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Gérer les déterminants de la santé dans leur interaction

Dans le document Santé 2020 : cadre politique et stratégie (Page 77-80)

Santé 2020, dans sa globalité, expose clairement les défis sanitaires très réels auxquels les pays de toute la Région sont confrontés. Quoiqu’il puisse y avoir des variations dans les conditions propres à chaque pays, il est de plus en plus vrai que les problématiques clés les concernent tous. Cependant, Santé 2020 ne se contente pas de décrire ces problématiques ; ce cadre politique met l’accent sur des solutions potentielles et sur les domaines où les données disponibles indiquent qu’une intervention positive peut avoir des effets importants. Ce faisant, Santé 2020 fournit un canevas fondé sur l’importance de l’adoption de démarches stratégiques dans le cadre desquelles les difficultés sont évaluées à partir d’une perspective qui envisage tout le système.

Santé 2020 le fait en reconnaissant que les divers déterminants de la santé ont des interactions entre eux, et que les facteurs biophysiques, psychologiques, sociaux et environnementaux sont tous importants. Cela accroît l’importance de développer des stratégies multiformes évitant une démarche ponctuelle ou axée sur une campagne isolée, et cherchant plutôt à mobiliser des interventions dans toute une série de domaines afin d’obtenir un effet synergique combiné sur les difficultés que l’on tente de résoudre.

Le schéma classique et bien connu montré ci-dessous (fig. 1) aide à illustrer les interrelations entre les différents déterminants de la santé, en reconnaissant qu’il est important d’envisager à la fois les facteurs qui influencent directement le comportement de l’individu et de la communauté, et les importants déterminants sociaux au sens plus large. Il est particulièrement important de gérer les déterminants sociaux, non seulement parce qu’ils peuvent directement influencer la santé (comme les effets de mauvaises conditions de logement ou d’assainissement), mais aussi – et c’est important – parce qu’ils influencent les options et les choix réellement offerts aux gens, leurs chances dans la vie, leur contexte de vie, ce qui affecte leurs décisions, les choix pour lesquels ils optent et leur mode de vie.

adapté de Dahlgren & Whitehead (40).

Figure 1. Les déterminants de la santé dans leur interaction

toutes leurs politiques de réglementation et de leurs politiques sociales et économiques (41).

La santé et le bien-être peuvent connaître une nette amélioration lorsque des pays, des régions et des villes fixent des objectifs communs et procèdent à des investissements conjoints du secteur de la santé et d’autres secteurs. Parmi les domaines prioritaires, il convient de signaler les suivants : la performance scolaire, les conditions d’emploi et de travail, la protection sociale et la réduction de la pauvreté. Parmi les approches, il convient de mentionner les suivantes  : prendre en compte la résilience communautaire ainsi que l’inclusion et la cohésion sociales ; et promouvoir les atouts existant en faveur du bien-être, c’est-à-dire les capacités des individus et des communautés qui permettent de protéger et de promouvoir la santé (par exemple, les compétences personnelles et le sentiment d’appartenance). La définition d’objectifs annuels ou la réduction des inégalités de santé peut aider à motiver la prise de mesures, et constitue l’un des principaux moyens d’évaluer le développement de la santé à tous les niveaux. Les interventions doivent être systématiques et s’inscrire dans la durée.

La lutte contre les inégalités sociales contribue de manière significative à la santé et au bien-être. Pour réduire les gradients de la santé, il faut que les politiques menées aient un but global consistant à donner à tous les groupes socioéconomiques des chances égales, notamment en remédiant aux situations défavorisées en matière de santé et en réduisant les disparités sanitaires. Les mesures visant à diminuer ce manque d’équité toucheront toutes les personnes concernées si elles sont appliquées à l’ensemble de la

société. La protection sociale universelle permettra de réduire la pauvreté et aura une incidence plus importante sur les personnes dans le besoin que les programmes étroitement ciblés. Toutefois, on ne luttera de manière rentable contre le manque d’équité que si l’intensité des interventions mises en œuvre est proportionnelle aux besoins de chaque individu ou groupe de la société. Dans ce contexte, le terme « besoins » désigne les problèmes sanitaires et sociaux qui se prêtent à des mesures raisonnables dont on sait qu’elles sont efficaces. Dans le cadre de cette démarche, les interventions les plus déterminées viseront à répondre aux besoins des personnes les plus défavorisées et les plus vulnérables, mais les mesures ne porteront pas exclusivement sur ces personnes.

