits acoustiques et sismiques. La cavit´e Fabry-Perot, de finesse 73000, cylindrique (diam`etre de 10 cm et longueur de 23 cm) et enti`erement en Zerodur, est suspendue dans son enceinte `a vide par des ressorts permettant de filtrer les vibra-tions. L’enceinte `a vide repose sur une table optique et est `a l’int´erieur d’une boˆıte en bois, ce qui permet d’att´enuer les fluctuations de temp´erature et le bruit acoustique. Afin de d´ecoupler sismiquement l’exp´erience du reste du bˆatiment, la table optique repose sur une dalle en b´eton de 300 tonnes flottante par rapport au reste de l’´edifice.

En 1997, S. Seel et al. obtiennent `a l’Universit¨at Konstanz en Allemagne, avec deux cavit´es en saphir (de finesse 120000 et 57000) refroidie `a l’h´elium liquide, une stabilit´e relative de fr´equence de ∼ 3 × 10−15, pour des temps d’int´egration de 4 s `a 70 s [104]. Ces oscillateurs sont, `a l’´epoque, les plus stables, entre 1 s et 1000 s, bien qu’aucune disposition particuli`ere n’ait ´et´e prise pour lutter contre l’influence des vibrations, si ce n’est que le module d’Young du saphir est nettement plus ´elev´e (420 GPa) que celui du Zerodur (91 GPa). Le choix du mat´eriau est motiv´e par les propri´et´es thermiques du saphir. En dessous de 5 K, elles permettent, compar´ees `a celles du Zerodur et de l’ULE, une meilleure insensibilit´e aux perturbations thermiques externes

(coefficient d’expansion thermique plus faible), une sensibilit´e `a la puissance optique circulant dans la cavit´e r´eduite (rapport conductivit´e thermique sur le coefficient d’expansion thermique sup´erieur) et une pr´ecision accrue de l’asservissement de temp´erature (diffusivit´e thermique plus grande). Cepen-dant, comme indiqu´e, la temp´erature de la cavit´e doit ˆetre en dessous de 5 K et n´ecessite donc l’utilisation contraignante d’un syst`eme cryog´enique.

La meilleure stabilit´e relative de fr´equence `a court terme pour un laser a ´et´e d´emontr´ee en 1999 par B. C. Young et al. du National Institute of Standards and Technology au ´Etat-Unis d’Am´erique [56]. Elle est de 3 − 4 × 10−16 pour un temps d’int´egration compris entre 1 s et 100 s. La cavit´e est cylindrique (diam`etre de 150 mm et longueur de 240 mm) et enti`erement faite en ULE et repose sur deux supports en forme de V. Afin d’isoler la cavit´e des vibrations verticales, son enceinte `a vide repose sur une table, d’une masse avoisinant une tonne [105] suspendue au plafond par des tubes en caoutchouc de 3 m de long. La fr´equence propre du mode de pendule d’un tel syst`eme est inversement proportionnelle `a la racine carr´ee de la longueur de la suspension utilis´ee, il est donc plus judicieux de proc´eder comme cela plutˆot que de suspendre uniquement la cavit´e dans l’enceinte `a vide. Ce montage permet aussi d’att´enuer efficacement les vibrations verticales `a partir de la fr´equence propre du syst`eme. Elle est inversement proportionnelle `a la racine carr´ee de la charge et profite donc de la masse importante de la table. Les fr´equences de la r´esonance fondamentale des oscillations observ´ees sont de ∼ 0, 3 Hz. On peut ajouter qu’un amortissement visqueux (1 s), ainsi qu’un asservissement de position (constante de temps de 100 s) de la table sont impl´ement´es afin de stabiliser la position de la table. Enfin, l’ensemble est acoustiquement isol´e `a l’aide d’une enceinte en bois [106] et la temp´erature de l’enceinte `a vide est minutieusement asservie. Une sensibilit´e aux vibrations de la cavit´e ∼ 2 × 10−10 (m.s−2)−1 a ´et´e mesur´ee.

Pour des raisons pratiques, il est int´eressant de pouvoir s’affranchir de l’utilisation d’une telle table ou encore d’un syst`eme cryog´enique. Au JILA, pour y parvenir, M. Notcutt et al. utilisent une cavit´e de finesse 46000, ayant un axe optique vertical en ULE, support´ee de fa¸con `a ce que sa sensibilit´e aux vibrations soit r´eduite [57]. Ce design est inspir´e de celui utilis´e pour certaines cavit´es micro-ondes [107] et de travaux pr´ec´edemment r´ealis´es sur une cavit´e en saphir cryog´enique [108]. Ils tirent parti du fait que si cette cavit´e est maintenue `a la moiti´e de sa longueur, lorsqu’elle est soumise `a une acc´el´eration verticale, les variations de longueur d’une moiti´e de cavit´e sont compens´ees par les variations de l’autre moiti´e. En ajustant quelque peu la position du centre de gravit´e de la cavit´e (`a l’aide de masses inf´erieures `

a 1 g), la sensibilit´e verticale aux vibrations mesur´ee est d’environ 3, 5 × 10−11(m.s−2)−1, en valeurs relatives. Ce coefficient est 20 fois plus faible que

celui d’une cavit´e de mˆeme longueur maintenue par l’une de ses extr´emit´es. L’inconv´enient d’une cavit´e d’axe vertical vient du fait que les fluctua-tions de longueur de chacune des moiti´es de cavit´e sont proportionnelles `a la longueur de la cavit´e. De plus, pour diminuer la contribution du bruit thermique, il faut augmenter la longueur de la cavit´e, rendant critique et incertaine la compensation si l’on garde le diam`etre constant. Dans ce but, T. Nazarova et al. choisissent de r´ealiser, en 2006 au Physikalisch-Technische Bundesanstalt en Allemagne, une cavit´e dont l’axe optique est horizontal et `

a faible sensibilit´e acc´el´erom´etrique [72]. Pour la concevoir, ils utilisent des m´ethodes de calcul par ´el´ements finis, afin de d´efinir la position optimale des appuis, rendant invariante la longueur de la cavit´e (entre les miroirs). Le plan d’appuis est quasiment situ´e dans le plan horizontal de sym´etrie du corps cylindrique. Ce concept est attribu´e `a T. Rosenband du National Insti-tute of Standards and Technology [109]. Ces appuis sont rendus possibles par l’usinage de quatre trous (d’axe horizontal et orthogonaux `a l’axe de la cale) r´epartis sym´etriquement autour de la cavit´e. Ces travaux sont les premiers `a prendre en compte l’effet du d´eplacement angulaire des miroirs sur la sensi-bilit´e acc´el´erom´etrique de la cavit´e. Les coefficients mesur´es sont `a peu pr`es de 3 × 10−12 (m.s−2)−1 pour le vertical, de 3 × 10−11 (m.s−2)−1 pour l’axial et de 2, 4 × 10−11 (m.s−2)−1 pour l’horizontal transverse.

En utilisant le mˆeme concept, S. Webster et al. r´ealisent une cavit´e ho-rizontale dont les coefficients de sensibilit´e aux vibrations sont au maximum de 3 × 10−12 (m.s−2)−1, 1, 2 × 10−11 (m.s−2)−1 et 1, 6 × 10−11 (m.s−2)−1 res-pectivement pour les directions verticale, axiale et transverse (horizontale) `a la cavit´e [60, 61]. Ici, le plan d’appuis s’obtient en usinant un ´epaulement de part et d’autre du corps (cylindrique) sur toute sa longueur. Il est ainsi pos-sible d’ajuster exp´erimentalement la position longitudinale des appuis afin d’annuler la sensibilit´e verticale. Deux lasers stabilis´es ind´ependamment sur deux de ces cavit´es permettent d’atteindre une stabilit´e relative de fr´equence de l’ordre de 1 × 10−15 entre 0, 5 s et 100 s (d´erive lin´eaire retranch´ee). Ce r´esultat est limit´e par le bruit thermique des miroirs dont le substrat est fait en ULE. Le design n´ecessite l’ajustement exp´erimental de la position des appuis, qui est assez fastidieux et en est le principal inconv´enient. Ce-pendant, ce d´esagr´ement a permis de confronter les mesures de sensibilit´e acc´el´erom´etrique avec un mod`ele par ´el´ements finis pour chacune des posi-tions des appuis test´es.