agir sur les déterminants sociaux et environnementaux de la santé peut efficacement aplanir des inégalités de toutes sortes en matière de santé. Il n’est pas possible de lutter contre le manque d’équité en matière de santé sans agir contre le manque d’équité face aux causes de la mauvaise santé – les conditions de la vie quotidienne et la répartition du pouvoir, de l’argent et des ressources. Celles-ci se reflètent, par exemple, dans le manque d’équité entre les sexes et d’autres inéquités sociales, une exposition différente aux risques, et différents niveaux de résilience et d’injustice dans les circonstances immédiates et visibles de la vie des personnes – leur accès aux soins de santé, aux écoles et à l’enseignement, leurs conditions de travail et de loisirs, leur foyer, leur environnement social, leur ville  –  et leurs chances de vivre une vie épanouie et saine (8,27,42,43). Pour lutter contre ce manque d’équité, il faudrait que chacun jouisse d’un niveau de vie minimum, sain, basé sur les conditions matérielles qui assurent une vie décente et un bon départ dans la vie (accès universel à un bon développement dans le premier âge, ainsi qu’à une éducation et à un emploi de haute qualité)  ; et soit investi de certains pouvoirs – c’est-à-dire qu’il ait la maîtrise de sa propre vie, une voix dans le domaine politique et la possibilité de participer aux processus décisionnels.

Il est essentiel, pour améliorer la situation sanitaire et réduire le manque d’équité, de concrétiser pleinement ces droits humains, et les États membres ont l’obligation de les respecter et de les protéger (27,44,45).

Les interventions doivent être menées sur une base universelle mais, étant donné le gradient social en matière de santé, elles doivent l’être avec une intensité en rapport avec les besoins sociaux et sanitaires  –  l’universalisme proportionné (46). Pour réduire le gradient socioéconomique et la fracture sanitaire générale au sein d’une population donnée, il faut que la santé dans les groupes socioéconomiques les plus défavorisés s’améliore plus rapidement que dans les groupes les plus favorisés. Par conséquent, la réduction de ce gradient social exige des efforts qui ne ciblent pas uniquement les populations les plus vulnérables. La démarche fondée sur le gradient implique une combinaison de mesures universelles globales, avec des stratégies ciblant les groupes à haut risque. une démarche visant uniquement les groupes défavorisés ne modifierait pas la répartition des déterminants de la santé sur l’ensemble du spectre socioéconomique.

Les interventions nécessaires sur le plan mondial ont été résumées dans une déclaration contenue dans la résolution WHa62.14 de l’assemblée mondiale de la santé (2009) sur la réduction des inégalités en matière de santé par une action sur les déterminants sociaux de la santé (47). une autre déclaration de ce type a été adoptée lors de la récente Conférence mondiale sur les déterminants sociaux de la santé, qui s’est tenue à Rio  de  Janeiro (Brésil) (8). Toutefois, pour un changement réel, il faudra plus que des déclarations, même si elles s’appuient sur des bases factuelles solides et une évidente bonne volonté. Pour donner suite à la résolution de l’assemblée mondiale

de la santé et à la Conférence, une stratégie/plan d’action mondial sur les déterminants sociaux de la santé (2012-2017) est en cours d’élaboration par l’OMS. S’attaquer aux inéquités d’origine sociale dans le domaine de la santé nécessite une forte volonté politique, des interventions coordonnées, une approche résolument systémique, l’existence de systèmes efficaces et très performants et l’orientation cohérente de toute une gamme de politiques gouvernementales, en particulier  –  mais pas exclusivement  –  celles de la santé (48,49).

On oppose souvent l’adoption d’une démarche basée sur les déterminants sociaux de la santé et l’adoption d’une démarche fondée sur les opportunités, le libre arbitre et la responsabilité personnelle en matière de santé, par exemple le comportement qui détermine la santé. Dans la pratique, cependant, comme l’analyse des taux de mortalité élevée (résultats) montre que ceux-ci sont dus aux conditions dans lesquelles les gens naissent, grandissent, vivent, travaillent et vieillissent, les individus auront visiblement de la difficulté à prendre sur eux la responsabilité de leur santé tant qu’une action sociale n’aura pas créé les conditions dans lesquelles les gens peuvent avoir la maîtrise de leur propre existence. En fait, il ne s’agit pas de savoir s’il est souhaitable de réduire le manque d’équité en matière de résultats sanitaires, mais de se demander ce qui peut être évité grâce au recours à des moyens raisonnables (50). Pour être efficaces, les mesures adoptées doivent mériter un soutien public et politique.

Il est recommandé que les 53 pays de la Région européenne établissent tous des stratégies claires pour corriger les mécanismes et la magnitude actuels du manque d’équité en matière de santé, et ce en intervenant résolument sur les déterminants sociaux de la santé (encadré n° 6) dans le cadre d’une démarche stratégique pansystémique qui trouve un équilibre entre les mesures axées sur les facteurs comportementaux individuels et sur ceux de l’environnement social. On sait que les pays sont, au départ, à des stades très différents en matière de santé, d’équité en santé, et de développement social et économique. Même si cela peut limiter ce qui est faisable à court terme et les délais pouvant être impartis pour gérer certaines problématiques, cela ne devrait pas affecter les aspirations à long terme de la stratégie.

Dans le document Santé 2020 : cadre politique et stratégie (Page 77-80)