L. Chen et al. ont aussi utilis´e des mod`eles par ´el´ements finis pour conce-voir une cavit´e verticale [110] ayant une faible sensibilit´e acc´el´erom´etrique. L’id´ee directrice de ce design repose sur le mˆeme concept que celui exploit´e par M. Notcutt et al. [57]. Ces cavit´es, de finesse 250000, ont ´et´e r´ealis´ees en ULE (miroirs et cale) et permettent d’atteindre une stabilit´e de ∼ 10−15 par

cavit´e, limit´ee par le bruit thermique, quasiment entre 0, 5 s et 100 s [59]. La longueur de la cavit´e (70 mm) est issue d’un compromis entre la sensibilit´e acc´el´erom´etrique (diminue quand la longueur de cavit´e diminue, voir plus haut) et la r´eduction de la contribution du bruit thermique (diminue quand la longueur de cavit´e augmente). Les coefficients acc´el´erom´etriques mesur´es sont de 7 × 10−11 (m.s−2)−1 pour l’axe vertical et de 4, 6 × 10−11 (m.s−2)−1 pour les axes horizontaux.

La seule tentative d’utilisation de substrat de miroirs en silice fondue, sur une cale en ULE, a ´et´e faite par N. Poli et al. [15, 111]. Ces travaux n’ont pas permis de tirer parti de la r´eduction du bruit thermique que la silice fondue procure (stabilit´e relative de fr´equence de 2 × 10−15 pour τ = 10 s), principalement `a cause de l’accroissement cons´equent de la sensibilit´e thermique de la cavit´e.

Les designs des cavit´es `a faible sensibilit´e acc´el´erom´etrique, pr´esent´es dans les articles ´evoqu´es plus haut, ont pris en compte l’axe vertical, quelque soit l’orientation de l’axe de la cavit´e, mais n’ont jamais pleinement in-clus les axes horizontaux. Il reste donc possible de diminuer les sensibilit´es acc´el´erom´etriques horizontales en consid´erant cela au moment de la concep-tion de la cavit´e.

On remarque que la finesse des cavit´es a augment´e au cours du temps, ce qui r´eduit l’influence des effets parasites. Par effets parasites on d´esigne les effets qui introduisent des d´eplacements de fr´equence fictifs de la cavit´e comme notamment le bruit de photons, les bruits ´electroniques et modula-tions r´esiduelles du faisceau (voir le paragraphe 2.1.1).

Enfin, un r´esultat r´ecent, obtenu `a l’I´ENM-CNRC (Institut des ´Etalons Nationaux de Mesure du Conseil National de Recherche, Canada) par P. Dub´e et al. [26], montre que la stabilit´e de fr´equence d’un laser stabilis´e sur cavit´e peut ˆetre exceptionnelle pour des temps d’int´egration de plusieurs milliers de secondes. La comparaison avec une horloge `a ion pi´eg´e atteint 5 × 10−16 en valeur relative pour des temps d’int´egration de 3000 s. Les miroirs ´etant en ULE, cette valeur est possible grˆace au fait que la longueur de la cavit´e est de ∼ 250 mm (bruit thermique de la cavit´e ∼ 3 × 10−16) et que la temp´erature de la cavit´e est extrˆemement bien contrˆol´ee autour du point d’inversion de son coefficient de dilatation thermique